Rapport officiel
de la Commission d’Enquête
indépendante
sur l’accident nucléaire
de
FUKUSHIMA
Rapport officiel de:
LA COMMİSSİON D’ENQUÊTE İNDÉPENDANTE SUR L’ACCİDENT NUCLÉAİRE DE FUKUSHİMA
Résumé:
Les Editions de Fukushima
Diète Nationale du Japon
I. INTRODUCTION
On peut le télécharger à cette adresse :
http://naiic.go.jp/wp-content/uploads/2012/09/NAIIC_report_lo_res10.pdf
Le résumé du Rapport Officiel de la Commission Indépendante sur l’Accident Nucléaire de Fukushima a été publié en anglais par la Diète Nationale du Japon le 5 juillet 2012.
C’est ce texte qui a été traduit en français dans les pages qui suivent.
Résumant tous les rapports de la Commission, y compris le rapport principal, ce résumé est destiné uniquement à permettre au public non japonais d’en prendre connaissance.
Depuis le 16 octobre 2012, la Diète a mis également en ligne la traduction anglaise de la totalité du rapport que l’on peut télécharger partie par partie à cette adresse : http://naiic.go.jp/en/report/
Objectifs de la Commission d’Enquête
La Commission, la première en son genre dans l’histoire du gouvernement constitutionnel du Japon, a reçu son mandat de la Diète Nationale pour enquêter sur les causes de la catastrophe nucléaire de Fukushima, sur les dommages qui en découlent et sur l’efficacité de l’intervention d’urgence.
Elle a également été chargée d’enquêter sur la politique nucléaire du Japon et de proposer des recommandations pour éviter qu’une situation semblable ne se reproduise. Elle a tenu plus de 900 heures d’auditions et d’entretiens avec plus de 1100 personnes. Elle a été en mesure d’utiliser les pouvoirs du corps législatif pour obtenir les documents et les preuves nécessaires. La Commission a agi au nom du peuple japonais, indépendante de tout membre élu de l’une des chambres de la Diète, des restrictions de la bureaucratie gouvernementale, et de l’influence du lobby financier nucléaire.
Avertissement
Seul le rapport original en japonais a valeur de rapport officiel. La version française a été réalisée pour aider le public francophone à prendre connaissance de ce qui est arrivé au Japon. Les versions anglaises et françaises ne sont pas des documents officiels. Seule la version japonaise du rapport intégral est officielle. Si des questions se posent quant à l’exactitude des informations contenues dans la traduction, il faut avant tout se référer à la version japonaise du rapport de la Commission. S’il y a des divergences ou des différences entre la version japonaise et les traductions anglaises ou françaises, la version en langue japonaise prévaut. Le texte original en japonais est disponible à cette adresse : http://naiic.go.jp/report/
II. TRADUCTION
« Nous avons entrepris de produire un rapport qui satisfasse aux plus hautes exigences de la transparence. Les habitants de Fukushima, la population du Japon et la communauté internationale ne peuvent se contenter de moins. »
Kiyoshi Kurokawa, président de la Commission.
Traduction française
La traduction française du résumé du rapport officiel de la commission indépendante sur l’accident nucléaire de Fukushima a été initiée par le blog de Fukushima.
Suite à l’appel lancé aux lecteurs en juillet 2012, un groupe de 8 personnes s’est constitué afin de traduire en français l’intégralité du résumé disponible en langue anglaise.
Les traducteurs se sont partagé le travail, et chacune des parties traduites a fait l’objet de plusieurs relectures contradictoires. Cette traduction coopérative, réalisée de manière totalement bénévole, est libre de droit.
Elle peut donc être diffusée en tout ou partie, à partir du moment où le texte original n’est pas transformé, où la source est mentionnée et où il n’en est pas fait commerce.
Cette édition française se place dans l’esprit qui a prévalu à la rédaction du rapport original, à savoir la diffusion des résultats d’une enquête indépendante des lobbys industriels ou des pressions politiques, avec une grande exigence de transparence et une volonté de diffusion internationale.
Traducteurs
Robert Ash, Gilles D., Guy Fargette, Pierre Fetet, Odile Girard, Marie-France Payrault- Gaber, Jean-Marc Royer, Catherine Thirion.
Sigles
L’industrie nucléaire emploie de nombreux sigles. Ils sont souvent développés dans le texte. Quand ce n’est pas le cas, se reporter au glossaire à la fin de l’ouvrage p. 101 à 104.
Résumé
Président
Kiyoshi Kurokawa, médecin, chercheur à l’Institut National des Hautes Etudes en Sciences Politiques (GRIPS), ancien président du Conseil Scientifique du Japon
Membres
Katsuhiko Ishibashi, sismologue, professeur émérite de l’Université de Kobe
Kenzo Oshima, conseiller auprès du président de l’Agence de Coopération Internationale du Japon, ancien ambassadeur du Japon aux Nations Unies
Hisako Sakiyama, médecin, ancien directeur de l’Institut National des Sciences
Masafumi Sakurai, avocat, ancien procureur-général du Bureau Suprême des Procureurs Publics, ancien inspecteur-général chargé de la Conformité Juridique, Inspection Générale du Ministère de la Défense
Koichi Tanaka, ingénieur chimiste, chercheur à la Shimadzu Corporation
Mitsuhiko Tanaka, journaliste scientifique
Shuya Nomura, Professeur à la faculté de Droit de Chuo à l’Université de Chuo, avocat
Reiko Hachisuka, président de la Société du Commerce et de l’Industrie, ville d’Okuma, préfecture de, Fukushima
Yoshinori Yokoyama, concepteur de systèmes sociaux, directeur du Programme de Gestion de l’Université de Tokyo (Todai EMP)
Conseillers de la Commission
Itsuro Kimura, Tatsuhiko Kodama Tatsuo Hatta
Examinateurs
Takao Iida Makoto Saito Jun Sugimoto Isao Nakajima Takeshi Matsuoka Administration
Toru Anjo, Directeur Général
Sakon Uda, Directeur de l’Enquête
LA DIÈTE NATIONALE DU JAPON
L‘ACCIDENT NUCLÉAIRE SANS PRÉCÉDENT qui a débuté le 11 mars 2011 est le sujet du présent rapport, que nous présentons ici aux membres de la Diète Nationale du Japon pour avis.
Cette démarche est conforme à la Loi sur la Commission d‘Enquête Indépendante sur l‘Accident Nucléaire de Fukushima. Environ six mois après la nomination de notre président et de ses membres en décembre 2011, notre tâche d’investigation est aujourd’hui terminée.
Ce rapport est censé renforcer l‘autorité administrative du corps législatif et améliorer la supervision dans le domaine de l‘énergie nucléaire.
En tant que première commission indépendante nommée par la Diète dans l’histoire du gouvernement constitutionnel du Japon, nous aimerions souligner à quel point il est important que ce rapport soit utilisé, dans l‘intérêt du peuple japonais et des peuples du monde.
Message du président
Comment un tel accident a-t-il pu se produire au Japon, une nation qui a une telle préoccupation de sa réputation d’excellence en ingénierie et en technologie? Cette Commission est d’avis que le peuple japonais ‒ et la communauté mondiale ‒ méritent une réponse complète, honnête et transparente à cette question.
LE SÉISME ET LE TSUNAMI
du 11 mars 2011 sont des catastrophes naturelles dont l‘ampleur a choqué le monde entier. Quoiqu‘il ait été déclenché par ces cataclysmes, l‘accident de Fukushima Daiichi qui s‘en est suivi ne peut pas être considéré comme une catastrophe naturelle.
Ce fut un désastre d’origine spécifiquement humaine ‒ qui aurait pu et aurait dû être prévu et empêché. De plus, ses effets auraient pu être atténués par une réponse plus efficace. Nos rapports listent une multitude d’erreurs et de négligences délibérées qui ont laissé la centrale de Fukushima démunie devant les événements du 11 mars. Ils examinent également de graves lacunes dans la gestion de l’accident par TEPCO, les régulateurs et le gouvernement.
Malgré tous les détails qu‘il fournit, ce rapport ne peut pas réellement faire comprendre, surtout à une audience internationale, l‘état d‘esprit qui a nourri la négligence à la source de cette catastrophe. Ce qu‘il faut admettre, aussi douloureux soit-il, c‘est que nous avons à faire à un désastre « made in Japan ».
Les raisons fondamentales sont à chercher dans le souci des convenances qui fait partie intégrante de la culture japonaise : notre obéissance automatique, notre réticence à remettre en cause l‘autorité, notre attachement au « respect du programme », notre dépendance au groupe et notre insularité. Si d‘autres Japonais s‘étaient trouvés à la place de ceux qui sont responsables de l‘accident, le résultat aurait fort bien pu être le même.
Après les « chocs pétroliers » des années 1970, le Japon a accéléré le développement de l‘énergie nucléaire pour s‘efforcer d‘assurer la sécurité énergétique nationale.
C‘est ainsi que ce développement est devenu un objectif politique pour le gouvernement comme pour l‘industrie et qu‘il a été poursuivi avec cette détermination farouche qui a permis le miracle économique d‘après guerre au Japon. Forte d‘un tel mandat, l‘énergie nucléaire est devenue une force échappant au contrôle de la société civile. Sa régulation a été confiée à une bureaucratie gouvernementale engagée dans sa promotion. À une époque où le Japon avait une grande confiance en soi, une petite élite soudée bénéficiant d’énormes ressources financières avait peu d‘égards pour ce qui n‘était « pas inventé ici ».
Cette arrogance a été renforcée par la mentalité collective de la bureaucratie japonaise, pour laquelle le premier devoir de tout bureaucrate est de défendre les intérêts de son organisation. Poussée à l’extrême, cette mentalité a conduit les bureaucrates à placer les intérêts de l’organisation avant leur devoir primordial, qui est de protéger la population. C‘est seulement en l‘abordant ainsi que l‘on peut comprendre comment l’industrie nucléaire japonaise est passée à côté des leçons de Three Mile Island et de Tchernobyl, et comment il est devenu habituel de résister à la pression réglementaire et de dissimuler les petits accidents. C’est cette mentalité qui a conduit à la catastrophe de Fukushima Daiichi.
Ce rapport critique sévèrement de nombreux individus et organisations, mais l’objectif n’est pas ‒ et ne devrait pas être ‒ la réprobation. L’objectif doit être de tirer les leçons de cette catastrophe, et de réfléchir profondément sur ses causes fondamentales, afin de s’assurer qu’elle ne se répète jamais. Parmi les leçons à tirer, beaucoup ont trait aux politiques et aux procédures, mais la leçon principale devrait inciter chaque citoyen japonais à se livrer à une profonde réflexion.
Les conséquences de la négligence de Fukushima se sont révélées catastrophiques mais la mentalité sous- jacente se retrouve d‘un bout à l‘autre du Japon.
En admettant ce fait, chacun d‘entre nous se doit de s‘interroger sur notre responsabilité en tant qu‘individus dans une société démocratique. Parce que nous sommes la première commission d‘enquête indépendante de la bureaucratie et disposant de l‘aval de la législature, nous espérons que cette initiative pourra contribuer au développement de la société civile japonaise. Et surtout, nous avons entrepris de produire un rapport qui satisfasse aux plus hautes exigences de la transparence.
Les habitants de Fukushima, la population du Japon et la communauté internationale ne peuvent se contenter de moins.
Présentation
Le mandat de la Commission
Le 30 octobre 2011, la Loi NAIIC (officiellement « Loi sur la Commission d‘Enquête Indépendante sur l‘Accident Nucléaire de la Centrale de Fukushima ») a été promulguée, créant de ce fait une commission indépendante qui devait enquêter sur l‘accident de Fukushima ; celle-ci avait toute autorité pour réclamer des documents et exiger de la branche législative d‘utiliser ses pouvoirs d‘investigation afin d‘obtenir tout document ou preuve nécessaires.
Ce fut la première commission indépendante créée dans l’histoire du gouvernement constitutionnel du Japon.
Le 8 Décembre 2011, notre président et neuf autres membres ont été nommés, et chargés par le porte- parole et le Président de la Diète Nationale du mandat suivant, conformément à l’article 10 de la Loi NAIIC :
1. Enquêter sur les causes directes et indirectes de l‘accident qui a frappé la centrale nucléaire de Fukushima, centrale appartenant à la compagnie d‘électricité de Tokyo le 11 mars 2011, suite au grand séisme du Japon de l‘Est.
2. Enquêter sur les causes directes et indirectes des dommages provoqués par l‘accident en question.
3. Enquêter et vérifier la réponse d‘urgence à l‘accident ainsi qu‘aux dommages consécutifs, vérifier la séquence des événements et des actions menées, évaluer l‘efficacité de la réponse d‘urgence.
4. Enquêter sur l’histoire des décisions et des processus d’approbation concernant les politiques nucléaires et d’autres questions connexes.
5. Recommander des mesures pour prévenir les accidents nucléaires et tout dommage en résultant, sur la base des conclusions des enquêtes ci-dessus.
Les recommandations incluront l‘évaluation des principales mesures de la politique nucléaire et la structure des instances administratives associées.
6. Assurer les fonctions administratives nécessaires pour mener à bien les activités mentionnées ci-dessus.
Les attentes de la Commission
Avant que la Commission ne commence son enquête, nous avons également reçu les directives suivantes du Conseil de la Commission Mixte sur les Règles et l’Administration des deux Chambres sur l‘accident de la centrale nucléaire de Fukushima de la Compagnie d‘électricité de Tokyo :
- L‘enquête doit être menée avec diligence par les experts en se plaçant d‘un point de vue logique, objectif et scientifique, sans pencher pour ou contre l‘énergie nucléaire.
- Le principe est de mener une enquête ouverte et approfondie, mais certaines informations et parties de l’enquête peuvent être réservées pour protéger le processus d’enquête de toute influence extérieure.
- Il faut envisager une perspective globale de façon à ce que les résultats et les conclusions puissent aider à prévenir des accidents nucléaires autre part dans le monde.
– L’enquête doit se concentrer sur la sécurité publique plutôt que sur le fonctionnement des réacteurs nucléaires.
- L’enquête doit tenir compte du fait que les séismes et les tsunamis sont toujours des événements imprévisibles, mais inévitables au Japon.
– L‘enquête doit permettre d‘aboutir à des recommandations utiles pour l‘avenir de la nation et fournir une opportunité de renforcer les instances législatives du pays.
Ce que nous avons fait
Notre enquête a impliqué plus de 900 heures de consultations et d‘entretiens avec 1 167 personnes. Nous avons fait neuf visites dans des centrales nucléaires, Fukushima Daiichi, Fukushima Daini, la centrale d‘Onawaga de la compagnie d‘électricité Tohoku et la centrale de Tokai de la Compagnie d‘Energie Nucléaire du Japon, afin de mener une enquête très approfondie. Pour assurer un degré maximum de divulgation de l’information, les 19 réunions de la Commission (sauf la première) ont été ouvertes au public et diffusées sur Internet en japonais, en anglais et à plus de 800 000 internautes. Nous avons également utilisé les médias sociaux, Facebook et Twitter, pour communiquer avec le public et ainsi recevoir plus de 170 000 commentaires. Pour avoir une perspective globale, nous avons envoyé trois équipes à l‘étranger et nous avons eu des entrevues avec des experts des États-Unis, de France, de Russie, d’Ukraine et de Biélorussie. En plus de cette version anglaise du résumé, l’intégralité du rapport sera bientôt publiée en anglais. Nous nous sommes efforcés de choisir des témoins qui avaient des postes importants au gouvernement, chez TEPCO et dans les instances de régulation, au moment de l‘accident. Afin de mieux comprendre les points de vue des personnes évacuées, nous avons tenu trois assemblées publiques au cours desquelles nous avons pu entendre de vive voix les opinions de plus de 400 participants. Nous avons également visité douze municipalités dans la zone d’évacuation – Futaba, Okuma, Tomioka, Namie, Naraha, Kawauchi, Hirono, Katsurao, Minamisoma, Tamura, Iitate, Kawamata – pour mener des entretiens et des enquêtes concernant les résidents et aussi les travailleurs de la centrale nucléaire. Nous avons reçu 10 633 réponses à un sondage auprès des résidents, et de nombreuses réponses des travailleurs de la centrale provenant d’environ 500 entreprises sous- traitantes.
Ce que nous n’avons pas fait
Il y a un certain nombre de choses que nous n‘avons pas faites, par manque de temps ou parce qu‘elles ne relevaient pas de nos priorités ou de notre mandat.
Nous n‘avons pas étudié les questions concernant la politique future de l‘énergie du Japon, par exemple la promotion ou l‘abolition de l‘énergie nucléaire.
Nous n’avons pas enquêté sur le traitement et la gestion des barres de combustible nucléaire usé. Nous n’avons pas procédé à des investigations qui nécessiteraient des visites dangereuses du point de vue de la radioactivité.
Nous avons étudié la compensation des dommages et les problèmes de décontamination d’un point de vue systématique, mais nous n’avons pas examiné les processus spécifiques.
Nous n’avons pas abordé les questions liées à la responsabilité de TEPCO dans le cas où celui-ci serait dans l‘incapacité de payer les coûts liés à l‘accident.
Nous n’avons pas abordé toutes les conséquences financières liées à l’accident.
Nous n’avons pas abordé la remise en service des réacteurs nucléaires à l‘arrêt pour des raisons diverses.
Nous n‘avons pas non plus étudié les politiques gouvernementales et les règlements administratifs qui ne sont pas relatifs à des questions de sûreté nucléaire.
Nous n’avons pas enquêté directement sur l’état des réacteurs de Fukushima impliqués dans l’accident, mais nous avons pris conscience de leur état au cours de notre enquête en nous fondant sur d‘autres sources.
Nous n‘avons pas non plus tenté d‘évaluer les méthodes de démantèlement des réacteurs de Fukushima. Et finalement, nous n‘avons pas étudié les questions concernant la réhabilitation de l‘environnement entourant la centrale.
Adaptation du Rapport spécial sur l’accident nucléaire de Fukushima Daiichi de l’INPO [Institute of Nuclear Power Questions]
L’accident
Le 11 mars 2011, le grand séisme du Japon de l‘Est a déclenché un accident extrêmement grave à la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi dont la Compagnie d‘Electricité de Tokyo (TEPCO) est le propriétaire et l‘opérateur. Cet accident catastrophique a finalement été qualifié d‘accident de niveau 7 (« accident grave » ) selon l‘Echelle Internationale des Evénements Nucléaires (INES). Quand le séisme a eu lieu, le réacteur 1 de la centrale de Fukushima Daiichi était en fonctionnement normal et produisait la quantité d‘électricité conforme à ses spécifications ; les réacteurs 2 et 3 étaient en fonctionnement et les paramètres de chaleur étaient conformes aux spécifications ; les réacteurs 4, 5 et 6 faisaient l‘objet d‘une inspection périodique. La fonction d‘arrêt d‘urgence, ou SCRAM, a été activée dans les réacteurs 1, 2 et 3, immédiatement après le début de l’activité sismique.
Les secousses sismiques ont endommagé les équipements de distribution électrique entre les sous- stations du transformateur Shinfukushima de TEPCO et la centrale de Fukushima Daiichi. Il existait une ligne de secours de 66 kV qui faisait partie du réseau de la Compagnie d‘Electricité Tohoku, mais cette ligne de secours n‘a pas pu alimenter le réacteur 1 en raison de connexions blindées de modèles incompatibles.
Le tsunami causé par le séisme a inondé et totalement détruit les générateurs diesel de secours, les pompes de refroidissement à l‘eau de mer, le système de câblage électrique et l’alimentation en courant continu pour les réacteurs 1, 2 et 4, ce qui a entraîné la perte complète de courant, sauf au réacteur 6, alimenté par un générateur diesel de secours initialement dédié à la climatisation. En résumé, les réacteurs 1, 2 et 4 n‘avaient plus aucune électricité ; le réacteur 3 avait perdu son alimentation en courant alternatif, puis en courant continu avant l’aube du 13 mars 2012 [note du traducteur : erreur de date dans la traduction anglaise du rapport] et le réacteur 5 avait perdu toute son alimentation électrique en courant alternatif.
Le tsunami n’a pas uniquement endommagé les alimentations électriques. Le tsunami a aussi détruit ou emporté des véhicules, des équipements lourds, les réservoirs de fuel et de gravier. Il a détruit des bâtiments, des installations et d’autres machines. L’eau de mer du tsunami a inondé toute la zone des bâtiments et a même atteint les équipements de haute pression des réacteurs 3 et 4 ainsi que la piscine commune de refroidissement [des assemblages usés]. Une fois l‘eau retirée, les décombres résultant de l’inondation ont été éparpillés sur tout le site de la centrale, ce qui a entravé tout déplacement. Les plaques d’égout et de caniveaux avaient disparu, laissant des trous béants dans le sol. En outre, le séisme a soulevé, enfoncé ou fait s‘écrouler l’intérieur des bâtiments et les voies de passage, ce qui a rendu l’accès ou la circulation dans la centrale extrêmement difficiles. Les réparations ont également été interrompues tandis que les ouvriers s‘occupaient de réagir aux répliques sismiques intermittentes mais importantes et au tsunami. La perte de l’électricité a entraîné la perte soudaine des équipements de surveillance tels que les jauges, les compteurs, et les fonctionnalités de contrôle-commande dans la salle centrale.
Les éclairages et les communications ont également été touchés. Les décisions et les réponses à l’accident ont dû être improvisées sur place par le personnel opérationnel, en l’absence d‘outils et de manuels valides. Le manque d‘électricité explique qu‘il ait été si difficile de refroidir efficacement les réacteurs sans perdre de temps. Refroidir les réacteurs et en observer les effets dépendait largement de l‘électricité pour pouvoir injecter l‘eau sous haute pression, faire baisser la pression dans les réacteurs, injecter de l‘eau à basse pression, refroidir les enceintes de confinement des réacteurs et y faire baisser la pression, et se débarrasser de la chaleur résiduelle dans le dernier échangeur de chaleur. La perte d‘accès mentionnée plus haut a empêché la mise en œuvre de mesures de première nécessité : un système d‘injection d‘eau alternatif avec des camions-citernes, la remise en état de l‘alimentation électrique, le contrôle de la configuration de l‘évent et la possibilité de sa commande.
La série d’événements résumés ci-dessus donne un aperçu de la gravité de l’accident qui a finalement rejeté une énorme quantité de matières radioactives dans l’environnement. Ces événements sont décrits en détail dans le rapport complet.
Chronologie des événements qui ont suivi le séisme et le tsunami
Réacteur 1 Réacteur 2 Réacteur 3 Réacteur 4 En fonctionnement normal
14h46 : séisme SCRAM (arrêt d’urgence des réacteurs) Perte d’alimentation électrique extérieure en courant alternatif Mise en route automatique des groupes électrogènes de secours révision périodique Démarrage du refroidissement du cœur par le condenseur d’isolement (IC)
Ouvertures et fermetures répétées des vannes du système IC Démarrage du système de refroidissement du cœur du réacteur en situation d’isolation (RCIC) Démarrage du système de refroidissement du cœur du réacteur en situation d’isolation (RCIC) 15h37 : tsunami (à son apogée)
Perte totale d’électricité Perte totale des alimentations électriques (SBO) Perte totale d’électricité Vers 18h10 : début de l’exposition du cœur (analyse)
Vers 18h50 : début de l’endommagement du cœur 12.3 5h46 : début de l’injection d’eau douce
vers 14h30 : éventage 15h36 : explosion d’hydrogène dans le bâtiment du réacteur 19h04 : début de l’injection d’eau de mer Interférence avec les opérations de secours 13.3 11h36 : arrêt du système RCIC 12h35 : Début de l’injection de sécurité à haute pression (HPCI)
2h42 : arrêt du HPCI 14.3 vers 9h10 : début de l’exposition du cœur du réacteur
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vers 9h20 : éventage 9h25 : début de l’injection d’eau douce |
Retour d’hydrogène en provenance du réacteur 3 par un tuyau du système des gaz en attente (SGTS) |
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vers 10h40 : début del’endommagement du cœur |
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13h12 : début de l’injection d’eau de mer |
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14.3 |
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Interférence avec les opérations de secours 13h25 : diagnostic d’arrêt du système RCIC |
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11h01 : explosion d’hydrogène dans le bâtiment du réacteur |
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vers 17h00 : débutde l’exposition du cœur du réacteur |
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vers 19h20 : début del’endommagement du cœur |
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19h54 : début de l’injection d’eau de mer |
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15.3 |
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Vers 6h00 :endommagement de la chambre de suppression Rejet massif de matériaux radioactifs |
Vers 6h00 :explosion d’hydrogène dans le bâtiment du réacteur |
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Version française du résumé du rapport de la NAIIC – Editions de Fukushima – Novembre 2012
Conclusions et recommandations
Conclusions
Après une enquête de six mois, la Commission a pu tirer les conclusions suivantes : Afin de prévenir de futurs sinistres, des réformes fondamentales doivent être faites. Ces réformes doivent couvrir à la fois la structure de l’industrie électrique, du gouvernement et des organismes de réglementation, ainsi que les processus de fonctionnement. Elles doivent couvrir les situations normales et les situations d’urgence.
Une catastrophe d’origine humaine
L’accident nucléaire de Fukushima a été le résultat d‘une collusion entre le gouvernement, les organismes de réglementation et TEPCO, et de la gestion défectueuse des dites parties. Celles-ci ont effectivement trahi le droit de la nation à vivre à l’abri d’accidents nucléaires. Par conséquent, nous concluons que l’accident était clairement d’origine humaine. Nous croyons que les causes profondes étaient les systèmes organisationnels et réglementaires qui ont couvert des décisions et des actions erronées, plutôt que des questions relatives à la compétence d’un individu particulier. (cf. recommandation 1)
Les causes directes de l’accident étaient toutes prévisibles avant le 11 mars 2011.
Mais la centrale de Fukushima Daiichi fut incapable de résister au séisme et au tsunami qui a frappé ce jour-là. L’opérateur (TEPCO), les organismes de réglementation (la NISA et la NSC) et l’organisme gouvernemental de promotion de l’industrie nucléaire, le METI, ont tous échoué à correctement définir les exigences de sécurité les plus élémentaires, telles que l’évaluation de la probabilité d’un accident, la préparation à contenir les effets d‘un tel désastre, et l’élaboration de plans d’évacuation du public dans le cas d’un rejet important de radioactivité. TEPCO et l‘Agence de Sûreté Nucléaire et Industrielle (NISA) étaient conscients de la nécessité d’un renforcement structurel pour être en conformité avec les nouvelles normes, mais plutôt que d’exiger leur mise en œuvre, la NISA a déclaré que les mesures devaient être prises de manière autonome par l’opérateur. La Commission a découvert qu’aucune des protections nécessaires n‘avaient été mises en œuvre sur les réacteurs 1 à 3 au moment de l’accident. Ce fut le résultat d’un consentement tacite de la NISA à accorder des délais dans la mise en œuvre de ces mesures de protection. En outre, bien que la NISA et les opérateurs aient été conscients du risque d’endommagement du cœur par le tsunami, aucune réglementation n‘a été établie, et TEPCO n‘a pas non plus pris les mesures de protection contre un tel événement.
Depuis 2006, les régulateurs et TEPCO étaient conscients du risque de panne totale d’électricité à la centrale de Fukushima Daiichi si un tsunami devait atteindre le niveau du site. Ils étaient également conscients du risque d’endommagement du cœur du réacteur par la perte du refroidissement à l’eau de mer dans le cas d’un tsunami plus fort que celui qui avait été prévu par la Société Japonaise des Ingénieurs Civils. La NISA savait que TEPCO n’avait pas envisagé de mesures pour atténuer ou éliminer le risque, mais a omis de fournir des instructions spécifiques pour remédier à la situation. Nous avons trouvé la preuve que les organismes de réglementation demandaient ouvertement aux opérateurs quelles étaient leurs intentions à chaque fois qu’il était question de mettre en œuvre un nouveau règlement.
Par exemple, la NISA a informé les opérateurs qu’ils n’avaient pas besoin d’examiner une situation de panne totale (SBO) parce que la probabilité était faible et parce que d’autres mesures étaient en place. La NISA a ensuite demandé aux opérateurs de rédiger un rapport qui donnerait les raisons appropriées pour expliquer pourquoi cette mise en œuvre n’était pas nécessaire. Afin d’obtenir la preuve de cette collusion, la Commission a été forcée d’exercer son droit législatif pour obtenir de telles informations de la NISA ; celle-ci avait refusé de répondre à plusieurs demandes. Les régulateurs ont également eu une attitude négative face aux nouvelles avancées scientifiques et technologiques qui auraient pu venir de l‘étranger. Si la NISA avait transmis à TEPCO les mesures incluses dans le paragraphe B.5.b de la loi sécuritaire américaine déclenchée par l‘attaque terroriste du 11 septembre, et si TEPCO avait mis ces mesures en place, l‘accident aurait peut-être pu être évité.
Il y a eu de nombreuses opportunités pour prendre des mesures préventives avant le 11 mars. L’accident s’est produit parce que TEPCO n’a pas pris ces mesures et que la NISA et la commission de sûreté nucléaire (NSC) n‘ont pas réagi.
Ils ont aussi intentionnellement reporté la mise en place des mesures de sécurité, ou pris des décisions basées sur l’intérêt de leur organisation, et non pas agi dans l’intérêt de la sécurité publique. Du point de vue de TEPCO, la nouvelle réglementation aurait interféré avec l’exploitation des centrales et affaibli la position de l‘entreprise dans d’éventuelles poursuites judiciaires. Ce fut une motivation suffisante pour s’opposer énergiquement à de nouvelles règles de sécurité et négocier avec les régulateurs via la Fédération des compagnies électriques (FEPC).
Les régulateurs auraient dû prendre une position ferme pour le bien du public, mais ils ont échoué à le faire. Comme ils s‘étaient fermement convaincus eux-mêmes que les centrales nucléaires étaient sûres, ils étaient réticents à créer de nouveaux règlements. Le problème a encore été aggravé par le fait que la NISA avait été créée par le Ministère de l‘Économie, du Commerce et de l‘Industrie (METI), une institution qui s‘est toujours activement occupée de promouvoir l‘énergie nucléaire.
Les dommages du séisme
Nous concluons que TEPCO a été trop rapide à avancer le tsunami comme cause de l’accident nucléaire et à nier que le séisme ait causé des dégâts. Nous croyons que le séisme a probablement endommagé l’équipement nécessaire pour assurer la sécurité et qu’il est possible qu’il y ait eu une légère perte du liquide de refroidissement dans le réacteur 1. Nous espérons que ces points seront examinés de façon plus approfondie par une prochaine enquête. (cf. recommandation 7)
Même si les deux catastrophes naturelles – le séisme et le tsunami qui a suivi – ont été les causes directes de l‘accident, il reste plusieurs points dans le déroulement des événements qui n‘ont pas été éclaircis. La raison principale en est que presque tout l‘équipement directement lié à l‘accident se trouve à l‘intérieur de l‘enceinte des réacteurs, qui sont inaccessibles et le resteront encore de longues années.
Un examen complet et une analyse exhaustive sont donc impossibles actuellement. TEPCO n‘a cependant pas hésité à attribuer l’accident au tsunami, et à conclure que le séisme n’était pas responsable des dommages à l’équipement nécessaire à la sécurité (même s‘il a ajouté « dans la mesure où l‘information a pu être confirmée », une phrase qui apparaît dans les rapports de TEPCO au gouvernement et à l’AIEA). Cependant, sans preuve de fond, il est impossible de considérer le tsunami comme la cause directe de l‘accident. La Commission estime qu’il s’agit là d’une tentative pour éviter toute responsabilité en mettant tout sur le compte de l‘inattendu (la hauteur du tsunami), comme il est écrit dans le rapport intermédiaire, et non pas sur le séisme, plus prévisible.
Grâce à notre enquête, nous avons vérifié que les personnes impliquées étaient au courant du risque de séisme et de tsunami.
En outre, les dommages causés au réacteur 1 ont été causés non seulement par le tsunami, mais aussi par le séisme, une conclusion établie après avoir examiné les faits suivants :
1) La plus grande onde de choc du séisme a frappé après l’arrêt automatique (SCRAM) [des réacteurs].
2) La JNES a confirmé la possibilité d‘un accident localisé de perte de liquide de refroidissement.
3) Les opérateurs du réacteur 1 se sont inquiétés de la fuite de liquide de refroidissement de la soupape de sécurité.
4) La soupape de décharge ne fonctionnait pas. En outre, il y a eu deux causes à la perte d’alimentation externe, toutes deux liées au séisme: il n’y avait pas de systèmes redondants et diversifiés, ni de résilience parasismique pour les alimentations électriques externes, et par ailleurs, le poste de transformation de ShinFukushima n’était pas résistant aux séismes. (Voir la section 2 du résumé des résultats)
Évaluation des problèmes opérationnels
La Commission conclut qu’il y a eu des problèmes organisationnels au sein de TEPCO. Si le niveau des connaissances, de la formation et des inspections avait été plus exigeant, et si un guide d’instructions d’urgences spécifiques avait été donné en temps voulu aux travailleurs du site, une réponse plus efficace aurait été possible. (cf. recommandation 4)
Il y a eu beaucoup de problèmes opérationnels sur place au cours de l’accident. Les événements montrent clairement que, quand le cadre permettant de répondre à un accident grave n‘est pas en place, les mesures qui peuvent être prises sur place en cas de panne totale sont très limitées. Le travail de dépannage, comme la confirmation du fonctionnement du condenseur d‘isolation du réacteur 1, aurait dû être mené rapidement à cause de la perte de courant continu, mais ce ne fut pas le cas. TEPCO n’avait pas prévu de mesures pour le fonctionnement du condenseur et n’avait ni manuels complets, ni exercices périodiques, ce qui dénote clairement des problèmes d’organisation. En ce qui concerne la conduite de ventilation, effectuer des travaux de réparation sans électricité et en présence de niveaux de radiation croissants a dû être extrêmement difficile et chronophage.
De plus, dans le manuel d’instruction concernant les accidents graves, des sections entières du diagramme [des opérations] étaient manquantes. Non seulement les travailleurs ont eu à travailler en utilisant un manuel imparfait, mais ils ont été pressés par le temps, travaillant dans le noir avec des lampes de poche comme seule source de lumière.
La lenteur de la réponse a encore aggravé le manque de confiance du Kantei (bureau du premier ministre) dans la gestion de TEPCO, mais le travail a été accompli en réalité dans des conditions extrêmement difficiles.
De nombreuses infractions aux divers niveaux de sécurité ont été commises simultanément, tandis les quatre réacteurs perdaient en même temps leur alimentation électrique. S’il n’y avait pas eu certains événements fortuits ‒ le fait que la pompe d’alimentation en eau à haute pression destinée au refroidissement d’urgence (RCIC) du réacteur 2 ait fonctionné si longtemps, l‘éclatement de son panneau de soufflage et le relâchement de pression qui s‘en est suivi, et la rapidité avec laquelle les sous-traitants ont nettoyé les décombres ‒ les réacteurs 2 et 3 auraient été dans une situation encore plus précaire. Nous avons conclu ‒ étant donné les lacunes dans la formation et la préparation ‒ qu‘une fois que la panne totale est survenue, impliquant entre autres la perte de toute source d’alimentation électrique directe, il était impossible de changer le cours des événements.
Les problèmes dans l’intervention d’urgence
La Commission conclut que la situation a continué à se détériorer parce que le système de gestion de crise du Kantei, des régulateurs et des autres organismes responsables n’ont pas fonctionné correctement. Les limites définissant les rôles et les responsabilités des uns et des autres étaient problématiques, en raison de leurs propres ambiguïtés. (cf. recommandation 2)
Le gouvernement, les organismes de réglementation, la direction de TEPCO et le Kantei manquaient de préparation et d‘assurance pour effectuer une intervention d’urgence efficace dans un accident de cette ampleur. C‘est pourquoi aucun d‘entre eux ne fut efficace pour prévenir ou limiter les dommages. La NISA était censée jouer le rôle principal, comme il est prévu dans la Loi sur les mesures spéciales concernant la préparation aux urgences nucléaires qui a été adoptée en 1999 après un accident de criticité dans l’installation de conversion d’uranium à Tokaimura, (préfecture d’Ibaraki, société JCO).
Toutefois, la NISA n’était pas préparée à une catastrophe de cette ampleur, et a échoué dans sa fonction. Dans la période critique, juste après l’accident, le Kantei n’a pas promptement déclaré l’état d’urgence. L’équipe régionale d’intervention d’urgence nucléaire devait être le lien entre le Kantei et l’opérateur, qui aurait dû tenir le Kantei informé de la situation sur le terrain.
Au lieu de cela, le Kantei a contacté le siège de TEPCO et le site de Fukushima directement, et a perturbé la chaîne de commandement prévue. Une équipe d’intervention mixte TEPCO/Kantei a été créée au siège de TEPCO le 15 mars, mais cette entité n’avait aucune autorité légale.
Le Kantei, les régulateurs et TEPCO avaient tous compris la nécessité de ventiler le réacteur 1. TEPCO avait fait savoir à la NISA, comme le protocole le demandait, qu‘il s‘apprêtait à ventiler. Mais il n’y a pas de confirmation que la décision de ventilation ait été transmise à l‘encadrement du METI ou au Kantei.
Cette faute de la part de la NISA et la rareté des informations en provenance du siège de TEPCO ont abouti à la perte de confiance du Kantei en TEPCO.
Le Premier ministre s‘est rendu sur le site pour diriger les travailleurs qui s’occupaient du cœur endommagé. Cette intervention directe et sans précédent du Kantei a détourné l’attention et le temps du personnel opérationnel sur place et a semé le désordre dans la ligne de commande hiérarchique.
Alors que le siège de TEPCO était censé fournir un soutien à l’usine, en réalité, il s‘est subordonné au Kantei et a fini par tout simplement relayer les intentions du Kantei. Ceci fut une conséquence de l‘état d‘esprit existant chez TEPCO, à savoir une réticence à prendre des responsabilités, réticence incarnée par l’incapacité du président Shimizu à communiquer clairement ses intentions au Kantei concernant la centrale.
Dans le même temps il est difficile de conclure que c‘est le Premier ministre qui a découragé d‘adopter l‘idée d‘un retrait complet de TEPCO, comme on a pu le voir dans d‘autres rapports, pour plusieurs raisons :
1) Il n‘y a aucune preuve que la direction de TEPCO à la centrale ait même songé à un retrait complet,
2) Il n‘y a aucune trace de décision qui aurait été prise au siège de TEPCO à propos d‘un retrait complet,
3) L‘évacuation prévue avant la visite de M. Shimizu au Kantei envisageait de garder les membres de l‘équipe d‘urgence à la centrale (même si les critères d‘évacuation avaient été discutés),
4) Le directeur-général de la NISA a indiqué que quand M. Shimizu l‘a appelé, il ne lui a pas demandé son avis sur la possibilité d‘un retrait complet, et
5) Le centre de crise hors-site, qui était connecté par un système de vidéo-conférence, a affirmé que l‘option du retrait complet n‘avait pas été discutée. La gestion de crise ayant trait à la sécurité publique devrait être assurée sans jamais avoir à compter sur la capacité et le jugement du Premier ministre.
Les problèmes d’évacuation
La Commission conclut que la confusion dans l’évacuation des résidents découle de la négligence des régulateurs, de l‘échec persistant à mettre en œuvre les mesures adéquates contre une catastrophe nucléaire, ainsi que d’un manque d’action des gouvernements précédents et des régulateurs sur la gestion des crises. Le système de gestion de crise qui existait pour le Kantei et les régulateurs devait protéger la santé et la sécurité du public, mais il a échoué dans cette fonction. (cf. recommandation 2) Le gouvernement central a été non seulement lent à informer les gouvernements municipaux de l’accident nucléaire, mais il a également omis de faire comprendre le degré de gravité de l’accident. De même, la vitesse de l’information dans les zones d’évacuation a considérablement varié en fonction de la distance de la centrale.
Plus précisément, seulement 20 pour cent des habitants de la ville proche de l’usine étaient au courant de l’accident lorsque l’évacuation de la zone des trois kilomètres a été ordonnée à 21h23 dans la soirée du 11 mars. La plupart des résidents de la zone des 10 km ont appris l’accident lorsque l’ordre d’évacuation a été émis à 5h44 le 12 mars ‒ plus de 12 heures après la notification de l’article 15 ‒ mais n’ont reçu ni explication de l’accident ni directives d’évacuation.
De nombreux résidents ont dû fuir avec seulement le strict nécessaire et ont été forcés de se déplacer plusieurs fois et même parfois vers des zones ayant des niveaux élevés de radiations. Il y a eu une grande confusion dans l’évacuation, causée par des consignes de calfeutrement prolongé au domicile, consignes contredites par des « ordres d’évacuation volontaire » .
Certains résidents ont été évacués vers des zones fortement irradiées parce que les informations de surveillance de la radioactivité n’avaient pas été fournies. Certaines personnes ont été évacuées vers ces zones, ont ensuite été laissées sur place, et n‘ont plus reçu aucune nouvelle consigne d’évacuation avant le mois d‘avril. La Commission a confirmé que les plans de préparation à une urgence nucléaire et les mesures complexes de réponse à une catastrophe n‘avaient pas été mis à jour ; elle attribue cet état des choses aux réticences des régulateurs à améliorer et à réviser les plans d’urgence existants.
Des problèmes de santé et de bien-être publics non résolus
La Commission reconnaît que les résidents de la zone touchée se battent encore contre les effets de l’accident. Ils continuent à faire face à de graves problèmes, comme les effets de l’exposition aux rayonnements sur la santé, les déplacements, la dislocation des familles, la perturbation de leur vie et de leurs modes de vie et la contamination de vastes zones de leur environnement. Il n’y a pas de fin prévisible aux activités de décontamination et de restauration qui sont essentielles pour la reconstruction des communautés. La Commission conclut que le gouvernement et les régulateurs ne sont pas pleinement engagés à protéger la sécurité et la santé publiques et qu’ils n’ont pas agi pour protéger la santé des résidents et restaurer leur bien-être. (cf. recommandation 3)
Environ 150 000 personnes ont été évacuées. On estime que 167 travailleurs ont été exposés à des doses de plus de 100 millisieverts. Près de 1 800 kilomètres carrés de terres dans la préfecture de Fukushima auraient été contaminés par une dose de rayonnement cumulée de 5 millisieverts ou plus par an. Les défauts de la planification de l’évacuation ont conduit de nombreux résidents à recevoir une exposition inutile aux rayonnements. D’autres ont été forcés de se déplacer à plusieurs reprises, ce qui a entraîné une augmentation du stress et des risques pour la santé ‒ incluant des décès chez les patients gravement malades. Le gouvernement doit analyser les conditions de vie des résidents dans les zones touchées et systématiquement planifier des mesures visant à améliorer leur qualité de vie. Ces mesures devraient inclure la réorganisation des zones d’évacuation, la restauration des bases de la vie quotidienne, les problèmes de décontamination et la reconstitution des systèmes médicaux et sociaux pour répondre aux besoins du public. Il ne l‘a pas encore fait.
Les plus de 10 000 personnes qui ont répondu à nos enquêtes et les commentaires que des membres de la Commission ont entendus lors des réunions publiques jugent sévèrement la position actuelle du gouvernement.
Alors que des seuils d‘exposition ont été fixés pour le syndrome d‘irradiation aigüe, il n‘existe pas de seuil généralement accepté pour les dommages de l‘irradiation à long terme causés par les faibles doses. Le consensus international, cependant, est que le risque s‘accroît en fonction de la dose reçue. L‘impact de l‘irradiation sur la santé peut varier d‘une personne à l‘autre selon l‘âge, la sensibilité aux radiations et d‘autres facteurs, en partie inconnus. Après l‘accident, le gouvernement a annoncé de façon unilatérale une valeur de référence pour les doses d‘irradiation sans donner à la population l‘information spécifique dont elle avait besoin et qui lui permettrait de répondre à ce genre questions :
Quel niveau est tolérable au vu des effets à long terme sur la santé ?
En quoi les conséquences sur la santé diffèrent-elles selon les individus ? Comment les gens peuvent-ils se protéger contre les substances radioactives ?
Le gouvernement n‘a pas sérieusement mis en place de programmes pour aider les citoyens à comprendre la situation et à se faire leur propre opinion. Il a échoué par exemple à expliquer les risques liés aux irradiations pour différentes couches de la population comme les nourrissons et les jeunes ou les personnes particulièrement vulnérables aux effets des radiations.
Réformer les régulateurs
La Commission a conclu que la sécurité nucléaire et celle de la population japonaise ne peuvent être assurées que si les régulateurs passent par un processus de transformation fondamentale. Toute l’organisation a besoin d’être transformée de manière substantielle. Les régulateurs japonais ont besoin de remettre en cause leur attitude insulaire, ignorante des normes de sécurité internationales et de se transformer en une entité mondialement crédible. (cf. recommandation 5)
Les régulateurs n’ont ni surveillé ni contrôlé la sécurité du nucléaire. Le manque d’expertise a abouti à une forme de neutralisation de la réglementation, et au report de sa mise en œuvre. Ils ont fui leurs responsabilités directes en laissant les opérateurs appliquer les règlements selon leur bon vouloir.
Leur indépendance vis-à-vis des politiques, des ministères pro-nucléaires et des opérateurs a été une parodie. Ils se sont montrés incapables et manquaient d’expertise et de volonté pour assurer la sécurité de l’énergie nucléaire.
En outre, l’organisation manquait de transparence. Sans l’enquête menée par cette commission, la plupart des faits révélant la collusion entre les régulateurs et les autres acteurs n’auraient jamais été dévoilés.
Réformer l’opérateur
En s’appuyant de manière servile sur la bureaucratie gouvernementale du METI, TEPCO n’a pas assumé ses responsabilités en tant que société privée. Dans le même temps, sous les auspices de la FEPC, il a utilisé sa relation privilégiée avec les régulateurs afin d’émasculer toute réglementation. (cf. recommandation 4)
La gestion du risque chez TEPCO illustre ce point. Par exemple, TEPCO n‘a examiné les risques de tsunami que du point de vue de ses propres intérêts :
les risques peuvent-ils se traduire par un arrêt des réacteurs existants ou affaiblir la position de l‘entreprise dans d’éventuelles poursuites juridiques ?
TEPCO a ignoré le risque potentiel pour la santé et le bien-être publics. (Voir la section 5)
A cause du type de gestion des dirigeants de TEPCO ‒ un abandon de leurs responsabilités sur le dos du gouvernement ‒ les problèmes sont devenus évidents lors de l’accident. Ils ont donné la priorité aux intentions du Kantei plutôt qu‘à celles des ingénieurs techniques du site. Leur comportement a toujours été incertain, et le malentendu qui s‘est produit sur « l‘hypothèse d‘abandon total » de la centrale est un bon exemple de la confusion qui a résulté de leur comportement. (Voir la section 3) Après l’accident, TEPCO a continué de refuser la transparence dans la diffusion des informations. Il a limité les informations aux faits confirmés et s‘est arrangé pour ne pas divulguer les informations considérées comme incertaines ou gênantes.
Pour ne donner que quelques exemples, citons le retard dans la communication des prévisions de la demande d‘électricité qui servaient de base au coupures d‘électricité par roulement, et le manque de mises à jour sur les conditions des cœurs des réacteurs de la centrale.
Réformer les lois et les règlements
La Commission conclut qu’il est nécessaire de revoir les lois et règlements en vigueur concernant l’énergie nucléaire. Des mécanismes doivent être mis en place pour veiller à ce que les dernières découvertes technologiques provenant de sources internationales soient reprises dans les lois et règlements en vigueur. (cf. recommandation 6)
Les lois et les règlements liés à l’énergie nucléaire n‘ont été revus que comme des pis-aller à la suite d‘accidents réels. Ils n‘ont pas fait l‘objet d‘une révision sérieuse et complète qui correspondrait aux critères de réponse à un accident et aux mesures de sauvegarde d‘une norme internationale. En conséquence, les risques prévisibles n’ont pas été pris en considération. Les règlements existants sont principalement orientés vers la promotion de l’énergie nucléaire, et non vers la sécurité, la santé et le bien-être publics. La responsabilité sans équivoque que les opérateurs doivent assumer lors d‘une catastrophe nucléaire n’a pas été spécifiée. Il n‘y avait pas non plus de directives claires sur les responsabilités des parties en cas de situation d’urgence. Le concept de défense en profondeur utilisé dans d’autres pays n’a pas encore été pleinement pris en compte.
Du rafistolage
Remplacer des personnes ou changer le nom des institutions ne va pas résoudre les problèmes. À moins que les causes profondes ne soient résolues, les mesures de prévention contre de futurs accidents similaires ne seront jamais efficaces. (cf. recommandations 4, 5 et 6)
La Commission estime que les causes profondes de cet accident ne peuvent être résolues et que la confiance du peuple ne pourra être rétablie tant que cette « catastrophe d’origine humaine » sera considérée comme le résultat d’une erreur commise par une personne particulière. La question sous- jacente est la structure sociale qui a engendré cette neutralisation de la réglementation et le cadre organisationnel, institutionnel et juridique qui a permis aux individus de justifier leurs propres actions, de les cacher quand cela était gênant, sans laisser de traces, afin d’éviter toute responsabilité. À tous les niveaux, la Commission a rencontré une ignorance et une arrogance impardonnables chez toute personne ou tout organisme s’occupant d‘énergie nucléaire.
Nous avons rencontré un mépris total des évolutions internationales et de la sécurité publique.
Nous avons trouvé un fonctionnement routinier basé sur les procédures et les pratiques conventionnelles antérieures, la priorité étant d‘éviter de faire courir des risques à l’organisation.
Nous avons trouvé un état d’esprit donnant la priorité aux intérêts de l‘organisation, et ceci au détriment du public.
Recommandations
Sur la base de ces constatations, la Commission propose pour l‘avenir les sept recommandations suivantes. Nous demandons instamment à la Diète Nationale du Japon de bien vouloir débattre et délibérer sur ces recommandations. Recommandation 1 :
Suivi de l’organisme de réglementation nucléaire par la Diète Nationale
Un comité permanent pour traiter des questions relatives à l’énergie nucléaire doit être établi à la Diète, afin de superviser les organismes de réglementation en charge de la sécurité publique. Ses responsabilités devraient être :
1. Mener des enquêtes régulières et des audits sur les organismes de réglementation, les universitaires et les parties prenantes.
2. Établir un organe consultatif comprenant des experts indépendants avec une vision globale pour mettre à jour les connaissances dont le comité a besoin dans ses transactions avec les régulateurs.
3. Poursuivre les enquêtes sur les autres questions pertinentes.
4. Faire des rapports réguliers sur les activités des régulateurs et la mise en œuvre des recommandations.
Recommandation 2 :
Réforme du système de gestion de crise
Un réexamen fondamental du système de gestion de crise doit être engagé. Les limites qui séparent les responsabilités des autorités nationales et locales de celles des opérateurs doivent être claires. Cela comprend :
1. Un réexamen de la structure de gestion de crise du gouvernement. Une structure doit être établie avec une chaîne de commandement consolidée et le pouvoir de faire face aux situations d’urgence.
2. Les autorités nationales et locales doivent assumer la responsabilité de la réponse aux émissions de radiations hors du site. Ils doivent agir avec la santé et la sécurité publique comme priorité.
3. L’opérateur doit assumer la responsabilité de gérer les accidents sur site, y compris l’arrêt des opérations, le refroidissement du réacteur et son confinement. Recommandation 3 :
Responsabilité du gouvernement pour la santé publique et le bien-être
En ce qui concerne les responsabilités de santé publique, les conditions suivantes doivent être mises en œuvre dès que possible :
1. Un système doit être établi pour faire face aux effets à long terme sur la santé publique, y compris les maladies liées au stress. Le diagnostic médical et le traitement doivent être couverts par des fonds publics. L’information doit être diffusée pour assurer de façon prioritaire la santé et la sécurité publiques, plutôt que ce qui convient au gouvernement. Cette information doit être complète, afin que la population puisse prendre des décisions éclairées.
2. La surveillance continue des points chauds et de la propagation de la contamination radioactive doit être gérée pour protéger les communautés et le public. Les mesures visant à empêcher toute propagation devraient également être mises en œuvre.
3. Le gouvernement doit établir un programme détaillé et transparent de décontamination et de réinstallation et fournir des informations, qui permettent à tous les habitants d‘être informés sur leurs possibilités d‘indemnisation.
Surveillance des opérateurs
TEPCO doit opérer des changements fondamentaux ‒ y compris le renforcement de sa gouvernance ‒ orientés vers une culture d‘entreprise qui privilégie la sécurité ; il doit modifier sa position sur la diffusion des informations et établir un système qui privilégie la gestion du site.
Afin d’éviter que la Fédération des Compagnies Electriques (FEPC) soit utilisée comme « voie de passage obligée » des négociations avec les organismes de réglementation, de nouvelles relations entre les compagnies d’électricité doivent également être établies : elles doivent privilégier les questions de sécurité, la supervision mutuelle et la transparence.
1. Le gouvernement doit fixer des règles et divulguer les informations concernant ses relations avec les opérateurs.
2. Les opérateurs doivent mettre en place une veille technologique croisée favorisant le maintien des normes de sécurité aux plus hauts niveaux internationaux.
3.TEPCO doit opérer une réforme radicale de l‘entreprise, incluant la gestion des risques, la gouvernance et la diffusion des informations ‒ la sécurité étant la seule priorité.
4. Tous les opérateurs doivent accepter un organisme désigné par la Diète comme une autorité de surveillance de tous les aspects de leurs opérations, incluant la gestion des risques, la gouvernance, les normes de sécurité, avec le droit d‘enquêter sur place. Recommandation 5 :
Critères du nouveau régulateur
La nouvelle organisation du régulateur doit satisfaire aux conditions suivantes :
1. L‘indépendance:
La ligne hiérarchique, l‘autorité responsable, les procédures de travail doivent être : a)indépendants des organisations gouvernementales, b) indépendants des opérateurs et c) indépendants des politiques.
2. La transparence:
a) Le processus de décision doit être indépendant des actionnaires des compagnies. b) Publier ces décisions est une nécessité absolue. c) Le comité doit garder les minutes des réunions avec les lobbies, les opérateurs des industries électriques et les organisations politiques et les rendre publics. d) Le parlement doit sélectionner, en dernière instance, les commissaires après avoir entendu les tierces parties.
3. Le professionnalisme:
a) Le personnel doit avoir des compétences reconnues et satisfaire aux normes internationales. Les programmes d‘échanges et de rencontres avec d‘autres régulateurs étrangers doivent être promus ; interactions et échanges au sein des ressources humaines doivent être multipliés b) Un organisme de régulation comprenant un personnel compétent doit être établi. c) La règle du non retour doit être appliquée sans exception.
4. La consolidation:
Les fonctions des organisations, en particulier les communications d’urgence, la prise de décision et de contrôle, doivent être renforcées.
5. La réactivité:
Les organisations devraient se tenir au fait des dernières connaissances et technologies, et se soumettre à des activités de réforme en continu, sous la supervision de la Diète.
Recommandation 6 :
Réforme des lois relatives à l’énergie nucléaire
Les lois concernant les questions nucléaires doivent être réformées en profondeur.
1. Les lois existantes doivent être améliorées et réécrites afin de satisfaire aux normes internationales de sécurité et de protection de la santé publique et du bien-être.
2. Les rôles des opérateurs et de tous les organismes gouvernementaux impliqués dans des activités d’intervention d’urgence doivent être clairement définis.
3. Un suivi régulier et les mises à jour subséquentes doivent être mis en oeuvre afin de se conformer aux standards les plus élevés et aux dernières découvertes technologiques de la communauté nucléaire internationale.
4. De nouvelles règles doivent être créées afin de : a) superviser les opérations de mise en conformité des vieux réacteurs, b) fixer les critères déterminant si les réacteurs doivent être démantelés.
Mise en en place d’un système de commissions d’enquête indépendantes
Un système de nomination de commissions d’enquête indépendantes, incluant des experts venant surtout du secteur privé, doit être développé pour traiter des questions non résolues, incluant, entre autres, le processus de démantèlement des réacteurs, la gestion des combustible usés, l‘atténuation des effets des accidents et la décontamination.
Résumé des résultats de l’enquête 1
L’accident était-il évitable ?
La Commission a confirmé que le 11 mars 2011, la structure de la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi n’était pas capable de résister aux effets du séisme et du tsunami, ni à un accident grave. En dépit du fait que TEPCO et les régulateurs étaient conscients du risque de ce genre de catastrophes naturelles, ils n’avaient pas pris de mesures préventives. C’est ce manque de préparation qui explique la gravité de l’accident. Capacité de résistance du réacteur n°1 de Fukushima Daiichi
La structure du réacteur 1 était incapable de résister au puissant séisme et au tsunami massif du 11mars 2011. Les spécifications de la centrale ne contenaient pas les critères de résistance antisismique et anti-tsunami appropriés :
En effet,
1) à la fin des années 1960, au moment où les réacteurs 1 à 3 ont obtenu le permis de construire, les directives pour la construction des centrales nucléaires étaient insuffisantes ;
2) la zone autour de la centrale était considérée comme une zone d‘activité sismique minimale n’ayant jamais connu de dommages associés à un tremblement de terre. Basé sur cette évaluation, le niveau d’accélération au sol maximum a été fixé à 265 gal, un niveau remarquablement bas. En 1981, une « Directive pour une conception antisismique des installations nucléaires de production d‘électricité » a été fixée par la NSC. En 2006, la NSC a publié une version révisée de la précédente directive. La NISA a exigé que les opérateurs nucléaires évaluent la sécurité antisismique sur leurs sites en conformité avec la nouvelle directive, connue sous le nom de « vérification antisismique » [le backcheck]. En mars 2008, TEPCO a présenté un rapport intermédiaire de vérification sur le réacteur 5 de Fukushima Daiichi, déclarant que ses mesures antisismiques étaient sûres et que le niveau de tolérance maximum de l‘accélération au sol était porté à 600 gals.
En 2009, la NISA a accepté le contenu du rapport intermédiaire sur le réacteur 5, alors que l’évaluation incluait le bâtiment du réacteur et seulement sept des nombreux équipements de sécurité de celui-ci. En juin 2009, des rapports similaires pour les réacteurs 1 à 4 et le réacteur 6 ont été soumis, mais ceux-ci étaient tout aussi limités. TEPCO n‘a publié aucun autre rapport de vérification antisismique parce qu‘aucune évaluation de sécurité antisismique importante n‘a été réalisée. Alors que la date limite officielle de mise en place était juin 2009, TEPCO a pris la décision unilatérale de reporter la date limite à janvier 2016.
TEPCO savait grâce aux procédures de vérification mises en place pour ce rapport intermédiaire que de nombreux renforcements étaient nécessaires pour répondre aux normes de la dernière directive, mais notre enquête a confirmé que TEPCO n‘avait ajouté aucun renforcement aux réacteurs 1 à 3 à la date du séisme du 11 mars.
Bien que la NISA ait reconnu la nécessité des renforcements et de la vérification antisismique, le régulateur a échoué dans son rôle de supervision des travaux de TEPCO. Dans leurs analyses et leurs évaluations après l’accident, TEPCO et la NISA ont tous deux confirmé que quelques-unes des pièces de sécurité importantes de la tuyauterie et des supports du réacteur 5 n‘étaient pas aux normes de sécurité antisismiques au moment du tremblement de terre. Mais suite à son inspection visuelle, TEPCO a indiqué qu’il n’avait pas trouvé de dégâts matériels dans ces parties. la Commission estime cependant qu‘une conclusion niant les dégâts du séisme ne peut pas être légitimement établie, tant qu‘une inspection complète, incluant un contrôle non destructif n‘aura pas été mené.
La Commission estime que cette même conclusion est valide pour les réacteurs 1 à 3, qui sont beaucoup plus anciens que le réacteur 5. La section 2 de ce rapport comprend des détails montant que le séisme enregistré à Fukushima Daiichi a dépassé les hypothèses de la dernière directive.
Il est clair que les mesures antisismiques de renforcement nécessaires n’étaient pas en place au moment du séisme du 11 mars.
L’absence de mesure de lutte contre les tsunamis
La construction de l’usine de Fukushima Daiichi qui a débuté en 1967 était basée sur les connaissances en sismologie de cette époque-là. Comme la recherche a continué au fil des ans, les chercheurs ont souligné à plusieurs reprises la forte probabilité de tsunamis dont les niveaux dépasseraient les hypothèses formulées au moment de la construction, ainsi que la possibilité d’endommagement du cœur dans l‘éventualité de tels tsunamis.
TEPCO a négligé ces avertissements, et les faibles marges de sécurité qui existaient étaient loin d’être suffisantes pour faire face à une telle situation d’urgence. Depuis 2006, les autorités réglementaires et TEPCO ont échangé des informations sur la possibilité d’une panne totale d’électricité résultant de tels tsunamis.
Ils étaient également conscients du risque de dommages au cœur des réacteurs à la suite d’une panne des pompes d’eau de mer si l’ampleur d’un tsunami s‘avérait être supérieure à l’évaluation faite par la Société japonaise des ingénieurs civils.
Cette absence d’améliorations a été la source d‘au moins trois problèmes essentiels : Premièrement, la NISA n‘a publié aucune information sur ses évaluations ou ses instructions de réexamen des hypothèses utilisées dans la conception des moyens de défense vis-à-vis des tsunamis. La NISA n’a pas non plus conservé les dossiers d’évaluations ou d‘instructions. En conséquence, les tierces parties n‘ont jamais pu connaître l’état réel de la situation.
Le deuxième problème concerne la méthodologie utilisée par la Société japonaise des ingénieurs civils pour évaluer la hauteur du tsunami. Bien que le processus de choix de la méthode ait été obscur et qu‘il ait impliqué la participation des compagnies d’électricité, ce qui est inacceptable, la NISA a accepté cette méthode comme conforme sans examiner sa validité.
Un troisième problème est l’interprétation et le choix arbitraires d’une théorie des probabilités. TEPCO a tenté de justifier sa croyance en la faible probabilité d‘occurrence d‘un tsunami et a utilisé les résultats d’un processus de calcul biaisé pour ignorer la nécessité de mettre en place des contre- mesures. TEPCO a aussi prétendu que ce serait utiliser une méthodologie d‘incertitudes techniques que de fonder une évaluation de la sécurité contre les tsunamis sur une démarche faisant appel aux probabilités ; TEPCO a utilisé cet argument pour retarder la mise en œuvre des mesures de lutte contre les tsunamis. En tant qu‘agence de régulation la NISA était au courant du retard de TEPCO à appliquer les contre-mesures, mais n’a pas réagi avec des instructions ou des demandes spécifiques. Elle n‘a pas non plus suivi de façon adéquate les progrès de la vérification.
La raison pour laquelle TEPCO a négligé le risque important d’un tsunami relève de sa manière de gérer les risques, manière dans laquelle l’interprétation des problèmes a souvent été ajustée pour répondre aux intérêts propres de l‘entreprise. Dans une structure de gestion saine des risques, le gestionnaire envisage et met en œuvre des mesures, même si les détails doivent encore être scientifiquement confirmés. Plutôt que de tenir compte des faits connus et de rapidement mettre en œuvre les contre-mesures, TEPCO a eu recours à des tactiques dilatoires, comme la présentation d’autres études scientifiques et le lobbying.
Des mesures non conformes aux normes internationales
Toutes les mesures de lutte contre un accident grave qui étaient en place au Japon étaient inefficaces en pratique. Les hypothèses à la base des mesures de lutte contre un accident grave n‘envisageaient que des questions internes, tels que l’erreur opérationnelle d‘origine humaine et n‘envisageaient pas les facteurs externes tels que séismes et tsunamis, alors même que le Japon est connu pour être fréquemment confronté à ces événements naturels.
Dès le début, les opérateurs ont été autorisés à fixer des mesures de lutte contre les accidents graves de manière autonome. En 1991, le groupe de concertation sur les problèmes courants [Common Issue Discussion Panel] de la NSC a explicitement déclaré que « la gestion des accidents ‒ y compris les mesures opportunes et flexibles qui pourraient être nécessaires dans des situations réelles ‒ devait être envisagée et mise en œuvre par les opérateurs en fonction de leur ―compétence technique‖ et de leur ―expertise‖, sans exiger de l’autorité une réglementation des détails spécifiques. »
Les mesures de lutte contre les accidents gaves qui ont été fixées de manière autonome par l‘opérateur n‘étaient même pas conformes aux normes prévues par les organismes de réglementation. En fait, les équipements de sécurité contre les accidents graves se sont avérés avoir une capacité de résistance plus faible que les équipements de sécurité conformes aux normes utilisés pendant le fonctionnement normal. De toute évidence, le fait d‘utiliser des équipements de sécurité contre les accidents graves qui soient moins performants que les équipements utilisés en fonctionnement normal anéantit le concept même de ces mesures de sécurité. Parce que soumises à une supervision inadéquate, les mesures mises en œuvre contre les accidents graves au Japon étaient inefficaces en pratique par rapport aux mesures en place à l’étranger, et ont provoqué d‘importants délais de réaction.
Permettre aux opérateurs de mettre les mesures en œuvre de façon autonome leur a également laissé une grande liberté pour négocier avec les régulateurs les conditions d‘application via la Fédération des Compagnies Electriques (FEPC).
Cela fut particulièrement le cas après 2010 quand les régulateurs ont commencé à envisager d‘aligner les mesures de lutte contre les accidents graves sur les standards internationaux et que les opérateurs, par l’intermédiaire de la FEPC, ont commencé à exercer de fortes pressions sur les régulateurs pour ralentir le processus.
Les opérateurs ont négocié avec les régulateurs avec deux perspectives en tête :
1) éviter ou minimiser le risque de poursuites potentielles ;
2) éviter des obligations de mise en conformité qui pourraient interférer avec le fonctionnement des réacteurs existants. Encore une fois, cela a eu pour conséquence que rien n‘a été fait pour se préparer contre les accidents graves comme celui qui a eu lieu à compter du 11 mars ; le genre d‘accident qui n‘a que très peu de chance de se produire, mais qui provoque, quand il survient, des situations catastrophiques. 2 L’accident : l’escalade
La Commission a soigneusement étudié le déroulement de l’accident. Nous avons essayé d’établir si l‘accident aurait pu être contenu et s’il aurait pu être encore plus grave. Nous avons également examiné le rôle du séisme dans l’accident, et la validité de l’hypothèse TEPCO selon laquelle le tsunami aurait été la seule cause directe.
Le déroulement de l’accident
Les mesures mises en place pour prévenir un accident grave à l’usine de Fukushima Daiichi étaient loin d’être suffisantes. Le système d’alimentation électrique était particulièrement fragile d‘un point de vue défensif et a souffert de son manque de redondance, de diversification et d’autonomie. Bien que la centrale soit reliée à un certain nombre de lignes électriques extérieures, il n’y avait que deux stations- source, lesquelles ont été mises hors service par le séisme, ce qui a provoqué une perte d’alimentation externe pour tous les réacteurs. Les générateurs diesel et d’autres équipements d’alimentation du site, y compris les équipements de distribution électrique étaient tous situés au sein ou à proximité de la centrale et ont été inondés par le tsunami qui a frappé peu de temps après. Les hypothèses concernant une panne totale [SBO] ne comprenaient pas la perte de l‘alimentation en courant continu ; c‘est pourtant exactement ce qui s’est passé. Dans le chaos qui a suivi le désastre causé par le tsunami, les travailleurs ont été grandement entravés dans leurs efforts. La perte des fonctions de la salle de contrôle, de l’éclairage et des systèmes de communication et la lutte pour livrer des équipements et des matériaux dans une centrale jonchée de décombres ont été encore exacerbées par la répétition des répliques. Cela non plus n‘avait pas été anticipé. Les manuels de gestion détaillée des accidents graves n’étaient pas à jour, les schémas et les documents décrivant les procédures de ventilation étaient incomplets ou manquants. La priorité n‘avait pas été suffisamment axée sur les simulations et la formation aux situations d‘urgence. Cela est symptomatique des problèmes institutionnels de TEPCO. Les réacteurs 1, 3 et 4 ont explosé, et l‘enceinte de confinement a été endommagée dans le réacteur 2. Le cœur des réacteurs 5 et 6 n‘a pas été endommagé, car ces réacteurs étaient à l‘arrêt en toute sécurité. La Commission a découvert qu‘en réalité, une situation encore pire aurait pu se produire dans les réacteurs 2 et 3, et que la situation dans les réacteurs 5 et 6 aurait pu facilement se dégrader. Si des mesures préventives contre le terrorisme avaient été mises en place, l‘accident aurait pu être géré et évoluer de manière différente. Le combustible usé de la piscine du réacteur 4 aurait pu être endommagé et des effets plus sévères auraient pu affecter une superficie plus vaste. A ce stade, cet accident désastreux aurait aisément pu se transformer en un scénario encore plus effrayant.
Vérification des événements
L‘accident est très clairement dû à des phénomènes naturels : le tremblement de terre et le tsunami qui l‘a suivi. Pourtant, un certain nombre de facteurs importants ayant trait à la façon dont l’accident a évolué restent inconnus, principalement parce qu’une grande partie des équipements essentiels et de la tuyauterie touchés par cet accident sont à l’intérieur de l’enceinte de confinement des réacteurs et resteront donc hors de portée des inspecteurs pendant de nombreuses années.
En dépit de cela, TEPCO précise dans son rapport d’enquête provisoire que les équipements de sécurité essentiels n’ont pas été endommagés par le tremblement de terre, et que la principale cause de l’accident est le tsunami.
Dans ce rapport, on trouve une clause de non-responsabilité précisant que celui-ci s‘appuie sur des résultats « [valables] dans la mesure de leur confirmation » Le gouvernement a également écrit un rapport d’accident similaire qui a été soumis à l’Agence Internationale d’Energie Atomique (AIEA).
Nous avons mené nos investigations et nos consultations avec soin, soucieux de ne pas tirer de conclusions hâtives qui s‘appuieraient sur des mesures décidées d‘avance. La Commission reconnaît la nécessité pour les régulateurs et pour TEPCO de revoir et de vérifier les causes de l’accident sur la base des faits suivants :
1. De fortes secousses ont débuté à la centrale 30 secondes après le SCRAM et la centrale a été durement secouée pendant plus de 50 secondes. Cela ne signifie pas que les réacteurs nucléaires n‘aient pas été impactés par les mouvements sismiques. On pense que le mouvement au sol a été assez fort pour endommager certaines fonctions de sécurité essentielles, parce que les vérifications des plans de résistance aux séismes et des renforcements antisismiques n’avaient pas été faites.
2. Les niveaux de pression du réacteur et de l’eau montrent clairement qu‘une perte massive de réfrigérant primaire n’a pas eu lieu dans la période comprise entre le séisme et le tsunami. Cependant ‒ comme l‘écrit l‘Organisation japonaise pour la sûreté nucléaire (JNES) dans les « résultats techniques » donnés par la NISA ‒ une perte minime de réfrigérant provenant d’une fissure dans la tuyauterie et occasionnant une fuite de liquide de refroidissement ultérieure n‘affecterait pas le niveau de l’eau ou la pression du réacteur ; elle aurait pu se produire sans être visible pour les opérateurs. Si ce genre de perte minime de réfrigérant reste incontrôlé pendant 10 heures, des dizaines de tonnes de liquide de refroidissement pourraient fuir, conduisant à un endommagement ou une fusion du cœur.
3. Le rapport provisoire de l’enquête menée par le gouvernement, les « résultats techniques » de la NISA et plus particulièrement le rapport provisoire de TEPCO, ont tous conclu que la perte de l’alimentation d’urgence en courant alternatif ‒ qui a certainement eu un impact sur l‘évolution de l’accident ‒ « a été causée par l’inondation due au tsunami ».
Le rapport de TEPCO dit que la première vague du tsunami a atteint le site à 15h27 et la seconde à 15h35. Mais ce sont les moments où les capteurs fixés à 1,5 km au large des côtes ont détecté les ondes, et non pas ceux où le tsunami a frappé la centrale. Cela donne à penser qu’au moins la perte de l’alimentation de secours A dans le réacteur 1 pourrait ne pas avoir été causée par les inondations. Sur cette base, certaines questions fondamentales doivent faire l‘objet d‘une explication logique avant d‘affirmer définitivement que les inondations ont été la cause de la panne totale.
4. Plusieurs employés des fournisseurs de TEPCO qui travaillaient au quatrième étage du bâtiment du réacteur 1 au moment du séisme ont été témoins d‘une fuite d’eau sur cet étage qui abrite deux grandes cuves pour le condenseur d‘isolation et la tuyauterie de ce condenseur. La Commission estime que cette fuite ne venait pas d‘un débordement de l‘eau de la piscine de combustible usé du cinquième étage. Toutefois, étant donné que nous ne pouvons pas aller à l’intérieur de la centrale et effectuer une inspection sur place, la source de cette fuite reste à confirmer.
5. Les condenseurs d‘isolation (systèmes A et B2) du réacteur 1 ont été fermés automatiquement à 14h52, mais l’opérateur du réacteur 1 a arrêté manuellement les deux condenseurs 11 minutes plus tard [15h03]. TEPCO a toujours maintenu que cet arrêt manuel s‘expliquait par « le fait qu‘on avait jugé que le taux d‘excursion horaire de la température du liquide de refroidissement du réacteur ne pouvait pas être maintenu à moins de 55 degrés (Celsius), ce qui est le point de référence fourni par le manuel opérationnel ». Le rapport de l’enquête dirigée par le gouvernement, ainsi que le rapport du gouvernement à l’AIEA, affirment la même chose. Toutefois, selon plusieurs travailleurs impliqués dans l‘arrêt manuel des condenseurs qui ont répondu à notre enquête, ils ont arrêté les condenseurs pour vérifier si le liquide de refroidissement s’échappait des condenseurs ou d‘autres tuyauteries, parce que la pression du réacteur baissait rapidement. Alors que les explications de l‘opérateur [de quart] sont raisonnables et correctes, l’explication de TEPCO est irrationnelle.
6. Il n’existe aucune preuve de l’ouverture de la vanne de sécurité au réacteur 1, même si c‘est la procédure habituelle en cas d‘accident. Par contre, ces documents sont disponibles pour les réacteurs 2 et 3. Nous avons constaté que le bruit de l’ouverture du clapet de sécurité pour le réacteur 2 a été entendu à la salle de contrôle centrale et dans le réacteur 2, mais aucun employé travaillant au réacteur 1 n‘a entendu le bruit de l’ouverture de la soupape de sécurité du réacteur 1.
Il est donc possible que l‘ouverture de la soupape du réacteur 1 n‘ait pas fonctionné. Dans ce cas, un accident minime de perte de réfrigérant causé par le mouvement sismique pourrait avoir eu lieu dans le réacteur 1.
3 La réponse d’urgence à l’accident
La Commission a enquêté sur la manière dont TEPCO, les agences de régulation, le gouvernement et le Kantei (Cabinet du Premier Ministre) ont répondu à l’accident ‒ y compris les premiers stades de la réponse, le développement de l‘accident, le système d’intervention d’urgence et le système de gestion de crise. La réponse de TEPCO à l’accident.
Au moment de l’accident, ni le Directeur exécutif ni le Président de TEPCO n’étaient présents ni joignables, situation inconcevable pour un opérateur de centrales nucléaires. Les deux hommes avaient également une compréhension différente de la structure de la Réponse d’Urgence, un fait qui a très probablement contribué au retard dans la réponse de TEPCO à l’accident. Le manuel de TEPCO pour la réponse à un accident grave était complètement inefficace, et les mesures qu’il recommandait n‘ont pas fonctionné. Ce manuel présupposait que les mesures des paramètres de fonctionnement du réacteur seraient lisibles, mais il n’avait pas envisagé un blackout prolongé de l’installation comme ce qui s’est produit à Fukushima et qui a empêché toute gestion de ces paramètres. La chaîne de commandement a été perturbée durant la période d’urgence. Dans une situation d’accident, la direction de la centrale était supposée communiquer avec la NISA (Agence de Sûreté industrielle et nucléaire) à partir du site déporté ERC (Centre de Réponse d’Urgence), mais cela n’a pas été possible par suite du dysfonctionnement de ce site, qui se trouvait dépourvu de courant électrique à la suite du tremblement de terre. La situation réelle de la ventilation de l’unité 1 n’a pas été communiquée à la NISA, ni au Cabinet du Premier ministre, ce qui a favorisé une atmosphère de méfiance entre la direction TEPCO du site, les agences de régulation et le Cabinet du Premier ministre.
La décision du Premier ministre qui en a résulté, d‘aller sur le site et donner des instructions, n’a pas seulement pris du temps aux opérateurs du site, mais a perturbé la chaîne de commandement prévue entre la compagnie nucléaire, les agences de régulation et le Cabinet du Premier Ministre. Si la direction de TEPCO avait communiqué activement la situation du site dès le début, et expliqué la gravité de la situation aux autres parties, il est possible que la méfiance ‒ et la confusion qui a suivi dans la chaîne de commandement ‒ auraient pu être évitées. La direction de TEPCO n’a pas non plus produit de support technique suffisant. Alors que la situation de l’Unité 2 continuait de se détériorer, Masao Yoshida, le directeur général de la centrale de Fukushima, a demandé un avis technique au PDG et VP Sakae Muto, mais celui-ci en transit depuis le site déporté n’a pu répondre. La direction de TEPCO n’a pas non plus réussi à protéger Yoshida des questions directes du Kantei, et a approuvé les instructions de M. Madarame, directeur de la NSC, bien que celles-ci aient été contraires aux décisions prises sur le site, la vraie première ligne de réponse à l’accident. Enfin, la mentalité de l’encadrement de TEPCO de « soumission à l’autorité » a entravé leur action. La confusion produite par le commentaire du Président Shimizu à propos de « l’évacuation », et l’intervention du Kantei résultent de cette mentalité. Au lieu de prendre des décisions déterminées et de les communiquer clairement au gouvernement, TEPCO a suggéré ce qu’elle pensait que le gouvernement voulait et a donc échoué à transmettre la réalité du terrain.
Il est difficile de conclure que ce serait le Premier ministre qui aurait découragé l’idée d’une évacuation complète, comme il a été rapporté ailleurs, pour diverses raisons :
1) la direction du site n’a jamais envisagé un retrait complet de ses employés ;
2) il n’y a pas de preuve qu’une décision en faveur d’un retrait complet ait été prise à la direction de TEPCO,
3) le plan d’évacuation, préparé avant la visite de Shimizu au Kantei, prévoyait de maintenir des membres de la Réponse d’Urgence à la centrale ;
4) le Directeur-général de la NISA, que M. Shimizu a contacté, a assuré qu’il n’avait pas été consulté pour une évacuation totale ;
5) l’équipe du site déporté, jointe par un système de vidéoconférence, a certifié qu’il n’y avait pas de discussion sur l’hypothèse d’une évacuation complète. Il est clair qu’il y a eu une incompréhension de la part du Kantei, mais la raison fondamentale tient à la mentalité des dirigeants de TEPCO, fait de déférence et de dépendance vis-à-vis de l’autorité gouvernementale, et à l’abdication de leurs propres responsabilités, malgré la nature privée de l’entité.
Les organisations de réponse d’urgence du gouvernement
Au moment de l’accident, le système de réponse gouvernemental à un accident n’a pas fonctionné comme prévu. Les systèmes prévus en cas de catastrophe ‒ comme les infrastructures de communication et de transport ‒ étaient hors d’usage à cause du tsunami et du tremblement de terre. L’échec du système gouvernemental de réponse à l’accident dans les premiers temps a été l’un des facteurs qui ont poussé le Kantei à augmenter son implication dans la réponse à l’accident.
Le système gouvernemental de réponse à l’accident était constitué principalement :
*du Centre de Réponse à l’Urgence Nucléaire du Premier ministre,
*du Secrétariat du Centre de la Réponse à l’Urgence Nucléaire de la NISA
*et de l’Equipe Régionale de la Réponse à l’Urgence Nucléaire. Dans l’ensemble, aucune de ces organisations n’a fonctionné comme prévu.
Le Centre de la Réponse à l’Urgence nucléaire du Premier ministre, et son Secrétariat étaient censés diriger la coordination globale des mesures de Réponse d’Urgence, telles que les mesures destinées à protéger les habitants à proximité, mais ils ont été incapables de mener ces tâches à bien. Bien que l’intervention du Kantei ait contribué à aggraver la catastrophe, l’échec du Secrétariat du Centre pour l’Urgence nucléaire à collecter et à partager les informations sur l’évolution de l’accident et de l‘intervention a constitué un facteur significatif. De plus, l’équipe régionale de la Réponse à l‘Urgence nucléaire n’a pas pris d’initiative dans l‘intervention locale sur l’accident, comme par exemple l‘émission d’un ordre d’évacuation. Cela est dû à l‘arrivée simultanée du tremblement de terre, du tsunami et de l’accident nucléaire, et à l’absence d’une préparation à un accident grave et prolongé. Le Centre de Gestion de Crise, situé dans le bâtiment du Kantei, était déjà saturé par la gestion des conséquences du tremblement de terre et du tsunami, et se trouvait dans l’incapacité de répondre à l’accident nucléaire.
La Commission de Sûreté nucléaire a rencontré de nombreux problèmes et s’est montrée incapable de fournir des conseils fondés sur l’expertise de sa propre organisation.
Le Ministère de l’Education n’a pas non plus réussi à utiliser les systèmes qu’il avait préparés. En un moment où les événements se précipitent, il est absolument vital que chaque flux d’information soit partagé en temps réel. Bien qu’il y ait eu un système de téléconférence reliant le Kantei à chacune des organisations concernées, rien n‘atteste que le système ait été utilisé, tout particulièrement pour partager des informations entre le Kantei et ces organisations. TEPCO a transporté son propre système de téléconférence au site déporté et l’a utilisé pour mettre en relation le Siège avec la centrale de Fukushima. Si TEPCO avait connecté son système au réseau de téléconférence du gouvernement, il aurait été en mesure de partager l’information en temps réel dès les premiers stades, mais cela n’a pas été fait.
La réponse d’urgence du Kantei
Alors que la situation se détériorait et que les systèmes de réponse à l’accident prévus par le gouvernement ne fonctionnaient pas, le Kantei a pris le contrôle de la réponse d’urgence, avec le Premier ministre Naoto Kan au centre d’un groupe ad hoc d’hommes politiques, de conseillers et le président de la NISA. Ce groupe était composé de gens qui n’étaient pas des experts et qui n’avaient pas de compréhension adéquate de la situation sur le site. Le Kantei a rencontré des problèmes dès le début. Après s’être vu notifié par TEPCO que la situation correspondait aux conditions de l’Article 15 de l’Acte sur les Mesures Spéciales concernant la Préparation à l’Urgence nucléaire, il lui a fallu deux heures pour publier la Déclaration de Situation d’Urgence nucléaire, étape nécessaire pour lancer la Réponse d’Urgence.
En fait, le Premier ministre Naoto Kan n’était pas pleinement conscient que la publication de la « Déclaration d’une Situation d’Urgence » était le premier pas indispensable pour l’intervention face à l’accident, et son entourage n’a pas su l‘en informer correctement. Le groupe du Kantei a compris que le Centre de Gestion de Crise, en charge de la réponse initiale, était saturé par le traitement des conséquences du tremblement de terre et du tsunami. Les membres dirigeants de la NISA et de la NSC avaient rejoint le groupe pour apporter leurs conseils. Ils n’ont pu, cependant, répondre de manière adéquate aux questions, ce qui a produit un sentiment de méfiance, qui a atteint son maximum au moment de l’explosion de l’Unité 1.
A partir de là, le bureau du Premier ministre, au cinquième étage du Kantei, est devenu la première ligne des efforts de réponse à l’accident. Bien que TEPCO et les autorités de régulation soient tombées d’accord sur la manière d’agir sur le dégazage et sur l’injection d’eau de mer, le Kantei est resté dans l’ignorance de ce fait, et est intervenu, aggravant encore le désordre et la confusion. Au matin du 15 mars, pris d’un sentiment d’urgence face au manque d’information, le Premier ministre Naoto Kan a décidé d’aller lui-même visiter le site. En réponse à l’offre de TEPCO d’évacuer face à la situation de plus en plus critique dans l’unité 2, le Premier ministre Naoto Kan a convoqué le Président Shimizu à son bureau, et il a rejeté l’évacuation.
Peu après, le gouvernement a décidé d’établir une structure conjointe entre le gouvernement et la direction de TEPCO, au siège de TEPCO.
Tout au long du déroulement de cet accident, le bureau du Premier ministre a également été central dans les décisions concernant les zones d’évacuation. Les plans d’urgence attribuaient au centre de décision sur site la responsabilité d’élaborer des propositions d’évacuation, avec un transfert de compétence au Secrétariat du Centre de la Réponse à l’Urgence nucléaire, au cas où le Centre de décision sur site ne serait pas en mesure de le faire. Telle était précisément la situation, mais lorsque la réponse du Secrétariat du Centre de la Réponse à l’Urgence nucléaire a été différée, le Kantei est intervenu et a ordonné les évacuations.
Cela a provoqué les problèmes suivants :
1/ alors que les décisions étaient prises sur une base ad hoc, il y avait une coopération insuffisante entre les agences du gouvernement.
2/ le détail des opérations d’évacuation était lacunaire.
3/ le public manquait d’explications appropriées. Cela a conduit à aggraver le désordre et la confusion sur le terrain.
Evaluation de la réponse d’urgence du gouvernement et du Kantei
Nous respectons les efforts du gouvernement et des autres parties concernées, au vu des conditions extrêmes où ils se sont trouvés ‒ faire face à l’accident, au tremblement de terre, au tsunami, simultanément et dans des conditions de pression considérable. Ils ont eu très peu de temps pour définir une approche mesurée, et ils ont dû agir sur de longues périodes sans manger ni dormir.
Mais il y a deux points qui doivent être précisés. D’abord, le groupe du Kantei n‘a pas compris le propre rôle que le Kantei aurait dû assumer dans la crise. On a accordé beaucoup d’attention à la mauvaise communication entre le Kantei et TEPCO, sur la question de savoir si l’évacuation de la centrale prévue par TEPCO concernait tous les employés ou une partie d’entre eux. Cependant, l’état des réacteurs était si grave que TEPCO se devait de demander une évacuation.
Dans cette situation, le Kantei aurait dû confirmer la possibilité que tous les travailleurs soient évacués, afin de prévoir l’évacuation des habitants et prendre d’autres mesures pour protéger ceux-ci. Il est clair que le Kantei n’aurait pas dû intervenir sur des questions que TEPCO était en mesure de traiter, comme la condition du dégazage et l’injection d’eau de mer, et aurait dû confirmer le sens des commentaires du Président Shimizu à propos de l’évacuation.
Son intervention amenant à établir un centre de décision gouvernement-TEPCO chez TEPCO est également incompréhensible. Un second point concerne le fait que l’intervention directe du Kantei, dont la visite du Premier ministre Naoto Kan à la centrale Daiichi de Fukushima, a perturbé la chaîne de commandement et provoqué de la confusion dans une situation déjà terrible sur le site.
A partir de cette visite, un nouveau canal de communication a été mis en place, entre le Kantei, Fukushima Daiichi et la direction de TEPCO. Ce nouveau canal allait à l’encontre du flux d’information officiel entre Fukushima-Daiichi vers le siège de TEPCO, puis vers la NISA et le Kantei (le Centre de la Réponse d’Urgence Nucléaire du Premier ministre). La nouvelle orientation obligeait TEPCO à communiquer ses informations non seulement à la NISA mais aussi au Kantei, contribuant à perturber la réponse de TEPCO et causant du désordre dans la centrale.
A tout moment, la priorité du gouvernement doit être son souci pour la santé et le bien-être publics. Mais parce que l’attention du Kantei était concentrée sur les problèmes en cours à la centrale — ce qui aurait dû être de la responsabilité de l’opérateur ‒ le gouvernement a manqué à sa responsabilité envers le public. L’intervention permanente du Kantei dans la centrale a également mis en place les conditions permettant à TEPCO d’abdiquer de fait sa responsabilité envers la situation dans la centrale.
D’après le Manuel d’Urgence nucléaire, la NISA et les autres institutions bureaucratiques ont la responsabilité de recueillir et d’organiser l’information pour la mettre à disposition du Centre de la Réponse à l’Urgence Nucléaire, afin qu’elle serve à la prise de décision. Cependant, avec le nouveau canal de communication mis en place entre le Kantei et TEPCO, la perception qu’avaient les institutions bureaucratiques de leur responsabilité a décru et leur approche est devenue passive. Le sectionnement vertical des divers ministères impliqués a également empêché un partage efficace d’information.
Afin de garantir la sécurité publique, il est nécessaire que de telles agences réagissent non seulement de façon flexible en temps de crise, mais accroissent leur capacité de gestion de crise grâce à un entraînement continu.
La réponse à l’accident de la Préfecture de Fukushima
Le Système de Réponse d’Urgence de la Préfecture de Fukushima était également fondé sur l’hypothèse qu’une catastrophe nucléaire ne surviendrait pas en même temps qu’un tremblement de terre et un tsunami. Il a été totalement pris au dépourvu. La structure de réponse à une catastrophe de la Préfecture de Fukushima était exposée dans le Plan régional de Prévention de Catastrophe de la Préfecture de Fukushima, mais l’éventualité d’un désastre nucléaire causé par des catastrophes naturelles n’avait pas été envisagée.
Etant donné l’effondrement des communications avec le gouvernement central dans le moment qui a suivi l’accident, l’exécutif de la préfecture et le gouvernement central ont ignoré les actions les uns des autres. Ressentant l’urgence de la situation, l’exécutif de la Préfecture a ordonné unilatéralement que les habitants soient évacués dans un rayon de 2 km autour de la centrale, en se fondant sur des exercices antérieurs de prévention et d’urgence. Cela a été suivi 30 minutes plus tard par le gouvernement central qui a ordonné l’évacuation des habitants dans un rayon de 3 km. Mais le tremblement de terre et le tsunami ayant gravement endommagé les réseaux de communication, il était difficile de transmettre la directive aux municipalités et au public. La Préfecture de Fukushima a également été incapable de gérer la surveillance d’urgence. Seul l’un des 24 postes de surveillance était encore en état de fonctionner ; les autres avaient été soit emportés par la mer, soit coupés du réseau. Les postes mobiles de surveillance sont restés inutilisables jusqu’au 15 mars, à cause des problèmes du réseau de téléphone mobile. Il y avait bien un véhicule équipé d’équipement de surveillance, mais il s’est trouvé hors d’usage, par manque de carburant.
La diffusion de l’information par le gouvernement central
La précision détaillée a constitué une priorité, aux dépens d’une diffusion rapide de l’information envers ceux qui en avaient besoin pour prendre des décisions en connaissance de cause. M. Edano, directeur du cabinet, a affirmé de façon répétée qu’il n’y avait pas d’effet sanitaire immédiat des fuites de radioactivité, inspirant au public un faux sentiment de sécurité.
Dans ses déclarations, cependant, la nécessité et l’urgence d’une évacuation n’ont jamais été expliquées correctement du point de vue des habitants, et le gouvernement n’a jamais fourni de preuve pour appuyer ses déclarations. Cela a provoqué une angoisse importante dans le public. Enfin, le plus grave est que le gouvernement a choisi de diffuser des informations dans une perspective purement subjective, plutôt que de répondre aux besoins du public.
4 L’étendue des dommages
La commission a abouti à un certain nombre de constatations concernant l’étendue des dommages provoqués par l’accident sur la centrale nucléaire. Nous avons étudié la manière dont les décisions ont été prises, et comment les stratégies et les mesures palliatives ont été communiquées au public. Nous avons également enquêté sur ces éléments du point de vue des habitants affectés par les conséquences de l’accident. Dommages infligés par l’accident de centrale
Les effets de l’accident continuent bien sûr à se faire sentir et continueront d’affecter le pays. L’accident a provoqué l’émission de 900 PBq (1015 Bq) de substances radioactives, 1/6 du total des rejets de l’accident de Tchernobyl si on les convertit en niveau d’iode. Il y a maintenant de vastes étendues du pays ‒ 1800 km² ‒ dans la préfecture de Fukushima dont les niveaux de contamination atteignent une dose cumulée potentielle de 5 mSv/an ou davantage.
Les habitants sont particulièrement préoccupés par leur niveau d’exposition. Cependant, les conséquences sanitaires ne sont pas encore connues du fait des différentes conditions qui s’appliquent à chaque individu.
Une estimation de l’exposition externe cumulée sur les 4 premiers mois suivant l’accident pour 14 000 habitants environ (à l’exclusion des travailleurs de la centrale) dans trois villes et villages où les doses de radiation ont été relativement élevées, montre que 0,7 % d’entre eux ont été exposés à 10 mSv ou plus, et 42,3 % ont été exposés à moins de 10 mSv, dont 57 % ont été exposés à moins de 1 mSv. Bien que ces valeurs soient généralement basses, il est clair que des habitants souffrent de stress provoqué par la peur de l’inconnu.
Des ordres d’évacuation chaotiques
L’enquête de la commission a révélé que de nombreux habitants n’ont pas été informés qu’un accident s’était produit ou qu’il s’aggravait rapidement et que des fuites radioactives avaient lieu, et cela, même après que le gouvernement et certaines municipalités en aient été informés.
Lorsque les conséquences de l’accident ont commencé à s’aggraver, les destinations d’évacuation et d’autres aspects de l’évacuation ont été souvent modifiés. Mais, même durant la période d’aggravation, la plupart des habitants proches sont restés dans l’ignorance de la catastrophe ou de sa gravité, sans parler du risque accru.
Un total de 146 520 habitants ont été évacués à la suite des ordres d’évacuation du gouvernement. Pourtant, de nombreux habitants proches ont été évacués sans informations précises. Dans l’ignorance de la gravité de l’accident, ils pensaient ne partir que pour quelques jours et n’ont emporté que le strict nécessaire.
Les ordres d’évacuation ont été régulièrement révisés tandis que les zones d’évacuation passaient du rayon initial de 3 km à 10 km, puis 20 km, tout cela en une seule journée. A chaque fois que la zone d’évacuation était étendue, les habitants devaient se déplacer. Certains évacués n’ont pas été informés qu’ils avaient été envoyés sur des sites de forte radioactivité. Les hôpitaux et les crèches dans la zone des 20 km se sont débattus pour assurer des moyens de transport et trouver des hébergements ; 60 patients sont morts en mars de complications liées à l’évacuation. L’exaspération a monté parmi les habitants. Le 15 mars, les habitants de la zone entre les 20 et 30 km ont reçu l’ordre de se calfeutrer.
Comme cette mesure a duré plusieurs semaines, ces habitants ont été victimes d’un grand manque d’information et de moyens. L’ordre de calfeutrage a été en conséquence revu en évacuation volontaire. Mais là aussi, l’information sur cette modification a été tristement déficiente et les habitants se sont retrouvés à devoir évacuer sans posséder les informations indispensables.
La Commission conclut que le gouvernement a de fait abdiqué sa responsabilité envers la sécurité publique. Le fait que certaines parties de la zone des 30 km subissaient de forts niveaux de radiation a été connu avec la publication du Système pour la Prédiction de l’Information Environnementale sur la Dose d’Urgence (SPEEDI), le 23 mars. Mais ni le gouvernement ni le Centre de Réponse d’Urgence Nucléaire n’ont pris de décision rapide pour l’évacuation des résidents de ces zones qui n’ont été évacuées qu’un mois plus tard.
Le manque de préparation au désastre nucléaire
Les autorités de régulation s’étaient aperçues de divers problèmes concernant la préparation à une catastrophe nucléaire avant l’accident, mais elles n’avaient pas redéfini les mesures de prévention. En conséquence, les retards dans la mise en œuvre ont contribué à une réponse inappropriée, comme on a pu le constater durant l’accident. La Commission de Sûreté Nucléaire (NSC) a commencé à revoir les directives de prévention de catastrophe en 2006, pour s’aligner sur les nouveaux standards internationaux. Néanmoins, la NSC redoutait que les habitants s’inquiètent de la nécessité de mesures de protection supplémentaires après avoir été régulièrement assurés du caractère inoffensif de l’énergie nucléaire, et que ces inquiétudes alimentent les arguments opposés au projet plutonium-thermal (utilisation du MOX), alors en cours.
La NSC n’a pas su expliquer comment l’initiative de défense civile pourrait être bénéfique pour les habitants, et a échoué à mettre en œuvre les standards internationaux de façon consistante. Bien que la révision des directives se soit poursuivie après 2007, l’accident s’est produit alors que cette révision était toujours en cours. Après le tremblement de terre de Niigata en 2007, il était évident que l’hypothèse d’une catastrophe multiple devait être prise en compte dans les mesures de prévention d’un accident nucléaire. Pourtant, la NISA a maintenu des contre-mesures basées sur l’hypothèse d’une faible probabilité de catastrophe multiple. La NISA n’a finalement fourni que des conseils passifs à propos des simulations de catastrophe fondées sur une telle éventualité. Pendant ce temps, le gouvernement n’a pas non plus intégré l’hypothèse d’un accident grave ou d’une catastrophe multiple dans aucun de ses exercices de catastrophe nucléaire. Lorsque le cadre des exercices a été étendu, ceux-ci ont perdu de leur substance, et ont été réalisés dans un but cosmétique, plutôt que d’amélioration de la préparation. Les exercices non pertinents étaient dépourvus d’instruction sur la nécessité d’utiliser des outils tels que l’obtention d’informations sur les radiations depuis le système SPEEDI. Quoiqu’il ait été appliqué dans les exercices annuels, les participants ont trouvé les exercices inutiles au moment de l’accident.
Le Système de Soutien à la Réponse d’Urgence (ERSS) et le système SPEEDI doivent servir à protéger la sécurité publique.
Les directives sur la surveillance de l’environnement reposent sur l’hypothèse que l’ERSS prédit et anticipe les émissions de matières radioactives et les données de rejet, et que le SPEEDI prédit et anticipe la diffusion de matières radioactives à partir l’ERSS. Les mesures de sûreté publique, y compris celles qui concernent l’évacuation, devraient reposer sur l’utilisation de ces systèmes. Si les données d’émission ne peuvent être récupérées depuis l’ERSS, le système SPEEDI ne fournit que des données trop peu fiables pour délimiter les zones d’évacuation. Certaines des personnes impliquées étaient conscientes des limitations du système, mais aucune révision n’a été réalisée avant la catastrophe. Il n’y avait pas d’autre réseau de données qui aurait pu suppléer ou remplacer les systèmes de prévision. Ce dispositif a échoué.
Les données d’émission n’ont pu être récupérées de l’ERSS, et le gouvernement a été incapable d‘utiliser les résultats de SPEEDI dans la planification des mesures de protection, et dans la définition des zones d’évacuation.
Quelques semaines plus tard, la NSC a publié une estimation du panache de radioactivité au moment de l’accident. Bien que l’estimation de la NSC ait été réalisée par une analyse a posteriori fondée sur une surveillance des données de long terme, le public a cru par erreur qu’elle avait été réalisée au moment de l’accident, que le gouvernement l’avait ignorée ou ne l’avait pas publiée. Cela a accru la méfiance du public. En même temps, les systèmes médicaux d’urgence sur les radiations avaient été établis provisoirement, après les problèmes survenus au moment de l’accident chez JCO en 1999.
Personne n’avait pris en compte la nécessité d’une préparation à une exposition à la radioactivité d’une grande zone géographique, comme cela s’est produit à Fukushima. A cause de cela, la plupart des dispositifs n’ont pu servir car ils étaient trop proches de la centrale, mais aussi du fait de leur capacité et des effectifs de personnels médicaux entraînés. Ces institutions médicales avec une capacité de traitement d’urgence nucléaire n’ont pas fonctionné comme prévu.
Conséquences actuelles et futures des radiations sur la santé
L’une des préoccupations majeures parmi les habitants est l’effet des radiations sur leur santé. Néanmoins, le gouvernement et la Préfecture de Fukushima doivent encore apporter une réponse adaptée aux inquiétudes pressantes des habitants en ce qui concerne la dose de radiation dans leur environnement, son effet sur leur santé et d’autres questions liées aux radiations. Ce que le gouvernement doit faire, c’est offrir une information détaillée aux habitants et leur fournir des éléments pour une prise de décision informée.
Il n’y a pas de consensus parmi les experts sur les effets sanitaires de l’exposition à de faibles doses de radiation, mais nous sommes d’avis que les limites devraient être fixées aussi bas que l’on peut raisonnablement le faire. Le gouvernement doit faire des efforts pour expliquer la nécessité de limites, et justifier les niveaux choisis, de manière claire et compréhensible pour les citoyens ordinaires.
Le gouvernement n’a pas encore sérieusement entrepris de programmes pour aider les gens à comprendre suffisamment bien la situation, pour qu‘ils prennent leur propre décision en connaissance de cause. Le gouvernement n’a, par exemple, pas clairement expliqué les variations de risque d’exposition aux radiations selon les diverses populations, telles que les enfants et les jeunes, les femmes enceintes, ou d’autres catégories plus vulnérables aux effets des radiations.
On a beaucoup appris avec l’accident de Tchernobyl sur l’exposition aux faibles doses, y compris le risque de cancers de la thyroïde parmi les enfants. Or, bien que les effets positifs de l’administration de comprimés d’iode et le bon moment de leur prise aient été pleinement connus, le Centre de Réponse à l’Urgence Nucléaire du gouvernement et l’Exécutif de la Préfecture n’ont pas su fournir les instructions correctes pour le public.
Un contrôle approprié de l’exposition interne du public est important pour la gestion de la santé sur le moyen et long terme. Bien que les normes aient été fixées en détail, il est plus important que le gouvernement communique par des moyens clairement utiles au public : identifier ce qui est mangeable, ce qu’est le niveau tolérable d’absorption, quels produits demeurent sains, et si les tests sont fiables.
Le gouvernement devrait répondre efficacement aux inquiétudes publiques par des inspections minutieuses et une communication transparente.
Ni le gouvernement, ni la Préfecture n’avaient préparé de plans pour recueillir des informations sur l’exposition interne au césium radioactif. TEPCO n’avait pas préparé les mesures de sûreté pour les travailleurs en cas d’accident grave, et l’information sur les doses dans l’environnement ne leur a pas été fournie immédiatement après l’accident.
Il est important que l’exposition des employés de la centrale soit contrôlée avec exactitude, assurer la sûreté des travailleurs durant la réponse à l’accident est crucial. De plus, l’exposition aux radiations n’est pas le seul enjeu sanitaire.
Les gens de Fukushima souffrent de problèmes de santé mentale, c’est devenu un problème social sérieux parmi les victimes de Tchernobyl. La Commission considère la santé mentale et physique des habitants comme une priorité majeure, et conclut à la nécessité d’une action urgente.
Les études sur les conditions de santé des habitants de Fukushima sont nécessaires, mais un système de contrôle adéquat avec des équipements de contrôle représente un besoin urgent. Des mesures doivent être prises en priorité pour la santé publique. Malheureusement, nous voyons peu de signes en ce sens.
Les problèmes à long terme d’environnement et de décontamination
Une fois que les matières radioactives sont relâchées, elles continuent à affecter l’environnement et il faut s’en occuper de manière efficace. De tous les problèmes résultant de l’accident, la Commission considère que le problème de la pollution environnementale est le moins traité. Comme le montrent les observations sur l’accident de Tchernobyl, les retombées radioactives répandues sur une vaste zone demeurent dans les zones de forêt et de montagne pendant de nombreuses années, et leur niveau ne diminue pas naturellement avant de longues décennies.
Les feux de forêt, les inondations et d’autres facteurs peuvent étendre encore la contamination. L’eau de pluie lessive les substances radioactives et provoque des zones de concentration élevées (« hotspots », « points chauds ») dans des lieux tels que les lacs. Des dépôts hautement contaminés tendent également à se former au fond de la mer. Le gouvernement devrait s’occuper rapidement de ces problèmes, avec une perspective à long terme pour corriger la situation.
Le gouvernement dépense des montants considérables d’argent et d’énergie dans des programmes de décontamination, mais des problèmes fondamentaux sont apparus dans la mise en œuvre. De nombreuses régions se sont révélées incapables de sécuriser des sites de stockage temporaires pour les débris contaminés, et ce problème a été exacerbé par l’action unilatérale du gouvernement qui a voulu faire avancer la décontamination sans avoir au préalable obtenu l’assentiment des habitants.
Il a été prouvé que plus la communication est bonne entre les exécutifs municipaux et la population, plus la communauté réussit à sécuriser les stockages de débris temporaires. La commission reconnaît que les habitants ont également des projets de décontamination différents selon la région, et il faut prendre en considération leurs demandes. Certains veulent demeurer dans leur région d’origine et soutiennent activement la décontamination ; d’autres veulent partir et demandent des compensations pour être aidés dans leur déménagement.
De nombreux habitants ont le choix et, dans ce cas, le gouvernement doit les aider à prendre des décisions informées.
Il est temps de commencer à étudier la rentabilité de la décontamination et de son effet sur l’environnement, ainsi que les méthodes utilisées dans le processus de décontamination. Sans une analyse en profondeur, les inquiétudes majeures des habitants resteront sans réponse : peuvent-ils retourner chez eux ? Si oui, quand ? S’ils retournent, pourront-ils subvenir eux-mêmes à leurs besoins ?
La décontamination ne devrait pas être traitée comme une décision unilatérale, mais doit être classée selon son efficacité. Il faut garder en mémoire que la clé des questions posées par les habitants n’est pas la décontamination, mais le fait de savoir s’ils pourront reprendre leur vie antérieure.
Le gouvernement doit continuer le processus de décontamination tout en révisant les plans pour intégrer l’expérience acquise. 5 Les problèmes organisationnels dans la prévention de l’accident et dans l’intervention
La commission a constaté divers problèmes organisationnels concernant les mesures préventives avant l’accident, les causes de l’accident et la crise de la gestion de l’intervention après l’accident. Nous avons examiné toute la chaîne des événements pour mettre en évidence ce qui a mal tourné dans les organisations et les systèmes impliqués. Nous avons également étudié la relation entre TEPCO et les agences de régulation, en vue d’une réforme future.
Questions de fond
Il y a eu beaucoup d‘occasions pour la NISA, la NSC et TEPCO de prendre des mesures qui auraient empêché l’accident, mais ils ne les ont pas prises.
Ils ont, soit délibérément reporté la mise en place de mesures de sûreté, soit pris des décisions dans l’intérêt de leur organisation ‒non dans l’intérêt de la sécurité publique. A la suite de la mise en œuvre de nouvelles régulations dans d’autres pays, des discussions ont eu lieu pour réviser les directives, afin d’inclure un scénario dans lequel l’alimentation en courant alternatif serait perdue.
La discussion a également porté sur une vérification de la fiabilité des sources de courant continu. Malheureusement, ces débats n’ont pas produit la moindre modification dans les directives ou les réglementations, et au moment de l’accident, aucune considération sérieuse n’avait été accordée à un scénario impliquant la perte du courant alternatif délivré à la centrale. TEPCO et la NISA étaient toutes deux conscientes que si le niveau du tsunami dépassait les hypothèses faites par la Société des Ingénieurs Civils (Society of Civil Engineers), il y avait un risque de dommage dans le cœur par suite d’un dysfonctionnement des pompes d’alimentation en eau de mer. Ils étaient également conscients qu’un tsunami avec des niveaux d’eau au-dessus du niveau du sol de la centrale était possible et que cela aboutirait à une perte complète de l’alimentation électrique. Bien que TEPCO et la NISA aient été conscientes des risques, rien n‘a été fait pour amender les réglementations existantes ou les aligner sur les normes internationales. La NISA n’a donné aucune instruction contraignante pour prendre des mesures spécifiques, et TEPCO n’a engagé aucune action. La NISA a bien donné instruction à TEPCO de conduire une vérification antisismique, mais en ne réalisant pas cette vérification, TEPCO a bel et bien ouvert la voie à l’accident. La NISA est également en défaut parce qu’elle ne s’est pas assuré que la vérification avait eu lieu en temps opportun, malgré la conscience qu’elle avait de l’importance de cette vérification.
La défaillance de la NISA dans la demande de mise en œuvre de cette action, et la défaillance de TEPCO à la mener à bien, constituent conjointement une négligence qui a mené à la catastrophe. Ils ne peuvent utiliser l’excuse de circonstances qui auraient dépassé leurs prévisions.
La captation de régulation de l’industrie nucléaire japonaise
Les causes fondamentales de l’accident, comprenant l’incapacité à mettre en œuvre des mesures de prévention d’un tremblement de terre et d’un tsunami, et le manque de mesures destinées à faire face à un accident grave, peuvent également être imputées à la Fédération des Compagnies d’Energie Electrique (FEPC).
C’est une association de lobbying des compagnies d’électricité, non contrôlée, qui porte donc sa part de responsabilité. Bien qu’une vigilance constante soit requise pour se maintenir au niveau des normes internationales évolutives en matière de prévention des séismes, les opérateurs électriques du Japon ont, obstinément et de façon répétée, refusé de réévaluer et d’améliorer les réglementations existantes, dont les vérifications antisismiques et la mise en conformité. L’industrie nucléaire japonaise s’est montrée inférieure à la norme globale de préparation au risque sismique et au tsunami, et n’a pas su réduire le risque d’accidents graves en adhérant à la stratégie des cinq niveaux de défense en profondeur.
L’examen par la Commission de la manière dont les régulations sont discutées et amendées révèle une relation de complaisance entre les opérateurs, les autorités de contrôle et les spécialistes universitaires, que l’ont ne peut caractériser que comme totalement inappropriée. Sur le fond, les autorités de contrôle et les opérateurs ont donné la priorité aux intérêts de leurs organisations sur la sécurité publique, et ont décidé que les opérations des réacteurs nucléaires au Japon « ne seraient pas arrêtées ». Parce que les autorités de régulation et les opérateurs assuraient systématiquement que « la sûreté de l’énergie nucléaire est garantie », ils avaient un intérêt commun à éviter que les réacteurs existants ne soient mis à l’arrêt pour des raisons de sûreté, ou que des poursuites judiciaires ne soient lancées par des militants antinucléaires.
Ils ont systématiquement évité, compromis ou reporté toute tentative d’action, et toute réglementation ou constatation qui auraient menacé le maintien en service des réacteurs nucléaires. La FEPC a été la principale organisation représentant cette position intransigeante auprès des agences de régulation et dans le monde universitaire.
Nos investigations se sont concentrées sur le rôle important de lobbying mené par la FEPC pour le compte des opérateurs, et nous avons scruté la relation entre les opérateurs et les autorités de régulation. La Commission a constaté que la relation manquait, de fait, d’indépendance et de transparence, et était très éloignée d’une « culture de sûreté ». Il s’agit d’un cas typique de « captation de régulation », où la supervision de l’industrie par les autorités de régulation cesse d’être effective.
Nous en avons trouvé des exemples dans la neutralisation des révisions du « Guide pour la conception antisismique », et dans les discussions erronées qui ont eu lieu à propos de la réglementation des mesures correctives à prendre en cas d’accident grave.
Les problèmes organisationnels de TEPCO
Cette fois encore, il nous faut pointer la mentalité organisationnelle de TEPCO comme étant l’une des causes de la catastrophe : d’une part, ils ont fortement influencé la politique énergétique et les régulations nucléaires tout en abdiquant leur propre responsabilité, et en laissant le METI prendre la responsabilité en première ligne. Mais d’autre part, ils ont également manipulé la relation de connivence avec les autorités de régulation pour affaiblir les mesures législatives et régulatrices.
TEPCO a bel et bien organisé des réunions à propos de ce qu’il envisageait comme des risques pour la production nucléaire ; de tels risques étaient définis comme la perte potentielle de confiance en son utilité de la part du public en cas de catastrophe naturelle et une diminution possible du taux d’activité des réacteurs.
Le risque d’un accident potentiellement grave n’est jamais apparu dans la liste des risques de TEPCO. TEPCO a expliqué cette omission flagrante en affirmant que la sûreté nucléaire relevait de son département sur le site de la centrale, et que par conséquent de tels risques ne devaient pas figurer dans les comptes-rendus des réunions de la Direction centrale des risques. Le risque de dommage à la santé et au bien-être publics n’était pas un problème pour TEPCO.
Comme la production d’électricité est devenue de moins en moins rentable au fil des ans, la direction de TEPCO s’est mise à insister sur la baisse des coûts et l’augmentation de la dépendance du Japon dans l’énergie nucléaire.
Tout en affirmant du bout des lèvres une politique de la « sûreté avant tout », en réalité, la sécurité est passée au second rang des priorités. Le fait que TEPCO ne disposait pas des diagrammes corrects des tuyauteries et des autres dispositifs de la centrale de Daiichi en est une illustration emblématique.
Cette absence de diagrammes corrects a constitué l’un des facteurs de retard de la ventilation à un moment crucial durant l’accident. Après l’accident, TEPCO avait la double responsabilité de contenir la situation accidentelle et de rendre compte des faits concernant l’état de l’accident pour les habitants alentour, la nation et la communauté internationale, de façon appropriée et en temps opportun.
Nous affirmons que l’information diffusée effectivement par TEPCO a été inappropriée, et que cette inadéquation a constitué elle aussi une cause indirecte de la détérioration de la situation. Par exemple, en ce qui concerne l’information sur un accroissement de la pression dans la cuve du réacteur n°2, TEPCO a diffusé un communiqué de presse à propos d’une injection d’eau de mer à 23h00 le 14 mars, mais n’a pas fait état d’un accroissement du débit de dose à l’entrée de la centrale, qui s’est produit entre 19h00 et 21h00 le même jour.
TEPCO a également minimisé la gravité de la situation concernant les dégâts dans la chambre de suppression de l’unité n°2 ; de plus, il y a eu un délai significatif entre le moment où TEPCO a informé le Kantei et le moment où elle a révélé la chose publiquement.
La Commission a également découvert un procès-verbal fait par TEPCO qui notait qu’elle n’avait pas informé le public d’une augmentation de pression dans la cuve du réacteur n°3, à 8h00 le 14 mars, parce que la NISA en avait interdit la publication. En fait, le Kantei avait simplement donné instruction à TEPCO de l’informer du contenu des communiqués au moment où ils étaient rédigés. En obéissant à l’ordre de la NISA de retenir la diffusion de cette information cruciale, TEPCO a de fait donné la priorité à ses propres intérêts et à ceux de la NISA, aux dépens du bien du public et de son droit à être informé.
Les problèmes organisationnels concernant les autorités de régulation
Avant l’accident, les corps de régulation manquaient d’une culture organisationnelle accordant la priorité à la sécurité publique sur leur propre confort d’institution, et de l’état d’esprit nécessaire à la gouvernance et à la supervision.
La Commission conclut que les failles structurelles dans l’administration du nucléaire doivent être identifiées par une investigation critique des structures organisationnelles, des lois et des réglementations, et du personnel concerné.
Nous devions identifier les secteurs nécessitant une amélioration, reconnaître les leçons à tirer et envisager les réformes nécessaires à une mise en œuvre effective de la sûreté nucléaire à l’avenir. L’autonomie et la transparence doivent être mises sur pied dans les nouvelles organisations de régulation à créer.
Elles doivent avoir des pouvoirs de supervision importants afin de contrôler correctement les opérateurs de centrales nucléaires. Un personnel nouveau avec une expertise hautement professionnelle doit être embauché et formé.
Il est nécessaire d’opérer des changements drastiques pour obtenir un « système ouvert » fonctionnant correctement. Les relations intimes qui existaient entre les régulateurs et les entités privées ne doivent plus pouvoir réapparaître.
Pour assurer que la sûreté et les systèmes de régulation du Japon se maintiennent au niveau des normes internationales, il est nécessaire d’en finir avec les vieilles attitudes qui ont été complices de l’accident qui s’est produit.
6 Le système législatif
La Commission a enquêté sur le besoin d’une réforme fondamentale des lois et des réglementations concernant l’énergie nucléaire. Elle a exposé les grandes lignes de la nécessité de préparer une structure organisationnelle qui assurerait des processus de décision sains pour la mise en œuvre de lois et de réglementations sur le nucléaire.
Lois et réglementations pour l’énergie nucléaire
La Commission a constaté qu’avant l’accident, la révision et l’amendement de lois et de réglementations n’étaient entrepris que sur une base disparate, en réponse à des préoccupations minuscules. La volonté d’opérer des changements importants et significatifs pour rester à niveau avec les normes de la communauté internationale faisait profondément défaut. Au moment de l’accident, les lois, les réglementations et l’infrastructure reposaient sur l’hypothèse que l’étendue et l’ampleur de catastrophes naturelles éventuelles n’excèderaient pas ce qui s’était déjà produit. On n’a pas su prendre en compte la perspective d’événements sans précédents tels que le tremblement de terre et le tsunami du 11 mars 2011, alors que l’éventualité de tels événements était connue. Ceux qui étaient en charge des lois et des réglementations qui présidaient au fonctionnement de l’industrie nucléaire au Japon avaient un état d’esprit dogmatique qui a empêché de suivre l’évolution des lois, des normes et des pratiques internationales, et qui a ignoré des conseils technologiques pertinents et des améliorations venant de l’étranger. Il en est résulté qu’au moment de l’accident, les lois et les réglementations gouvernant l’industrie nucléaire au Japon étaient dépassées par rapport celles des autres pays, et dans certains cas, obsolètes.
Avant l’accident, l’objectif premier des lois et des réglementations sur le nucléaire était la promotion de l’énergie nucléaire.
Les lois doivent être refondues en mettant l’accent avant tout sur la sûreté, la santé et le bien-être publics. Les rôles, les responsabilités et les relations entre les opérateurs, les autorités de régulation et les autres entités concernées doivent être clairement délimités dans la Loi sur les Mesures spéciales concernant la préparation à l’Urgence nucléaire.
La protection en profondeur doit être formellement ancrée dans les réglementations, pour qu’elle fonctionne correctement si le besoin s’en fait sentir à l’avenir. L’accident a mis en lumière la nécessité d’une réforme profonde et fondamentale des lois et des réglementations pour les amener au niveau des normes internationales, pour utiliser le savoir technologique de pointe et apprendre des autres accidents survenus dans le monde.
Il est nécessaire de créer un système dans lequel les régulateurs ont l’obligation permanente de s’assurer que les lois et les réglementations reflètent les changements dans les normes internationales. Un mécanisme de suivi de la mise en place des infrastructures nécessaires doit être mis au point. Une fois que ces nouveaux systèmes, ces nouvelles lois et réglementations auront été créés, ils doivent être rétroactivement appliqués aux réacteurs existants. Il doit être explicitement précisé dans les lois que les réacteurs qui ne répondent pas aux nouveaux standards devraient être désaffectés ou traités de façon appropriée.
Annexes
Enquête sur les personnes évacuées suite à l’accident de la centrale nucléaire de Fukushima L’enquête a eu 10 633 réponses, soit un taux de réponse d’environ 50 pour cent. Parmi celles-ci, 8 073 personnes interrogées ont écrit des commentaires dans l’espace de commentaires libres. De plus, 431personnes interrogées ont écrit sur le recto et le verso de la feuille d’enquête et/ou ont écrit d’autres commentaires sur des documents distincts, exprimant ainsi leur forte volonté de se faire entendre.
- Le retard du gouvernement à communiquer des informations sur l’accident a provoqué de la confusion par la suite.
* Parce que les instructions pour l’évacuation ont été faites au coup par coup, de nombreuses personnes ont été évacuées plusieurs fois, évacuées vers des zones à fortes radiations, et évacuées avec seulement le strict nécessaire.
- Des messages de détresse émanant de personnes évacuées nous ont été adressés Les problèmes ne sont pas encore résolus. Des mesures appropriées devraient être envisagées dans les plus brefs délais.
Communication d’informations sur l’accident
- La connaissance de l’accident était extrêmement faible chez les habitants, malgré la communication d‘informations conformément à l’Article 10 à 15h42 le 11 mars, la divulgation d‘un rapport conformément à l’Article 15 à 16h45, et la déclaration de l’état d’urgence à 19h03.
- Il y avait des différences significatives dans la vitesse de transmission des informations sur l‘accident dans les zones d‘évacuation, en fonction de la distance de la centrale.
- Les municipalités et la police ont été les sources d‘information sur l‘accident pour 40% des habitants de Futaba et Naraha, mais seulement pour 10% des habitants de Minamisoma, Iitate, et Kawamata.
Ordre d’évacuation
Les habitants ont été informés de l’accident quelques heures après qu‘il est survenu, mais ils n’ont reçu aucune information sur la situation ou qui aurait été utile pour leur évacuation. En conséquence, de nombreux habitants n’ont pu partir qu‘avec le strict nécessaire.
Évacuations volontaires
- A l‘intérieur de la zone de 30 km de rayon, l’ordre de se calfeutrer dans les habitations a été émis à 11h00 le 15 mars et l’appel pour les évacuations volontaires a été émis le 25 mars. Cependant, comme le gouvernement a été lent à donner des instructions, de nombreux habitants ont évacué de manière volontaire.
- Même s’il était évident qu’il y avait des niveaux de radiations élevés dans Iitate et Kawamata, les évacuations planifiées ne l‘ont été que tardivement. Le gouvernement a peut-être tardé à désigner les zones à évacuer qui avaient des niveaux élevés de radiations.
- Évacuations vers des zones ayant des niveaux élevés de radiations
- Environ 50 % des habitants de Namie ont temporairement évacué vers des zones avec des concentrations élevées de radiations.
- Le gouvernement a tardé à divulguer des informations de surveillance.
Expansion des zones évacuées et évacuation progressive
- Plus de 70 % des habitants des zones près des centrales de Fukushima Daiichi et de Fukushima Dai-Ni (Futaba, Okuma, Tomioka, Naraha, Namie) ont été évacués plus de quatre fois. Il y a eu de nombreuses plaintes concernant des ordres d’évacuation qui ont contraint les habitants vivant le plus près des centrales nucléaires à évacuer de nombreuses fois. Consignes en cas d’accident
- Même à la centrale, il y a eu peu d’explication de la possibilité d’un accident nucléaire. Moins de 15% des habitants ont déclaré avoir reçu une formation à l’évacuation en cas de catastrophe nucléaire et moins de 10% des habitants ont indiqué avoir reçu des explications quant à la possibilité d’un accident nucléaire.
Résultats du sondage
- Ce sondage a été envoyé aux citoyens qui ont été forcés d’évacuer à la suite de cet accident.
Objectif : Comprendre la réalité de la façon dont l’évacuation a été ordonnée et la manière dont les risques de l’énergie nucléaire ont été expliqués.
Méthode : Enquête postale.
Durée : du 15 mars au 11 avril 2012.
Population cible : 21 000 foyers sélectionnés au hasard dans 12 villes, bourgs et villages
(pour un total de 55 000 foyers) dans les zones d‘évacuation.
Villes et villages interrogés : Futaba, Okuma, Tomioka, Naraha, Namie, Hirono, Tamura, Minamisoma, Kawauchi, Katsurao, Kawamata, Iitate. Total des personnes interrogées : 10 633.
La Commission tient à exprimer ses remerciements aux nombreuses personnes qui ont coopéré à cette enquête. Le taux de réponse a été extrêmement élevé : 50 %. Sur les 10 633 personnes interrogées, 8 073 (76%) ont fourni des commentaires dans l’espace de commentaires libres. De plus, 431 personnes interrogées ont écrit sur le recto et le verso de la feuille d’enquête et/ou ont écrit d‘autres commentaires sur des documents distincts, exprimant ainsi leur forte volonté de se faire entendre. Retard dans la communication de l’information
La connaissance de l’accident a été extrêmement faible parmi les habitants évacués malgré la communication d‘informations conformément à l’article 10 à 15h42 le 11 mars, la divulgation d‘un rapport conformément à l’article 15 à 16h45, et la déclaration de l’état d’urgence à 19h03. Il y avait des différences significatives dans la vitesse de transmission des informations sur l‘accident dans les zones d‘évacuation. Les municipalités, le système radio d‘urgence ou la police ont été les sources d‘information sur l‘accident pour 40% des habitants de Futaba et Narahamachi, mais seulement pour 10% des habitants de Minamisoma, Iitate, et Kawamata.
Heure de l’ordre d’évacuation et sources d’information
Quelques heures après que l’ordre d’évacuation ait été émis, les municipalités ont communiqué l’ordre d’évacuation aux habitants, montrant qu’il y avait un haut niveau de communication entre les municipalités et les habitants.
Cependant, comme il y avait des zones dans lesquelles les municipalités n’ont pas reçu les ordres d’évacuation du gouvernement, il y a eu des problèmes majeurs dans le processus de transmission de l’ordre d’évacuation du gouvernement aux municipalités.
Les habitants ont reçu l’ordre d’évacuation, mais ils n’ont pas reçu d’informations sur la situation ou l’accident qui aurait été utile à leur évacuation.
En conséquence, de nombreux habitants sont partis avec seulement le strict nécessaire. Beaucoup d‘habitants ont reçu des informations des municipalités. Un pourcentage élevé d‘habitants de Minamisoma, Kawamata et Iitate ont reçu des informations de la télévision, la radio ou l’internet.
▲ Quand avez-vous appris l’accident à Fukushima Daiichi ?
(i) Commentaire d’un habitant de Futaba:
« J’ai quitté ma maison avec seulement le strict nécessaire. J’ai appris où aller par le système radio d‘urgence alors que j’étais sur la route. Je suis arrivé au premier site d‘évacuation où il m‘avait été indiqué d‘aller, après 6h de voiture au lieu d‘une heure seulement en temps normal. En chemin, mon fils qui vit loin m‘a appelé et m’a dit que je ne devais pas m‘attendre à revenir bientôt. C’est alors seulement que j‘ai commencé à comprendre peu à peu ce qui était en train de se passer réellement. C’est ce que je me rappelle. Pouvez-vous imaginer à quoi ressemble la vie quand vous êtes déplacés et séparés de vos amis et des gens que vous connaissez ? »
▲ Source d’information à propos de l’accident
▲ Pourcentage d’habitants qui savaient à propos de l’évacuation
▲ Source d’information à propos de l’ordre d’évacuation
(ii) Commentaire d’un habitant d’Okuma :
« S’il y avait ne serait-ce qu‘un mot au sujet d’une centrale nucléaire lorsque l’évacuation a été ordonnée, nous aurions pu réagir raisonnablement, prendre nos objets de valeur avec nous ou fermer la maison avant de partir. Nous avons dû courir avec rien d’autre que les vêtements que nous avions sur nous. C‘est une telle déception à chaque fois que nous sommes brièvement autorisés à rentrer chez nous simplement pour découvrir que nous avons été cambriolés à nouveau. »
(iii) Commentaire d’un habitant de Tomioka :
« Nous aurions voulu entendre clairement que nous ne serions pas en mesure de revenir pour un certain temps. Je n‘ai pas pu amener mes objets de valeur avec moi. En particulier, parce que les dossiers médicaux ont été laissés à la maison, la santé de mes parents s’est aggravée pendant l’évacuation. Il est difficile, surtout pour les personnes âgées, de fuir à l‘improviste. Je n’ai pas d’attaches à Tomioka parce que nous louions seulement la maison, mais si nous ne pouvons pas vivre dans le logement temporaire pour toujours, nous allons perdre un endroit pour vivre de façon permanente. Il y a d’autres problèmes aussi. Donc, je veux bénéficier de l‘aide sociale à nouveau. Ce n’était pas le personnel de l’administration préfectorale ou de la mairie qui était là pour nous guider lors de l’évacuation, c‘étaient les travailleurs des services médicaux qui d‘habitude voyaient mon père. Il a fallu une demi-journée pour savoir où il avait été emmené. Il a fallu trop longtemps pour créer une liste de personnes évacuées. »
(iv) Commentaire d’un habitant de Namie :
« J’ai réussi à passer une nuit dans une école primaire du quartier de Tsushima après avoir entendu l‘annonce dans le gymnase, dans la matinée du 12 mars, qu‘un tsunami approchait de l‘école primaire de Namie-Higashi, au lieu d’être informé de l’accident survenu à la centrale nucléaire. Si on m’avait informé précisément de l’accident, j’aurais évacué plus loin que Tsushima. Il est décevant que information n’ait pas été donnée. »
(v) Commentaire par un habitant d’Odaka de Minamisoma :
« Nous ne savions pas qu‘il y avait eu une explosion d’hydrogène à la centrale, nous ne pouvions pas deviner pourquoi nous avons dû évacuer. Le directeur (de TEPCO) à l‘époque de l’accident s‘est rappelé à la télé qu’il pensait qu’il pouvait mourir à ce moment-là, mais ce genre d’information aurait dû être annoncé aux habitants vivant à proximité instantanément. En tout état de cause, l’information à été diffusée trop lentement. Les habitants n’ont pas été traités correctement. »
Temps d’évacuation
• Quelques heures après que l’ordre d’évacuation ait été émis, la plupart des habitants (80-90%) dans les zones d‘évacuation ont commencé à évacuer.
• Dans la zone de 30 km entourant la centrale nucléaire, les habitants n’ont pas eu d‘autre choix que d‘évacuer volontairement. Même si un niveau élevé de radiations a été observé dans Kawamata et Iitate, la décision de l‘évacuation planifiée de la zone a été retardée.
• A l‘intérieur de la zone de 30 km de rayon, l’ordre de se calfeutrer dans les habitations a été émis à 11h00 le 15 mars, et l’appel à évacuer volontairement a été émis le 25 mars. Cependant, comme le gouvernement a été lent à donner des instructions, de nombreux habitants ont évacué de manière volontaire.
• Même s’il était évident qu’il y avait des niveaux de radiations élevés dans Iitate et Kawamata, les évacuations planifiées ne l‘ont été que tardivement. Le gouvernement a peut-être tardé à désigner les zones à évacuer qui avaient des niveaux élevés de radiations.
• Dans l’espace pour les commentaires, certains habitants de ces zones ont critiqué la lenteur du gouvernement à délivrer l’ordre d’évacuation ou même l’absence de cet ordre pour leur zone.
(i) Commentaire d’un habitant de Minamisoma:
« A Haramachi dans Minamisoma, on nous a dit de « rester à la maison », et on ne nous a pas dit, même une seule fois d’évacuer. À la télévision, tout ce qu’ils ont dit était qu‘il n’y a pas d’effets immédiats sur la santé », ce qui nous a fait encore plus peur. Rien n’a changé depuis que l’accident est survenu. Quand il y a très peu de progrès en matière de décontamination, il est trop étrange que l’ordre d’évacuation soit déjà levé. Le gouvernement devrait penser davantage aux populations locales. » (i) Commentaire d’un habitant de Kawauchi (zone des 20 km-30 km):
« Le 11 mars, immédiatement après avoir entendu les premières informations sur l’accident, de nombreuses personnes dans le village ont évacué vers cette zone. Les jeunes s‘envoyaient des emails «évacuez» les uns aux autres, presque comme une chaîne d‘emails. Cependant, nous n’avons reçu aucune information officielle sur l‘évacuation. On nous a seulement dit de rester à l’intérieur par l’intermédiaire du système de radio d’urgence. Après avoir entendu un voisin qui a un policier dans sa famille dire : « Je vais évacuer car cela semble dangereux », j’ai décidé d’évacuer. J’ai entendu dire que la police était partie de Kawauchi le 14 mars. Les bénévoles qui donnaient de la nourriture ont utilisé l’essence restante pour leur transport. Je voulais qu’ils nous aident à évacuer le plus tôt possible. Je ne peux que penser qu’ils nous ont abandonnés. »
▲ Quand avez-vous commencé à évacuer ?
▲ Pourcentage d’habitants qui ont évacué volontairement
(iii) Commentaire d’un habitant d’Iitate:
« Cette région n’a reçu aucune information dans les premières phases de l’accident nucléaire. Nous avons entendu parler du niveau de radiations seulement après que l’équipe de recherche de l’AIEA est venue. M. Edano, le secrétaire général du gouvernement, a dit à plusieurs reprises à la télévision que le niveau de radiations « n’aura pas d‘effets immédiats sur la santé ». La réalité est que les habitants d‘Iitate ont été exposés à des radiations jusqu’au 22 avril (lorsque l’évacuation planifiée a été ordonnée). Cela fait maintenant une année, mais nous n’avons reçu aucune indemnisation des dommages et le gouvernement essaie de se couvrir par la levée des ordres d’évacuation. »
(iv) Commentaire d’un habitant de Hirono:
« Parce qu’ils pourraient paniquer… Parce que les personnes dans les zones plus dangereuses ne seraient pas en mesure d’évacuer… Comment la zone d’évacuation a été étendue à 10 km de diamètre par la suite au lieu de 5 km dans la phase initiale… Alors que nous n’avions que la télévision comme source de renseignement, sans informations précises ou d’idée de la façon dont l’accident allait évoluer, le ministre responsable continuait de déclarer « cela n’affectera pas la santé immédiatement… ». TEPCO ne cessait de parler de la sécurité et de la fiabilité des réacteurs … Je suis dégoûté de la faible qualité des personnes en charge de ce pays. »
(v) Commentaire d’un habitant de Kawamata:
« Ils disaient qu’il n’y a pas d’effet immédiat, mais l’évacuation a été ordonnée le 16 avril. S‘ils l‘avaient ordonnée plus tôt, j’aurais pu trouver un lieu spécifique pour évacuer. Bien que ce fut un désastre immense, la réponse a été trop lente. La réponse initiale la plus importante, basée sur l ‗analyse de la situation réelle n’a pas été apportée et aucun ordre basé sur des mesures appropriées n‘a été donné.
J‘exige la préparation aux situations d‘urgence. Tout ce que j‘ai vu étaient des politiciens faisant de la politique politicienne, alors que la nation est confrontée à un désastre sans précédent. Je m’interroge sur l’humanité de ces gens. Il est regrettable que ce soit la nation qui ait mis ces personnes aux responsabilités. »
► Réunion avec des habitants de Kawamata-machi
Des habitants ont évacué vers des zones qui devinrent plus tard des zones d’évacuation
• Environ 50 pour cent des résidents de Namie ont temporairement évacué vers des zones avec des concentrations élevées de radiations…
▲ Pourcentage d’habitants qui ont évacué vers des zones qu’ils ont dû ré-évacuer plus tard à cause de hautes concentrations de radiations. I
Insatisfaction à propos de la communication de renseignements à partir de SPEEDI ou de données de surveillance
• De nombreux commentaires des habitants de Namie, Minamisoma, et Iitate ont témoigné du mécontentement sur la communication d’informations à partir de SPEEDI ou de données de surveillance.
(i) Commentaire d’un habitant de Namie:
« Le fait que j‘ai évacué vers la zone la plus irradiée en l’absence d‘informations de SPEEDI demeure une source de crainte pour ma santé pour le reste de ma vie. Pourquoi n’ont-ils pas divulgué les informations SPEEDI? Que pensent-ils de la vie des gens ? Notre maison n‘est plus habitable en raison de difficultés dans la reconstruction des infrastructures, la décontamination et la peur d’avoir une installation de stockage provisoire à proximité. L’énergie nucléaire doit être arrêtée. Elle causera un second Fukushima et il n‘y aura nulle part où vivre au Japon. »
(ii) Commentaire d’un habitant de Minamisoma:
« J‘aurais aimé que l’information soit divulguée beaucoup plus tôt. Je comprends que la décision du gouvernement de ne pas divulguer visait à empêcher une possible panique. Mais les habitants ont été évacués vers des zones très irradiées en raison du manque d’informations. A partir de maintenant, les causes de l’accident doivent être étudiées et un manuel de mesures d‘intervention doit être mis en place, parce que nous ne savons pas quand
le prochain accident se produira. J‘exige qu‘on mette en œuvre des méthodes pour réduire les dommages d‘un accident, étant donné qu’il est difficile de l’empêcher. »
(iii) Commentaire d’un habitant de Iitate :
« Je crois que beaucoup de gens ont été exposés à des radiations à cause de la réponse inadéquate à l‘accident donnée par le gouvernement et les municipalités. Les données ont été effacées et des instructions trompeuses ont été données alors même qu’ils étaient au courant de la situation réelle. Ont- ils vraiment du respect pour nos vies ? Notre famille a déneigé à l’extérieur de notre maison et a été mouillée parce que nous ne savions rien des radiations. Nous exigeons l’indemnisation des dommages et des problèmes de santé au cours des prochaines décennies. Qu’est-ce que les membres du NAIIC pensent des mensonges qui sont révélés plus d’une année après l’accident ? »
Nombres d’évacuations
• Dans l’année après les accidents, les résidents les plus proches de la centrale ont dû évacuer un certain nombre de fois. Environ 70% des résidents de Futaba, Okuma, Tomioka, Naraha et Namie ont dû évacuer quatre fois ou plus.
• Le gouvernement a tardé à divulguer des informations de surveillance.
▲ Nombre d’évacuations avant fin mars 2012
(i) Des habitants de Namie:
« Même si nous revenons à Namie, les tuiles du toit sont tombées et la pluie contaminée est tombée à l‘intérieur. Ce ne sont pas des conditions dans lesquelles nous pouvons vivre. Chaque fois que j‘y retourne, je suis en colère. Notre plus jeune fils dit aussi qu’il est désormais impossible pour nous de vivre ici. L‘après-midi du 11 mars, quand nous étions sur le point de réparer le toit, on nous a dit d’évacuer à la salle de gym de l’école à proximité de Tsushima. Nous sommes restés à l’école pendant 3 ou 4 jours. C’était un endroit avec des niveaux élevés de radiations. Nous avons déménagé six fois à l’intérieur et à l’extérieur de la préfecture et nous nous sommes finalement arrêtés après être venu ici. » (Nihonmatsu)
(ii) Commentaire d’un habitant de Futaba:
« Le 12 mars, notre hôtel n’avait pas d’électricité ni d’eau. Nous avons été autorisés à rester dans un ancien hôtel et ils ont partagé avec nous l’essence. Notre fils habite dans la préfecture de Saitama et il nous a laissé habiter là pendant quatre mois. Actuellement, nous vivons ensemble comme une famille de quatre personnes. Lorsque nous avons visité notre maison brièvement le 6 mars, mon mari a eu un choc quand il a réalisé qu’il ne pourrait pas retourner dans la maison où il est né et est actuellement à l’hôpital. Nous sommes frustrés par l’irresponsabilité et le déshonneur de la politique de ce pays et de TEPCO. »
▲ Pourcentage d’habitants qui ont eu un entraînement à l’évacuation avant l’accident nucléaire
(iii) Commentaire d’un habitant de Tomioka:
»Nous n’avions aucune idée de ce qui se passait, mais on nous a dit d’évacuer à Kawauchi. Quand nous sommes arrivés là, nous avons dû déménager d’un endroit à l’autre et sommes finalement arrivés à Miharu, mais on nous a dit que c‘était plein. On nous a dit d’aller vers le centre d’évacuation de Motomiya. Nous avons ensuite déménagé à plusieurs reprises et sommes actuellement dans une location à Iwaki. Depuis, un an s’est écoulé, mais nous n’avons aucune idée de ce que nous allons faire. »
Habitants avertis de la possibilité d’un accident ou qui ont reçu un entraînement à l’évacuation avant l’accident
• Même dans des endroits proches de l’usine, seulement 10-15% des habitants ont déclaré avoir reçu une formation à l’évacuation, et moins de 10% ont été informés de la possibilité d’un accident nucléaire.
• Certains ont déclaré qu‘on leur a expliqué que les centrales nucléaires étaient totalement sûres, et ont ainsi pensé qu‘un accident ne se produirait jamais.
(i) Commentaire d’un habitant de Futaba:
« J’ai assisté à une conférence donnée par TEPCO une fois. Mentionnant l’exemple du 11 septembre aux Etats-Unis, ils ont dit que les centrales nucléaires sont sûres, quoi qu‘il arrive. Lorsque j’ai posé une question pour reconfirmer la sécurité absolue, les participants à la conférence, dont beaucoup sont des parents des employés de TEPCO, me regardèrent comme si je n‘avais rien compris de ce que TEPCO nous avait dit. Les attitudes et les réactions de TEPCO et du gouvernement, qui semblent penser si peu à nous, me mettent en colère plutôt que triste. Je demande une réponse plus rapide et plus sincère. »
(ii) Commentaire d’un habitant d’Okuma:
« Je travaillais dans une centrale nucléaire et je n’ai jamais pensé à un tel accident. Quand j‘ai travaillé comme sous-traitant pour TEPCO au premier étage, j’ai demandé à un chef d’équipe « Et si un tsunami semblable à celui de Sumatra frappe le Japon? » La réponse fut, « Impossible ! Il n’est pas nécessaire de penser à une situation impossible ». Après tout, TEPCO, le gouvernement, et la municipalité n‘ont pas réfléchi sérieusement. Moi non plus. »
(iii) Commentaire d’un habitant de Naraha:
« Lorsque j’ai assisté à une conférence de TEPCO pour les habitants proches de la centrale, peu de temps après que la société ait cachée un accident au public, TEPCO a déclaré qu’ils avaient non seulement les 3 premières couches de protection, mais aussi les 4ème et 5ème couches de mesures de sécurité, de telle manière que les participants ne comprenaient pas ce que cela signifie d’avoir tant de couches de sécurité. Maintenant je me rends compte que tout ce que TEPCO a expliqué était des mensonges, et que j‘ai été trompé. »
▲ Pourcentage d’habitants ayant été informés de la possibilité d’un accident nucléaire avant le 11 mars
(iv) Commentaire par un résident de Tamura:
« Ils n‘arrêtaient pas de dire que les centrales nucléaires sont absolument sans danger puis l’accident est arrivé. Si toutes les personnes impliquées pensent l’accident comme un simple « accident imprévisible » alors ce pays doit être très négligent. Les causes doivent être trouvées et clarifiées. Cet accident ne doit jamais se répéter. Je veux franchement donner des conseils aux membres du Parlement. Ils sont censés veiller à la vie quotidienne de la nation et à la reconstruction, mais ils sont préoccupés par des batailles politiques. Alors que l’enquête sur l’accident doit être approfondie, le Parlement doit avoir une discussion approfondie pour la nation. »
(v) Commentaire d’un résident de Katsurao:
« Nous étions habitués à regarder des publicités TV tous les jours affirmant que l‘énergie nucléaire coûtait moins cher, était sûre et propre. Avec de vifs souvenirs d’un tel message, nous ne pouvions pas croire que l’accident s’était produit, comme nous ne pouvions imaginer qu‘un tsunami apporte la tragédie. Nous vivons encore dans un étroit logement temporaire après plus d’un an. Nous n’avons aucune idée du moment où nous pourrons revenir à la maison. Nous sommes absolument opposés à la remise en service des réacteurs. Aucun nouveau réacteur ne doit être autorisé et nous devons passer aux énergies renouvelables. Des lois et règlements concernant de tels plans doivent être mis en place rapidement. Le gouvernement devrait accélérer l’indemnisation des dommages de l’accident. Ce n’est pas comme l‘indemnisation d‘un accident de la circulation… Je suis fatigué de mes conditions de vie actuelles. J‘exige que le gouvernement prenne sa responsabilité et mette tous les efforts pour indemniser les victimes. Je compte sur le gouvernement. »
Messages extraits des commentaires libres |
Nombre de commentaires |
% du total |
Les causes de l’accident doivent être investiguées dés que possible et les résultats divulgués intégralement. Demande d’une enquête approfondie afin de ne jamais laisser se reproduire un accident similaire. |
1 120 |
14% |
Les informations et le comportement du gouvernement ne sont pas fiables et ne sont pas dignes de confiance |
909
|
11% |
Insatisfaction des demandes d’indemnisation. |
876
|
11% |
Insatisfaction ou demande concernant le calendrier d’indemnisation (besoins urgents, etc.) |
204
|
3% |
Insatisfaction ou demande concernant les conditions d’octroi de l’indemnisation (écarts selon les régions, l’âge, le statut d’emploi, etc.) |
203
|
3% |
Insatisfaction ou demande concernant les termes de l’indemnisation (extension de la période d’indemnisation, accorder une indemnisation à vie, indemnisation jusqu’au retour, etc.) |
182
|
2% |
Insatisfaction ou demande concernant le montant de l’indemnisation |
93
|
1% |
Insatisfaction ou demande concernant le périmètre d’indemnisation (mobilier de la maison, cultures agricoles, les coûts d’évacuation, les pertes sur les profits futurs, etc.) |
46
|
1% |
Demande de décontamination rapide pour permettre le retour dans nos maisons et nos quartiers |
858
|
11% |
Besoin de précisions quant au moment où la situation va redevenir sûre à nouveau et où les habitants pourront rentrer chez eux en toute sécurité. (Besoin d’information dés que possible si le retour sera autorisé un jour. Sinon, il n’y a pas moyen de planifier l’avenir.) |
836
|
10% |
Le suivi des mesures prises en urgence est lent. Aucun progrès n’a été fait même un an après l’accident. Besoin d’orientation le plus tôt. |
820
|
10% |
Les informations et le comportement de TEPCO ne sont pas fiables et ne sont pas dignes de confiance |
628
|
8% |
Exiger que l’État assume sa responsabilité. Forte rancœur envers le gouvernement. |
610
|
8% |
Exigez que TEPCO assume sa responsabilité. Forte rancœur envers TEPCO. |
558
|
7% |
Le gouvernement ne comprend pas la réalité et la situation des personnes évacuées. Il doit en savoir plus sur nous. |
544
|
7% |
Pas de maison, pas de ville ou retourner. Demande pour qu’une ville ailleurs soit rapidement désignée comme un lieu habitable (Aucune intention d’abandonner les villes natales mais il n’y a plus de possibilité d’y retourner) |
541
|
6% |
Il avait été dit aux habitants que les centrales nucléaires étaient sûres et en sécurité. Ils croyaient qu’un tel accident ne se produirait jamais. |
482
|
6% |
Je ne peux pas m’empêcher de ressentir de l’anxiété au sujet des enfants et de l’avenir. Je n’ai aucune idée comment on est censé vivre comme cela. |
445
|
6% |
Les ordres d’évacuation ont été lents, il n’y avait pas d’ordre d’évacuation ou l’ordre était incompatible avec ce qui était dit par les médias. |
375
|
5% |
Les ordres d’évacuation n’étaient pas spécifiques. Nous avons eu à courir avec à peine plus que nos vêtements sur nous et n’avons jamais pensé à un accident nucléaire qui se déroulait |
364
|
5% |
Demande d’indemnisation rapide et suffisante pour la terre et la maison (mise à disposition d’une nouvelle maison, réparations ou rachat de la maison existante). |
344
|
4% |
Constamment soumis au stress du à l’environnement inconnu, la vie de réfugié prolongée, se sentant inquiet au sujet de l’avenir, etc. Souffrant d’une mauvaise santé à cause du stress. |
334
|
4% |
|
|
|
Version française du résumé du rapport de la NAIIC – Editions de Fukushima – Novembre 2012
Les familles sont séparées. Nous ne nous voyons plus beaucoup et nous nous manquons les uns les autres. |
290
|
4% |
Souhaits de prompt rétablissement de la vie que nous avons eue. Souhaits de«restaurer» la vie ordinaire. |
278
|
3% |
Demande pour une réduction progressive du nombre de centrales nucléaires. Souhaits pour une éventuelle élimination de toutes les installations nucléaires, et pour une transition vers les énergies renouvelables. Demande pour l’élimination des centrales nucléaires pour assurer une vie sûre et sécurisée. |
276
|
3% |
Évacuation vers des zones où les radiations étaient élevées. Les informations de SPEEDIauraient du être divulguées immédiatement. |
201
|
2% |
La décontamination demandera un immense budget et du temps. Elle doit être effectuée sur la base de décisions bien planifiées. |
177
|
2% |
Demande de clarification de qui est responsable. |
172
|
2% |
Sentiment de peur que la santé pourrait être affectée négativement par les radiations, et que la santé puisse se détériorer une fois un médicament ou un traitement ambulatoire arrêté. |
165
|
2% |
TEPCO ne comprend pas la réalité de la situation et des personnes évacuées. Ils doivent en savoir plus sur nous. |
162
|
2% |
Besoin de précisions sur ce que nous devrions faire. Demande pour une sortie de la situation actuelle et pour s’installer. |
161
|
2% |
Peur que la santé des enfants et des enfants à naître pourrait être affectée par l’exposition aux radiations. (Également préoccupé par la baisse de la force physique et par la croissance des enfants.) |
154
|
2% |
Famille, amis et voisins sont séparés. Perte de contact et sentiment de séparation. |
137
|
2% |
Chômage en raison de la perte du lieu de travail. Aucun revenu et lutte pour survivre. (L’agriculture était le moyen de subsistance historique mais est maintenant impossible.) |
132
|
2% |
À cours d’argent pour vivre. Impossible de vivre décemment. Besoin urgent d’indemnisation pour couvrir les coûts de la vie. |
121
|
1% |
Des exercices d’évacuation ont été effectués régulièrement mais n’ont jamais été basés sur un accident comparable (accident nucléaire ajouté à une catastrophe naturelle). |
119
|
1% |
La conception de la centrale pourrait ne pas avoir pris un tsunami en compte. Il avait été dit à maintes reprises que de multiples couches de mesures de sécurité ont été mises en oeuvre ce qui était rassurant. |
116
|
1% |
Très triste de voir la patrie familière contaminée par les radiations. Sentiment de s’enliser de jour en jour, aucune joie, aucun espoir. |
111
|
1% |
Très déçu de ne pas être en mesure de profiter d’une retraite confortable après l’accident. Frustrant de se demander pourquoi l’on doit mener une telle vie. |
97
|
1% |
Les refuges (qui sont loués ou mis temporairement à disposition) sont médiocres et inconfortables (obsolètes, petits, incommodes, etc). Nous voulons un nouvel environnement mis en place rapidement. |
92
|
1% |
Demande de réparation des infrastructures communautaires (« lifeline », systèmes de transport, installations et services) immédiatement pour que les gens puissent y vivre. |
80
|
1% |
Demande d’indemnisations complètes lorsque les maladies se développeront à la suite de l’exposition aux radiations. Les indemnisations devraient également couvrir les pertes non économiques. |
69
|
1% |
Forcé de déménager dans plusieurs refuges et forcés d’évacuer à plusieurs reprises. |
61
|
1% |
Les déménagements dans les sites d’évacuation ont pris du temps en raison de la congestion du trafic et des conditions routières. |
56
|
1% |
|
|
|
Version française du résumé du rapport de la NAIIC – Editions de Fukushima – Novembre 2012
Les mesures préventives n’ont pas été effectivement réalisées parce que les événements étaient au-delà de ce qui était prévu et, de ce fait, les réponses d’urgence, les décisions et les actions étaient en retard par rapport à ce qui était nécessaire. |
55
|
1% |
Le manque de fournitures de secours et d’information ont été extrêmement limités après l’évacuation. |
55
|
1% |
Demande pour que le système scolaire, les médias et les autres prennent leur responsabilité. |
49
|
1% |
Les véhicules privés ont été utilisés mais la rareté de l’essence à rendu l’évacuation difficile. Certains n’ont pas pu évacuer correctement |
44
|
1% |
L’évacuation était difficile voire impossible en raison de l’âge, maladie, etc. |
41
|
1% |
Demande pour la recherche rapide et la fourniture d’un lieu (terrain et maison) pour vivre sans danger et en toute sécurité. |
41
|
1% |
Demande de savoir pour combien de temps le logement loué ou le refuge sont prévus. Besoin de savoir s’il y a une autre place disponible si nous avons besoin de partir. |
36
|
0,40% |
Il n’y avait pas de route d’évacuation. Le seul chemin était encombré ce qui a empêché une évacuation sans heurts. |
27
|
0,30% |
Il aurait fallu des mesures efficaces d’intervention d’urgence, communication des risques, préparation de routines, l’attitude, etc. Des informations et mesures d’évacuation précises auraient pu éviter la panique et la confusion. |
24
|
0,3 |
Il est difficile de s’entendre et de construire des relations avec les gens dans le nouvel environnement. Se sentir isolés et seuls sur le site des réfugiés. |
24
|
0,30% |
Envie d’un rayon d’espoir parmi les évacués. Envie d’être engagé à faire quelque chose pour l’avenir. |
24
|
0,30% |
Demande pour une fréquence accrue de brèves visites à la maison. Demande pour des visites plus fréquentes (Par exemple, une fois par mois) |
22
|
0,20% |
A perdu un membre de la famille ou un ami pour cause de maladie résultant de la fatigue suite à l’évacuation ou à cause du stress de la vie de réfugié. |
18
|
0,20% |
Évacués en bus parce que les voitures privées ont été interdites pour les évacuations, la raison pour cela n’a jamais été expliquée. |
17
|
0,20% |
Il est triste et difficile d’être victime de discrimination, de préjugés et de malentendu seulement au motif d’être un évacué (ou d’être quelqu’un de Fukushima). Honte sur le site des réfugiés. |
17
|
0,20% |
Demande d’indemnisation pour chercher un futur emploi ou aide pour trouver un emploi. (En raison du déplacement, trouver un emploi est difficile.) |
13
|
0,20% |
Il n’y a pas eu d’instruction de porter un masque ou des vêtements de protection. |
12
|
0,20% |
Les hôpitaux ont connu des difficultés à évacuer. |
10
|
0,10% |
Demande de sécurité de l’emploi / retour à l’emploi à la ville natale une fois le retour autorisé après l’évacuation prolongée. |
10
|
0,10% |
▲ Après avoir lu toutes les réponses au sondage, nous avons extrait et comptabilisé chaque sujet comme indiqué. Comme certaines réponses contiennent plusieurs sujets, le total cumulé de tous les sujets dépasse le nombre de réponses. Il y a aussi des réponses non incluses dans les données parce qu’elles n’ont pas pu être classées.
Enquête sur les travailleurs de la centrale nucléaire de Fukushima
• Après l’accident, la plupart des travailleurs de TEPCO n’ont pas été évacués, mais sont restés sur le site afin d’aider, après la catastrophe. Certains travailleurs en sous-traitance ont été évacués le 11 mars à 16 h00. Il a été constaté des problèmes de communication d‘informations pour les sous-traitants. Le 11 mars, ceux qui sont restés sur le site n’ont pas reçu d’explications sur l’état de dangerosité de la situation des réacteurs.
• Les efforts, mis en place pour le processus de contrôle de l’irradiation des travailleurs sur le site de l’usine accidenté, ont été restreints compte-tenu de la situation d’extrême urgence et des moyens de mesure limités disponibles sur place. Il n’y a pas eu de rapport sur les cumuls des doses d’irradiation pour ces individus et aucun effort n’a été fait pour prendre en compte la radiation in-situ. De nombreux travailleurs ont exprimé leur anxiété et frustration sur le manque de contrôle des doses radioactives. Ces besoins doivent être améliorés.
• La plupart des travailleurs qui sont restés en fonction après le tremblement de terre dans le cadre de l’accident ont été enregistrés comme professionnels de la radioactivité.
• Certains d’entre eux ont dû partager un dosimètre avec plusieurs autres personnes car les appareils n’étaient pas en nombre suffisant. Très peu d’entre eux sont restés sans aucun appareil du tout.
• Un système d’enregistrement des résultats des dosimètres n’était pas disponible. La conséquence en est qu’environ 30 % des employés n’ont pas eu connaissance de leur cumul d’irradiation, ce qui est un problème.
• On n’a pas observé de différences significatives dans le traitement des mesures prises contre les radiations pour les employés TEPCO et les travailleurs sous-traitants. • La majorité des employés qui ont eu à faire face aux conséquences de l’accident n’ont pas été prévenus à l’avance qu’ils auraient à le faire si l’un des réacteurs était détérioré. Certains d’entre eux ont dû travailler sans avoir le choix et n’ont pas donné leur consentement. Des lacunes apparaissent dans la préparation des travailleurs en cas de désastre nucléaire.
• Environ 80% des employés ont reçu une information sur les doses radioactives dans leur domaine d’opération, ou connaissaient les doses de radioactivité du site à partir de cartographies de dosages avant d’intégrer le groupe. Environ 20% ont affirmé n’avoir reçu aucune explication à ce sujet dans leur domaine opérationnel. Bien qu’il soit indispensable que des travailleurs du site aient à être impliqués dans la crise, une formation sur les niveaux de radiation et les risques devrait toujours être donnée.
Résumé de la méthodologie employée pour cette enquête
• Cette étude a été conduite sur les employés qui étaient présents à l’usine nucléaire de Fukushima Daiichi le 11 mars 2011.
• L’objectif de cette enquête : comprendre la réalité de la communication des informations, évacuations et contrôle de santé sur le site de l’usine.
• Méthode : étude effectuée par courrier.
• Durée : du 27 avril au 18 mai 2012.
• Personnes ciblées : environ 5 500 employés présents à l’usine nucléaire Fukushima Daiichi le 11 mars 2011, et ont été ou étaient employés de TEPCO ou de compagnies sous-traitantes (*) et qui ont accepté de participer.
• Total des participants : 2 415 soit environ 44 % de l’ensemble contacté.
• Sur ces 2 415 réponses, 1 060 (44%) ont fait des commentaires dans l’espace réservé à cet effet. Par ailleurs, 41 participants ont écrit sur le devant et l’arrière du document d’enquête ou ont fourni des commentaires complémentaires sur des enveloppes ou des feuilles de papier séparées. Nous avons senti de leur part une forte volonté d’être entendus.
Répartition des réponses par rapport au lieu de travail
• La plupart des participants travaillaient dans les aires radioactives le 11 mars. Communication des informations aux travailleurs durant l’accident
• Environ 40% des employés TEPCO ont été alertés que les réacteurs étaient ou pouvaient être à un niveau dangereux. Par ailleurs, pratiquement aucun employé des compagnies sous- traitantes n’a été prévenu.
(*) Note : Étant donné que nous n’avons pas pu conduire cette enquête avec les employés des compagnies qui n’ont pas voulu participer, les résultats ne représentent pas tout le personnel concerné et est donc à cet égard incomplète.
De plus, cette commission a demandé aux compagnies sous- traitantes de TEPCO l’adresse actuelle des employés qui travaillaient à l’usine nucléaire le 11 mars 2011. Mais certaines compagnies nous ont donné les adresses d’employés qui ont commencé à travailler sur le site de l’usine après le 11 mars 2011. Ceux-ci ont été inclus dans les 5 500 personnes ciblées pour l’enquête. C’est la raison pour laquelle, on ne peut dire que les exemples relevés sont une analyse statistiquement exacte sur les employés de Fukushima Daiichi le 11 mars 2011. De ce fait, veuillez prendre note que les réponses peuvent ne pas être statistiquement fiables, excepté pour celles des employés de TEPCO, qui a fourni les informations de contact pour pratiquement tous ses employés.
Après le tremblement de terre du 11 mars, y a-t-il eu une explication donnée par TEPCO sur les conditions critiques des réacteurs ou la possibilité d’une telle situation ?
▼ Travailleurs non-évacués Travailleurs évacués
Situation de l’évacuation après le tremblement de terre
• Plus de 80% des employés TEPCO n’ont pas été évacués après le tremblement de terre et sont restés sur place. Nombre des employés des sous-traitants ont été évacués de l’usine, tout au moins temporairement.
• La plupart des évacués l’ont été aux environs de 16 h le 11 mars.
.Plus de la moitié des travailleurs des sous-traitants qui ont évacué ont répondu qu’ils n’avaient pas reçu d’ordre pour cela. (Ceci inclut ceux qui ont répondu être rentrés chez eux car ils avaient reçu des ordres de le faire en cas de tremblement de terre, et non en raison de l’accident à la centrale électrique.)
• Environ 30% des travailleurs des compagnies sous-traitantes primaires et 15% des sous- traitants secondaires sont restés sur place afin de faire face à l’accident.
Les travailleurs impliqués à contenir l’accident
• La plupart de tous les employés qui ont dû lutter contre l’accident ont été enregistrés en tant que professionnels de la radioactivité.
• Seuls environ 10% des employés sous-traitants impliqués dans la lutte contre l’accident ont reçu une explication à l’avance sur la possibilité que l’usine puisse subir un accident nucléaire.
• Environ 30% des employés TEPCO et 40% des autres n’ont donné aucun accord pour travailler lors d’un tel accident.
Gestion de l’irradiation
• Étant donné le manque de dosimètres à cause du tsunami, TEPCO a laissé de nombreux travailleurs dans les zones aux niveaux de radiation faible partager des dosimètres immédiatement après l’accident. En conséquence, le pourcentage d’employés qui n’ont pas eu accès à un dosimètre du tout a pu être limité à 5 %. Il n’a été observé aucune différence significative entre les employés de TEPCO et les autres.
Le 11 mars, avez-vous évacué le site de l’usine de Fukushima Daiichi (y compris une évacuation temporaire) ?
▼Avant l’accident, avez-vous été informé des tâches possibles de lutte qui pouvaient vous être confiées dans le cas d’un tel accident ?
▼ Avez-vous reçu des instructions pour l’évacuation du 11 mars (pour ceux qui ont évacué ce jour-là) ?
▼ (instructions de TEPCO : 3 et 2 % en bleu)
Ratio des employés professionnels de la radioactivité par rapport aux autres qui sont intervenus dans la lutte contre l’accident
▼Si vous avez évacué l’usine le 11 mars, à quelle heure ?
▼• TEPCO a fait effectuer le contrôle d’irradiation des travailleurs « manuellement » car le système de mesure et de contrôle cumulatif des radiations était devenu inutilisable. Toutefois, environ 30% des employés ont dit qu’ils n’avaient jamais été informés des doses de radiation cumulées. Il n’y a pas de différences significatives majeures entre les employés de TEPCO et ceux des compagnies sous-traitantes sur le niveau d’informations données concernant l’irradiation.
• Au fur et à mesure de l’évolution de l’accident, les niveaux de radiation montèrent hors du bâtiment parasismique, et même hors de la zone de radiation sous contrôle. A ce stade, TEPCO a donné des explications aux travailleurs engagés dans des tâches hors du bâtiment antisismique sur les doses radioactives des différents sites de l’usine et sur la possibilité croissante d’irradiation. Alors que 40% des employés ont répondu avoir été informés à chaque fois, 20% d’entre eux ont dit n’avoir reçu aucune de ces informations. Pas de différences significatives entre les employés TEPCO et les autres n’ont été constatés sur l’information des risques et leur étendue durant les opérations.
• Le contrôle de l’exposition radioactive a été mené au mieux vu les limitations et le nombre restreints des matériels à disposition. Quoiqu’il en soit, de nombreux employés ont affirmé que la gestion de la radiation aussi bien interne que cumulée et leur contrôle a été insuffisant.
Commentaire d’un employé de TEPCO:
« Il n’y a eu aucune explication sur le danger encouru jusque tôt le matin du 15 mars. Je comprends que la situation était critique et qu’il y avait peu de temps pour donner des explications, mais au moins, nous voulions savoir. » « Il nous était demandé de gérer notre taux d’irradiation par nous-mêmes, peut-être parce que les bases de données étaient devenues inutilisables à cause du tremblement de terre. Mais nous n’avions même pas de stylos ou du papier. Il nous était impossible de garder des traces avec précision. » « Mon exposition radioactive cumulée atteignait environ 0,008 millisievert à la fin mars. J’ai donc demandé un contrôle de tout le corps. La compagnie a refusé arguant que je n’y avais pas droit tant que je n’avais pas atteint 0,1 millisievert. J’ai travaillé dans le bâtiment principal antisismique pendant deux semaines à partir du 11 mars, et j’ai passé là au moins 5 à 6 heures chaque jour. J’étais sûr d’être irradié intérieurement. A la mi-mai, j’ai eu un contrôle des globules blancs du sang, mais les résultats ont montré que j’étais moins atteint que les personnes qui ont passé moins de temps que moi dans ce bâtiment.
Commentaire d’un employé de TEPCO:
« J’ai réclamé fortement un suivi approfondi, et plus particulièrement pour la génération la plus jeune des travailleurs, qui se sentaient probablement abandonnés. Certains ont été temporairement relevés de leur travail ayant atteint la limite d’exposition radioactive légale d’une année. Les dirigeants TEPCO disent que cet accident n’est pas un autre Tchernobyl, malgré son ampleur, mais je ne vois aucune différence en terme de souffrance des habitants, et plus particulièrement la perte de leur endroit de vie. Je ne veux pas que ces dirigeants diminuent la gravité de l’accident ».
Commentaire d’un employé de TEPCO:
« Les employés du bâtiment principal parasismique ont travaillé dans des conditions où ils ne pouvaient se fier à personne sauf à eux-mêmes, et ils étaient seuls responsables de leur propre sécurité. Ces problèmes n’ont-ils pas pour origine un manque de préparation en cas de désastre ? Je ne veux pas entendre dire que cet événement a eu lieu car il n’était pas possible de l’anticiper. Le gouvernement et la compagnie de production nucléaire sont responsables des problèmes préexistants qui ont conduit au désastre. N’est-il pas de la responsabilité de la NAIIC (Commission d’Enquête Indépendante) de révéler ces problèmes et les dénoncer ? »
Commentaire d’un employé sous-traitant:
« Aucune information quelle qu’elle soit sur l’interruption du courant de la station n’a été transmise aux travailleurs de finition comme nous. Il m’a fallu apprendre par la télévision les ordres d’évacuation d’urgence pour les habitants dans un rayon de 20 km. Bien que travailleur sous-traitant, je devais faire des équipes de 24 heures selon mon contrat de travail. Mon employeur savait que plusieurs de ses employés comme moi étaient restés dans le bâtiment principal antisismique. Toutefois, le directeur général de la compagnie, le directeur exécutif et le responsable de la protection radioactive ont tous évacué avec leurs familles. Finalement, je suis arrivé à appeler notre siège à Tokyo le 14 mars, mais ils n’étaient pas au courant qu’il y avait encore des employés travaillant dans le bâtiment central. J’ai demandé à être évacué, mais ils ont refusé ma demande. Je mangeais et dormais à peine et arrivais à mes limites physiques et mentales. Plus tard, j’ai dit au directeur général de TEPCO que je voulais être évacué et il fut très difficile d’avoir son consentement. Nous avons découvert que la voiture de notre compagnie que nous avions prévu d’utiliser avait été prise par des employés de TEPCO, mais un collègue nous a emmenés. J’ai demandé à de nombreuses reprises un contrôle physique complet à mon employeur fin mars et en avril, mais ma demande a toujours été refusée. J’ai été assigné à travailler à Daiichi à la fin avril, ce que j’ai refusé compte tenu de problèmes de santé. En résultat, j’ai été par la suite victime de harcèlement moral de mon employeur et suis devenu mentalement déséquilibré. A cause de cela, j’ai dû quitter la compagnie en juin, ce qu’ils ont attribué à une démission pour raisons personnelles. »
Entre le jour de l’accident et la fin mars, est-ce que votre employeur vous a indiqué votre niveau d’irradiation cumulée chaque fois que vous travailliez ?
▼Entre le jour de l’accident et la fin mars, avez-vous reçu des explications de qui que ce soit sur les risques d’irradiation chaque fois que vous travailliez hors du bâtiment principal parasismique ?
▼ Avez-vous donné votre accord pour être assigné à des travaux de lutte contre les conséquences d’un accident ?
▼ Commentaire d’un employé d’un sous-traitant principal:
« En ce qui concerne les travailleurs, il n’y avait pratiquement pas d’instructions d’évacuation. Il faut un protocole de communication des informations bien compris pour être efficace. Les mesures prises pour faire face à l’accident n’étaient pas coordonnées et par dessus tout très pauvres. Il en va de même de la perspective des habitants. Les procédures d’évacuation et de destination étaient vagues et le sont toujours. Tous ces problèmes doivent être éclaircis. C’est seulement à partir de là qu’un nouveau commissionnement de l’usine nucléaire pourra être discuté. Il y a des employés qui retournent chez eux le soir et essaient de mener des vies normales après avoir été exposés à la radioactivité. C’est inconcevable. »
Commentaire d’un employé d’un sous-traitant principal:
« Je travaillais à Fukushima Daiichi le 11 mars. Lorsque le tremblement de terre s‘est produit, j’ai essayé de sortir, mais il m‘a fallu deux heures pour sortir du site de l’usine étant donné le nombre de personnes. Les premières vagues du tsunami sont arrivées alors que j’étais encore en train de sortir et cependant il n’y eut aucune annonce concernant le tsunami. En y pensant maintenant, cela me fait frissonner de peur. »
Commentaire d’un employé d’un sous-traitant principal:
Le niveau de radiation dans le bâtiment principal antisismique était si élevé qu’en temps normal il aurait été complètement bloqué pour empêcher toute entrée. Je n’avais aucun choix sinon celui d’essayer d’évaluer mon taux d’irradiation dans ma tête. Ce bâtiment était clairement contaminé et il y avait une augmentation dans la concentration de poussière et d’iode. L’eau était rare, et je ne pouvais pas me laver les mains avant de manger de la nourriture d’urgence. J’étais clairement exposé intérieurement. L’eau et l’électricité étaient en besoin urgent, toutefois il n’y avait aucune fourniture de l’un ou de l’autre venant de l’extérieur. L’usine était complètement isolée et j’ai pensé avoir été abandonné à mon sort. »
Commentaire d’un employé d’un sous-traitant principal:
« Étant donné que les travailleurs étaient désespérément nécessaires, je n’eus pas le temps de me faire confirmer si ma famille était sauve, et ceci me perturbait tant que je ne pouvais me concentrer sur mes devoirs professionnels. La priorité était de faire face à l’accident, cependant il n’y avait aucune possibilité pour les employés de vérifier leur taux d’irradiation. Je me sentais en danger. Il n’y avait pas assez de dosimètres et il fallait les partager. Les employés chargés de tâches non indispensables furent évacués, mais pas les autres. Je craignais pour ma vie. Le principal bâtiment parasismique avait résisté au tremblement de terre, mais il ne protégeait pas des radiations. Les endroits les plus contaminés étaient indiqués par des bandes adhésives. Étant donné que l’attention était monopolisée par une réunion en réponse au désastre entre le siège de TEPCO et l’usine, aucune information du tout n’a été transmise à la zone d’entourage, alors qu’il y avait une prévision de la dispersion radioactive du système de contrôle interne de l’usine basé sur la direction du vent. Les employés qui étaient chargés de la lutte contre le désastre à ce moment auraient mérités d’être affectés à d’autres endroits ! »
Commentaire d’un employé d’un sous-traitant principal:
« Le contrôle des taux radioactifs a manqué de rigueur juste après l’accident. Le contrôle annuel des taux d’irradiation a été un problème vague durant les 15 dernières années. Les différences de taux enregistrées d’un employé à un autre étaient importantes. J’ai été surexposé, environ 0,15 millisievert/h en externe et 0,007 millisievert/h en interne, de ce fait maintenant je ne peux pas travailler dans la zone contrôlée pour les cinq ans à venir. »
Commentaire d’un employé d’un sous-traitant principal:
« Après l’accident, il n’y avait aucun système de test corporel complet et il était sensé n’y avoir aucune radiation (Je me demande si cela pouvait venir d’ordres des compagnies électriques ou des compagnies de sous-traitance?). Étant donné qu’il n’y a eu aucune information donnée les 12 et 13 mars, nous n’avons pas su dans quelle direction la radiation s’est dispersée durant notre évacuation. » « Si la décontamination n’a pas la priorité, nous ne pouvons pas retourner chez nous. J’espère que la décontamination sera faite par des volontaires de chez TEPCO ou des compagnies qui appartiennent à TEPCO (c.à.d. par des personnes qui ne travaillent pas dans des usines nucléaires). »
Avant le 11 Mars, aviez-vous reçu des instructions précisant que vous pouviez avoir à être chargé de lutter contre un accident ?
▼Entre le moment de l’explosion de l’unité 1 le 12 mars et la fin mars, portiez-vous un dosimètre lorsque vous travailliez hors du bâtiment principal parasismique (*) ?
▼ (* le seul bâtiment conçu pour coordonner la lutte contre un tremblement de terre et à partir duquel toutes les réponses à la crise étaient organisées.)
Commentaire d’un employé d’un sous-traitant principal:
« Je ne pense pas qu’il ait été donné beaucoup d’attention aux travailleurs qui ont eu en fait à gérer l’accident. Le premier compteur corporel complet a été installé dans la ville d‘Iwaki, mais seuls les employés TEPCO étaient en droit de l’utiliser. Les autres devaient se rendre jusqu’à Kashiwazaki et nous n’avons pratiquement pas vu d’employés TEPCO là. TEPCO a laissé tout faire par les principaux sous-traitants. Avant de donner des blâmes, l’opérateur devrait avant tout se focaliser sur les règles de sécurité en cas d’accident. »
Commentaire d’un employé d’un sous-traitant principal:
« En tant que travailleur d’un sous-traitant principal, je n’ai eu d’autre choix que d’être impliqué dans la procédure mise en place après l’accident, ce qui veut dire être confronté à des niveaux d’irradiation extrêmement élevés par rapport à la norme. Je suis très inquiet pour ma santé depuis le 11 mars. Après l’accident, j’ai reçu une compensation financière selon les conditions de ma propre compagnie, mais c’était vraiment une très petite somme. Peut-on dire que ce que nous avons fait était pour notre pays ? Si c’est le cas, nous devrions recevoir plus d’argent. J’ai souffert d’un cancer de l’estomac dans le passé et si je devais encore en être atteint à cause du travail fait à la suite de l’accident et en mourir, cela serait impardonnable. »
Commentaire d’un employé d’un sous-traitant principal:
« Cela fait quatre ans que je travaille dans une compagnie sous-traitante. Durant tout ce temps, je n’ai jamais eu de formation sur une procédure d’évacuation en cas d’accident nucléaire. L’état d’esprit de TEPCO était qu’il était « impossible qu’un accident arrive », et « nous avons besoin de formation uniquement en cas de sinistre par le feu ». A cause de cela, j’ai été licencié et j’ai dû évacuer très loin afin d’élever mes trois enfants et protéger leur santé. Je veux retrouver nos vies et moyens de vivre. »
Commentaire d’un employé d’un sous-traitant principal:
« J’exige de recevoir une compensation et assurance suffisantes dès que possible. Nous ne pouvons pas attendre un jour de plus. »
« Je pense que cet accident devait se produire en fait. TEPCO est devenu maître dans l’art de cacher l’information. Même maintenant, TEPCO n’a pas fourni toutes les informations concernant la fuite d’eau, etc. » « Le gouvernement et TEPCO auraient dû prendre en compte les accidents passés comme celui de Tchernobyl lorsqu’ils ont dû affronter le désastre. Il n’y a eu aucune excuse faite aux évacués. Comment cela peut-il être acceptable ? »
Commentaire d’un employé d’un sous-traitant secondaire:
« Aux nouvelles, il était dit que les travailleurs de l’usine qui affrontaient l’accident étaient prêts à mourir, mais en regardant ces nouvelles, je me disais qu’il était impossible que l’on soit prêt à mourir. J’ai fait un contrôle corporel complet pour la première fois fin avril et mon taux d’irradiation était incroyablement élevé. Je suis de tout cœur avec les personnes qui travaillent encore pour lutter contre les conséquences de l’accident. J’espère que ces personnes travaillant à Fukushima Daiichi prendront soin de leur santé. »
Rapports des réunions
de la Commission indépendante
sur Fukushima
1ère réunion de la Commission
Lieu : The Fukushima View Hotel, Préfecture de Fukushima
Date: 19 décembre 2011
La première réunion de la Commission d‘enquête indépendante sur l‘accident nucléaire de Fukushima s‘est tenue au Fukushima View Hotel dans la ville de Fukushima le 19 décembre 2011.
La Commission a approuvé la version préliminaire des règles encadrant son fonctionnement, désigné un chef de projet, décidé de la structure des groupes de travail et de son siège, et commencé officiellement son activité. Reiko Hachisuka, un des membres de la Commission, a également présenté un rapport sur les conditions difficiles dans lesquelles vivent aujourd‘hui les populations concernées. Mme Hachisuka, qui a été évacuée d‘Okuma, où est située la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi, pour vivre dans des résidences provisoires mises à disposition à Aizu Wakamatsu, a déclaré que les réfugiés souffrent d‘une perte du sentiment de sécurité et de stabilité malgré les affirmations répétées depuis des années par TEPCO et le gouvernement que la centrale était sûre. Afin de se rendre compte par elle-même des conditions prévalant à la centrale et dans ses environs, la Commission s‘est rendue sur place le 18 décembre.
Elle a aussi observé les efforts de décontamination menés par la municipalité d‘Okuma. Après la première réunion de la Commission lundi, nous avons visité les logements provisoires de Kawamata qui abritent des réfugiés du district de Yamakiya (qui fait partie de la ville de Kawamata) où les taux de radiation sont élevés.
Nous avons parlé personnellement avec le maire de la ville, Michio Furukawa, également représentant de la communauté en résidence provisoire.
Nous avons vu les opérations mises en œuvre pour décontaminer les champs et les forêts du district de Yamakiya.
2ème réunion de la Commission
Lieu : Keisei Memorial Hall, Tokyo
Date : 16 janvier 2012
Témoins : Yotaro Hatamura, Président du Comité d’Enquête du Cabinet du Premier Ministre sur l’Accident de la Centrale Nucléaire de Fukushima de TEPCO
Shinji Ogawa, Directeur-Général du Comité d’Enquête du Cabinet du Premier Ministre
Masayuki Ishida, Directeur de la Division Inspection Qualité de l’Energie Nucléaire de TEPCO
Masayuki Ono, Directeur de la Division Qualité et Sécurité de l’Energie Nucléaire de TEPCO
Itaru Watanabe, Directeur-Général Adjoint du Bureau des Politiques de la Science et de la Technologie au MEXT
Yoshinari Akeno, chef de groupe, Service de la Sécurité Nucléaire du Bureau des Politiques de la Science et de la Technologie au MEXT
Tadao Kanda, Directeur, Bureau d’Evaluation des Politiques, secrétariat du ministre, au MEXT
La Commission a désigné son président intérimaire et le co-président du groupe.
Nous avons reçu une explication sur les rapports provisoires et initiaux sur l‘accident de la centrale nucléaire de Fukushima du Comité d‘Enquête et de Vérification du Gouvernement, de TEPCO et du Ministère de l‘Education, de la Culture, des Sports, des Sciences et de la Technologie (MEXT).
3ème réunion de la Commission
*Lieu : Shimin Plaza Kazo, Préfecture de Saitama
Date : 30 janvier 2012
Témoin : Katsutaka Idogawa, maire de Futaba.
Le maire de Futaba, Katsutaka Idogawa, a présenté la situation avant l‘accident de la centrale et les conditions au moment de l‘accident et durant l‘évacuation. Il a aussi discuté avec la Commission. Après la réunion, nous avons organisé une réunion avec les habitants de la ville pour écouter leurs derniers commentaires sur l‘accident et l‘évacuation, et pour avoir des détails sur la vie des évacués.
Katsutaka Idogawa
Commentaires de M. Idogawa :
§ « Depuis ma nomination comme maire, je n‘ai pas cessé de faire part de nos inquiétudes à propos de la centrale nucléaire à TEPCO et NISA. Ils n‘arrêtaient pas de nous dire de ne pas nous faire de souci, que la centrale était absolument sûre. Mais l‘accident est bel et bien arrivé. Ils ne peuvent pas donner d‘explication car l‘accident serait dû à « des facteurs qui vont au- delà de ce qu‘ils pouvaient imaginer ».
§ Le centre hors-site était inutilisable parce que trop proche de la centrale. Il faut vérifier et voir à quel type d‘accident le centre d‘urgence hors-site était censé pouvoir répondre.
§ Il est nécessaire de clarifier le rôle joué par les instances de régulation nucléaire et les relations qu‘elles entretiennent avec l‘industrie. Pour ce qui est de TEPCO, nous aimerions qu‘ait lieu une évaluation de tous les facteurs qui pourraient avoir contribué à l‘accident. Nous avons besoin de savoir si des questions fondamentales ont été ignorées pour privilégier la profitabilité, si la formation du personnel était adéquate et si les compétences techniques étaient correctement transmises, et quel genre de formation était fourni au grand nombre d‘intérimaires embauchés pour les inspections régulières. Nous voulons savoir si le service de gestion de crise fonctionnait correctement.
§ Pour ce qui est de la préfecture de Fukushima, une enquête est nécessaire pour établir par exemple si elle a diffusé des informations correctes à sa population et si elle fournit actuellement aux gens la protection dont ils ont besoin.
§ Quant au niveau de l‘exposition aux radiations, les explications et les normes sont très diverses et ce n‘est pas clair du tout. Le taux maximum d‘exposition cumulative pour la population en général est légalement de 1 millisievert par an. L‘accident nous a exposé à des radiations autres que le rayonnement naturel.
Il est scandaleux que TEPCO prétende que les radiations émises par sa centrale sont bona vacantia, c‘est-à-dire un objet sans propriétaire dont ils ne peuvent pas être tenus responsables.
§ Après l‘évacuation, les communications avec le gouvernement ont été absolument inexistantes. La télévision était notre seule source d‘information.
4ème réunion de la Commission
Lieu : Diète Nationale du Japon
Date : 15 février 2012
Témoins : Haruki Madarame, Président de la Commission de Sûreté Nucléaire (NSC),
Nobuaki Terasaka, ex-président de l’Agence de Sûreté Nucléaire et Industrielle (NISA)
Haruki Madarame Nobuaki Terasaka
1. Des instructions dépassées:
Haruki Madarame, président de la Commission de Sécurité Nucléaire, a admis que les instructions de sécurité étaient défectueuses et a présenté ses excuses. L‘accident de Fukushima a émis beaucoup plus de radiations que les scénarios figurant dans le chapitre « accident hypothétique » contenu dans les instructions, où les scénarios envisagés étaient d‘une bien moindre envergure que les scénarios d‘accident grave utilisés par de nombreux autres pays. Le Guide pour l‘évaluation du site d‘un réacteur, qui date de 1964, est toujours la référence pour accorder le permis de construire des centrales nucléaires. Durant le débat, ce guide a été qualifié d‘obsolète et M. Madarame est d‘avis qu‘il doit être amendé.
2. Manque de préparation des agences:
La NSC et NISA étaient toutes deux mandatées pour assurer la sécurité de l‘énergie nucléaire, mais manquaient de préparation pour les situations d‘urgence. De plus, il a été établi que la NSC comme NISA n‘avaient pas bien compris leur tâche essentielle qui est de protéger la population locale et le pays.
3. Connaissances insuffisantes:
Le débat a révélé un manque de connaissances techniques et de compétences en ingénierie nucléaire au sein des agences de régulation et de la direction de ces agences. Le débat a également rappelé à tous l‘énorme importance de l‘indépendance et combien il est essentiel de s‘appuyer sur des décisions et des suggestions fondées sur des faits et des analyses scientifiques pour que ces agences puissent fonctionner correctement. Le Japon a manifestement la responsabilité d‘établir des normes et des directives de sécurité qui soient dignes de confiance au niveau mondial.
5ème réunion de la Commission
Lieu : Diète Nationale du Japon
Date : 27 février 2012
Témoin : Richard A Meserve, ex-Président de la Commission de Régulation Nucléaire Américaine (NRC), Président de la Carnegie Institution for Science
Dr. Richard A. Meserve
1. Une attitude proactive:
Les responsables doivent faire des efforts permanents pour améliorer les normes de sécurité existantes. Les entreprises de construction et les opérateurs ne doivent pas présumer de la qualité des normes des agences de régulation et ne doivent pas avoir une attitude passive vis-à-vis des questions de sécurité et de sûreté.
2. Responsabilités et indépendance des opérateurs:
Les opérateurs de centrales nucléaires ont indéniablement la responsabilité de prévenir les accidents et d‘empêcher l‘aggravation des dommages pouvant en découler. En cas d‘urgence, l‘opérateur est censé prendre des décisions et doit éviter de se tourner vers le gouvernement. C‘est la raison pour laquelle les opérateurs doivent avoir les compétences nécessaires.
3. Responsabilités et indépendance des instances de régulation:
Le rôle des instances de régulation est d‘exiger des décisions sensées de la part de l‘opérateur et de faire appliquer ces décisions pour éviter l‘aggravation des problèmes. Les agences doivent rester indépendantes des opérateurs et du gouvernement. Les agences doivent également définir clairement le rôle de l‘opérateur, du gouvernement, et de la chaîne de commande. Ces rôles doivent faire l‘objet d‘un entraînement régulier.
4. Transparence de la prise de décisions:
Il est important de garantir la transparence dans toutes les procédures de prise de décisions, sauf celles qui touchent à la sécurité nationale. Il est important que les participants expriment ouvertement leur opinion pour gagner la confiance [du public].
5. Importance des ressources humaines:
Le Japon devrait suivre le modèle de la NRC, où la majorité des employés passent toute leur carrière à s‘occuper de sûreté nucléaire ; il devrait aussi fournir aux experts des perspectives suffisamment intéressantes. Au Japon, les professionnels qui ont l‘habitude de changer régulièrement de poste au sein de l‘administration se révèlent souvent incapables de gérer les situations de crise.
6. Indépendance et transparence des enquêtes:
Les caractéristiques les plus importantes pour l‘enquête sur l‘accident nucléaire sont l‘indépendance et la transparence.
6ème réunion de la Commission
Lieu : Diète Nationale du Japon
Date : 14 mars 2012
Témoin: Sakae Muto, Conseiller de TEPCO et ancien Vice-président Exécutif et Directeur Général de la Division Energie Nucléaire & Implantation de Centrales de TEPCO
Sakae Muto
1. Relations entre le gouvernement et l’opérateur:
Nous avons entendu un témoignage inattendu montrant que le Cabinet avait participé à des discussions sur des questions techniques concernant les réacteurs nucléaires. Le Premier ministre Kan a demandé le numéro de portable du directeur de la centrale de Fukushima, sans en informer la direction de TEPCO
2. Compétence de TEPCO:
M. Muto a déclaré que l‘opérateur était le premier responsable de l‘accident, mais des questions demeurent concernant la compétence de TEPCO à assumer cette responsabilité.
3. Manque de préparation aux accidents:
De longues discussions ont eu lieu sur la culture de sécurité et les actions préventives à mener contre les séismes. M. Muto a sous-entendu que la cause de l‘accident était le tsunami imprévu mais la possibilité d‘un tsunami avait été estimée en 2002 et TEPCO doit donc avoir reconnu les risques. Toutefois M. Muto a soutenu ne pas avoir eu connaissance de ces études. Ceci était clairement une défaillance de la culture de sécurité de TEPCO.
7ème réunion de la Commission
Lieu : Diète Nationale du Japon
Date : 19 mars 2012
Témoins : Volodymyr Holosha, Directeur de l’Agence de l’État Ukrainien pour la Gestion des Zones d’Exclusion, Ministre des Situations d’Urgence
Anatoliy Gora, Directeur Adjoint de la Centrale Nucléaire de Tchernobyl
Leonid Tabachnyi, Vice-Président du Centre d’Observation Géophysique du Service d’Hydrométéorologie au Ministère Ukrainien des Situations d’Urgence
Volodymyr Holosha Leonid Tabachnyi
1. L‘accident de Tchernobyl
diffère de celui de Fukushima par les types de matériaux radioactifs rejetés, les conditions météo, la géographie et l‘état des enceintes de confinement des réacteurs. Cependant les deux accidents ont été qualifiés d‘accidents de niveau 7 (accident grave), une qualification de l‘échelle internationale des événements nucléaires (échelle INES). Tchernobyl a provoqué d‘importantes émissions de matériaux radioactifs et affecté l‘environnement et de très nombreuses vies. Les matériaux radioactifs continuent à affecter sévèrement la santé publique et l‘environnement 26 ans après l‘accident.
2. Questions concernant l’exposition :
De nombreuses personnes ayant travaillé dans les zones contaminées en Ukraine ont été exposées aux radiations. Beaucoup de petits enfants qui ont été exposés aux radiations ont développé un cancer de la thyroïde. L‘exposition aux radiations ne se contente pas de provoquer des cancers de la thyroïde chez les jeunes enfants ; elle affecte l‘ensemble du corps. Les personnes évacuées souffrent de stress et de phobie des radiations. Les aliments contaminés sont surveillés et contrôlés séparément par type, quantité consommée, etc.
3. Questions concernant la diffusion de l’information:
La nécessité de diffuser l‘information a été reconnue par le gouvernement ukrainien, qui a tiré les leçons de l‘époque de l‘URSS. Cependant, il y a beaucoup d‘unités de mesures, comme les becquerels, les sieverts et les curies, qui ne sont pas bien connues de la population. L‘information du public peut être diffusée de manière différente selon les niveaux de contamination.
8ème réunion de la Commission
Lieu : Diète Nationale du Japon
Date : 28 mars 2012
Témoins : Ichiro Takekuro, représentant de TEPCO et Responsable de l’Energie Nucléaire chez TEPCO avant l’accident. Il était au Kantei pendant l’accident. Kenkichi Hirose, Conseiller Spécial du Cabinet du Premier Ministre, chargé de la NSC, ancien Secrétaire-Général de la Commission de Sûreté Nucléaire (NSC) et ancien Directeur-Général de l’Agence de Sûreté Nucléaire et Industrielle (NISA)
Ichiro Takekuro Kenkichi Hirose
1. Compétence de TEPCO:
Quoique la première obligation de TEPCO soit de prévenir les accidents et de minimiser les dommages, l‘entreprise s‘est révélée comme n‘ayant pas la capacité d‘auto-gouvernance qui aurait permis de mettre en place les mesures adéquates de prévention des accidents ; il lui manque aussi la culture qui lui permettrait de mener des efforts concertés pour améliorer la sûreté nucléaire en tenant compte du point de vue de la population. De plus, TEPCO ne reconnaît pas clairement les tâches et obligations liées à la sûreté nucléaire qui sont celles d‘un opérateur d‘énergie nucléaire. Pour ce qui est du programme de défense en profondeur, M. Takekuro a déclaré que TEPCO s‘était concentré sur les trois premiers niveaux, sous-entendant que TEPCO n‘était pas responsable de la mise en œuvre des quatrième et cinquième niveaux de défense en profondeur. Au moment de l‘accident, TEPCO a envoyé M. Takekuro au bureau du Premier Ministre pour faire un rapport détaillé des conditions de l‘accident au Premier Ministre.Toutefois, on a découvert que M. Takekuro envoyait en réalité des ordres au site de l‘accident de la part du Premier Ministre. Il est évident que la culture d‘entreprise de TEPCO a failli dans ses efforts de prévention des accidents et d‘amélioration de la sûreté nucléaire et failli à ses obligations d‘opérateur de centrale nucléaire. Ce point est aussi mis en évidence par la longue histoire de dissimulation d‘accidents de TEPCO
2. Responsabilités des agences de régulation:
Les discussions ont clairement montré que les agences de régulation nucléaire comme NISA n‘ont pas rempli leur première obligation, qui est de garantir la sécurité publique. Elles ont ignoré les fondements mêmes d‘une culture de la sécurité en laissant par exemple des mesures sécuritaires essentielles comme les vérifications (backcheks) aux opérateurs et en passant outre les recommandations de l‘AIEA ; leur responsabilité en l‘occurrence est accablante. Il est clair que la procédure de double vérification par la NISA et la NSC ne fonctionnait pas. Les défaillances et les comportements irresponsables révélés au cours du débat ne concernent pas seulement M. Hirose et les autres chefs. Le gouvernement est lui aussi hautement coupable, car c‘est lui qui a fait de la NISA une administration sous la houlette du METI. [ministère japonais de l‘Économie].
9ème réunion de la Commission
Lieu : Diète Nationale du Japon
Date : 18 avril 2012
Témoin : Hiroyuki Fukano, Directeur-Général de l’Agence de Sûreté Nucléaire et Industrielle (NISA).
Hiroyaki Fukano
1. Directive Sécurité:
La Directive Sécurité a été révisée par le gouvernement après l‘accident de Fukushima sur la base des mesures indiquées dans les ―Conclusions technologiques‖ qui sont une analyse provisoire. Les conditions d‘accident envisagées dans la nouvelle Directive Sécurité sont définies en détail avec une séquence d‘événements identique à celle de l‘accident de Fukushima. Aucune mesure ou définition n‘est donnée pour un accident éventuel dont l‘envergure dépasserait le scénario envisagé dans la nouvelle Directive Sécurité et seules quelques mesures de sécurité nécessaires sont incluses :
§ Le plan de construction de bâtiments résistants aux séismes, une notion dont le rôle s‘est révélé critique dans l‘accident de Fukushima, est défini comme une « tâche à moyen terme ».
§ La mise en place de ventilation filtrée, qui existe dans de nombreux pays européens, est définie comme une « tâche à moyen terme »
§ Le plan d‘évacuation d‘urgence, qui est extrêmement important pour la sécurité des habitants, ne relève pas de la discussion sur les « conclusions technologiques » qui ont servi de base à la révision de la Directive Sécurité.
10ème réunion de la Commission + Mairie de Namie 11ème réunion de la Commission + Mairie d’Okuma
Lieux : Nihonmatsu, Shimia Kaikan, Préfecture de Fukushima (10ème réunion) University of Aizu, Préfecture de Fukushima (11ème réunion)
Dates : 21 et 22 avril 2012
Témoins : Le maire de Namiemachi, M. Baba, et six autres témoins à la 10ème réunion de la Commission à Nihonmatsu Le maire d’Okuma, M.Watanabe, et quatre autres témoins à la 11ème réunion de la Commission à Aizu Wakamatsu. Après chaque réunion de la Commission, les membres de la Commission ont écouté les [doléances des] habitants durant les réunions dans les mairies.
Tamotsu Baba, maire de Namie
Toshitsuna Watanabe, maire d’Okuma
1. La colère des évacués:
Nous avons senti la profonde colère des habitants dont témoignent les commentaires suivants : « Il nous a fallu être évacués sans aucune information du gouvernement, de la préfecture ou de TEPCO sur l‘accident lui-même sur les modalités de l‘évacuation ou la direction qu‘il fallait prendre. » « Il aurait dû y avoir quelqu‘un, un employé de TEPCO par exemple, pour nous fournir des informations plus tôt. » Nous avons reconnu à nouveau l‘importance d‘avoir des procédés de communication permettant de fournir en temps voulu une information facile à comprendre.
2. Garantir la sécurité des habitants:
Un fonctionnaire local a indiqué qu‘il se demandait « si le gouvernement local avait rempli son rôle de garant de la sécurité des habitants. » Certains ont dit que « les exercices d‘évacuation d‘urgence n‘étaient qu‘une façon de faire des exercices pour le plaisir de faire des exercices. Le but visé était surtout l‘auto-satisfaction de l‘organisateur. Est-ce que ces exercices n‘auraient pas dû se faire sur la base d‘hypothèses plus réalistes ? » Les conclusions de nos précédentes réunions suggèrent que les régulateurs n‘ont absolument pas l‘état d‘esprit qu‘il faudrait pour protéger les habitants.
3. Message des villes où sont situées des centrales nucléaires:
Nous avons entendu des opinions importantes en particulier venant des habitants d‘Okuma. Voici quelques-unes des opinions les plus notables : « Les gens des villes où se trouvent des centrales nucléaires avaient tellement l‘habitude de s‘entendre dire ―combien les centrales sont sûres‖. C‘était du lavage de cerveau ». « Je n‘avais jamais imaginé qu‘une centrale nucléaire puisse devenir un problème ». « Il n‘y eut aucune communication concernant tous ces problèmes qui peuvent échapper au contrôle humain ». Ces commentaires peuvent être très importants pour tous ceux qui vivent dans des villes où sont situées des centrales nucléaires.
4. Relations avec le gouvernement et confiance en celui-ci:
Nous avons entendu des commentaires sur le gouvernement, l‘accusant en particulier de ne pas avoir réussi à fournir l‘information nécessaire au moment de l‘accident. « Je ne peux toujours pas faire confiance au gouvernement ». « Je n‘ai aucune confiance dans l‘information fournie par le gouvernement sur la condition actuelle de l‘unité 4 et sur le niveau des doses de radiation. »
5. La vie et l’avenir des évacués:
Nous avons vraiment réalisé que les instructions d‘évacuation tardives ou mal définies – comme le souligne l‘emploi de cette phrase « par mesure de précaution » – ont eu un impact sévère sur la population. Un des participants a souligné la nécessité de « mettre en place un système par lequel le gouvernement continuera à surveiller les conditions sanitaires de la population de génération en génération. » En outre, de nombreux habitants ont à maintes reprises exprimé leur profond désir de « ne pas laisser les autres municipalités qui ont des centrales nucléaires subir ce qu‘[ils ont] subi. »
Réunion publique à Okuma Réunion publique à Namie
12ème réunion de la Commission
Lieu : Diète Nationale du Japon
Date : 14 mai 2012
Témoin : Tsunehisa Katsumata, Président de Tokyo Electric Power Company (TEPCO) et ex-Président de la Fédération des Compagnies d’Electricité du Japon (FEPC).
M.Katsumata est PDG de TEPCO depuis octobre 2002 et en est devenu le Président en février 2008
Tsunehisa Katsumata
1. Redevabilité d’un opérateur de centrale nucléaire et du Premier Ministre:
Tout en rappelant que « les compagnies d‘électricité sont sans aucune ambigüité responsables de la sécurité des centrales nucléaires, » [Katsumata] a indiqué que « c‘est le Premier Ministre qui était le directeur-général du siège de la réponse d‘urgence où il fallait établir des priorités dans les décisions sur le site de la centrale ». Les trois directeurs principaux de l‘équipe dirigeante (PDG, président et vice-président) n‘étaient pas disponibles au moment de l‘accident. M. Katsumata n‘a appris l‘absence du PDG qu‘après l‘accident. Le fait qu‘il n‘ait pas contacté le PDG entre le moment où ce dernier est rentré de l‘étranger et celui où il est retourné au siège montre de toute évidence son absence complète de conscience de l‘imminence de la crise.
2. Faits critiques concernant le tsunami:
Les causes de l‘accident, selon la déclaration de M. Katsumata, sont « en cours d‘investigation à TEPCO ». Cependant l‘affirmation que le tsunami, qui n‘avait pas été anticipé, est la cause principale [de la catastrophe] est assez dérangeante. Elle révèle que le risque posé par un tsunami potentiel non anticipé n‘avait pas été communiqué en interne au PDG. Il se trouve que M. Katsumata avait décidé qu‘ « un tsunami de ce genre ne pouvait pas se produire dans la réalité. » Il semble que le risque de tsunami n‘avait pas été envisagé sous l‘angle des probabilités.
3. A propos des régulations:
M. Katsumata a souligné [l‘importance de] la simplification des réglementations, mais les mesures que les opérateurs prennent indépendamment, dont les vérifications de résistance aux séismes et les réponses aux accidents graves, n‘avaient pas été prises par TEPCO et d‘autres opérateurs. De sérieux doutes demeurent : quel rapport entre la demande de simplification des réglementations et les retards dans les réactions de TEPCO ? La Commission a aussi appris un fait peu connu, à savoir que la FEPC avait servi de forum pour les lobbies [de l‘industrie nucléaire].
4. Résumé:
M. Katsumata a admis que rétrospectivement il pouvait concevoir un certain nombre de mesures qui auraient dû être mises en place, par exemple les mesures anti-tsunami et les réponses aux accidents graves ; mais il s‘est abstenu de réflexions plus spécifiques. Le public doit déterminer, à travers les discussions d‘aujourd‘hui, si M. Katsumata était suffisamment compétent pour être à la tête d‘un opérateur nucléaire géant.
13ème réunion de la Commission
Lieu : Diète Nationale du Japon
Date : 16 mai 2012
Témoin : Kazuo Matsunaga, Vice-Ministre de l’Économie, du Commerce et de l’Industrie (METI) au moment de l’accident et Directeur Général de l’Agence pour la Sécurité de l’Industrie et du Nucléaire (NISA) de Juin 2004 à Septembre 2005.
1. Décisions prises en qualité de Directeur Général de l’Agence pour la Sécurité de l’Industrie et du Nucléaire (NISA):
Le témoin a déclaré qu’il n’avait pas pu prendre le temps de faire appliquer les nouvelles normes antisismiques parce qu’il était trop occupé à réagir à l’accident survenu à la centrale nucléaire de Mihama [Préfecture de Fukui, 8 août 2004, 4 morts - ndt]. Il s’est dérobé aux demandes d’explications sur son propre rôle dans les stress tests et a déclaré qu’il n’était pas de son ressort de discuter de l’application de la directive B.5.b. En sa qualité, il n’était pas impliqué directement dans les aspects importants de la sécurité nucléaire, et il a évité de définir clairement ses propres réalisations et responsabilités.
2. Jugements concernant la sécurité nucléaire dans la remise en service des centrales nucléaires:
La question demeure posée de savoir si, en matière de politique énergétique et de sécurité nucléaire, les instances dirigeantes prennent bien les décisions qui conviennent en connaissance de cause. Si le METI émet des jugements touchant la sécurité et la remise en service des centrales nucléaires avant que ne soient menées à terme les enquêtes du gouvernement sur les accidents, il se peut que cet organisme n’ait pas la pleine connaissance des faits. Ce problème fut également évoqué par le ministre du METI, Banri Kaieda, le 18 Juin 2011.
3. Responsabilité dans le maintien d’une alimentation électrique suffisante:
La question suivante a été posée à M. Matsunaga : « savez-vous si l’information rendue publique par TEPCO concernant sa capacité d’alimentation électrique est entière et exacte? » Mais il a déclaré qu’il n’était au courant d’aucune faute de la part de TEPCO.
4. Concernant l’adoption de l’utilisation du plutonium comme combustible:
Nous avons estimé qu’il était possible que le gouvernement eût précipité la prise de décision par l’autorité régionale au sujet de la mise en pratique de l’utilisation thermique du plutonium dans le réacteur Nº 3 de la centrale de Fukushima Daiichi en offrant des subventions gouvernementales alors qu’il aurait fallu consacrer plus de temps à réaliser une sérieuse vérification du dispositif antisismique.
5. Aptitude à réagir de manière compétente en situation de crise:
Le METI, de même que la NISA, étaient probablement insuffisamment préparés.
Au vu des résultats de cette audience, une sérieuse réflexion s’impose sur la question de savoir si la structure sur laquelle repose actuellement l’organisation des agences de régulation du nucléaire, y compris le METI, qui joue le rôle à la fois de promoteur de l’énergie nucléaire et de contrôleur de sa sécurité, peut être améliorée en vue d’un fonctionnement plus efficace.
14ème réunion de la Commission
Lieu : Diète Nationale du Japon
Date : 17 mai 2012
Témoin : Banri Kaieda, membre de la Chambre des Représentants et Ministre de l’Économie, du Commerce et de l’Industrie (METI) au moment de l’accident.
1. Interprétation des faits par le témoin au moment de l’accident
a) M. Kaieda a affirmé qu’il se sentait responsable de la lenteur avec laquelle fut prise la décision de déclarer la Situation de Crise Nucléaire et que la raison en était qu’il avait fallu du temps pour convaincre le Premier Ministre de le faire.
b) Il ignorait les raisons pour lesquelles le Premier Ministre de l’époque, M. Kan, s’était rendu à Fukushima Daiichi, ainsi que le but de cette visite.
c) M. Kaieda avait reçu directement de la part de M. Shimizu, président de TEPCO au moment de l’accident, un appel téléphonique concernant l’évacuation [de la centrale - ndt]. Le témoin se rappelle qu’il y était question de « la Centrale Daiichi », de « la Centrale Daini », d’une « évacuation », mais non pas d’un « retrait total du personnel ». En outre, M. Kaieda avait interprété cet appel direct de la part de M. Shimizu comme revêtant une importance particulière.
d) M. Kaieda a déclaré qu’il avait eu le sentiment que TEPCO hésitait à ordonner la ventilation ainsi qu’à mettre hors service les réacteurs 5 et 6. Il a été également précisé que si la loi de Régulation des Réacteurs Nucléaires avait été invoquée pour justifier la décision de lancer la ventilation, c’était pour pousser TEPCO à ouvrir les évents.
Ce point a révélé une ambiguïté dans la définition des responsabilités entre le gouvernement et les opérateurs des centrales.
e) M. Kaieda a évoqué la difficulté, dès le début de l’accident, à communiquer et partager l’information entre le site de l’accident, le Kantei [cabinet du Premier Ministre- ndt] et la Direction de TEPCO, comme au « jeu du téléphone », où le message chuchoté de bouche à oreille parvient déformé au destinataire. Il a ajouté: « le gouvernement doit réfléchir à ce problème ».
f) Le niveau de préparation du gouvernement était, aux dires du témoin, « insuffisant ». De plus, selon lui, « les entraînements aux situations de crise auraient dû inclure l’utilisation du système SPEEDI ».
g) Le témoin a fait une déclaration cruciale au sujet des explosions d’hydrogène : « Personne à ce moment-là n’avait un instant songé à la possibilité d’une explosion d’hydrogène ». Il a également exprimé ses regrets de n’avoir pas été en mesure d’empêcher l’explosion d’hydrogène. Il a estimé que les leçons de l’accident de Three Mile Island n’avaient pas été mises en pratique.
2. Concernant les Stress Tests
S’agissant d’imposer l’obligation de procéder à des stress tests avant le redémarrage d’une centrale, M. Kaieda a déclaré qu’il n’avait pas même envisagé de rendre obligatoire le réexamen du dispositif comme mesure possible, afin d’accélérer la procédure de redémarrage pour les opérateurs.
3. Solutions idéales pour une bonne organisation chargée de la régulation de l’industrie et de la réaction aux situations de crise
a) M. Kaieda a dit que l’organisation chargée de la réaction aux situations de crise devrait avoir des effectifs allégés afin de permettre à tous les membres de bien comprendre leur rôle. Il a estimé que la NISA n’avait pas répondu à l’attente du public dans l’exécution de ses fonctions.
b) Il a encouragé les agences chargées de la régulation à être indépendantes et à être axées sur la sécurité. Selon lui, l’organisation chargée de la régulation devrait compter parmi ses membres des experts en matériaux radioactifs ayant les connaissances et les équipements nécessaires pour réagir aux situations de crise.
15ème réunion de la Commission
Lieu : Diète Nationale du Japon
Date : 27 mai 2012
Témoin : Yukio Edano, Ministre de l’Économie, du Commerce et de l’Industrie. Il était Chef de Cabinet au moment de l’accident.
1. Points de vue de M. Edano et de M. Shimizu concernant le retrait total du personnel
M. Edano ne se souvient pas des termes exacts utilisés quand fut évoqué le projet de retirer le personnel de la centrale. Cependant, il se rappelle qu’il exprima son avis que si une évacuation totale des équipes devait avoir lieu, il s’en suivrait une détérioration de l’état des installations qui ne pourrait pas être empêchée. En réaction à ces propos de M. Edano, M. Shimizu, Président de TEPCO, n’a pas pu formuler de réponse et est resté silencieux. S’appuyant sur cette réaction, M. Edano a ajouté : ‘ »il apparaissait clairement que ce qui était envisagé dans la proposition (de M. Shimizu) n’était pas simplement une évacuation partielle ». Au cours d’une conversation téléphonique, M. Yoshida, Directeur de la centrale de Fukushima Daiichi, avait répondu à la question de M. Edano au sujet du retrait du personnel en disant : « il reste encore des tâches à accomplir sur place. Nous ferons de notre mieux ».
2. Notification de diffusion publique d’information
M. Edano avait donné l’ordre à TEPCO d’aviser le cabinet du Premier Ministre de toute diffusion publique d’information au moment où celle- ci serait effectuée, mais cette directive n’avait pas pour but de contraindre TEPCO à demander l’autorisation du cabinet du Premier Ministre avant de procéder à cette diffusion.
3. Question de l’acceptation de l’aide internationale
Le cabinet du Premier Ministre avait donné des instructions aux différents ministères pour qu’ils acceptent toute offre d’aide internationale qui pourrait être proposée, même si cela nécessitait de surmonter des considérations légales. M. Edano a alors ajouté les déclarations suivantes, à la lumière de son expérience :
1. Mauvaise diffusion de l’information
Au vu des questions soulevées aujourd’hui, il a reconnu que, du point de vue du public et des habitants de la région, l’information n’avait pas été suffisamment diffusée. Au moment des faits, il avait cru cette diffusion suffisante. Il a reconnu que la diffusion des informations concernant les risques aux personnes avait besoin d’être améliorée.
2. Problèmes concernant le traitement de l’information
Il a souligné les difficultés qu’il y avait à réunir, prévoir et devancer l’information. A titre d’exemple, il a cité le fait que le terme « précautions » utilisé dans les communiqués publics ne reposait pas sur des bases claires.
3. Nécessité de séparer les rôles de Chef de Cabinet Ministériel et de Porte-parole
M. Edano a noté qu’en l’absence d’un porte-parole unique du gouvernement, le Chef de Cabinet joue un deuxième ou double rôle. Il estime que tout particulièrement dans les cas de crise, ces deux fonctions devraient être séparées. Le porte-parole devrait avoir une formation spéciale.
16ème réunion de la Commission
Lieu : Diète Nationale du Japon
Date : 28 mai 2012
Témoin : Naoto Kan, membre de la Chambre des Représentants ; Premier Ministre du Japon au moment de l’accident
Conditions antérieures à l’accident
1. L’accident s’est produit dans une centrale nucléaire qui avait été construite et exploitée dans le cadre d’une politique nucléaire nationale, et c’est donc le gouvernement qui porte la plus grande part de responsabilité dans l’accident.
M. Kan, qui dirigeait le gouvernement au moment de l’accident, a présenté une nouvelle fois ses excuses pour n’avoir pas pu freiner l’évolution de l’accident.
2. En ce qui concerne la réaction à l’accident nucléaire, M. Kan n’avait été informé de manière détaillée avant l’accident ni de l’autorité du Premier Ministre dans ce domaine, ni de celle du directeur général de la cellule de crise.
3. L’autorité du directeur général de la cellule de crise n’avait pas été nécessairement reconnue dans sa totalité par M. Kan à l’occasion d’un exercice de simulation de crise.
Pendant l’accident
1. Le fait de se rendre sur place pour rencontrer les dirigeants de la centrale et se rendre compte de la situation a été considéré comme un point positif pour M. Kan, étant donné qu’il ne pouvait pas obtenir d’information utile de la part des membres de la NISA, de la NSC ou de la part des conseillers techniques de TEPCO au sujet de ce qu’il convenait de faire à la centrale de Fukushima Daiichi.
2. On n’avait pas pris conscience que la centrale subirait une recriticité à la suite de l’injection d’eau de mer au lieu d’eau douce, bien que M. Madarame, Président de la NSC, eût signalé qu’une telle possibilité n’était pas exclue. M. Kan a également déclaré que ces décisions (de suspendre l’injection d’eau de mer), dont on a dit qu’elles provenaient du Kantei [cabinet du Premier Ministre - ndt], pouvaient en fait n’avoir été que des avis émis par les membres de TEPCO qui se trouvaient alors au Kantei.
3. Il y eut deux appels de M. Yoshida, Directeur de la centrale de Fukushima Daiichi, à M. Hosono, (Conseiller Spécial, Cabinet du Premier Ministre), sur des questions relatives au retrait total du personnel. Dans le premier appel, M. Yoshida dit que la situation était « extrêmement tendue », et dans le second appel, qu’on avait « commencé à injecter de l’eau, et que ça semblait efficace ». M. Kan s’est souvenu d’avoir rappelé une fois mais n’a pas pu se remémorer les détails de la conversation. Puis, tôt le matin du 15 Mars, le ministre du METI avait réveillé M. Kan et c’est alors que ce dernier avait entendu pour la première fois que TEPCO proposait l’abandon de la centrale, ce qui lui avait paru absurde.
Réactions du gouvernement et du Kantei (Cabinet du Premier Ministre)
1. Se trouvant confronté aux plus grandes catastrophes conjointes jamais survenues - un tremblement de terre et un tsunami – en même temps qu’à un accident nucléaire, le centre de contrôle de la crise établi à distance, au sein du Kantei, a eu de grandes difficultés à fonctionner correctement comme poste de commande.
2. Le décret sur les mesures spéciales concernant le niveau de préparation requis pour faire face à une crise nucléaire (Nuclear Emergency Response Act) se révéla inefficace, et le Kantei fut contraint de tenir le rôle de commandant en chef.
3. Le fait de s’être personnellement rendu sur le site de l’accident fut un acte extraordinaire, qui, selon M. Kan, aurait éventuellement pu être évité si l’information lui avait été dûment communiquée en temps voulu par TEPCO et / ou par la NISA.
4. C’était M. Edano (Chef de Cabinet au moment de l’accident) qui avait refusé l’offre d’affecter des experts étrangers au bureau du Premier Ministre. M. Kan n’avait pas été informé de cette décision.
5. M. Kan n’était pas au courant du fait que l’assistance étrangère avait été repoussée par la NSC. Si cela est vrai, c’est un sérieux problème.
6. M. Kan avait suivi des conseils divers, y compris en dehors des voies officielles.
7. M. Kan avait demandé le soutien de plusieurs membres particuliers de la Diète, mais ces demandes n’avaient pas pour but de leur attribuer le rôle d’une équipe de conseillers.
Orientations pour l’avenir
M. Kan reconnaît que la catastrophe du 11 mars a mis en évidence certains problèmes fondamentaux du Japon. Il estime que la première étape en vue de réformer la politique nucléaire consiste à dissoudre la structure organisationnelle de la communauté nucléaire au Japon, laquelle est contrôlée principalement par TEPCO et par la Fédération Japonaise des Fournisseurs d’Electricité (FEPC). En outre, le fait d’inviter des experts de l’étranger pourrait produire un effet de catalyseur en vue de restructurer la communauté nucléaire au Japon. Il a exprimé sa conviction que le Japon devait aspirer à se passer de ses centrales nucléaires. M. Kan a exprimé son respect et sa reconnaissance aux personnes qui ont fourni un rude travail sur place pour faire face à l’accident survenu dans une centrale nucléaire.
17ème réunion de la Commission
Lieu : Fukushima Terrsa, Préfecture de Fukushima
Date : 29 mai 2012
Témoin : Yuhei Sato, Gouverneur de la Préfecture de Fukushima au moment de l’accident.
Conditions antérieures à l’accident
1. Le gouvernement central et TEPCO avaient affirmé que les risques relatifs aux catastrophes nucléaires avaient été correctement circonscrits et que la région était protégée dans le cadre d’une philosophie de défense en profondeur.
2. L’évacuation dans un rayon de 2 kilomètres fut décidée par le gouvernement local de la préfecture sur sa propre initiative, parce que le gouvernement central n’avait pas agi suffisamment vite. Toutefois, l’ordre d’évacuation ne fut pas diffusé correctement en raison des pannes des systèmes de communication. Par la suite, les ordres d’évacuation décrétés par le gouvernement central furent répercutés par les médias, mais le gouvernement de la préfecture ne reçut aucune directive concrète de la part du gouvernement central. Ceci eut pour conséquence que les habitants furent contraints de subir une évacuation extrêmement difficile et bouleversante.
Mise en pratique de l’utilisation du plutonium comme combustible à la centrale
1. L’une des trois conditions fixées par le gouvernement préfectoral en réponse au gouvernement central préalablement à toute décision de procéder à une utilisation thermique du plutonium dans le réacteur Nº 3 de Fukushima Daiichi était que ce dernier devait atteindre le même niveau de résistance antisismique que celui qui apparaissait dans le rapport intérimaire de vérifications du réacteur Nº 5. Toutefois, M. Sato affirme que lorsque l’utilisation thermique du plutonium fut mise en place dans le réacteur Nº 3, il ignorait que parmi les vérifications effectuées ne figuraient pas les mesures anti- tsunami comme pour le réacteur Nº 5.
2. En outre, M. Sato déclare qu’il n’était pas informé de l’existence d’une subvention spéciale liée au projet d’utilisation thermique du plutonium, alors que c’était pourtant bien lui qui avait mis ce projet en pratique.
Orientations pour l’avenir
1. M. Sato a fait valoir que le cloisonnement des fonctions administratives était un obstacle à la sécurité nucléaire, et a exprimé son opinion que l’unification de ces multiples fonctions était éminemment souhaitable.
2. Il y avait eu des contradictions dans l’information, y compris dans l’information relative au système SPEEDI. Un autre obstacle était que le partage de l’information et la communication au sein de la cellule de crise n’étaient pas suffisants et que le gouvernement préfectoral avait des problèmes d’organisation. M. Sato a dit qu’il souhaitait une réforme de la gestion des situations de crise. Il a exprimé son avis qu’il était essentiel d’améliorer l’échange des idées, de mettre en place une organisation plus efficace et de faciliter l’intervention des experts, tout cela de manière étroitement coordonnée, afin d’éviter les accidents à l’avenir.
3. La Nation a largement apporté son soutien à Fukushima et à ses habitants depuis la catastrophe. En retour, M. Sato a dit qu’il voulait apporter sa contribution à la création d’une communauté plus intégrée offrant la promesse que jamais une telle catastrophe ne se reproduirait.
18ème réunion de la Commission
Lieu : Diète Nationale du Japon
Date : 8 juin 2012
Témoin : Masataka Shimizu, président de TEPCO au moment de l’accident.
Problèmes de communication
1. Le président Shimizu n’était « pas au courant que le Kantei [cabinet du Premier Ministre - ndt] n’avait pas confiance en la réaction de TEPCO concernant l’ouverture des évents » lorsqu’il revint de son voyage d’affaires. En outre, c’est seulement après les déclarations du Premier Ministre qu’il « découvrit » que le Premier Ministre avait interprété la proposition concernant le retrait du personnel comme signifiant un « retrait total ». Il semble que M. Shimizu ne se soit pas rendu compte de la disparité des points de vue entre la façon dont le Kantei percevait la situation et celle dont TEPCO la percevait. Les échanges entre le Kantei et TEPCO étaient entravés par les malentendus et la méfiance, ce qui eut pour effet de créer cette controverse concernant l’interprétation du mot « évacuation ».
2. En marge de ce témoignage, l’enquête de la Commission a confirmé le fait que le personnel était bien présent sur le terrain, déployant tous ses efforts pour résoudre les problèmes des réacteurs, et qu’il n’avait pas envisagé d’abandonner le site. Par ailleurs, aucune preuve n’a été découverte que TEPCO eût pris la décision d’opérer un « retrait total ».
3. D’après l’enquête de la Commission, si la situation des réacteurs nucléaires qui se trouvaient dans un état critique fut finalement maîtrisée, c’est grâce au personnel qui se trouvait sur le terrain, car il avait une bonne compréhension de l’état dans lequel se trouvaient les réacteurs, et la conscience de ses responsabilités lui enjoignait de demeurer sur place jusqu’au bout de la crise.
4. A cette fin, TEPCO n’aurait pas dû s’adresser au Kantei pour recevoir des instructions. Au lieu de cela, des personnes qui se trouvaient sur place ou quelqu’un qui possédait la qualification requise pour porter un jugement technique sur la situation auraient dû prendre les décisions, comme cela fut le cas par exemple lorsque fut prise la décision d’injecter de l’eau de mer.
5. Ces considérations invitent à engager un important débat sur la position de l’opérateur et sur le bien-fondé des interventions du Kantei, lequel ne possédait pas l’expertise nucléaire.
6. M. Shimizu a insisté sur l’importance de disposer de bâtiments résistant aux tremblements de terre en remarquant qu’il était « effrayant d’imaginer ce qui se serait produit si TEPCO n’en avait pas eu ». Diverses mesures pour se préparer à l’éventualité d’un cas plus grave même encore sont nécessaires. Il est bien clair maintenant combien il est important d’assurer la sécurité des ouvriers dans les centrales pour protéger la vie du public.
19ème réunion de la Commission
Lieu : Diète Nationale du Japon
Date : 9 juin 2012
Résumé des résultats de l’enquête
Les résultats de l’enquête ont montré que les lenteurs du gouvernement dans la transmission et la communication de l’information concernant l’accident ont été à l’origine de la confusion qui s’en est suivie. Du point de vue des personnes évacuées, des consignes d’évacuation lancées au coup par coup ont fait que beaucoup de personnes ont été évacuées plusieurs fois, parfois en direction de zones affectées de doses de radiation élevées, et / ou en n’emportant que le strict nécessaire. Les voix et les opinions des habitants évacués qui n’ont pas d’autre endroit où aller ont été très claires. Les problèmes ne sont pas encore résolus. Des mesures appropriées doivent être envisagées dès que possible. Nous communiquerons ce message à la Diète.
19ème réunion de la Commission
Glossaire
[Beaucoup de termes et de sigles étant spécifiques à la langue anglaise, nous avons préféré laisser le texte anglais en regard de la traduction, ndt]
Acute radiation disorder An acute illness resulting from a high dose usually exceeding 500mSV to most or all of the body in a short period of time.
B.5.b The section of the 2002 NRC Security Order that addresses damage from fire or explosion such as could occur from the impact of a large commercial aircraft. Backcheck A review of the safety of a nuclear power plant—a term peculiar to the Japanese nuclear industry.
Backfit The modification of or addition to systems, structures, components, or design of a plant or a facility; or the design approval or manufacturing license for a facility; or the procedures or organization required to design, construct, or operate a plant or a facility.
Becquerel Bq The unit of radioactivity in which one nucleus decays per second. Condensate storage tank A tank containing water used for a reactor‘s cooling systems.
Condensate water transfer pump The pump for water from the condensate storage tank.
Containment vessel The gas-tight shell around a nuclear reactor.
Core damage Damage to the central part of the reactor that contains the fuel and produces heat.
Defense-in-depth The practice of having multiple, redundant, and independent layers of safety systems to safeguard the reactor core.
ECCS Emergency Core Cooling System
Acute radiation disorder. Maladie aiguë résultant d’une forte dose dépassant habituellement 500mSV à la plupart ou la totalité du corps dans un court laps de temps.
B.5.b. Section de la recommandation de la NRC de 2002 qui aborde les dommages causés par un incendie ou une explosion qui pourraient se produire suite à l’impact d’un gros avion commercial.
Backcheck. Revue de sûreté d’une centrale nucléaire [terme propre à l'industrie nucléaire japonaise, ndt].
Backfit. Mise en conformité. L’ajout ou la modification de systèmes, de structures, de composants ou de la conception initiale d’une usine ou d’une installation ; ou l’approbation de la conception ou de la licence de fabrication pour une installation ; ou l‘approbation des procédures ou de l’organisation nécessaires à la conception, à la construction, à l‘exploitation d’une usine ou d’une installation.
Becquerel Bq. Unité de radioactivité correspondant à une désintégration nucléaire par seconde.
Condensate storage tank. Réservoir d’eau du condenseur utilisée pour les systèmes de refroidissement d’un réacteur.
Condensate water transfer pump. Pompe de transfert de l‘eau du condenseur vers le réacteur.
Containment vessel. Enceinte de confinement étanche autour d’un réacteur nucléaire.
Core damage. Dommages au cœur du réacteur contenant le combustible et produisant de la chaleur.
Defense-in-depth. Défense en profondeur. Mise en place de niveaux multiples, redondants, et indépendants de systèmes de sécurité pour protéger le cœur du réacteur.
ECCS Emergency Core Cooling System. Systèmes de refroidissement d‘urgence du cœur.
ERSS Emergency Response Support System – a system of information sharing between nuclear power plants and government agencies designed to facilitate a coordinated and effective response from the national government.
FEPC Federation of Electric Power Companies (Hokkaido Electric Power Co., Hokuriku Electric Power Co., Chubu Electric Power Co., The Chugoku Electric Power Co., The Okinawa Electric Power Co., Kyushu Electric Power Co., Shikoku Electric Power Co., The Kansai Electric Power Co., Tokyo Electric Power Co. and Tohoku Electric Power Co.) – A federation of the ten privately owned electric power utilities created in 1952 to facilitate communication and cooperation between them.
Filtrate tank Part of the water injection backup line of the plant, connected by a pump to the water tank that draws from Sakashita dam.
gal A unit of acceleration defined as one centimeter per second squared. Hardened vent A separate vent pipe designed to withstand higher loads during an accident such as a station blackout, and routed to an elevated point outside the reactor building.
HPCI High pressure coolant injection system – the first line of defense in the emergency core cooling system. HPCI is designed to inject substantial quantities of water into the reactor while it is at high pressure so as to prevent the activation of the automatic depressurization, core spray, and low pressure coolant injection systems.
IAEA International Atomic Energy Agency – an international organization that seeks to promote the peaceful use of nuclear energy, and to inhibit its use for any military purpose, including nuclear weapons.
IC Isolation condenser – a heat exchanger located above containment in a pool of water open to atmosphere. In operation, decay heat boils steam, which is drawn into the heat exchanger and condensed; then it falls back into the reactor.
ERSS Emergency Response Support System. Système de gestion des urgences : un système de partage de l’information entre les centrales nucléaires et les organismes gouvernementaux destiné à faciliter une réponse coordonnée et efficace du gouvernement central.
FEPC. Federation of Electric Power Companies Fédération des compagnies électriques (Hokkaido Electric Power Co., Hokuriku Electric Power Co., Chubu Electric Power Co., The Chugoku Electric Power Co., La Okinawa Electric Power Co., Kyushu Electric Power Co., Shikoku Electric Power Co., Le Kansai Electric Power Co., Tokyo Electric Power Co. et Tohoku Electric Power Co.) Une fédération des dix compagnies d’électricité privées créée en 1952 pour faciliter la communication et la coopération entre elles.
Filtrate tank. Réservoir à eau filtrée. Elément de l‘alimentation de secours en eau de l‘usine, relié par une pompe au réservoir d’eau [non filtrée] en provenance du barrage de Sakashita.
Gal. Mesure d‘une caractéristique sismique : c‘est l‘unité d’accélération au sol définie par un cm/s2.
Hardened vent. Tubulure d‘évent renforcée, conçue pour résister aux pressions élevées lors d’un accident (par exemple une panne totale d’électricité) et qui débouche en un point élevé, à l’extérieur du bâtiment du réacteur.
HPCI High Pressure Coolant Injection system. Système d’injection haute pression du liquide de refroidissement – la première ligne de défense dans le système de refroidissement d’urgence du cœur. Elle est conçue pour injecter des quantités importantes d’eau dans le réacteur pendant qu’il est sous une pression élevée de façon à empêcher l’activation de la dépressurisation automatique, la pulvérisation dans le cœur et le déclenchement des systèmes d‘injection de refroidissement à basse pression de fluide caloporteur.
IAEA International Atomic Energy Agency. Agence Internationale de l‘Energie Atomique, AIEA, organisation qui cherche à promouvoir l‘usage pacifique de l‘énergie nucléaire et à empêcher son utilisation à des fins militaires, dont les armes nucléaires.
IC Isolation Condenseur. Condenseur d‘isolation. Un échangeur de chaleur situé au-dessus de la cuve de confinement, dans un bassin d’eau à l’air libre. En fonctionnement, la vapeur d‘eau chauffée est envoyée vers l’échangeur de chaleur et condensée, puis elle retombe dans le réacteur.
INES International Nuclear and Radiological Event Scale – a seven-level scale for assessing and communicating safety information regarding nuclear and radiological incidents.
JNES Japan Nuclear Energy Safety Organization – an incorporated administrative agency established to ensure safety in the use of nuclear energy, which works in conjunction with NISA.
Kantei The Prime Minister‘s Office - The building housing both the Prime Minister‘s official office and residence. In this report, ―Kantei‖ most often refers to the Prime Minister and the ad hoc group on the 5th floor, which was responsible for the government‘s response to the accident. LOCA loss of coolant accident – a mode of failure for a nuclear reactor that can result in core damage, unless it is mitigated by ECCS.
Make-up system A system used to add water to the reactor coolant system under normal operating conditions. M/C High voltage metal-clad type switchgear – In an electric power system, switchgear is the combination of electrical switches, fuses or circuit breakers used to control, protect and isolate electrical equipment. METI Ministry of Economy, Trade & Industry
MEXT Ministry of Education, Culture, Sports, Science, and Technology.
Millisievert mSv A unit of equivalent radiation dose.
NAIIC Nuclear Accident Independent Investigation Commission
NISA Nuclear and Industrial Safety Agency – a government regulatory agency under METI.
INES International Nuclear and radiological Event Scale. Echelle internationale [de mesure] des évènements nucléaires et radiologiques. Une échelle à sept niveaux pour évaluer et communiquer les informations de sécurité concernant des incidents ou accidents nucléaires et radiologiques.
JNES Japan Nuclear Energy Safety organization. Une agence administrative mise en place pour assurer la sécurité dans l‘utilisation de l’énergie nucléaire, qui travaille en collaboration avec le régulateur (la NISA).
Kantei Cabinet du Premier Ministre. Le bâtiment abritant à la fois le bureau officiel du Premier ministre et sa résidence. Dans ce rapport, « Kantei » renvoie le plus souvent au Premier ministre et au groupe de travail ad hoc du 5ème étage qui était responsable de la réponse du gouvernement à l’accident.
LOCA Loss Of Coolant Accident. Perte accidentelle de fluide caloporteur. Un accident nucléaire qui peut entraîner des dommages du cœur, sauf s‘il est atténué par les systèmes de refroidissement d‘urgence.
Make-up system. Un système utilisé pour ajouter de l’eau au système de refroidissement du réacteur dans les conditions normales de fonctionnement.
M/C. Commutateur haute tension de type blindé. Dans un système d’alimentation électrique, cet appareillage est la combinaison de commutateurs électriques, de fusibles ou de disjoncteurs utilisés pour contrôler, protéger et isoler l’équipement électrique.
METI. Ministry of Economy, Trade & Industry. Ministère de l’Economie, du Commerce et de l’Industrie.
MEXT. Ministère de l’Education, de la Culture, des Sports, de la Science et de la Technologie.
Millisievert mSv. Unité de dose équivalente de rayonnement.
NAIIC Nuclear Accident Independent Investigation Commission. Commission d‘enquête indépendante sur l‘accident nucléaire de Fukushima nommée par la diète japonaise.
NISA Nuclear and Industrial Safety Agency. Agence de Sécurité Industrielle et Nucléaire, un organisme gouvernemental de réglementation sous tutelle du METI, Ministère de l’Economie, du Commerce et de l’Industrie.
NSC Nuclear Safety Commission of Japan – a government administrative body under the Cabinet Administration Office (CAO) that oversees the regulators and the operators.
PBq PetaBecquerel. 1015 Bqs.
Reactor A device in which a fission chain reaction can be initiated, sustained and controlled.
RCIC Reactor core isolation cooling system – RCIC is a feedwater pump meant for emergency use. It is able to inject cooling water into the reactor at high pressure. SBO Station blackout – a complete loss of alternating current electric power to the station.
SCRAM Safety Control Rod Axe Man – Rapid shutdown of a nuclear reactor where fission is halted by inserting control rods into the core.
Shelter-in-place order An order to take immediate shelter in a location readily accessible by sealing it off from outside contaminants and shutting off all air circulation systems. For many residents this meant their own houses.
SPEEDI System for Prediction of Environmental Emergency Dose Information. SR Safety relief valve – a safety device designed to protect a pressurized vessel or system during an overpressure event.
TEPCO Tokyo Electric Power Company, the operator of the Fukushima Daiichi Nuclear Power Plant
Venting A system designed to vent accumulated hydrogen gas in the reactor buildings.
Yield strength Yield strength is the stress beyond which a specified amount of permanent deformation of a material occurs.
480V bus cross-tie breaker A cross-tie breaker is a connection between electric power systems by means of which each can interchange power with the other. NSC Nuclear Safety Commission of Japan. Commission de sûreté nucléaire du Japon. Un organisme administratif gouvernemental sous la tutelle du Bureau central de l’administration (CAO), qui supervise les régulateurs et les opérateurs.
PBq PetaBecquerel. 1015 Bqs.
Réacteur Installation dans laquelle une réaction de fission en chaîne peut être initiée, soutenue et contrôlée.
RCIC Reactor Core Isolation Cooling system. C‘est une pompe d’alimentation en eau destinée à un usage d‘urgence. Elle est en mesure d’injecter de l’eau de refroidissement sous haute pression dans le réacteur.
SBO Station Black Out. Une perte totale de courant alternatif.
SCRAM Safety Control Rod Axe Man. Arrêt rapide d’un réacteur nucléaire dans lequel la fission est interrompue par l’insertion des barres de contrôle dans le cœur.
Shelter-in-place order. Instruction demandant de se mettre immédiatement à l‘abri dans un endroit facilement accessible, protégé des contaminants extérieurs et toutes circulations d‘air coupées. Pour de nombreux résidents, cela signifiait de se calfeutrer dans leurs propres maisons.
SPEEDI System for Prediction of Environmental Emergency Dose Information. Système de gestion des informations d’urgence concernant l‘irradiation de l’environnement.
SR Safety Relief valve. Vanne de décharge. Un dispositif de sécurité conçu pour protéger une enceinte ou un système lors d’un événement de surpression. TEPCO. Tokyo Electric Power Company. L’opérateur de la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi.
Venting. Système de ventilation conçu pour évacuer l‘hydrogène accumulé dans les bâtiments réacteurs.
Yield strength. Limite élastique : contrainte au-delà de laquelle la déformation d’un matériau est permanente
480V bus cross-tie breaker. Installation de tête protégée par disrupteurs-inverseurs qui permet d‘interchanger des alimentations électriques de 480V.
Clause de non-responsabilité
Nous nous sommes efforcés dans cette traduction anglaise de respecter avec la plus grande exactitude le contenu et l’esprit du texte japonais d’origine. Cette traduction n’est destinée qu’à faciliter au public non- japonais l’accès [au rapport] ; elle n’offre aucune garantie d’exactitude, ni expresse ni implicite.
Si des questions se posent concernant l’exactitude de l’information contenue dans la traduction, prière de se référer à la version japonaise du rapport de la Commission qui constitue la version officielle du document. Toute divergence ou différence créée dans la traduction n’est pas contraignante et n’a aucune valeur juridique à des fins de mise en application.
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