LE GRAND CANYON DANS L’ARIZONA EN TIMELAPSE…MAGNIFIQUE !

LE GRAND CANYON DANS L’ARIZONA

LE GRAND CANYON DANS L'ARIZONA EN TIMELAPSE...MAGNIFIQUE ! dans REFLEXIONS PERSONNELLES grand-canyonfsfs

Le Grand Canyon est situé dans l’Arizona, aux États-Unis.
Au total, 80 000 photos prises sur une période de 7 jours.
La musique est signée Figgy et le titre est «Don’t Waste»

Publié dans:REFLEXIONS PERSONNELLES |on 26 novembre, 2012 |4 Commentaires »

« LOVEFIELD » UN COURT METRAGE GENIAL DE MATHIEU RATTHE !

«LOVEFIELD»

un film de Mathieu RATTHE

Il combine des éléments d’horreur, de suspense et de drame pour créer une histoire qui emmène le spectateur vers une fin…très…spéciale !

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Publié dans:REFLEXIONS PERSONNELLES |on 26 novembre, 2012 |1 Commentaire »

ETUDE SUR LA CONTRIBUTION DU BIOMIMETISME A LA TRANSITION VERS UNE ECONOMIE VERTE EN FRANCE: ETAT DES LIEUX, POTENTIEL, LEVIERS (Hermine DURAND / Catherine LARRIEU / Claire HUBERT)

Étude sur la contribution du biomimétisme à la

transition vers une économie verte en France :

Etat des lieux, potentiel, leviers

ETUDE SUR LA CONTRIBUTION DU BIOMIMETISME A LA TRANSITION VERS UNE ECONOMIE VERTE EN FRANCE: ETAT DES LIEUX, POTENTIEL, LEVIERS (Hermine DURAND / Catherine LARRIEU / Claire HUBERT) dans REFLEXIONS PERSONNELLES biomimetisme-design

(Hermine DURAND / Catherine LARRIEU / Claire HUBERT)

30 octobre 2012 - DÉVELOPPEMENT DURABLE-

Commissariat Général au Développement Durable
Études et documents – Numéro 72 – Octobre 2012-

fichier pdf Etude sur la contribution du biomimétisme à la transition vers une économie verte en FRANCE état des lieux, potentiel, leviers

Le terme de biomimétisme désigne l’imitation de propriétés remarquables du vivant dans les activités humaines. Il recouvre des champs variés : produits et technologies biomimétiques dans le monde industriel, nouvelles pratiques agricoles ou forestières tirées de l’observation des écosystèmes naturels, ou encore nouveaux schémas d’organisation inspirés de la nature. L’écomimétisme désigne plus particulièrement l’étude de fonctionnements écosystémiques intéressants, pour en reproduire les conditions et donc les avantages ; il peut être considéré comme un secteur du biomimétisme.

Depuis plus de 20 ans, de nombreux travaux de recherche et d’innovation sur le biomimétisme ont été réalisés à l’échelle mondiale mais n’ont eu que peu de résonance en France. Pourtant, savoir qu’il faudrait déjà plusieurs planètes pour héberger durablement une humanité avec nos standards de vie impose d’en tenir compte en termes d’innovation. La réflexion classique consiste en effet à partir des produits et procédés actuels et d’en améliorer les performances en termes de ressources consommées, de déchets, d’impacts sur les milieux ; une autre est de chercher à reproduire avec des procédés classiques, industriels ou agricoles, des matériaux naturels intéressants. La voie du biomimétisme et de l’écomimétisme consisterait plutôt, à l’inverse, à partir de processus ou matériaux naturels, généralement effectués ou obtenus à pression et température basses, à partir de substances non rares et renouvelées, intégralement recyclées et sans rejets toxiques, et d’examiner ce qu’il est éventuellement nécessaire de « dégrader » ou de transposer de ces performances pour obtenir une production importante ou un effet à l’échelle souhaitée. Bien sûr les questions d’éthique ne devront pas être absentes de la démarche.

Les exigences auxquelles nos sociétés sont aujourd’hui confrontées du fait des limites physiques et biologiques de la planète nécessitent donc de revisiter les mécanismes du monde vivant, non seulement à l’échelle des espèces mais aussi à celle des écosystèmes, pour trouver des réponses innovantes s’inscrivant dans ces limites, en termes de produits, de procédés et d’organisations. Ainsi le biomimétisme est, selon un rapport du Sénat de 2007, « l’une des boîtes à outils de la quatrième révolution industrielle ».

Il ne s’agit pas d’affirmer a priori que toutes les activités humaines actuelles pourraient être réalisées de cette façon, mais de prendre au sérieux les limites planétaires et d’en tirer toute la créativité possible. C’est pourquoi le Commissariat Général au Développement Durable a fait de ce sujet l’une des actions de ses 5 chantiers transversaux pour 2012-2013, dans la perspective d’une économie verte, résiliente et équitable.

Pour préparer cette action, l’objectif de la présente étude, réalisée par Hermine DURAND de septembre 2011 à janvier 2012 en relation avec trois entités du CGDD (DDD, DRI, SEEIDD), est de faire un état des lieux de la recherche et de l’innovation françaises en matière de biomimétisme et d’en évaluer le potentiel dans la perspective d’une économie verte et résiliente. A partir de recherches bibliographiques et de rencontres avec de nombreux acteurs, elle brosse un portrait du biomimétisme en France et dans le Monde :

- en identifiant les acteurs et les enjeux du biomimétisme dans le contexte de l’économie verte,

- en donnant des exemples d’applications industrielles du biomimétisme en fonction des filières vertes et en analysant leur caractère effectivement soutenable,

- en présentant et illustrant l’écomimétisme comme un outil participant à la construction d’une agriculture plus durable.

Publié dans:REFLEXIONS PERSONNELLES |on 23 novembre, 2012 |Pas de commentaires »

SECHERESSE: 70% DES FORÊTS AU BORD DE L’EMBOLIE

Sécheresse:

SECHERESSE: 70% DES FORÊTS AU BORD DE L'EMBOLIE dans REFLEXIONS PERSONNELLES foret70% des forêts au bord de l’embolie

PARIS (Sipa) — Les deux tiers des forêts de la planète sont très vulnérables face au risque de sécheresse, indique une étude internationale publiée cette semaine sur le site internet de la revue Nature.

Un équipe internationale de 24 scientifiques spécialistes de la physiologie des plantes s’est penchée sur le problème de la résistance des arbres face au manque d’eau. Et leurs conclusions battent en brèche un certain nombre d’idées reçues. Alors qu’il apparaît a priori évident que les forêts des régions sèches sont plus exposées que les autres à un risque fatal de pénurie d’eau, les données qu’ils ont rassemblées montrent que les forêts humides sont tout aussi exposées à ce risque.

La raison de ce paradoxe est résumée par l’Institut National de Recherche Agronomique (INRA), dont plusieurs chercheurs ont contribué à l’étude: « les arbres optent pour une stratégie hydraulique à haut risque ». En clair, quelle que soit la pluviométrie de la région où ils se trouvent, les arbres -qu’ils soient feuillus ou conifères- ont l’habitude de vivre sur le fil du rasoir en matière de gestion de l’eau, ne se laissant que peu de marge en cas de baisse des pluies.

Sans eau, les arbres sont victimes d’embolies

Pourquoi tant d’espèces convergent-elles sur une stratégie si risquée? C’est la marque, selon l’étude « d’un compromis qui concilie croissance et protection contre le risque de mortalité ». La « faible marge de sécurité » prise par les arbres leur permet en effet d’optimiser l’utilisation du carbone nécessaire à leur croissance mais « peut se payer au prix de leur mort » .

En effet, explique l’INRA, lorsque les pluies se font moins importantes et que le sol se dessèche, « la sève des arbres est exposée à de très fortes tensions qui peuvent rompre les colonnes d’eau à l’intérieur de leur système vasculaire. Ce phénomène de ‘cavitation’ produit une embolie gazeuse de la même manière que des thromboses peuvent bloquer le système circulatoire des humains ». Et lorsque la sécheresse s’accentue, « l’embolie s’accumule dans le système vasculaire jusqu’à ce que l’arbre se dessèche et meure ».

En tout, estiment les scientifiques, 70% des arbres dans le monde atteignent d’ores et déjà leur seuil de rupture hydraulique. Or le changement climatique laisse prévoir une augmentation de la température et de l’aridité dans de nombreuses régions du globe, rappellent-ils. Si l’étude n’envisage pas de scénarios catastrophiques, elle pourrait aider à prévoir quelles espèces pourraient ne pas survivre à ces changements climatiques.

(Sipa / 23.11.2012 13h17)

Publié dans:REFLEXIONS PERSONNELLES |on 23 novembre, 2012 |Pas de commentaires »

LES SCIENTIFIQUES LE DISENT: LA DENATALITE OU LA MORT ! (Pièces et main d’oeuvre)

Les scientifiques le disent :

La dénatalité ou la mort !

LES SCIENTIFIQUES LE DISENT: LA DENATALITE OU LA MORT ! (Pièces et main d'oeuvre) dans REFLEXIONS PERSONNELLES natalite

dimanche 14 octobre 2012 par Pièces et main d’œuvre

« Maintenant, ce n’est plus seulement Pièces et main d’œuvre qui le dit, c’est Nature. » Ainsi parlaient des chercheurs, il y a quelques jours dans les couloirs de la fac d’Orsay. Ils avaient tort. Bien d’autres, depuis des décennies, prophètes de malheur et oiseaux de mauvais augure, annoncent l’effondrement écologique et ses effets catastrophiques pour l’humanité. Mais pour éveiller l’attention d’universitaires diplômés et des médias, il faut la caution – tardive – de la plus prestigieuse revue scientifique du monde.

Deux revues font autorité dans le milieu scientifique mondial. Publier dans Science ou Nature est un triomphe pour les chercheurs. Nature, publication britannique créée en 1869, est la revue scientifique interdisciplinaire la plus citée au monde.

Le 7 juin 2012, elle a publié une synthèse signée d’une vingtaine de chercheurs internationaux (spécialistes en paléontologie, biologie, géosciences, géographie, biochimie, géologie, biodiversité, entre autres, mais aussi « écoinformatique et écologie computationnelle »), intitulée « Approching a state shift in Earth’s biosphere » (à lire ici), nous alertant d’un proche basculement de la biosphère, irréversible et brutal.

Ayant croisé de nombreuses sources, les auteurs concluent : la conjugaison de la crise climatique, de la perte accélérée de la biodiversité, de la transformation rapide des flux d’énergie et de la dégradation générale des écosystèmes pourrait conduire à un seuil irréversible, provoquant un bouleversement comparable à celui qui a fait passer la Terre de l’ère glaciaire à l’actuelle ère inter-glaciaire, il y a 12 000 ans. Cette fois, le basculement se produirait d’un coup, sans que nul ne puisse prédire son issue – quoique les auteurs ne se montrent guère optimistes pour l’espèce humaine. Les ressources biologiques subiraient des changements rapides et imprévisibles en quelques générations.

Deux raisons à cette agonie : la croissance démographique et de la consommation des ressources per capita. L’étude nous apprend que 43 % de la surface de la planète est déjà exploitée par l’homme (agriculture et urbanisation). Si on atteint les 50 %, on ne pourra ni empêcher, ni retarder un effondrement planétaire, estiment les auteurs. À niveau de consommation des ressources naturelles constant, nous atteindrons ce seuil avec 8,2 milliards de Terriens. Soit, selon les estimations des démographes, en 2025. Dans treize ans. 

« Mes collègues qui étudient les changements liés au climat dans l’histoire de la Terre sont plus qu’inquiets. En fait, certains sont terrifiés », confie Arne Mooers, l’un des co-auteurs, professeur de biodiversité à la Simon Fraser University (Canada). (1)

L’étude publiée par Nature n’est pas terrifiante seulement pour sa revue des progrès de la catastrophe. On y sent poindre aussi la tyrannie éco-technicienne, la planification écologique et l’Enfer Vert (2), quand les scientifiques en appellent au remplacement de l’énergie fossile par d’autres sources énergétiques, à l’amélioration de l’efficacité agricole, à un meilleur management des « réservoirs de biodiversité et des services de l’écosystème ». La langue trahit les techniciens du Vivant et les gestionnaires du désastre. Deux cents ans de progrès technologique et d’industrialisation ayant abouti à la fois à l’imminence d’une catastrophe et au pilotage informatique de la société-machine, il est bien naturel de voir s’épanouir des disciplines telles que l’écoinformatique, « synthèse des sciences de l’environnement et des sciences de l’information qui définit les entités et processus des systèmes naturels dans un langage que les humains et les ordinateurs peuvent traiter. » (3)

Aussi peut-on lire sous la plume d’un promoteur de l’intelligence artificielle, à propos de l’effondrement annoncé par Nature : « Nous sommes pour notre part confirmés dans notre propre hypothèse selon laquelle l’évolution en cours est déterminée globalement par des compétitions entre systèmes anthropotechniques échappant au volontarisme des « systèmes cognitifs » limités que nous sommes. » (4) La technologie nous a conduits au désastre ? Il nous faut plus de technologie. Décrétons le cyber-état d’urgence planétaire.

Confions notre sort aux « systèmes cognitifs » illimités d’IBM, par exemple. Rien pour choquer la CGT, le Front de Gauche, le parti industriel et ses souteneurs médiatiques, tant qu’un tel projet crée des emplois. « Pas de futur sans industrie », pouvait-on lire sur une banderole à Lyon, le 9 octobre 2012 dans la manifestation de la CGT « pour l’emploi et l’industrie ». Et le syndicat de rabâcher sur son site et dans les interviews de ses représentants : « un emploi dans l’industrie génère 3 à 5 emplois dans les services et la sous-traitance qui permettent, par la consommation des salariés, d’alimenter l’économie, donc le développement industriel et l’emploi ».

Alimenter l’économie, donc le développement industriel et l’emploi, c’est se ruer vers le seuil irréversible des 50 % de la planète artificialisés. C’est, par exemple, dévaster les Alpes pour frayer la voie ferrée à grande vitesse Lyon-Turin et transporter plus de marchandises plus vite et plus loin. Quelques centaines d’emplois contre quelques pas de plus vers le seuil d’effondrement de la biosphère, le combat est trop inégal. Écoutons Daniel Mermet sur France Inter, en écho aux manifestants cégétistes :« Finalement c’est les histoires qui nous hantent et qui hantent ce pays en général depuis des décennies, c’est-à-dire l’emploi, c’est-à-dire les licenciements, c’est-à-dire cette hantise, cette peur, cette terreur, cette grande peur de cette époque déjà depuis longtemps ». (5) D’accord. Recréons les Ateliers Nationaux, comme en 1848, et employons les chômeurs à creuser des trous, et à les reboucher – par exemple sur le chantier du Lyon-Turin.

Entre les fous de la croissance et de l’emploi, et les aspirants à la tyrannie écolo-technicienne, quelle place est la nôtre ? Depuis des décennies, le courant luddite, anti-industriel et anti-technologie, expose la double menace de la fuite en avant techno-industrielle : la destruction de la nature est indissociable de la destruction de la liberté et de la dignité humaines. La catastrophe annoncée et les solutions avancées vérifient ces analyses, révélant les liens étroits entre saccage de la planète et société de contrainte. Puisqu’il n’y aura plus d’eau potable, d’air respirable, de sols fertiles pour tous, seule une gestion rationnelle, optimisée, automatisée et encadrée des ressources résiduelles permettra de prolonger notre survie. C’est parce que nous défendons la nature et la Terre (et non les « services rendus par l’écosystème »), et une humanité digne et émancipée que nous combattons l’industrie, la croissance, et leur moteur, les technologies.

Dans le rituel militant, nous sommes censés finir ce texte par des mots d’ordre positifs ou du moins offensifs. Nous nous en tiendrons à ces trois-là :

- Partage de la pénurie. 
- Grève du gaspillage. 
- Grève des ventres.

NOTES: 
- (1) http://www.sfu.ca/pamr/media-releas… 
- (2) Cf L’Enfer Vert, par TomJo (éditions Badaboum, 2011) et ici 
- (3) The Ecoinformatics Collaboratory at the Ground Institute for Ecological Economics, University of Vermont, cité par Wikipédia. 
- (4) J.P Baquiast, http://blogs.mediapart.fr/blog/jean… 
- (5) Là-bas si j’y suis, 12/10/12

(Pour télécharger ce texte, cliquer sur l’icône ci-dessous.)

Lire aussi : 
- De la popullulation, Simples citoyens, 8 novembre 2004 (ici
- À la recherche du nouvel ennemi. 2001-2025 : rudiments d’histoire contemporaine, Pièces et main d’œuvre (éditions l’Echappée, 2009) 
- L’industrie de la contrainte, Pièces et main d’œuvre (éditions l’Echappée, 2011)

Publié dans:REFLEXIONS PERSONNELLES |on 18 octobre, 2012 |Pas de commentaires »

OURS BLANC RACONTE L’HISTOIRE DES HOPIS (Joseph F.BLUMRICH-1913 / 2002)

« Ours Blanc » raconte l’histoire des HOPIS

Joseph F. BLUMRICH(1913-2002)
« Kásskara et les sept mondes »
L’histoire de l’humanité selon la tradition des Indiens HOPIS
Ecrit au printemps 1979 Edition actualisée‚ Munich‚ 1985
Traduction Hans W. Lintz – Copyright 2005

Entretien avec OURS BLANC, du clan des coyotes, conteur de la tribu HOPIS du Nouveau-Mexique :
Ceci est l’histoire de mes ancêtres et des clans qui sont venus sur ce continent. Le continent sur lequel mon peuple vécut longtemps a sombré dans la mer et les gens durent le quitter. Ils durent aller sur un nouveau continent qui sortait de la mer à l’est‚ afin d’avoir un nouveau monde pour eux et faire un nouveau commencement. Tout ceci fut provoqué par leur attitude dans certaines situations. Je te raconterai pourquoi c’est arrivé‚ comment ils sont parvenus sur le nouveau continent que nous appelons le quatrième monde‚ Tóowakachi‚ et ce qui leur est arrivé après.

Comme tu le sais‚ les HOPIS‚ dans leurs familles‚ suivent la lignée de la mère. C’est pourquoi j’appartiens au clan de ma mère‚ le clan des coyotes‚ et je dois à ma mère et à ma grand-mère une grande partie de mon savoir‚ ainsi qu’à mon oncle du même clan. Ils m’ont donné un bon enseignement. (…)Maintenant‚ il est temps de parler de notre peuple‚ pour vous dire qui nous sommes et pourquoi nous sommes ici dans l’espoir que quelqu’un‚ un jour‚ nous comprendra. Même si c’est moi qui parle ici‚ il s’agit du savoir des HOPIS que vous allez connaître. De la longue‚ longue histoire des HOPIS ressort un avertissement pour vous. Vous allez comprendre plus tard ce que je veux dire quand je raconterai mon histoire. C’est la raison pour laquelle je parle maintenant. Cela nous concerne tous. Peut-être que cet avertissement ne viendra pas trop tard. 

En racontant notre histoire‚ il faut que tu saches que le temps n’avait pas la même importance. Aujourd’hui‚ le temps semble important‚ le temps rend tout compliqué‚ le temps devient un obstacle. Mais‚ dans l’histoire de mon peuple‚ le temps n’était pas vraiment important‚ ni pour le créateur lui-même. Ce qui compte vraiment est la beauté que nous mettons dans notre vie‚ la manière dont nous accomplissons nos devoirs et notre responsabilité envers le créateur. Les choses matérielles de ce monde sont de peu d’importance pour les HOPIS‚ comme tu t’en apercevras quand tu seras chez moi et que tu verras comment nous vivons notre histoire.(..)

D’après nos traditions‚ nous avons vécu dans deux autres mondes avant de venir dans le troisième monde – puis‚ dans le quatrième‚ dans lequel nous sommes maintenant.

Le premier monde fut détruit par le feu‚ parce que les hommes sont devenus méchants.
Le deuxième monde fut détruit par la glace. Encore une fois‚ notre peuple survécut et arriva dans le troisième monde‚ le troisième continent.

Le nom du troisième monde était Kásskara. Peu de gens‚ aujourd’hui‚ connaissent la signification de ce très vieux mot. Je l’ai apprise par Otto Péntewa qui s’en est souvenu‚ cela signifie “ mère terre ”. Nous l’appelons aussi “ le pays du soleil ” parce que nous aimons bien faire référence au soleil et à la terre qui nous gardent en vie.

Kásskara était un continent. Peut-être était-ce le même qui est appelé aujourd’hui Mu ou Lémurie.

La plus grande partie du continent se situait au sud de l’Equateur‚ seulement une petite partie se trouvait au nord. C’était un pays très beau. Comparé à aujourd’hui‚ c’était presque un paradis. Nous devions travailler mais nous n’avions pas besoin de travailler dur. Depuis nos débuts dans le premier monde‚ nous avions suivi le plan de notre créateur et avions cultivé notre nourriture nous-mêmes. Dans ces temps‚ nous avions choisi le maïs comme nourriture principale‚ nous l’avons amené dans le deuxième monde et nous avons continué à en vivre dans le troisième monde. Quand tu vois notre maïs‚ pense au fait que les HOPIS l’ont depuis des temps très très anciens‚ déjà depuis le premier monde.

Les gens avaient de l’estime les uns pour les autres. Les clans avaient leurs propres chefs‚ mais ils avaient tous un grand chef spirituel. Dans la vie des HOPIS‚ il y a toujours eu un clan qui a la suprématie pour un certain temps afin de veiller à ce que nous remplissions bien nos obligations et responsabilités‚ ainsi que notre bonne conduite dans la vie. Quand nous avons hérité de ce monde-là‚ c’était le clan de l’arc qui avait le pouvoir. Pour cette raison‚ le chef de tribu du clan de l’arc était le souverain de Kásskara.
Au début‚ tout allait bien à Kásskara. Beaucoup plus tard‚ les hommes commencèrent‚ petit à petit‚ à perdre l’estime les uns pour les autres ; d’abord quelques-uns‚ puis de plus en plus. Comme tu le vois‚ nous sommes exactement comme les autres hommes. Je peux comparer cela avec ce qui se passe aujourd’hui dans les organisations : les gens veulent avoir un certain rang‚ du pouvoir‚ ils veulent leur part. La même chose est arrivée à Kásskara.

 

A l’est de chez nous se trouvait un continent que nous avons appelé Talawaitichqua‚ “ le pays de l’est ”. Dans la langue hopie‚ tichqua veut dire “ terre ”‚ la surface d’un continent‚ et la première partie du mot signifie “ matin ”‚ ou “ lever du soleil ”.
Entre ce continent et nous‚ il y avait une grande surface d’eau. Aujourd’hui‚ on appelle ce continent Atlantis et je continuerai à l’appeler ainsi car‚ pour toi‚ c’est un mot plus familier. 

Au début du troisième monde‚ les gens d’Atlantis étaient aussi paisibles que nous. Nous avons‚ bien sûr‚ la même origine divine. Ils avaient les mêmes symboles que nous. Mais‚ avec le temps‚ ils changèrent. Ils commencèrent à explorer les secrets du créateur que l’homme ne doit pas connaître.

Tu sais‚ il existe des secrets qui ne sont destinés qu’à la déité et‚ quand les hommes commencèrent à les étudier‚ ils enfreignirent cette loi. L’homme‚ en fait‚ a le même pouvoir que le créateur‚ mais le créateur garde des secrets que les hommes ne doivent pas chercher à comprendre. Cette affaire concernant les secrets est très très sérieuse.
Vous avez développé beaucoup de choses‚ par exemple des avions. Quand mon oncle m’a amené à Oraibi voir la lithographie d’un avion à réaction‚ qui est naturellement beaucoup plus ancien que vos avions à réaction d’aujourd’hui‚ il m’a dit : “ Ce sera très très bien de voler à nouveau à travers les airs‚ comme l’a fait notre peuple avant. Quand il y a quelque part‚ dans le monde‚ très loin‚ une catastrophe‚ on peut apporter du secours (nourriture‚ médicaments‚ outils). Mais on va également apporter la mort aux hommes à des centaines de miles de distance. Et c’est en cela que l’on désobéira à la loi divine. ”
Comment pouvez-vous séparer ces deux choses si vous faites des recherches sur des secrets dont les hommes ne savent pas encore faire une bonne utilisation ? Pense à toi : supposons que tu aies fait une découverte scientifique dans le domaine des fusées et que quelqu’un fasse un mauvais usage de ta découverte. Toi‚ tu ne le ferais pas‚ mais c’est ta découverte. Sais-tu vraiment où commence et se termine ta responsabilité ?
Et maintenant‚ ils essaient de produire la vie artificiellement – et un jour également l’homme. Cela fait partie de ce que nous appelons des recherches sur le sang. Et il n’est pas bien de faire cela !
Naturellement‚ vous pouvez faire des recherches sur le fonctionnement de votre corps afin de savoir ce qui guérit et ce qui vous donne une longue vie. Le créateur veut que nous le fassions. Il veut que nous profitions de la vie et que nous ayons aussi peu de travail pénible que possible et que tout ce qui est bon‚ toute la joie‚ tout le bonheur de ce monde nous échoient. Mais ces autres choses‚ vous ne devez pas les faire‚ non !

Nous pouvons résumer tout cela en deux phrases. Le créateur divin nous a dit : “ Si vous voulez être mes enfants‚ vous ne devez pas utiliser votre savoir pour soumettre‚ détruire‚ tuer ou faire une mauvaise utilisation de ce que je vous ai donné. Si vous ne respectez pas cette loi‚ vous n’êtes pas mes enfants. ”Vers la fin du troisième monde‚ il y avait une femme comme guide suprême d’Atlantis. Dans notre langue‚ nous pouvons l’appeler une Kickmongwuity‚ une prêtresse suprême ; à vos yeux‚ elle aurait été tout simplement une reine. Elle était très puissante et très belle. Elle a utilisé sa puissance et la beauté de son corps pour soumettre les chefs de son peuple. Elle reçut d’eux tellement de bijoux que nous l’avons appelée “ la femme turquoise ”. 

Atlantis étendit son influence et soumit des peuples dans les pays qui se trouvaient plus loin à l’est‚ que nous appelons aujourd’hui Europe et Afrique. Bien qu’Atlantis fut un petit pays‚ il avait une très grande influence. Tu peux le comparer à l’Angleterre. C’est également un petit pays‚ mais quelle influence il avait !Les Atlantes avaient également fait des recherches sur les secrets du créateur‚ qu’ils n’auraient pas dû connaître. Comme je te l’ai dit‚ ils en ont pris connaissance trop tôt. Spirituellement‚ ils n’étaient pas encore prêts‚ ils ont utilisé leur savoir pour soumettre d’autres peuples. Et en cela‚ ils ont enfreint l’ordre divin. Certains y ont même perdu leur vie. Ils ont également étudié d’autres planètes et ils s’y sont même rendus‚ mais comme c’étaient des planètes mortes‚ ils ne pouvaient y vivre. Ils devaient donc rester sur notre vieille terre. C’est alors qu’ils se sont retournés contre Kásskara. Ils savaient que‚ moralement et spirituellement‚ nous étions beaucoup plus forts‚ cela les a rendus envieux. C’est pourquoi la reine voulut également conquérir notre pays et soumettre notre peuple. Elle a menacé notre souverain de réunir tous ses vaisseaux spatiaux au-dessus de notre continent et de nous détruire de là-haut. Mais il refusa de céder. Il y eut un long temps de pourparlers que l’on peut aussi appeler conférences. Tous les grands hommes de cette époque tinrent des réunions. 

Comme je te l’ai déjà dit‚ il y avait parmi nous des gens qui étaient devenus avides de rang et de pouvoir. Leur croyance religieuse devenait plus faible et les gens n’avaient plus beaucoup d’estime les uns pour les autres. Nous étions dans une situation que l’on peut très bien comparer à la situation actuelle.
Avec le temps‚ l’influence de cette femme conduisit à une scission de notre peuple.

Les chefs se réunirent de nombreuses fois. Mais le groupe de ceux qui avaient des connaissances scientifiques fut beaucoup plus fort et ils vinrent pour attaquer mon peuple avec le matériel de leurs pouvoirs et de leur invention.(..)

Mon peuple ne se défendit pas quand il fut attaqué. (…) Nous savons que nous ne serons pas détruits‚ ce sont eux qui le seront les premiers. Nous seuls avons été sauvés. Des villes furent attaquées et beaucoup de gens périrent.

Et puis – comme disait ma grand-mère – quelqu’un a appuyé sur le mauvais bouton et les deux continents ont sombré. Ce ne fut pas le déluge universel. La terre entière ne fut pas détruite et tous les hommes ne furent pas tués. Atlantis s’enfonça très vite dans l’océan‚ mais notre troisième monde‚ Kásskara‚ s’enfonça très lentement.

Laisse-moi t’expliquer pourquoi cela s’est passé ainsi : supposons que je veux tuer quelqu’un et que j’ai un complice. Nous sommes d’accord pour le faire. Même si c’est moi qui tue‚ lui‚ le complice‚ le fait en pensée. Mais il n’est pas autant coupable que moi. Il aura une nouvelle chance par la réincarnation‚ mais pas moi. C’est la raison de la destruction rapide d’Atlantis.

La puissance qui se trouve hors de toute capacité humaine ne voulut pas permettre que le peuple de la paix soit anéanti complètement. Ces gens étaient des réincarnations d’hommes qui avaient vécu dans le deuxième monde‚ Topka‚ et qui avaient suivi les lois du créateur. C’était sa volonté de donner à ceux qui devaient être sauvés les moyens d’y parvenir.
Je sais que beaucoup de gens auront une opinion différente‚ mais nous sommes le peuple élu. Nous avons été sauvés et nous sommes venus ici parce que‚ depuis le premier monde‚ nous avons toujours obéi à la loi !
Nous allons voir maintenant ce qui se passa ensuite et quel rôle jouèrent les Kachinas qui nous ont amenés sur ce continent‚ dans le quatrième monde.
Mais d’abord‚ je dois te parler des Kachinas eux-mêmes.

Les Kachinas

Dans le troisième monde‚ et déjà depuis le premier monde‚ nous étions en relation avec les Kachinas. Kachine signifie “ initié estimé de haut rang ”. Dans les premiers temps‚ ils s’appelaient Kyápchina‚ mais comme notre langage a évolué avec le temps‚ nous disons maintenant Kachinas. En fait‚ Kyápchina désigne une seule personne. Quand on veut parler de plusieurs Kachinas‚ on dit Kyákyapichina‚ c’est le pluriel. Le mot Chinakane signifie “ pousse ”‚ la pousse d’une plante‚ mais ici il désigne la croissance spirituelle que les Kachinas nous donnent.

Les Kachinas peuvent être visibles‚ mais parfois ils sont également invisibles. Ils viennent de l’espace. Ils ne viennent pas de notre système solaire‚ mais de planètes très éloignées. Il faudrait à nos astronautes plusieurs générations pour y parvenir.

Le nom HOPI pour ces planètes est Tóónátakha‚ cela signifie qu’elles sont proches les unes des autres‚ pas dans le sens matériel mais dans le sens spirituel‚ parce que tous leurs habitants ont la même responsabilité‚ ils travaillent tous étroitement ensemble. C’est pourquoi nous pouvons traduire le mot par “ Confédération des planètes ”. Comme nous savons qu’il s’agit de douze planètes‚ nous pourrions dire également  « Confédération des douze planètes ». Les Kachinas peuvent se déplacer très rapidement et‚ pendant que je prononce cette phrase‚ ils peuvent parcourir de longues distances. Ils n’ont besoin que de quelques secondes ; leurs vaisseaux volent grâce à une force magnétique‚ même quand ils font le tour de la terre. Il y a trois sortes de Kachinas. Les premiers s’occupent de la continuité de la vie (survivance). Dans nos danses‚ ils apparaissent au milieu de l’hiver quand‚ dans la nature‚ toute vie dort. Ils nous offrent la certitude que la vie reviendra et continuera. Et comme la réincarnation fait partie de la continuité de la vie‚ cela signifie que nous naîtrons à nouveau et que nous aurons la possibilité de nous améliorer.
Le deuxième groupe est constitué par les enseignants. Nous apprenons d’eux qui nous sommes et où nous sommes‚ quelles sont les influences que nous pouvons subir et ce que nous devons faire.
Le troisième groupe représente les gardiens de la loi. On peut aussi les appeler “ ceux qui nous avertissent‚ nous mettent en garde ”‚ car ils nous parlent pendant longtemps‚ mais un jour viendra où il ne nous avertiront plus‚ mais au contraire ils nous puniront pour tout le mal que nous aurons fait.

 

Des enfants sont nés à la suite d’une relation mystique entre nos femmes et les Kachinas. Je te raconterai plus tard des légendes qui relatent ce fait. Nos gens pouvaient toucher les Kachinas‚ il y avait donc une proximité physique entre les Kachinas et les êtres humains. Mais‚ même si cela semble étrange‚ il n’y a jamais eu de rapports sexuels. Les enfants ont été conçus de façon mystique. De tels enfants‚ quand ils grandissaient‚ avaient une grande connaissance et une grande sagesse‚ et même parfois des pouvoirs surnaturels qu’ils avaient reçus par leur père spirituel. C’étaient toujours des hommes magnifiques‚ puissants‚ qui étaient toujours prêts à aider et jamais à détruire. 

Les Kachinas sont des êtres corporels‚ c’est pourquoi ils ont besoin de vaisseaux pour les voyages dans nos airs et pour retourner sur leurs planètes. Les vaisseaux spatiaux ont différentes tailles et noms. L’un d’eux est Patoowa‚ “ l’objet qui peut voler au-dessus de l’eau ”. Pahu veut dire eau dans notre langue‚ et Toowata est un objet avec une surface courbe. En raison de cette forme‚ nous l’appelons aussi « bouclier volant » .
Je vais te raconter à quoi il ressemble. Si on coupe une calebasse en deux‚ on obtient une forme qui a l’aspect d’une coupe ou soucoupe ; si on assemble deux de ces parties‚ on obtient la forme du vaisseau que l’on utilisa jadis pour se rendre sur ces planètes. Quand on est assis à l’intérieur‚ on peut se déplacer dans toutes les directions et on ne tombe pas‚ quelle que soit la vitesse. Comme il a cette forme‚ nous l’appelons Inioma.

Chez les HOPIS‚ on sait que quelques-uns des nôtres ont volé dans ces vaisseaux et que ces vaisseaux ont également été utilisés dans d’autres pays‚ car les Atlantes sont venus chez nous dans ces vaisseaux. Près d’Oraibi se trouve un dessin rupestre représentant une femme dans un bouclier volant. La flèche est un signe de grande vitesse. La femme porte les cheveux d’une femme mariée.

Les deux moitiés sont tenues ensemble par une “ bride ”. Celui qui conduit le vaisseau doit actionner cette “ bride ”. Quand il la tourne à droite‚ le vaisseau monte‚ quand il la tourne à gauche‚ il descend. Le vaisseau n’a pas de moteur comme les avions et n’a pas besoin de carburant. Il vole dans un champ magnétique. On doit seulement connaître la bonne hauteur. Si l’on veut se diriger vers l’est‚ on choisit une certaine hauteur‚ si l’on veut aller vers le nord‚ on choisit une autre hauteur‚ etc. Il suffit de monter à la hauteur correspondant à la direction choisie et le vaisseau vole dans le courant désiré. De cette manière‚ on peut atteindre n’importe quel endroit à l’intérieur de notre atmosphère‚ mais on peut également quitter la terre. C’est très simple ! Longtemps avant que notre continent et Atlantis soient engloutis‚ les Kachinas remarquèrent qu’il y avait‚ à l’est de chez nous‚ un continent qui sortait de l’eau. D’ailleurs‚ selon nos traditions‚ le monde a changé plusieurs fois. Ce qui était en train de sortir de l’eau était‚ en fait‚ le même pays que celui dans lequel nous avions vécu dans notre deuxième monde‚ Topka. Mais maintenant‚ nous l’appelons le quatrième monde‚ car son apparence est différente. 

On dit aussi que la terre a basculé plusieurs fois‚ je veux dire que le pôle nord était à l’endroit où le pôle sud se trouve actuellement et vice versa. Aujourd’hui‚ les pôles sont inversés et le véritable pôle nord se trouve au sud et le véritable pôle sud au nord. Mais‚ dans le cinquième monde‚ cela changera à nouveau‚ et les pôles seront à leur vraie place. A chaque fois‚ la terre a basculé complètement du nord au sud et pas seulement de la moitié‚ sinon il y aurait eut beaucoup trop de dommages et ce n’était pas l’intention du créateur. Durant Topka‚ le deuxième monde‚ la terre a basculé seulement de moitié et tout a gelé. Les Kachinas ont donc fait des recherches et observé cette nouvelle terre et‚ quand elle fut au-dessus de l’eau‚ ils commencèrent leurs préparatifs. La grande migration pouvait commencer.

Cette nouvelle terre devait devenir notre nouvelle patrie‚ que nous appelons Toowakachi‚ le quatrième monde. Nous avons aussi un autre nom‚ Sistaloakha‚ un mot pour désigner tout ce qui est créé rapidement et qui apparaît dans une forme parfaite.

Le créateur avait donc décidé de nous sauver‚ et les Kachinas nous aidèrent pour atteindre ce nouveau continent. Notre peuple arriva du troisième au quatrième monde de trois façons différentes. Les premiers arrivèrent dans des boucliers volants (c’est ainsi que nous les appelons chez nous). Ils étaient destinés aux gens importants‚ de haut rang. Ils étaient prioritaires parce qu’ils devaient fonder la nouvelle colonie et s’occuper de tous les préparatifs. Comme ils sont arrivés les premiers‚ tous les considéraient comme des gens estimés. Les Kachinas‚ en tant que spationautes‚ savaient où se trouvait la nouvelle terre et ils les y ont amenés. Les Kachinas pouvaient le faire car ils possédaient des boucliers volants ; notre peuple non‚ nous ne savions pas les construire. Mais tu te rappelles que les gens d’Atlantis avaient également des boucliers volants. Ils ne les avaient pas reçus des Kachinas qui les avaient quittés‚ mais ils les avaient construits eux-mêmes avec leur force malveillante ; mais ça‚ je te l’ai déjà raconté.

Longtemps avant que le continent du troisième monde‚ Kásskara‚ soit englouti‚ les premiers clans arrivèrent ici. Parmi les clans qui sont arrivés par les boucliers volants‚ se trouvaient le clan du feu‚ le clan du serpent‚ le clan de l’araignée‚ le clan de l’arc‚ le clan du lézard‚ le clan de l’aigle et le clan de l’eau. En fait‚ il y avait encore plus de clans‚ mais je t’indique ici les principaux. Sur la liste complète‚ le clan de l’arc est indiqué bien plus bas‚ contrairement à ce qui apparaît ici‚ car ce clan a mal agi dans le troisième monde. Mais les gens du clan de l’arc étaient encore importants. Même si beaucoup avaient participé à la destruction du troisième monde‚ ils n’avaient pas tous quitté le chemin du créateur. C’est pourquoi ils ont été sauvés. Il y avait aussi une sorte de gens (le deuxième groupe) qu’il fallut transporter ici et on l’a fait à l’aide de grands oiseaux. La fête du mois de mars‚ Powamu‚ nous rappelle ces événements. J’ai participé moi-même à cette cérémonie‚ à Oraibi‚ quand je fus enfin admis dans la société Powamu. Avant la cérémonie‚ le chef de tribu chanta un chant qui évoquait le troisième monde que nous avions quitté et qui parlait de la méchante reine qui avait conquis la plus grande partie du monde et dont l’influence fut si néfaste. C’est donc avec des oiseaux que sont venus des gens qui se trouvaient dans une phase intermédiaire vers les marches plus élevées d’une connaissance spirituelle. Pendant ce temps‚ les gens avaient très peur‚ car le vieux continent s’enfonçait de plus en plus. Ils avaient peur et pourtant ils savaient qu’ils devaient être sauvés. Une ville après l’autre fut détruite. L’eau n’arrêtait pas de monter et couvrait une grande partie du continent. Dans le troisième groupe se trouvaient ceux qui étaient encore au début de leur quête vers une force spirituelle. Mon clan‚ le clan des coyotes‚ en faisait partie. Je le sais de ma mère qui faisait partie de ce clan‚ ainsi que ses parents à elle. Ils avaient une connaissance précise de ces événements car ils les gardaient en mémoire afin de transmettre ce savoir comme héritage à ce continent‚ le quatrième monde.

Les différentes directions que prirent les rescapés du continent de Kásskara (Mu) et de l’île de Talawaitichqua (Atlantis) lors de la grande destruction il y 80.000 ans. Ces gens devaient donc venir par le troisième moyen‚ c’est-à-dire par bateaux. Ils durent lutter durement pendant longtemps. Alors que beaucoup de monde put venir par les airs‚ on dit aujourd’hui que tout le monde dut lutter pour pouvoir venir sur ce continent. On agit de cette façon pour ne pas oublier ces événements‚ car tout ce que l’on a du mal à obtenir‚ on l’estime davantage et on le garde en mémoire. Ces gens qui étaient transportés par bateaux faisaient partie des clans inférieurs qui possédaient peu de pouvoir. C’est pour cette raison qu’ils avaient subi l’influence du clan de l’arc‚ avec son plan destructeur. Ils y participèrent mais ne firent rien de leur propre gré‚ c’est pourquoi on leur offrit d’échapper à la destruction. Dans le cas contraire‚ ils auraient été détruits comme les autres. Pendant tout le temps où ce groupe fut en route sur les bateaux‚ ils reçurent la protection des Kachinas. Chaque clan avait un Kachina dont la tâche était de l’accompagner et de l’amener sur le continent. C’est ainsi que ce groupe fut conduit‚ en sécurité‚ sur ce continent. Les Kachinas savaient se faire comprendre mais les êtres humains n’avaient pas le privilège de pouvoir parler avec eux. Les Kachinas leur donnaient des conseils et leur indiquaient dans quelle direction ils devaient se diriger vers des îles où ils pouvaient se reposer. Et enfin‚ ils arrivèrent dans le quatrième monde ! Il existe une cérémonie qui rappelle ce voyage en bateaux et qui est célébrée par le clan de la flûte. Ainsi‚ nous nous rappelons chaque détail et chaque étape de ce voyage. Ce même événement nous est rappelé également par les sept statues de l’île de Pâques. Il y a sept statues pour figurer les sept mondes que nous devons traverser. L’île de Pâques est la seule île sur notre chemin qui n’a pas sombré complètement dans l’océan après notre passage.

Par ces trois moyens‚ les gens furent emmenés sur le continent sud-américain afin de s’y établir. A ce moment-là‚ la partie la plus haute était déjà au-dessus de l’eau. Mais tu dois savoir que tous ceux qui ont survécu à Kásskara n’ont pas tous pu venir ici. Nous‚ le clan des coyotes‚ étions les derniers à venir ici. Ceux qui sont partis après nous furent emmenés par des courants vers d’autres pays‚ parce qu’ils n’avaient pas été choisis pour venir ici. Certains arrivèrent à Hawaï‚ une partie du troisième monde qui n’a pas été engloutie‚ d’autres arrivèrent sur des îles du Pacifique sud et d’autres sur une île qui fait partie‚ aujourd’hui‚ du Japon‚ comme je l’ai appris il y a quelques années.
Un jeune homme venu de cette île m’a rendu visite. Il avait lu “ Le livre des HOPIS ”. Il est venu me dire que sa grand-mère lui avait raconté exactement les mêmes histoires concernant l’ancien monde. Il y a donc un certain nombre de gens qui n’ont pas pu venir ici‚ alors qu’ils ont la même origine et viennent du même continent‚ Kásskara. C’est pourquoi‚ sur les îles Hawaï‚ les initiés s’appellent Kahuna qui était le même nom que Kachina.

Tous les habitants d’Atlantis ne périrent pas quand leur continent fut englouti. Ceux qui ne voulurent pas participer à l’attaque de Kásskara par leur reine furent sauvés. Naturellement‚ ils voulurent‚ eux aussi‚ venir sur notre nouveau continent‚ mais le créateur nous avait promis que nous aurions la nouvelle terre pour nous seuls‚ pendant très longtemps. Bien qu’il n’y eut encore aucun HOPI sur ce nouveau continent‚ les Atlantes ne pouvaient pas venir ici‚ en Amérique du Sud.
Alors‚ il ne restât aux Atlantes que le chemin vers l’Est‚ dans des régions que l’on appelle aujourd’hui l’Europe et l’Afrique. Mais on leur avait ôté leurs pouvoirs. Ils étaient cloués au sol‚ ils ne pouvaient plus voler. Ils ne pouvaient survivre que s’ils partaient par petits groupes et chaque groupe n’emportait qu’une petite partie du savoir global qu’ils possédaient auparavant. 

 

C’est la raison pour laquelle les hommes‚ là-bas‚ n’ont aucun souvenir de leur histoire qui fut comparable à la nôtre. Quand ils détruisirent le troisième monde‚ le créateur les mit à un niveau culturel très bas. Mais après leur punition‚ qui dura des centaines d’années‚ ils recommencèrent à se développer. Pense à la culture des Egyptiens. Pour nous‚ les HOPIS‚ ce temps n’est pas loin.Ceci est maintenant notre nouveau continent‚ Tóówákachi‚ le quatrième monde. Le mot signifie “ le beau pays pour tous les hommes ”. Nous savons que nous sommes les premiers hommes à être venus ici et que le créateur nous a promis que nous y serions seuls‚ entre nous‚ pendant longtemps. Avec ce quatrième monde‚ nous sommes au milieu de la durée de la terre et de l’humanité. Nous sommes dans le quatrième d’un total de sept mondes que nous devons traverser. Trois sont derrière nous‚ trois sont devant nous.
En ce qui concerne le temps‚ nous avons déjà dépassé le milieu des sept mondes‚ car la durée de chaque monde à venir est plus courte. 

Notre peuple commença à aller vers le Nord‚ le Sud‚ l’Est et l’Ouest. Nous pouvions commencer à explorer le nouveau continent et pour cela nous utilisions les boucliers volants. Quelques-uns de chez nous avaient atteint un rang assez élevé pour avoir le droit d’accompagner les Kachinas lors de leurs explorations pour voir comment les nouvelles colonies étaient fondées. Et petit à petit‚ il y eut à nouveau des gens qui eurent leurs propres idées sur la façon de suivre les lois du créateur divin. Ils quittèrent le droit chemin. Parmi eux‚ il y avait des gens de haut rang qui voulaient avoir des positions importantes. Ils commencèrent les premiers à faire un mauvais usage des Tawúya‚ personne n’avait jamais fait cela auparavant. Les Kachinas essayèrent de les empêcher de s’envoler dans l’univers. Nous ne devions pas nous y rendre tant que nous n’avions pas rempli toutes nos obligations dans ce monde. Mais ces gens croyaient être déjà prêts. Le créateur fut au courant de ce qui se passait et‚ peu de temps après‚ il vint en personne et dit : “ Dès la première occasion dans ce nouveau pays‚ vous faillissez. Je dois vous punir. ” Et il prit la ville‚ l’éleva dans le ciel‚ la renversa (la tête en bas) et l’enfonça dans le sol. Dans tous les bâtiments alentour on ressentit l’énorme souffle d’air‚ le sol trembla‚ c’était comme un tremblement de terre. Ce fut une déception pour notre créateur que nous ayons désobéi à la première occasion. Après cela‚ notre peuple décida de partir dans différentes directions. C’est ainsi que se passa la première dispersion de notre peuple sur ce continent.

Quand nous nous fûmes éloignés des ruines de la ville détruite‚ certains Kachinas furent destinés à des garçons et des filles qui n’étaient pas encore nés. Ces enfants étaient choisis pour transmettre la mémoire véritable des événements du passé. Cela arriva bien souvent dans notre histoire. L’enfant reçoit le savoir lorsqu’il est encore dans le ventre de sa mère. Parfois‚ c’est la mère qui le reçoit pour que toutes ses pensées puissent pénétrer l’enfant avant la naissance. Pour cette raison‚ l’enfant n’a plus besoin d’apprendre plus tard‚ il faut seulement lui rappeler ce savoir qu’il reçut avant sa naissance. Tout ce que je te raconte ici ne s’est pas déroulé comme cela en peu de temps. Plusieurs centaines d’années s’écoulèrent depuis le début de la migration. Mais les enseignements des Kachinas permirent de garder nos traditions en mémoire. Souvent‚ à la vitesse de l’éclair‚ les Kachinas se rendaient chez le créateur afin de l’informer de nos progrès sur la terre. Et‚ comme je l’ai déjà dit‚ certains de nous avaient acquis un haut rang et étaient devenus très proches des Kachinas‚ alors ces derniers leur permettaient de les accompagner durant leurs vols.

Comme je te l’ai dit‚ plusieurs groupes quittèrent la ville détruite après nous‚ avec un Kachina à la tête de chaque groupe. Et comme les Kachinas pouvaient communiquer entre eux‚ ces groupes savaient ce qui les attendait. Il se passa beaucoup de temps avant que la zone chaude fut derrière eux. Ils arrivèrent à mieux respirer‚ les enfants ne moururent plus et le peuple s’agrandit. Ils continuèrent en direction du nord et furent guidés vers des lacs et des fleuves par Eototo. Après beaucoup d’années‚ ils arrivèrent à une barrière de glace et ne purent aller plus loin vers le nord. Ce n’était pas beaucoup plus au nord que la frontière canadienne d’aujourd’hui.

Eototo leur dit qu’il s’agissait d’une porte qui serait ouverte plus tard pour d’autres gens qui viendraient de par là pour immigrer vers le sud. Alors‚ ils rebroussèrent chemin pour chercher un endroit accueillant. Mais le voyage n’était pas terminé.

Ils durent d’abord se diriger en direction du soleil levant en traversant des régions d’où l’eau n’était pas partie depuis longtemps. Un jour‚ ils ne purent aller plus loin car ils arrivèrent devant une grande étendue d’eau. Eototo leur dit que c’était la fin du voyage vers l’est. “ Maintenant‚ vous devez vous retourner et marcher dans la direction du soleil couchant. ” Ils obéirent et allèrent vers l’ouest.

Après de nombreuses années‚ ils arrivèrent de nouveau devant une étendue d’eau et Eototo leur dit : “ Vous avez maintenant terminé votre migration‚ vous pouvez choisir où vous voulez vivre. ”
Mais le clan ne savait pas encore où il voulait s’installer. Après des recherches‚ il choisit cet endroit-ci où ils construisirent leur premier village et où les HOPIS vivent depuis lors.

Nous étions informés de toutes les particularités de notre système planétaire‚ pas seulement ce que l’on peut observer‚ mais aussi sur leur ordre. Ils savaient‚ et c’est pourquoi nous le savons aussi‚ que sur la lune se trouve du sable fin‚ que la terre est ronde et qu’il n’y a pas de vie sur Vénus‚ Mars ou Jupiter. Ce sont des planètes mortes sur lesquelles l’homme ne peut pas vivre. Si vos scientifiques nous l’avaient demandé‚ nous aurions pu leur dire qu’ils allaient trouver du sable fin sur la lune.

Húck’ovi
J’ai entendu cette histoire très souvent depuis ma plus tendre enfance. Húck’ovi se trouve sur le prochain plateau‚ de l’autre côté des basses terres‚ juste en face d’Oraibi. Nous gardons ce souvenir vivant‚ car il nous montre ce qu’il va arriver au monde entier. Nous saurons quand le temps sera venu‚ car tout se passera à nouveau comme ça.

Le village fut fondé par le clan du front. C’est un des trois clans qui ont un rapport avec la chaleur et l’énergie. C’est la chaleur qui détruit et c’est la chaleur qui purifie‚ c’est pourquoi ces clans sont si importants. Par ordre de puissance‚ il y a d’abord le clan du feu‚ puis le clan du soleil‚ puis le clan du front. (…)
Le temps arriva où les gens n’écoutèrent plus leur chef dans leur village‚ jusqu’à lui désobéir et lui manquer de respect. D’après une vieille coutume‚ on ne peut régler une telle chose que par le départ des gens et la destruction du village. C’est ce qui s’est passé avant‚ avec le troisième monde‚ puis avec TáotoómaPalátquapiCasas Grande – ça se répète sans cesse. Et ça se répète aujourd’hui dans le monde entier‚ pense à toutes les disputes‚ contradictions et au manque de respect. C’est pourquoi nous‚ les HOPIS‚ nous savons que la fin du quatrième monde arrivera bientôt. Nous en sommes proches. Donc‚ on a pris la décision de détruire le village par un feu et une explosion après une dernière cérémonie. Certains ne crurent pas au feu et à l’explosion et restèrent au village pour voir ce qui allait se passer. D’autres sont partis avant la cérémonie.

Trente hommes et trente femmes participèrent à la cérémonie. Chaque femme portait un plateau tressé sur lequel se trouvait de la farine de maïs pressée‚ avec un trou au milieu. Autour du trou‚ il y avait deux anneaux‚ l’un d’hématite rouge‚ l’autre d’hématite jaune. La masse jaune avait peut-être un rapport avec l’uranium que l’on a découvert à l’est de chez nous. Du trou sortait une flamme‚ quand la flamme s’étend‚ ou plutôt quand la flamme descend dans le trou‚ il y a une explosion‚ mais ça plus tard. Le groupe de femmes et d’hommes arriva à travers les rochers par le côté ouest du village. Les femmes posèrent leur plateau à l’intérieur d’un cercle sur la place du village. Un des plateaux fut donné au chef. Il le prit et alla dans une maison pour le bénir. Puis il sortit rejoindre les hommes et les femmes qui avaient quitté le village plus tôt et les hommes et femmes qui avaient participé à la cérémonie partirent avec lui. Comme je te l’ai dit‚ quelques hommes et femmes ne crurent pas quand on les mit en garde et ils restèrent.

Quand les flammes disparurent dans les trous‚ il y eut une grande explosion et une chaleur intense‚ et tout le village et les gens qui étaient restés périrent. Même certains de ceux qui étaient partis plus tôt furent incommodés par la chaleur et il fallut les porter.
Mais dans la chanson on dit que les gens vont de village en village et ne trouvent pas de refuge. Ils ne le trouveront nulle part‚ car ça brûle partout.

Il n’y a pas de remède‚ car ce sera le feu qui détruira notre quatrième monde.
Ce ne sera pas une guerre atomique‚ mais une arme électrique que l’on est en train de développer et qui sera découverte bientôt. Je ne sais pas comment agira cette arme exactement‚ mais elle enverra quelque chose qui ressemble à des ondes radio et ça partira d’une station et ça ira partout.

Toute la puissance et l’énergie dont nous avions besoin provenaient du soleil. Nous pouvions en bénéficier partout et les lignes électriques n’étaient pas nécessaires. Mais je ne sais pas comment cela fonctionnait.

Nous avions un appareil‚ en fait nous en avions beaucoup‚ avec un cristal à l’intérieur pas plus gros qu’un pouce. A l’époque‚ les gens n’avaient pas besoin de travailler la pierre avec un burin‚ pendant des jours. Tout ce qu’ils avaient à faire‚ c’était d’orienter l’appareil par rapport au soleil et ils pouvaient fendre la pierre avec l’énergie solaire. Tous les sons étaient mémorisés dans des cristaux. Tous les enregistrements du troisième monde se trouvent dans une grotte en Amérique du Sud. Ma grand-mère me l’a dit un jour mais personne ne sait plus où elle se trouve. Si la grotte était découverte un jour‚ je pourrais tout reconnaître à l’intérieur.

Quand nous sommes venus sur ce continent‚ nous avons bien sûr emmené de tels appareils‚ ainsi que toutes nos connaissances. Là-bas‚ en Amérique du Sud‚ les gens pouvaient soulever d’énormes blocs de roche en tendant les mains sans y toucher. Aujourd’hui‚ on est étonné et on ne comprend pas comment les gens ont pu bâtir de telles villes‚ mais à l’époque c’était facile. La plus grande efficacité des capacités de l’être humain se trouve dans le bout des doigts. Ils peuvent émettre beaucoup de force et en absorber autant. Pense aux hommes-médecine qui posent leurs doigts sur ton corps et sentent toutes les vibrations. Ils ressentent aussi les vibrations qui ne devraient pas s’y trouver et localisent ainsi la maladie.

A une certaines époque‚ on utilisait aussi le mercure‚ mais je ne sais pas exactement dans quel but. D’après notre tradition‚ il en existait deux sortes‚ une liquide et une solide. Il y aurait un rapport avec la chaleur et l’équilibre‚ mais je ne sais pas si‚ au point de vue scientifique‚ cela signifie quelque chose pour toi. Les gens du clan “ deux cornes ” l’ont utilisé‚ c’est ce que m’a dit un homme du clan de l’arc. Les gens avaient techniquement un niveau élevé‚ mais ils n’ont jamais utilisé la force pour détruire des vies.

Tout ce savoir s’est progressivement perdu et les gens ont dû travailler de plus en plus dur. Aujourd’hui‚ toutes ces bonnes choses sont dissimulées et nous voyons avec étonnement ce que l’on a réussi à faire dans le passé. Pour comparer‚ on pourrait dire que c’est aujourd’hui que nous vivons dans une époque sombre.

Chacun d’entre nous est né avec une prédestination et doit remplir sa tâche dans ce monde. Longtemps avant ma conception‚ il fut décidé que cela ferait partie de ma destinée de transmettre toutes ces choses. C’est pourquoi je suis venu pour parler avec toi.

Je t’ai parlé beaucoup de notre histoire‚ de l’histoire du peuple élu. Je sais qu’elle ne correspond pas à ce que vous avez cru jusqu’à maintenant. Naturellement‚ les scientifiques voudront nous corriger‚ comme ils le font toujours. Ils ne nous comprennent pas et ne peuvent donc pas comprendre notre histoire et nos opinions. Mais nous‚ les HOPIS‚ reconnaissons dans les événements d’aujourd’hui la même chose que ce qui est arrivé vers la fin du troisième monde. Nous voyons ce qui se passe dans le monde‚ la corruption‚ les assassinats‚ et nous savons que nous sommes sur le chemin de la destruction. On peut éviter cette fin terrible si nous retournons sur le chemin du créateur‚ mais je n’y crois pas. La prochaine grande catastrophe n’est pas loin‚ seulement quelques années. Cela doit vous sembler étrange dans votre monde‚ mais nous le savons.

Nous‚ les HOPIS‚ nous le savons.

Marc Lafontan

« Au bout de la route » 

 

OURS BLANC RACONTE L'HISTOIRE DES HOPIS (Joseph F.BLUMRICH-1913 / 2002) dans REFLEXIONS PERSONNELLES HOPIS-300x184

Publié dans:REFLEXIONS PERSONNELLES |on 12 août, 2012 |1 Commentaire »

« IMAGINE »…(Marc LAFONTAN)…UNE VISION PERSONNELLE D’UN QUEBECOIS

Imagine

(Marc LAFONTAN)

Quand nous avons déménagé ici en forêt boréale à l’extreme nord du Lac St Jean, il y a …. quelques années maintenant (déjà ?), on se disait qu’on aurait la paix, dans la nature pour faire pousser une flopée de gamins et de chiens … pas très loin derriere notre terrain on a une rivière, une belle chute d’eau , la forêt, le soleil du nord qui te cuit et te rougit, les roches ferreuses , la mousse, les loups, les ours, les orignaux, les couleurs, les senteurs, pas de voisineurs, pas d’inspecteurs, pas d’emmerdeurs.

Notre toute petite municipalité endettée a récemment vendu la chute d’eau à une compagnie qui va développer un barrage dont l’électricité va permettre d’alimenter une mine plus au nord… mine qui devrait fournir, bien évidemment, du travail à la population locale maintenant qu’ils ont rasé / replanté / débroussaillé toute la forêt locale jusqu’au cercle arctique pour la 3ème fois en 40 ans, et que l’industrie du bois est en faillite et que les arbres sont sous l’attaque de la “tordeuse” vu qu’ils n’ont pas replanté en diversité mais juste mis aux 6 pieds du pin norvégien non adapté à notre place et donc plus enclin à attraper les maladies… bref , tout le monde est content, la municipalité va faire du bacon, les chômeurs vont miner, l’État subventionne à tour de bras pour remplir la boîte à vote aux prochaines élections, le journal local fait de beaux portraits de tout ce monde avec de belles dents blanches ben content, pis la nature, ben on s’en calisse, ça repoussera ben, pis on est tellement loin de tout , faut bouffer et payer les dettes, y a que les citadins pour brailler sur une chute dont tout le monde se calisse de toute façon , pis y en a d’autres des chutes de toute façon, back off le grano … ok.

Presque tous les matins quand je me réveille je me demande si je devrais écrire sur ce blog ou aller exploser ce foutu barrage.

 

Ceux qui sont au pouvoir ont réussi à rentrer dans la tête du monde de nous associer à eux, pour que nous fassions partie de ce « nous » et devenions inséparables d’eux. De cette façon ils ne peuvent être mis en jeu, remis en cause ou renversés sans nous attaquer nous-mêmes. C’est le but ultime du nationalisme, de fusionner une nation entière dans un accord avec les dirigeants, de sorte qu’aucune action, et peu importe son obscénité, ne soit remise en question.

L’esclave ne peut arracher sa chaîne du mur de la démocratie, hey , c’est la majorité qui a décidé, majorité élue par le vote qui représente la preuve que tout va bien dans la bulle démocratique et qu’on a donc choisi , assume ton opinion bonhomme, t’as participé …. ils ont d’ailleurs piqué la pattern au chistianisme, pour qui vous êtes né du péché parce qu’Adam et Eve ont désobéi à Dieu. C’est incroyable d’ailleurs à quel point on peut étirer une fiction. Bref, cette vie est une punition, vous devez souffrir. Cette misère, cette souffrance, cette anxiété, vous les avez créées vous-même, et tout ce que vous pouvez faire, c’est souffrir patiemment afin d’être récompensé dans une vie future. En politique c’est pareil. T’as voté ? souffre, et attends la prochaine élection.

Peut-être que c’est pour cette raison, quand j’accuse le gouvernement, le capitalisme, le complexe techno industriel , la culture dans son ensemble ou les croyances et autres dogmes religieux et les -ismes, beaucoup de gens se mettent sur la défensive, comme si j’avais insulté leur mère.

Nous sommes donc le problème selon eux. C’est nous les incompétents. On leur fournit notre production, notre argent, notre vie parfois, et nos gestionnaires sont en train de nous dire que nous sommes coupables et responsables. J’utilise du papier toilette donc je suis responsable de la déforestation. Je conduis une voiture donc je suis responsable du réchauffement global. Et peu importe si je n’ai pas créé les systèmes qui en sont la cause et que ce soit eux qui aient créé ces multiples chaos. Je n’ai pas créé l’exploitation forestière industrielle. Je n’ai pas créé l’économie pétrolière. La civilisation détruisait la planète depuis bien longtemps déjà avant que je naisse, et continuera – à moins que moi et d’autres, dont le monde naturel, stoppent tout ça – après ma mort.

Nous tuons la planète, je dis. Bien, non, pas moi, mais merci de me penser si puissant. Parce que je prends des douches chaudes, je suis responsable de l’assèchement des aquifères. Et bien, non. Plus de 90% de l’eau utilisée par les humains l’est par l’agriculture et l’industrie. Les 10% restants sont partagés entre les municipalités (qui ont des terrains de golf à entretenir et un systéme de distribution défaillant) et les humains réels. Nous détruisons 107000 hectares de forêt par jour, et bien, non, je ne détruis pas. C’est sûr, je consomme du bois et du papier, mais ce n’est pas moi qui ai fait ce système. Quand je coupe un arbre j’en replante deux, des feuillus si possible. Si nous avons des troupes en Afghanistan, c’est pour protéger notre démocratie … et bien non, je vois bien que c’est pour leur piquer leur pêtrole avec tout un agenda économique derrière, d’ailleurs moi j’ai rien contre les afghans, j’irai bien fumer une pipe avec l’ancien du village. Si nous devons payer de nouvelles taxes au carbone, c’est parce que je conduis un pick up 4×4. Et bien non, comment se fait il depuis le temps que les compagnies de bagnoles n’aient pas inventé un moteur moins polluant ? quand t’habites ici, tu ne drives pas une trotinette pour sortir d’un rang de 12 km en bouette ou en slush … Mon poêle à bois fait un trou dans l’ozone ? mais que fait l’armée US en Irak et ailleurs qui produit 75% des gaz à effet de serre ? du tourisme haut de gamme ? Si le gouvernement n’a pas d’argent pour monter un meilleur système d’éducation pour nos enfants ou aider des personnes âgées survivant dans la misére , c’est parce que nous ne sommes pas assez taxés, y a pu de fric dans les caisses … Et bien non, je file déjà 30% de ma paye alors qu’il est prouvé que les plus riches en payent moins que moi en gagnant 100 fois plus que moi .. où est le partage du fardeau fiscal ? Comment vous gérez nos impôts gang de tarlas aux salaires faramineux ? Si le gouvernement donne des milliards qui étaient introuvables auparavant pour les écoles mais que là ils les ont pour sauver des banques c’est parce qu’elles sont trop importantes pour les laisser faire faillite après avoir joué au loto de la bourse, et bien non, je dis qu’elles nous ont déjà plumé assez, qu’elles crèvent toutes…

En fait, quel que soit le sujet, ceux qui prétendent gouverner nous remettent la faute sur le dos et payer les conséquences tout simplement parce que c’est plus payant que de règler la cause. Ça me fait vraiment penser à une multitude de mouches qui ne foutent rien à part tournoyer et te donner de la merde parce que ta bouse n’est pas assez grosse pour les nourrir …

Voici l’histoire réelle: Si je veux stopper la déforestation, je dois démanteler le système qui en est responsable.Point.

Plus nous laissons ceux au pouvoir nous convaincre qu’on peut nous blâmer pour nos actions, plus nous serons incapables de séparer ce que nous faisons de ce que nous sommes forcés de faire ou de ce que les dirigeants font en notre nom.

Je ne pense pas que la plupart d’entre nous, en dehors du monde réduit de la blogosphére, aient conscience de ce qui se passe réellement dans le monde. Et encore, on pourrait se demander ce que les “blogophages” font concrètement de l’info récoltée à part virer parano … La population lit les journaux, regarde la télévision, va à des causeries politiques ou religieuses, mais tout ce que cela leur fournit ce sont des explications superficielles. Comment règler les conséquences, jamais la cause. Ah Monsieur, qu’est ce qu’ils sont pourris les politiciens, mais à la prochaine élection, ça changera ! Mais si on peut aller au-delà de tout cela, en laissant de côté le superflu et en observant d’assez près, on voit à quel point l’humanité se détériore et dégénère. Travail, rythme de vie, éducation, nourriture, médicaments, pollution du corps et de l’esprit, technologies inutiles, zombie nation, atlantide bis, Pompei en attente, prenez vot billets , poussez pas derrière….

La dégénérescence survient quand on dépend totalement de l’extérieur, c’est-à-dire quand la matière – ce qui est matériel – est devenue le plus important.

Nous avons scindé la terre comme si elle nous appartenait – ton pays, le mien, ton drapeau, son drapeau, la religion d’ici et celle de l’autre, là-bas.

Le monde, la terre sont divisés, en morceaux. Nous nous battons et nous disputons pour la possession, et les politiciens exultent de pouvoir maintenir cette division, sans jamais considérer le monde comme un tout. Ils n’ont pas l’esprit global sauf quand le fric rentre sous la bannière du commerce et des délocalisations. Jamais ils ne ressentent ni ne perçoivent l’immense potentiel de n’avoir pas de nationalité ni de division. Diviser pour règner est un des enseignements de Machiavel qu’ils ont bien retenu. Toi noir, moi blanc, toi chomeur moi payeur d’impôts, toi pédé moi hétéro, toi laid moi beau, toi “pov con” moi power.
Ils préférent ne pas se pencher sur la laideur de leur pouvoir, de leur position, de leur sentiment de supériorité, sur leur psychopathie. Ils sont comme vous et moi, mais ils occupent le siège du pouvoir avec toute la mesquinerie de leurs désirs et de leurs ambitions et les entorses à la morale qu’il a fallu faire pour enfin arriver au sommet. Ainsi, ils assurent la survivance d’un comportement « tribal » que l’homme a toujours eu à l’égard de l’existence. Australopithèques en chasse au mammouth ou ruée dans Wall-Mart un jour de soldes, même combat, sauf que l’Humain est maintenant devenu aussi obèse qu’un mastodonte avec la merde qu’il ingurgite. Ils n’ont pas l’esprit libre de tout idéal ou idéologie, l’esprit qui dépasse les divisions entre les races, les cultures, et les religions que l’homme a inventées et soutenues pour perpetuer une élite au pouvoir et se replier dans la peur.

Les gouvernements seront nécessaires tant que l’homme ne sera pas sa propre lumière, tant qu’il ne mettra pas de l’ordre et de l’affection dans sa vie quotidienne, et qu’il ne portera pas un soin attentif à son travail, à ses observations, à son apprentissage. Il préfère être dirigé dans ses actes, comme il l’a été depuis toujours, par les anciens, les prêtres, les gourous, les économistes, les staticiens, les mathématiciens, les gratte-papiers et autres pousse crayons inutiles. Et il accepte les ordres de ceux-ci, leurs curieuses pratiques destructrices, comme s’ils étaient des dieux incarnés, comme s’ils connaissaient toutes les conséquences de cette vie si extraordinairement complexe.

Y a-t-il une différence entre ce qui arrive dans le monde extérieur et ce qui se passe à l’intérieur de nous ? Il y a, dans le monde, de la violence, une course en accéléré vers le précipice, une crise après l’autre, il y a des guerres, des divisions entre nationalités, des différences religieuses, raciales et communautaires, un ensemble de concepts systématisés se dressant contre un autre. Est-ce différent de ce qui se passe à l’intérieur de nous-mêmes ?
Nous voulons faire quelque chose dans le monde, avoir de meilleures institutions, de meilleurs gouvernements, etc., mais jamais nous n’admettons que nous avons créé ce monde tel qu’il est. Si nous ne changeons pas, il ne pourra changer.

Peut-on découvrir pourquoi on ne change pas ? Est-ce parce qu’on espère qu’il se trouvera quelqu’un d’autre pour mettre de l’ordre dans le monde et qu’on n’aura plus qu’à s’y glisser ? Pensez vous réellement qu’un politicien va soudainement surgir de ce systéme et en changer les paramêtres ? Qu’un nouveau Jésus Christ ou une entité ou des « ET » vont soudainement débarquer et nous dire qu’il faut arrêter ? Que 2012 va permettre de remettre les pendules à l’heure pendant que vous regardez les aiguilles de l’horloge en plein déni de la situation actuelle ? Est-ce parce que nous sommes indolents, psychologiquement paresseux, inefficaces ?

Nous sommes toujours des hôtes sur cette terre, avec l’austérité que cela implique. L’austérité est plus profonde que le renoncement des possessions ou une “simplicité volontaire” grand mantra des baby-boomers vieillissant du plateau et de sa culpabilité aux excés de jeunesse et de chemises fleuries à Woodstock qui les ont mené aux « BMW » et aux condos. Ce mot d’austérité a également été spolié par les religions… la mafia aime aussi l’austérité, surtout celle des caveaux de la banque du Vatican. Personne ne veut être austère, sauf ceux qui sont en bas de l’échelle sociale et qui la vivent sans pouvoir la nommer.

Pourtant, l’austérité n’avait pas de sens là-haut, dans la solitude de la Nature qui ne se comptabilise pas en ressources mais simplement en Être, en des multitudes de pierres, de petits animaux, de végétaux. Et dans le lointain, au-delà des collines, la grande mer des arbres brillait, étincelait des milles épines sous le gel et la rivière courait, courait, courait …..

Tiens, regardez ça et prenez un break du texte :
Ne restez pas assis sur le rivage à spéculer à propos de la rivière ; sautez dedans et suivez le courant de cette prise de conscience, et vous trouverez par vous-même à quel point sont extraordinairement limitées nos pensées, nos sentiments, et nos idées. Nos projections des dieux, sauveurs, maîtres – tout cela devient si évident, si puéril. La connaissance de soi est le début de la compréhension ; sans cette connaissance, les contradictions et les conflits existeront toujours. Et pour connaître le processus total de soi-même l’on n’a besoin d’aucun expert, d’aucune autorité. La soumission à l’autorité n’engendre que la crainte. Aucun expert, aucun spécialiste ne peuvent nous montrer comment comprendre le processus de notre moi. Chacun de nous doit s’étudier soi-même. Vous et moi pouvons mutuellement nous aider en en parlant, mais personne ne peut mettre au jour nos replis secrets, aucun spécialiste, aucun sage ne peuvent les explorer pour nous.

Là est la vraie Révolution selon ma perception.

Fin de transmission


Marc Lafontan

Publié dans:REFLEXIONS PERSONNELLES |on 22 juillet, 2012 |3 Commentaires »

COMMENT S’ENRICHIR EN PRETENDANT SAUVER LA PLANETE…

Comment s’enrichir

 en prétendant sauver la planète

COMMENT S'ENRICHIR EN PRETENDANT SAUVER LA PLANETE... dans REFLEXIONS PERSONNELLES terre-europe

 Par Sophie Chapelle (20 juin 2012)

PlaneteTerre1 BIOSPHERE dans REFLEXIONS PERSONNELLES

La planète, nouvel objet à but lucratif ? Demain, des ONG pourront acheter des quotas de baleines pour les protéger. Les parcs naturels pourront être évalués par des agences de notation. Les performances des forêts en matière de recyclage du carbone seront quantifiées. Des produits financiers dérivés vous assureront contre l’extinction d’une espèce. « Nous sommes en train d’étendre aux processus vitaux de la planète les mêmes logiques de financiarisation qui ont causé la crise financière », dénonce le chercheur Christophe Bonneuil, à la fin de la conférence Rio+20. Entretien.

arton2484-781e4 ECONOMIE

Cela fait vingt ans, depuis le sommet de la Terre à Rio en 1992, que l’on se préoccupe davantage de la biodiversité. Quel bilan tirez-vous de ces deux décennies ?

Christophe Bonneuil [1] : Ce qui a été mis en place en 1992 n’a pas permis de ralentir la sixième extinction actuellement en cours [2]. Le taux de disparition des espèces est mille fois supérieur à la normale ! Cette érosion de la biodiversité est essentiellement due à la destruction des habitats naturels, à la déforestation, aux changements d’usage des sols. La Convention sur la Diversité Biologique (CDB) adoptée à Rio il y a vingt ans se souciait certes de la biodiversité, mais son premier article indique clairement que la meilleure façon de la conserver suppose le partage des ressources liées à son exploitation. Il s’agit donc de conserver la biodiversité par la mise en marché de ses éléments, à savoir les « ressources génétiques ».

La CDB entérine dès cette époque la notion de brevets sur le vivant. Les textes préfigurent déjà un modèle marchand qui pense que l’on ne conserve bien que ce qui est approprié, breveté et marchandisé. Tout en mettant en avant qu’une partie de ces profits seront redistribués par un mécanisme de partage des avantages vers les communautés locales. Mais il a fallu plus de quinze ans pour qu’il y ait un accord sur ce mécanisme, lors de la conférence des parties sur la biodiversité à Nagoya en 2010. Il semble que les firmes n’étaient pas pressées d’avoir un mécanisme qui contrôle le retour des royalties vers les populations locales.

Les États se sont-ils donnés les moyens de préserver la biodiversité ?

Christophe_Bonneuil-6cfdf ENVIRONNEMENTIl n’existe pas de fonds mondial que chaque État ou une taxe mondiale sur les biotechnologies auraient pu abonder. Les États ont misé exclusivement sur la bioprospection [3] des firmes pharmaceutiques. Un des contrats les plus médiatisés a été celui qui liait la multinationale allemande Merck à INBio, l’Institut National de la Biodiversité au Costa Rica. Inbio devait fournir à Merck les substances chimiques extraites des plantes et les insectes prélevés au Costa Rica. En contrepartie, Merck versait 500 000 dollars par an, ce qui permettait à INBio d’avoir des ressources pour financer ses actions de conservation. Cet accord a fait énormément de bruit mais il n’a pas été suivi par beaucoup d’autres initiatives de ce type. Les grandes entreprises comptent davantage sur les énormes banques de molécules dont elles disposent, pour innover en laboratoire. Le paradigme de Rio 92, de conservation de la biodiversité par la bioprospection et la biotechnologie, créant un nouveau marché des ressources biologiques tout en rémunérant les communautés locales pauvres a fait la preuve de ses limites.

Concrètement, comment se déroule cette privatisation de la protection de l’environnement ?

Un accord financier a par exemple été signé en mars 2008 entre une société financière, Canopy Capital, et la réserve nationale d’Iwokrama en Guyana, dans la forêt amazonienne. En échange d’un versement annuel de 100 000 dollars finançant des actions de conservation de la réserve, Canopy Capital n’a pas acheté la terre en tant que telle, mais les droits sur les services écosystémiques de la réserve. Autrement dit, les droits sur le maintien de la pluviosité dans la région, sur le stockage de l’eau, sur la rétention du carbone, et éventuellement sur l’effet modérateur sur le climat. La réserve s’étend sur 371 000 hectares, sur lesquels vivent 7 000 habitants.

D’autres accords de ce type sont amenés à se multiplier, soumettant ainsi des parcs naturels aux logiques des « partenariats public-privé ». Avec cet investissement, Canopy Capital espère ensuite vendre des crédits carbone, des crédits biodiversité ou des crédits liés à d’autres services écosystémiques, soit dans le cadre de marchés volontaires (engagement d’une entreprise pour son image de marque), soit dans le cadre de marchés régulés tels les « mécanismes de développement propre » du protocole de Kyoto. Par exemple, si Coca-Cola souhaite compenser ses émissions polluantes, elle pourra financer une action de conservation au Guyana en payant un service à Canopy Capital.

D’autres marchés se développent-ils pour spéculer sur l’écologie ?

À côté des marchés institués par l’action publique (Mécanisme de développement propre de la convention climat, Emission Trading System européen sur le carbone, etc.), des marchés volontaires ont le vent en poupe. Ils témoignent de la privatisation des normes et des politiques environnementales aujourd’hui, alors que l’action publique internationale est enlisée au regard de l’échec de Copenhague, du manque d’ambition de Rio+20, ou de la crise financière des agences de l’ONU. Une foule de bureaux d’étude d’experts, de cabinets d’audit, de chercheurs et de sociétés bancaires se démènent pour codifier des standards, des unités de mesure et des règles d’échange pour ces marchés volontaires.

Ces marchés permettent à des entreprises dont les activités ont des impacts environnementaux désastreux de les compenser pour restaurer à bon compte leur image auprès des consommateurs, des actionnaires ou des bailleurs (montée de critères « verts » dans la notation financière), soit en conduisant elles-mêmes un projet autour de leurs sites industriels (minier par exemple, comme le fait le géant Rio Tinto) soit en finançant par du mécénat ou des achat de crédits une opération de conservation ailleurs dans le monde.

Cela tend à imposer l’idée que tous les milieux, tous les écosystèmes sont substituables les uns aux autres…

En ayant la possibilité de compenser un dégât en un lieu par une « réparation » ailleurs, où cela coûte moins cher, on est dans une logique de flexibilité, de délocalisation. C’est comme si tous les processus naturels pouvaient être ramenés à une seule grandeur monétaire globale… alors que, dans le cas de la biodiversité notamment, sa nature est profondément liée à des espaces, des pratiques et des cultures qui sont très divers. C’est justement ce qui maintient la biodiversité. Mais à la différence du marché du carbone qui entre dans le cadre des mécanismes de développement propre sous l’égide de l’ONU, les crédits biodiversité seront encadrés par des normes et des certificateurs privés.

Il y a notamment une proposition faite par des économistes d’un marché des droits à pêcher la baleine [4]. Ils estiment que plus d’un millier de baleines sont pêchées chaque année, malgré les accords internationaux, ce qui représenterait un marché mondial de 35 millions de dollars. En ramenant cette somme à l’animal, ils évaluent le coût de la baleine à préserver entre 13 000 et 85 000 dollars. Ils ont également calculé que les grandes ONG environnementales dépensaient 25 millions de dollars dans leur campagne de lutte contre la chasse à la baleine. Soit presque autant que ce que vaudrait le marché.

Ces économistes proposent donc à ces ONG d’utiliser leurs fonds dédiés au lobbying pour acheter des quotas de baleines. Elles paieraient pour la conservation, en faisant par exemple des souscriptions auprès du public et des États, ce qui permettrait aux pêcheurs d’être rémunérés sans pêcher. Cette proposition illustre bien l’idéologie ambiante : il faut transformer la nature en marché pour mieux la conserver. Et il faut transformer les activistes faisant du travail politique en simples clients sur un marché.

A quels autres « services rendus » par la nature s’intéressent les investisseurs ?

Depuis les années 1990 aux États-Unis, il existe une sorte de marché national de la compensation qui permet à un « développeur », lorsqu’il crée un supermarché sur une zone humide dans un État américain, de « compenser » la dégradation environnementale causée en payant une action de conservation dans une autre zone humide à plusieurs centaines de kilomètres. L’opérateur qui lance cette restauration écologique (nommé « banque » de compensation) vend de son côté ses « crédits » à divers développeurs qui ont besoin de « compenser » les effets négatifs de leurs activités. Ces crédits correspondent à des surfaces de tel habitat dans tel état écologique, ou bien en nombre de couples de telle espèce protégée.

Ces critères de calcul de l’équivalence entre l’impact d’un projet de « développement » et ce qu’il faut acheter pour compenser sont plus ou moins encadrés par l’Agence de protection environnementale américaine. Aux États-Unis, ce marché de la biodiversité représente 80 000 hectares, plus 400 banques de zones humides et d’espèces protégées, et 3 milliards de dollars de chiffres d’affaires. Plusieurs projets visent à développer de tels marchés, réglementés ou volontaires, au niveau mondial.

Après le marché carbone, on envisage donc un marché international de la biodiversité ?

Le projet le plus abouti serait d’aligner le secteur de conservation de la nature sur le modèle des marchés du carbone et du mécanisme REDD [5]. L’initiative « Biodiversity ans Business Offsets Programme » [6] travaille à la promotion d’un marché international de la compensation financière de la biodiversité qui soit analogue aux mécanismes existant pour les gaz à effet de serre. Il comprend parmi ses membres des ONG comme le WWF, The Nature Conservancy ou Conservation International, des entreprises comme Inmet Mining, des banques comme la Caisse des Dépôts et Consignations, le Global Environmental Fund ou la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement (BERD), et des départements ministériels d’une quinzaine de pays, dont le ministère de l’Écologie en France.

Le but était de mettre en place des méthodologies faisant en sorte que, par exemple, quelqu’un qui dégrade un écosystème en Louisiane puisse restaurer une mangrove au Gabon. Mais l’initiative n’a pas énormément avancé. Avec les crises de 2008-2009, l’espoir d’un marché mondial réglementé de la biodiversité se fait plus lointain. Ce qui avance bien plus plus vite, ce sont les études pilotes pour harmoniser les techniques de quantification et de monétarisation de la biodiversité et des écosystèmes. En toile de fond se dessine un mouvement spéculatif de prospection et d’achat de terres à forte valeur en « services écosystémiques », qui pourrait prolonger la ruée de ces dernières années sur les terres pour produire des agrocarburants.

Vous évoquez la mise en place de « produits dérivés biodiversité, où l’on pourrait spéculer sur la disparition d’espèces comme d’autres ont spéculé sur l’écroulement des subprimes »… C’est à dire ?

Tout échange marchand de tout type de services liés aux écosystèmes comporte des risques : que le service ne soit pas rendu, qu’un aléa climatique ou écologique survienne, etc. Pour sécuriser les marchés émergents des services écosystémiques, on recourt donc à des assurances. C’est le début de marchés dérivés et de la possibilité de parier sur la disparition de telle zone ou de telle espèce pour toucher l’assurance, ou faire monter le cours de tel produit financier dérivé. Avec le carbone, les forêts et autres « services écosystémiques », on est en train d’étendre à des processus vitaux de notre planète les mêmes logiques de financiarisation qui ont causé la crise financière de 2008…

Tout cela se déroule dans un contexte où l’ONU a de moins en moins de volonté politique et ne fonctionne que par des partenariats public-privé, où la communauté politique internationale n’a plus les moyens d’agir. Elle dit aux entreprises : aidez-nous à sauver la planète. Depuis le sommet de Johannesburg en 2002, on a officiellement intronisé les entreprises comme des acteurs légitimes dans l’effort international de protection environnementale. Mais pour que les entreprises sauvent la planète, il est impératif pour leurs actionnaires que cette activité devienne lucrative. Et donc on s’ingénie, dans les agences de l’ONU ou à la Banque Mondiale, à instaurer de nouveaux marchés de la nature.

Fini, les taxes, les parcs ou les régulations publiques, on ne jure plus que par les « instruments de marché » : paiements, enchères, marchés de droits à polluer et de compensation, prêts hypothécaires basés sur la nature… comme la bonne façon « innovante », souple et efficace de gérer l’environnement et de « sauver la planète ». De même qu’il y a un projet néolibéral pour l’eau, les services ou pour l’éducation, on voit bien ici se dessiner les contours du projet néolibéral pour financiariser la gestion de l’ensemble de la biosphère et l’atmosphère… Et il y a de bonnes raisons de s’y opposer !

Propos recueillis par Sophie Chapelle

Notes:

[1] Christophe Bonneuil est chercheur au Centre Koyré, CNRS, et membre de la commission écologie et société d’Attac. Il a participé à la rédaction de l’ouvrage : « La nature n’a pas de prix, les méprises de l’économie verte », publié par l’association Attac, éd. Les liens qui libèrent, 2012.

[2] Après les cinq extinctions massives qui ont marqué la planète, des extinctions préhistoriques à celles de nombreuses espèces liées à la colonisation de nouveaux territoires par l’être humain, en Amérique ou dans le Pacifique.

[3] La bioprospection est l’inventaire et l’évaluation des éléments constitutifs de la diversité biologique ou biodiversité d’un écosystème particulier.

[4] Article de Nature du 12 janvier 2012.

[5] « Reducing emissions from deforestation and forest degradation in developing countries », ou réduction des émissions liées à la déforestation et à la dégradation des forêts dans les pays en développement, lire notre article.

[6] Voir le site officiel.

Publié dans:REFLEXIONS PERSONNELLES |on 20 juin, 2012 |Pas de commentaires »

TCHERNOBYL: CONSEQUENCES POUR L’HOMME ET LA NATURE (YABLOKOV, NESTERENKO)

TCHERNOBYL

TCHERNOBYL: CONSEQUENCES POUR L'HOMME ET LA NATURE (YABLOKOV, NESTERENKO) dans REFLEXIONS PERSONNELLES 23Pripiat_abandonne

 A.V.Yablokov

V.B.Nesterenko

A.V.Nesterenko

  CONSEQUENCES DE LA CATASTROPHE

POUR L’HOMME ET LA NATURE

Saint-Pétersbourg

« NAOUKA »

2007

 DIGEST

 Choix des textes et traduction de Wladimir Tchertkoff

Collaboration de Lisa Mouravieff

 La présentation des démonstrations scientifiques, qui étayent les textes choisis, est exclue de ce digest.

Elle nécessiterait la traduction intégrale du livre de 376 pages en russe, qui contient

149 tableaux, 68 figures, et 826 titres de publications.

Alexei V. Yablokov, Vassili B. Nesterenko, Alexei V. Nesterenko

TCHERNOBYL:

CONSÉQUENCES DE LA CATASTROPHE

POUR L’HOMME ET LA NATURE.

Préface de Dimitro M. Grodzinsky

 PRÉSENTATION

Cet ouvrage est le plus complet panorama critique des publications médicales et biologiques consacrées aux conséquences de la catastrophe de Tchernobyl pour les habitants et pour la nature dans les territoires contaminés par les retombées radioactives (principalement au Bélarus, en Ukraine et en Russie).

Première partie (auteurs A. V. Yablokov et V. B. Nesterenko) : contamination des territoires.

Deuxième partie (auteur A. V. Yablokov) : données sur la morbidité générale et sur la mortalité, et sur les maladies des différents organes et systèmes vitaux dans les territoires contaminés par la radioactivité.

Troisième partie (auteurs A. V. Yablokov et A.V. Nesrerenko) : conséquences pour la nature.

Quatrième partie (auteurs V. B. Nesrerenko et A.V. Nesrerenko) : méthodes pour la minimisation des conséquences de la catastrophe.

Le livre examine les approches méthodologiques pour la détermination des effets de la contamination de Tchernobyl. L’opinion, selon laquelle les conséquences de la Catastrophe sont insignifiantes, ne correspond pas à la réalité des faits qui montrent – par le nombre des victimes (centaines de milliers) et par la durée des conséquences (centaines d’années), – que la catastrophe de Tchernobyl est la plus grande catastrophe technologique de l’histoire.

149 tableaux 68 figures 826 titres de publications dans les 376 pages de la version russe.

LES AUTEURS (en quatrième de couverture).

Professeur Alexei V. Yablokov – docteur ès sciences biologiques, conseiller et membre correspondant de l’Académie des sciences de Russie (depuis 1984), membre honoraire étranger de l’Académie des sciences d’Amérique de Boston (depuis 1996), vice-président du Comité d’écologie du Soviet Suprême de l’URSS (1989 – 1991), conseiller pour l’écologie et la santé publique du Président de la Fédération de Russie (1991 – 1993), président de la commission gouvernementale pour l’immersion des déchets radioactifs dans les mers (1992 – 1993), président de la Commission interministérielle de sûreté écologique du Conseil de Sécurité de la Fédération de Russie (1993 – 1997), président du Programme de Sûreté Nucléaire et Radiologique du Centre de Politique Environnementale de Russie et de l’Union Internationale Sociale  Écologique (depuis 1997). Membre du Comité Européen sur le Risque de l’Irradiation (depuis 2000). Président de la fraction « RUSSIE VERTE » du parti politique russe « YABLOKO » (depuis 2006). Auteur de nombreuses monographies et bulletins sur l’écologie, la théorie évolutionniste, la protection de l’environnement, la sécurité radiologique et la politique écologique.

Professeur Vassili B. Nesrerenko – docteur ès sciences techniques, membre correspondant de l’Académie nationale des sciences du Bélarus, Directeur de l’Institut indépendant de protection radiologique « Belrad » , créé en 1989 avec l’appui de A. Adamovitch, A. Sakharov et A. Karpov. Directeur général  de l’Institut de l’énergie nucléaire de l’Académie des sciences du Bélarus et Constructeur général de la centrale mobile d’énergie atomique « Pamir » (1971 – 1987). V. Nesterenko fut le premier scientifique à avoir mesuré (par spectromètre en survol d’hélicoptère, quelques heures après la catastrophe) la puissance de dose sur le toit du bloc n.4 de la centrale de Tchernobyl explosé. Auteur de plus de 350 monographies sur l’énergie nucléaire et sur la radioprotection. Ambassadeur de la paix de l’ONU, lauréat du Prix de la Paix.

Docteur Alexei Nesterenko – Coordinateur de projets internationaux pour le développement soutenable au Bélarus et en Lituanie. Auteur de plus 30 monographies sur l’écologie et la sécurité radiologique. Chef scientifique de l’Institut de protection radiologique « Belrad » (Minsk).

LES RELECTEURS SCIENTIFIQUES : E.B Bourlakova – docteur ès sciences biologiques, professeur, présidente du Conseil scientifique de radiobiologie de l’Académie des sciences de Russie (Moscou) ; D.M. Grodzinsky - docteur ès sciences biologiques, professeur, membre actif de l’Académie des sciences d’Ukraine, membre de la commission nationale de la protection radiologique de la population d’Ukraine (Kiev)

S O M MA I R E

Cruel jeu de cache-cache (D.M.Grodzinsky)…………………………………………………………………….7

Avant-propos des auteurs……………………………………………………………………..10

Introduction : dure vérité sur la catastrophe de Tchernobyl…………………………………12

PREMIÈRE PARTIE. LA CONTAMINATION DES TERRITOIRES…………………14

Chapitre 1. CONTAMINATION RADIOACTIVE…………………………………………………15

1.1. Particularités géographiques de la contamination…………………………………………….15

1.1.1. Europe…………………………………………………………………………………..15

1.1.1.1. Bélarus………………………………………………………………………………15

1.1.1.2. Ukraine……………………………………………………………………….15

1.1.1.3. Partie européenne de Russie…………………………………………………………………….15

1.1.2. Asie………………………………………………………………………………16

1.1.3. Amérique du nord…………………………………………………………………16

1.1.4. Arctique…………………………………………………………………………..16

1.1.5.Hémisphère sud…………………………………………………………………………………………..16

1.2. Particularités écologiques de la contamination…………………………………….16

1.2.1. Contamination en taches de léopard………………………………………………..17

1.2.2. Le problème des « particules chaudes »…………………………………………….17

1.3. Modification de la composition des radionucléides pourvoyeurs de doses…………17      

1.3.1. Modification de la composition des radionucléides dans le temps……………………17

1.3.2. Problème de l’américium-241.……………………………………………………..18

1.4. Combien de personnes ont été touchées par la contamination de Tchernobyl ?…….18

Chapitre 2. CONTAMINATION PAR LE PLOMB DE LA CATASTROPHE

DE TCHERNOBYL…………………………………………………………………………………..20

Conclusion………………………………………………………………………………………………20

DEUXIÈME PARTIE. LA SANTÉ DE LA POPULATION………………………………21

Chapitre 3. PROBLÈMES MÉTHODOLOGIQUES DE LA RECHERCHE DES

CONSÉQUENCES DE LA CATASTROPHE POUR LA SANTÉ……………………………..22

3.1. Difficultés pour obtenir des données objectives sur les effets de la Catastrophe…..22

3.2. De l’utilisation des « protocoles scientifiques »..…………………………………..24

3.3. Comment reconnaître l’influence de la Catastrophe sur la santé de la population..24

Chapitre 4. MORBIDITÉ GÉNÉRALE ET INVALIDITÉ…………………………………….25

4.1. Bélarus………………………………………………………………………………25

4.2. Ukraine……………………………………………………………………………..25

4.3. Russie……………………………………………………………………………….26

4.4. Autres pays ………………………………………………………………………………26

Chapitre 5. VIEILLISSEMENT RADIOLOGIQUE……………………………………………27

Chapitre 6. MORBIDITÉ NON CANCÉREUSE………………………………………………28

6.1 Maladies des systèmes circulatoire et lymphatique…………………………………28

6.1.1. Maladies du sang et des organes hématopoïétiques (p.70)…………………………………….28

6.1.1.1. Bélarus [1. – 14.]………………………………………………………………28

6.1.1.2. Ukraine [1. – 8]……………………………………………………………….28

6.1.1.3. Russie [1. – 11.] ………………………………………………………………28

6.1.2. Maladies des organes du système circulatoire (p.75)………………………………..28

6.1.2.1. Bélarus [1. – 10]………………………………………………………………28

6.1.2.2. Ukraine [1. – 5.]………………………………………………………………28

6.1.2.3. Russie [1. – 14.]……………………………………………………………….28

6.1.2.4. Autres pays……………………………………………………………………28

6.2 Altérations génétiques (p.81)…………………………………………………………28

6.2.1. Altérations de la fréquence des mutations…………………………………………..28

6.2.1.1. Mutations chromosomiques……………………………………………………28

6.2.1.1.1. Bélarus [1. – 5.]……………………………………………………………28

6.2.1.1.2. Ukraine [1. – 13.]………………………………………………………….29

6.2.1.1.3. Russie [1. – 20.]……………………………………………………………29

6.2.1.1.4. Autres pays – Yougoslavie, Autriche, Allemagne, Norvège………………….29

6.2.1.2. Mutations génomiques…………………………………………………………29

6.2.1.2.1. Trisomie-21 (mongolisme) – Bélarus, Allemagne, Suède, Grande Bretagne………29

6.2.1.2.2. Trisomie-13 (syndrome Patau) et autres mutations génomiques………………..29

6.2.2. Polymorphisme génétique des protéines……………………………………………29

6.2.3. Altérations dans l’ADN satellitaire…………………………………………………29

6.2.4. Malformations congénitales induites génétiquement………………………………..29

6.2.5. Enfants de parents irradiés [1. – 13.]……………………………………………………………….29

6.2.6. Les aberrations chromosomiques sont des indicateurs de l’état de santé [1. – 12.]……29

6.2.7. Conclusion (p.100-101)……………………………………………………………29

6.3. Maladies des organes du système endocrinien……………………………………..29

6.3.1 Revue des matériaux concernant les maladies du système endocrinien……………….30

6.3.1.1. Bélarus [1. – 16.]………………………………………………………………30

6.3.1.2. Ukraine [1. – 09.]……………………………………………………………..30

6.3.1.3. Russie [1. – 13.]……………………………………………………………….30

6.3.2. Altérations du fonctionnement de la glande thyroïdienne…………………………….31

6.3.2.1. Bélarus [1. – 15]……………………………………………………………….31

6.3.2.2. Ukraine [1. – 12]………………………………………………………………31

6.3.2.3. Russie [1. – 6]…………………………………………………………………31

6.3.2.4. Autres pays – Pologne…………………………………………………………31

6.3.3. Conclusion………………………………………………………………………..31

6.4. Altérations de l’immunité et du système lymphoïde…………………………………31

6.4.1. Bélarus [1. – 22.]………………………………………………………………….31

6.4.2. Ukraine [1. – 10.]……………………………………………………………….31

6.4.3. Russie [1. – 13.]…………………………………………………………………31

6.5. Maladies des organes respiratoires…………………………………………………32

6.5.1. Bélarus [1. – 8.]……………………………………………………………………32

6.5.2. Ukraine [1. – 9.]…………………………………………………………………..32

6.5.3. Russie [1. – 8.]……………………………………………………………………32

6.6. Maladies des organes du système uro-génital et atteintes à la reproduction………33

6.6.1 Bélarus [1. – 12.]…………………………………………………………………..33

6.6.2. Ukraine [1. – 18.]…………………………………………………………………33

6.6.3. Russie [1. – 10.]…………………………………………………………………..33

6.6.4. Autres pays – Arménie, Tchéquie…………………………………………………..33

6.7. Maladies du système osseux et musculaire…………………………………………33

6.7.1. Bélarus [1. – 3.]……………………………………………………………………33

6.7.2. Ukraine [1. – 7.]…………………………………………………………………..33

6.7.3. Russie [1. – 12.]…………………………………………………………………..33

6.8. Maladies des organes du système nerveux et des organes des sens………………..33

6.8.1. Maladies des organes du système nerveux………………………………………….33

6.8.1.1. Bélarus [1. – 7.]……………………………………………………………….33

6.8.1.2. Ukraine [1. – 13.]……………………………………………………………..33

6.8.1.3. Russie [1. – 25.]…………………………………………………………………………………….33

6.8.2. Maladies des organes des sens……………………………………………………..34

6.8.2.1. Bélarus [1. -11.]……………………………………………………………….34

6.8.2.2. Ukraine [1. – 6.]……………………………………………………………………..34

6.8.2.3. Russie [1. – 3.]………………………………………………………………..34

6.8.2.4. Autres pays – Norvège…………………………………………………………34

6.9. Maladies du système digestif et des organes internes………………………………34

6.9.1. Bélarus [1. – 12.]………………………………………………………………….34

6.9.2. Ukraine [1. – 15.]…………………………………………………………………34

6.9.3. Russie [1. – 17.]…………………………………………………………………..34

6.10. Maladies de la peau……………………………………………………………….34

6.10.1. Bélarus [1. – 5.]………………………………………………………………….35

6.10.2. Ukraine [1.]………………………………………………………………………35

6.10.3. Russie [1. – 7.]…………………………………………………………………………………………35

6.11. Infections et invasions……………………………………………………………..35

6.11.1. Bélarus [1. – 16.]…………………………………………………………………35

6.11.2. Ukraine [1. – 2.]…………………………………………………………………35

6.11.3. Russie [1. – 11.]…………………………………………………………………35

6.12. Malformations congénitales……………………………………………………….35

6.12.1. Bélarus [1. – 15.]…………………………………………………………………35

6.12.2. Ukraine [1. -  12.]………………………………………………………………..35

6.12.3. Russie [1. – 7.]…………………………………………………………………..35

6.12.4. Autres pays – Moldavie, Géorgie………………………………………………….35

6.13. Autres maladies……………………………………………………………………35

Chapitre 7. AFFECTIONS CANCÉREUSES (pp. 178 – 207)…………………………………..35

7.1. Augmentation de la morbidité cancéreuse générale………………………………..36

7.1.1. Bélarus [1. – 8.]…………………………………………………………………..36

7.1.2 Ukraine [1. – 5.]……………………………………………………………………36

7.1.3. Russie [1. – 5.]……………………………………………………………………36

7.2.  Cancer de la thyroïde………………………………………………………………36

7.2.1. Nombre de malades……………………………………………………………….37

7.2.1.1. Bélarus [1. –9.]………………………………………………………………..37

7.2.1.2 Ukraine [1. – 7.]……………………………………………………………….37

7.2.1.2. Russie [1. – 8.]………………………………………………………………..37

7.2.1.4. Autres pays [1. – 4]……………………………………………………………37

7.2.2. Combien et quand peut-on attendre de nouveaux cas de cancers de la thyroïde ?……….37

(pp. 193-196)

7.3. Cancer du sang – leucémie…………………………………………………………37

7.3.1. Bélarus [1. – 8.]

7.3.2. Ukraine [1. – 8.]

7.3.3. Russie [1. – 6.]

7.4. Autres cancers

7.4.1. Bélarus [1. – 11.]

7.4.2. Ukraine [1. – 6.]

7.4.3. Russie [1. –  7.]

Chapitre 8. MORTALITÉ……………………………………………………………………..37

8.1. Augmentation de la mortalité prénatale…………………………………………….38

8.1.1. Bélarus [1. – 2.]

8.1.2. Ukraine [1. – 4.]

8.1.3. Russie [1. – 4.]

8.1.4. Autres pays………………………………………………………………………..38

8.2. Augmentation de la mortalité périnatale, néonatale………………………………..38

et enfantine en général.

8.2.1. Mortalité périnatale

8.2.1.1. Bélarus [1.]

8.2.1.2. Ukraine [1. – 2.]

8.2.1.3. Autres pays – Allemagne, Pologne.

8.2.2. Mortalité néonatale

8.2.2.1. Ukraine

8.2.2.2. Russie

8.2.2.3. Autres pays – Pologne. Angleterre, Galles………………………………………38

8.2.3. Mortalité enfantine générale (0-14 ans)…………………………………………….39

8.2.3.1. Bélarus [1.]

8.2.3.2. Ukraine [1. – 3.]

8.2.3.3. Russie [1.]

8.3. Mortalité des liquidateurs [1. – 14.]

8.4. Augmentation de la mortalité générale……………………………………………..39

8.4.1. Bélarus [1. – 4.]

8.4.2. Ukraine [1. – 3.]

8.4.3. Russie [1. – 3.]

8.5. Calculs de la mortalité générale selon la grandeur du risque cancérigène………..39

8.6. Calculs de la mortalité générale par comparaison entre les territoires……………40

fortement et faiblement contaminés

8.7. Quel est le nombre des victimes de Tchernobyl ?………………………………………………40

8.8. Conclusion…………………………………………………………………………………………………..41

 

Conclusion de la IIe PARTIE…………………………………………………………………41

TROISIÈME PARTIE.

CONSÉQUENCES DE LA CATASTROPHE POUR L’ENVIRONNEMENT………….44

Chapitre 9. CONTAMINATION DE L’ATMOSPHÈRE, DES EAUX ET DES SOLS…………44

9.1. Contamination de l’atmosphère terrestre

9.2. Contamination des écosystèmes d’eau [1. – 8.]

9.3. Contamination du sol [1. – 6.]……………………………………………………..44

Chapitre 10. INFLUENCE SUR LE MONDE VÉGÉTAL…………………………………….45

10.1. Accumulation des radionucléides par les végétaux et les champignons [1. – 24.]..45

10.2. Radiomorphoses et tumeurs [1. – 9.]

10.3. Altérations génétiques [1. – 12.]

10.4. Autres altérations des végétaux et des champignons [1. – 5.]

Chapitre 11. INFLUENCE SUR LE MONDE ANIMAL

11.1. Incorporation des radionucléides [1. – 10.]

11.2. Altérations de la reproduction [1. – 13.]

11.3. Modifications génétiques [1. – 17.]

11.4. Modifications d’autres caractéristiques biologiques [1. – 11.]

Chapitre 12. INFLUENCE SUR LES MICRO-ORGANISMES ET LES VIRUS [1. – 5.]

Conclusion de la IIIe PARTIE……………………………………………………………………………………….45

QUATRIÈME PARTIE.

LA RADIOPROTECTION DES HABITANTS

DES TERRITOIRES CONTAMINES……………………………………………………..46

Chapitre 13. SUIVI RADIOLOGIQUE DANS LES TERRITOIRES CONTAMINES…………46

13.1. Suivi radiologique des produits alimentaires……………………………………..47

13.2. Suivi de la concentration de radionucléides dans l’organisme humain [1. – 5.]

Chapitre 14. EXPÉRIMENTATION DE L’EMPLOI D’ENTÉROABSORBANTS

POUR L’ÉLIMINATION DES RADIONUCLÉIDES DE L’ORGANISME…………………….49

14.1.Emploi des entéroabsorbants à base de pectine. [1. – 12.]

14.2. Où l’aide internationale à la population enfantine souffrante des

conséquences de la catastrophe serait-elle particulièrement efficace ?

Chapitre 15. MESURES DE PROTECTION EN AGRICULTURE  ET EN EXPLOITATION FORESTIÈRE DANS LES TERRITOIRES CONTAMINÉS PAR LES RADIONUCLÉIDES..50

15.1. Mesures de protection en agriculture [1. – 5.]

15.2. Expériences de mesures de protection dans l’exploitation forestière [1. – 4.]

Conclusion de la PARTIE IV…………………………………………………………………51

LEÇONS GÉNÉRALES ET CONCLUSION : Nous ne pouvons pas « oublier Tchernobyl »…..52

BIBLIOGRAPHIE…………………………………………………………………………..56

 Cruel jeu de cache-cache

Traduction de Lisa Mouravieff

21 ans se sont écoulés depuis la catastrophe de Tchernobyl et le monde est devenu différent – chancelant et incertain.  Tout ce qui constituait depuis des millénaires la plus sûre et la plus fidèle des sources de vie – l’air, les eaux naturelles, les fleurs, les fruits de la terre, les forêts, les fleuves et les mers -  tout cela est devenu en quelques jours source de danger pour l’homme,  car, se propageant du réacteur en ruines à travers tour l’hémisphère nord de notre planète, les éléments radioactifs ont rempli tout notre espace vital  et sont devenus source d’irradiation dangereuse pour l’homme et tout le biote. Tout de suite après l’accident, la réaction de l’opinion publique a, certes, été très forte, ce qui s’est manifesté, entre autre, par un regain de méfiance à l’égard de l’énergie atomique. De nombreux pays ont décidé d’arrêter la construction de nouvelles centrales nucléaires. Les énormes dépenses devenues nécessaires pour minimiser les conséquences négatives de l’accident de Tchernobyl ont aussitôt « augmenté le prix » de l’énergie électrique produite par les centrales nucléaires. Il est évident que tout cela ne pouvait qu’inquiéter les gouvernements de nombreux pays, ainsi que les grandes organisations internationales et les institutions nationales chargées de gérer les technologies nucléaires. C’est sans aucun doute ce trouble qui est à l’origine d’un processus paradoxal : la politisation du problème des effets sanitaires de l’irradiation chronique des populations vivant dans les territoires contaminés par Tchernobyl.

La politisation de ce problème a eu pour conséquence qu’au lieu d’organiser une étude objective et pluridisciplinaire des phénomènes radiologiques et radio biologiques induits par l’irradiation à faibles doses et de prévenir ses effets négatifs éventuels par des mesures adéquates, capables de protéger au maximum les populations des dangers de la radioactivité, on a entrepris, sous l’influence des apologistes de l’énergie atomique, de classer « top secret »  les données sur les valeurs véritables des rejets radioactifs et des doses d’irradiation, et d’occulter les informations sur la morbidité grandissante des populations directement ou indirectement touchées par Tchernobyl. Maintenant qu’il est devenu impossible de cacher la manifestation évidente de la hausse de la morbidité, on tente d’expliquer cette hausse par les conséquences d’un stress national généralisé. On entreprend parallèlement la révision de nombreux paradigmes de la radiobiologie moderne. Par exemple, à l’encontre de la nature de l’interaction entre les rayons ionisants et les structures moléculaires de la cellule telle qu’elle est généralement connue, on se remet à parler de seuil, de « norme acceptable », pour l’action de la radiation. En se basant sur le phénomène d’hormesis, observé lors de l’irradiation par faibles doses chez certaines créatures (mais pas chez l’homme), des scientifiques entreprennent de prouver que  les doses engendrées par Tchernobyl  ne peuvent avoir qu’un effet bénéfique sur l’être humain et tous les êtres vivants en général.

Ce jeu de cache-cache, à la fois étrange et cruel, car le prix à payer se calcule en perte de santé et de qualité de vie pour des millions d’êtres humains, ce petit jeu a atteint son apogée en 2006, lors de la commémoration du 20 anniversaire de la catastrophe de Tchernobyl à Kiev. Au cours des dix derniers jours d’avril, deux conférences internationales parallèles se sont déroulées dans deux locaux peu éloignés l’un de l’autre : l’une était organisée par les adeptes du nucléaire, l’autre par plusieurs organisations internationales inquiètes pour l’état de santé réel des populations victimes de l’accident de Tchernobyl. La première conférence n’a toujours pas adopté de résolution, car la partie ukrainienne refuse d’adhérer à ses dispositions par trop optimistes. La deuxième conférence s’est unanimement ralliée à la conclusion que la contamination d’énormes territoires par les radionucléides s’accompagne de conséquences sanitaires négatives nettement manifestées et par des risques de maladies radio induites clairement prévisibles pour les années à venir dans les pays d’Europe.

N’est-il pas grand temps d’arrêter ce jeu qui n’a aucune excuse, car le prix à payer est la santé des gens ? J’estime qu’il est grand temps de cesser cette confrontation entre les avocats des technologies nucléaires et ceux qui soutiennent une approche scientifique objective dans leur évaluation des risques de conséquences néfastes de l’accident de Tchernobyl pour les populations. Ces risques ne sont pas du tout, loin de là, des quantités négligeables et les arguments qui le confirment sont tout à fait convaincants.

Les procès-verbaux – aujourd’hui déclassés – des séances des commissions gouvernementales, consacrées à la catastrophe de Tchernobyl, dans les premières décades de mai 1986 contiennent des données sur le nombre de patients souffrant du mal des rayons aigus entrés dans les hôpitaux. Ce sont de très grands chiffres : de deux à trois ordres de grandeur supérieurs à ceux que citent jusqu’à présent les documents officiels. Comment expliquer cette différence d’évaluation du nombre de ceux qui contractèrent le mal des rayons ? Peut-on affirmer sans être accusé de légèreté que tous les médecins qui ont diagnostiqué ce mal étaient dans l’erreur ?

On se souvient que pendant les dix jours qui ont suivi l’accident beaucoup de gens souffraient d’irritation naso-pharyngienne. Cependant nous ne savons pas  quelles sont les valeurs de doses ou le nombre de particules chaudes qui doivent entrer en contact avec l’épithélium du pharynx pour provoquer cette laringopharyngite. Des valeurs probablement plus élevées qu’on l’imagine.

Lors de l’estimation des doses d’irradiation acquises dans l’année de l’accident, on néglige les radionucléides à vie brève des nuages radioactifs qui se sont déposés sur la surface du sol et sur les feuilles des légumes ou autres cultures précoces. Cependant même en 1987 l’activité de certains d’entre eux dépassait l’activité du césium-137 ou du strontium-90. La décision de calculer les doses en se fondant uniquement sur le rayonnement gamma du césium-137 donne donc des résultats sous-évalués pour les doses effectives accumulées. Les doses d’irradiation interne  sont calculées selon l’activité spécifique du lait et des pommes de terre mesurée dans les localités où ils sont produits. Mais on ne tient pas compte de la radioactivité des champignons et autres produits de la forêt alors que ces aliments constituent une part importante de la ration alimentaire des habitants des régions du Polessié.

Les régions du Polessié se caractérisent par un déficit d’iode, par conséquent les effets nocifs de l’iode radioactif doivent y occuper une place plus importante  que dans les régions où cet élément n’est pas en déficit. Mais cet aspect des régions contaminées n’a jamais été pris en compte comme il aurait fallu.

On néglige également le fait que l’efficacité de l’irradiation interne n’est pas toujours identique à celle de l’irradiation externe en ce qui concerne ses effets cytogénétiques : l’irradiation interne a une action nocive bien plus importante.

Nous voyons donc qu’il y a lieu de supposer que les doses d’irradiation n’ont jamais été évaluées convenablement, surtout pendant la première année qui a suivi l’accident. Les données concernant l’accroissement de la morbidité pendant les vingt années qui ont suivi la catastrophe viennent confirmer cette constatation.

Les données sur les cas de tumeurs malignes de la thyroïde chez l’enfant sont particulièrement expressives, au point que les partisans de la « radiophobie » comme cause principale des pathologies de l’après Tchernobyl ne nient pas l’augmentation de la fréquence de ce mal. Avec le temps on a assisté à une augmentation des cas de cancers à l’évolution plus lente, comme le cancer du sein ou des poumons.

D’année en année on assiste à une hausse de la morbidité des maladies non cancéreuses d’étiologie diverse. L’analyse des courbes de la morbidité générale des enfants vivant dans les territoires contaminés par Tchernobyl est particulièrement désespérante. D’année en année on voit diminuer le nombre d’enfants pratiquement en bonne santé. A Kiev, par exemple, où il y avait 90% d’enfants en bonne santé avant l’accident, leur pourcentage a diminué au cours des années qui ont suivi pour ne plus constituer aujourd’hui que 20%. Dans certaines régions du Polessié il n’y a plus un seul enfant en bonne santé. La morbidité chez l’adulte augmente aussi sensiblement dans tous les groupes d’âge : au cours des 20 ans qui ont suivi l’accident son taux s’est vu multiplié par divers facteurs selon les maladies.  On observe  avec netteté l’augmentation des cas de maladie cardio-vasculaire, la hausse de la fréquence des attaques cérébrales, des infarctus, de l’ischémie du muscle cardiaque. La durée moyenne de vie s’abrège en conséquence.

On observe une situation nettement inquiétante concernant les maladies du système nerveux chez l’enfant comme chez l’adulte. La fréquence des maladies de l’oeil, en particulier des cataractes, est en hausse brutale.

Les diverses formes de pathologie de la grossesse et l’état de santé des nouveaux-nés dans les familles des liquidateurs de l’accident ou de ceux qui ont été évacués des zones de forte contamination ne manquent pas d’inquiéter.

Les actions des défenseurs de l’énergie atomique qui nient les effets nocifs de l’irradiation sur la santé des populations paraissent particulièrement cyniques sur cette toile de fond tragique. Leurs paroles s’accompagnent malheureusement d’actes correspondants : refus presque total du financement de la recherche médico-biologique, suppression des institutions chargées « des affaires de Tchernobyl »,  détournement des équipes de scientifiques de l’étude des problèmes engendrés par la catastrophe de Tchernobyl. De plus il reste parmi nous de moins en moins de spécialistes qui sont allés à l’école de l’accident, qui ont pu pénétrer au plus profond des véritables causes des effets radiologiques et ont appris à contrecarrer le développement des conséquences néfastes de l’irradiation. Très bientôt il ne restera plus personne de ceux qui ont appris par leur propre expérience comment il faut agir dans le cas d’une catastrophe radiologique de l’ampleur de celle de Tchernobyl. Pourtant l’expérience acquise est utile non seulement aux pays touchés par cette catastrophe mais aussi à l’avenir de notre planète tout entière qui doit s’attendre à divers accidents à grande échelle vu la direction que suit actuellement le développement des technologies.

Sommes-nous donc à tel point myopes qu’à cause de l’entêtement de quelques favoris du nucléaire privés d’humanité et de morale,  nous sommes prêts à perdre l’expérience de la protection de l’homme des conséquences des éventuelles catastrophes technologiques à grande échelle, expérience que nous avons acquise avec tant d’abnégation et de sincère désintéressement ? Le progrès rapide que l’on observe en biologie et en médecine nous permet d’espérer qu’il n’est pas vain de chercher les moyens de supprimer les risques de nombre des maladies provoquées par une irradiation chronique. Il serait tout à fait insensé de négliger ces possibilités.

Il faut espérer malgré tout que l’objectivité dans l’évaluation des conséquences sanitaires de Tchernobyl finira par prendre le dessus, que la diversité biologique et  une attitude morale de la société en général à l’égard du progrès technique futur finiront par triompher.

On voudrait tant y croire.

Ce livre représente vraisemblablement la tentative la plus complète à ce jour de généraliser un très grand nombre de données concernant les effets nocifs de la catastrophe de Tchernobyl sur la santé des populations et de la nature. Les matériaux du livre montrent avec évidence que les conséquences de la Catastrophe augmentent au lieu de diminuer et continueront à augmenter dans l’avenir. Comment ne pas accepter la conclusion principale du livre : il ne faut pas oublier la Catastrophe, car ses conséquences se feront sentir sur la santé des hommes et de la nature pendant encore plusieurs générations.

 

D.M.Grodzinski, docteur en biologie, professeur,

membre de l’Académie des sciences nationale d’Ukraine.

Kiev, le 26 avril 2007

 

AVANT-PROPOS DES AUTEURS

L’idée principale du présent ouvrage est de présenter de façon brève et systématique les résultats des recherches consacrées aux différentes conséquences de la catastrophe de Tchernobyl. La nécessité d’une telle analyse est devenue évidente après la présentation au public en septembre 2005 par l’Agence Internationale de l’énergie atomique (AIEA) et l’Organisation mondiale de la santé (OMS) du rapport largement annoncé du « Forum de Tchernobyl », dont le contenu peut être brièvement résumé ainsi : « Les conséquences de la catastrophe de Tchernobyl ne sont pas si graves que cela, il faut organiser au mieux la vie dans les territoires contaminés et oublier Tchernobyl ».

Voici l’histoire de la création de ce livre.  A l’initiative de GREENPEACE International, plusieurs dizaines de spécialistes, pour la plupart de Biélorussie, d’Ukraine et de Russie (voir la liste ci-dessous), motivés par l’absence d’objectivité de l’AIEA et de l’OMS dans l’évaluation des conséquences de Tchernobyl, ont présenté à la veille du 20e anniversaire de la catastrophe en 2005 leurs études originales ou leurs aperçus consacrés aux conséquences de la catastrophe de Tchernobyl. En outre des centaines de copies d’articles, de résumés de thèses et d’autres matériaux consacrés à Tchernobyl reçus par GRENNPEACE ont été ajoutés à la bibliographie sur ce sujet rassemblée par A.Yablokov au cours des nombreuses années qui ont suivi la catastrophe (Yablokov 2001). En se basant sur ces documents, à la veille du 20e anniversaire de la catastrophe, le 16 avril 2006, fut publié le récapitulatif de A.Yablokov, I.Labunska, I.Blokov (Eds). « Health consequences of the Chernobyl Catastrophe » (Amsterdam, 2006, 137 p. ; www.grenpeace.org/international/press/reports/chernobylhealthreport); pour des raisons technique il s’est avéré impossible d’y inclure tout le matériel réuni. Plus tard une partie des documents présentés fut publiée dans le recueil I.Blokov, T.Sadownitchik, I.Labunska, I.Volkov (Eds) 2007.   The Health Effects of the Human Victims of the Chernobyl Catastrophe. Collection of scientific articles, Amsterdam, 235p. ; www.grennpeace.de/fileadmin/gpd/user_upload/themen/atomkraft/chernobylhealthreport.pdf.

Il faut ajouter à cela que des conférences consacrées au 20e anniversaire de Tchernobyl se sont tenues en 2006 en Ukraine, Russie, Biélorussie, Allemagne, Suisse, aux Etats-Unis et dans d’autres pays et que plusieurs aperçus bibliographiques contenant de nouveaux matériaux consacrés à ses conséquences sanitaires ont été publiés.

Citons parmi eux :

-               « Posledstvija Chernobyl’skoj avarii: ocenka i prognoz dopolnitel’noj smertnosti i rakovyh zabolevanij». [Conséquence de l’accident de Tchernobyl : évaluation et prévision de la hausse de la mortalité et de l’augmentation des cas de cancer »] 2006, M., Centr nezavisimoj jekologicheskoj jekspertizy RAN OMNNO «Sovet Grinpis», 24s. (ISBN 5-94442-012-X);

-               C.C.Busby and A.V.Yablokov (Eds).2006. Chernobyl : 20 years On Health Effects of the Chernobyl Accident. European Comm. Of Radiat. Risk Green Audit Press, Aberystwyth, 250 p. (www.euradcom.org/publications/chernobylinformation.htm);

-               A.Yablokov, R.Braun, U.Watermann (Eds), 2006.Chernobyl. 20 Years After. Myth and Truth. Agenda Verlag, Munster, 217 p;

-               I.Fairly and D.Sumner. 2006. The Other Report on Chernobyl (TORCH). Berlin, 90p. (www.greens(efa.org/cms/default/dok/118/118729.the_other_report_on_chernobyl_torch@en.htm);

-               Nacional’nye doklady po posledstvijam Katastrofy v Belarusi, Ukraine i Rossii. [Rapports nationaux sur les conséquences de la Catastrophe en Biélorussie, Ukraine et Russie]

La littérature scientifique consacrée aux conséquences de la Catastrophe compte en 2007 plus de 30 000 ouvrages et articles, publiés pour la plupart en langues slaves. Les systèmes d’information d’Internet contiennent de nombreux millions de documents : descriptions, souvenirs, cartes, photos etc. (par ex. 14,5 millions de pages dans GOOGLE, 1,87 millions dans YANDEX, 1,25 millions dans RAMBLER. Il y a plusieurs dizaines de sites consacrés à Tchernobyl, ils sont particulièrement nombreux chez les associations du réseau « Enfants de Tchernobyl » et les associations des liquidateurs). Le « Tchernobyl Digest », publié à Minsk avec la participation de diverses organisations de Biélorussie et de Russie depuis 1990, présente plusieurs milliers d’ouvrages annotés. Cependant le Rapport du « Forum de Tchernobyl » (2005), largement vanté par l’Organisation mondiale de la Santé et l’Agence Internationale à l’Energie Atomique comme le tableau  « le plus complet et le plus objectif » des conséquences de la Catastrophe, ne mentionne au chapitre de son analyse des conséquences sanitaires de la Catastrophe que près de 350 publications, pour la plupart en langue anglaise.

La liste des documents utilisés pour le présent ouvrage contient près de 1000 titres  mais nous avons utilisé en tout plus de 5000 articles publiés ou placés dans Internet, surtout en langues slaves. Nous nous excusons d’avance auprès des équipes scientifiques et des auteurs dont les travaux liés aux conséquences de la catastrophe de Tchernobyl n’ont pas été mentionnés dans les pages de nos ouvrages – les mentionner tous est physiquement impossible.

Voici les auteurs des diverses parties du présent ouvrage : I-e partie  « La contamination des territoires » – A.V.Yablokov et V.B.Nesterenko ; II-e partie « La santé des populations » – A.V.Yablokov ; III-e partie « Les conséquences de la Catastrophe pour la nature» – V.B. Nesrerenko, A.V.Nesterenko et A.V.Yablokov. L’ensemble du texte a été revu par tous les auteurs et exprime leur opinion commune.

[…]

 Introduction

Dure vérité sur la catastrophe  de Tchernobyl

L’explosion du quatrième bloc de la centrale nucléaire de Tchernobyl le 26 avril 1986 coupa la vie de millions d’habitants de la planète en deux parties : l’AVANT et l’APRÈS Tchernobyl. La catastrophe de Tchernobyl est un alliage complexe où se confondent  aventurisme technocratique et héroïsme de la part des liquidateurs, solidarité humaine et couardise de la part des hommes politiques (qui ont eu peur de prévenir leurs populations de l’énorme risque, multipliant le nombre de victimes innocentes), souffrances des uns et intérêt des autres. Tchernobyl a enrichi notre vocabulaire quotidien de nouvelles expressions : « liquidateurs », «enfants de Tchernobyl », « collier de Tchernobyl », « le SIDA de Tchernobyl », « la trace de Tchernobyl », « la contamination de Tchernobyl ».

Les vingt années qui se sont écoulées depuis la catastrophe nous ont clairement démontré que l’énergie atomique recèle bien davantage de danger que les armes nucléaires : le rejet d’un seul réacteur a provoqué une contamination cent fois supérieure à la contamination due aux bombes lâchées sur Hiroshima et Nagasaki.  Il est évident aujourd’hui qu’un seul réacteur nucléaire est capable de contaminer dangereusement la moitié du globe terrestre. Il est devenu évident que les habitants d’aucun pays de la planète ne peuvent plus compter sur leurs gouvernements pour les protéger d’une contamination radiologique apportée par le vent on ne sait d’où.

Les discussions se poursuivent toujours pour savoir quelle fut la quantité de radionucléides dispersée de par le monde et combien il en reste encore à l’intérieur du sarcophage, ouvrage cyclopéen en béton armé recouvrant le réacteur en ruines. Les uns affirment que 4 à 5% seulement des radionucléides d’une activité totale 50 millions de Ci ont été rejetés, d’autres affirment que le puits du réacteur est quasiment vide et que l’activité totale des radionucléides dispersés dans l’atmosphère s’élève à 10 milliards de Ci (pour le détail voir Annexe 1,2).

On ne connaît pas le nombre exact de personnes ayant participé à la liquidation des conséquences de la catastrophe car les dispositions secrètes interdisaient de « rendre public le fait de l’appel à la participation aux travaux concernés… » (cit. de la lettre du Ministère de la défense de l’URSS du 9 juin 1989… voir ch. 3 pour plus de détails).

Un peu avant le 20e anniversaire de Tchernobyl, en septembre 2005, le « Forum de Tchernobyl », constitué d’un groupe de spécialistes parmi lesquels des représentants de l’AIEA, de l’UNSCEAR, de l’OMS et d’autres programmes de l’ONU ainsi que de la Banque mondiale et de diverses organisations de la Biélorussie, la Russie et l’Ukraine, présenta un rapport en trois volumes – « L’héritage de Tchernobyl : conséquences sanitaires, écologiques et socio-économiques ». Voici les conclusions principales du volume consacré aux problèmes de santé : près de 9000 personnes ont trouvé la mort et peuvent encore périr de cancers radio induits (ce qu’il sera « difficile de découvrir » sur fond de cancers spontanés) ; près de 4000 cas de cancers radio induits de la thyroïde chez l’enfant ont été opérés avec succès ; on observe une certaine augmentation des cas de cataracte chez les liquidateurs et les enfants vivant en territoire contaminé. Cependant les facteurs tels que la misère, les modes de vie impropres, le sentiment de victime, le fatalisme – facteurs largement répandus parmi la population – sont bien plus dangereux que la radioactivité des retombées de Tchernobyl. En général, les conséquences de la catastrophe « pour la santé des gens se sont avérées bien moins graves qu’on ne l’avait cru au départ ».

Ceci est le point de vue des spécialistes travaillant dans le domaine de l’industrie nucléaire. Mais il existe un autre point de vue clairement exprimé par l’ancien secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan : « On ne connaîtra peut être jamais le nombre exact de victimes. Mais le fait que trois millions d’enfants nécessitent des soins, et cela non pas d’ici 2016 mais bien avant,  nous donne une idée du nombre de ceux qui risquent de tomber gravement malades… Leur vie future sera ruinée et leur enfance gâchée. Nombre d’entre eux mourront avant l’heure… »

Les retombées des nuages de Tchernobyl ont couvert des territoires où vivent au moins trois milliards de personnes. 13 pays européens ont eu plus de 50% et 8 pays plus de 30% de leur territoire dangereusement contaminés par les radionucléides de Tchernobyl (voir Ch.1). Les lois statistiques et biologiques implacables  feront que partout dans ces pays l’écho de Tchernobyl se fera entendre ça ou là pendant de nombreuses générations.

Peu après la catastrophe les médecins, inquiets d’observer une telle flambée de diverses maladies dans les territoires contaminés, ont demandé une aide supplémentaire. Mais les spécialistes liés à l’industrie nucléaire ont continué à clamer du haut de leurs tribunes qu’il n’y a aucune preuve « statistiquement fiable » des effets nocifs de la radiation de Tchernobyl. Ce n’est qu’au bout de dix ans après la Catastrophe qu’il a été admis dans les documents officiels que le nombre de cancers de la thyroïde s’est soudain mis  « étrangement » à augmenter. Si en 1985 plus de 80% des enfants vivant dans les territoires aujourd’hui contaminés de Biélorussie, Ukraine et Russie  étaient en bonne santé, il n’y en a plus que 20% à ce jour. Dans les régions particulièrement touchées il n’y a plus un seul enfant en bonne santé (voir ch.4). L’augmentation de la fréquence de nombreuses maladies dans les territoires contaminés ne peut s’expliquer ni par l’effet de screening, ni par les facteurs socio-économiques, car les différences de fréquence sont observées dans des régions qui se distinguent uniquement par leur niveau de contamination. Parmi les conséquences terribles de la radiation due à Tchernobyl on observe non seulement une augmentation des tumeurs cancéreuses mais des troubles de la structure du cerveau, surtout pendant le développement intra-utérin (voir ch.6).

Pourquoi l’évaluation des conséquences sanitaires de Tchernobyl donne des résultats si différents selon qu’elle provienne de spécialistes du nucléaire ou d’experts indépendants de l’industrie de l’atome ?

Il y a un petit jeu très populaires dans les marchés orientaux : il faut deviner sous quel gobelet se trouve la bille placée subrepticement par le meneur de jeu. Aujourd’hui ce sont les spécialistes du nucléaire qui mènent un jeu semblable : ils utilisent toutes les manipulations possibles et imaginables pour détourner l’attention des scientifiques de l’étude du nombre réel des victimes. La première de ces manipulations est l’exigence d’établir une stricte corrélation entre la pathologie et la dose reçue. Le truc se base sur le fait qu’il est impossible d’établir  le niveau de la dose reçue par simple calcul. Il est impossible de prendre en compte l’irradiation des premiers jours (qui a pu être des milliers de fois supérieure à ce qu’on suppose), il est impossible de tenir compte du caractère tacheté de la contamination du sol dans telle et telle région, il est impossible de prendre en compte l’impact de tous les radionucléides (césium, iode, strontium, plutonium etc…), il est impossible de définir la part de radionucléides accumulée par le corps de chacun avec l’air, les aliments et l’eau (certains aiment le lait et la viande, d’autres ne supportent pas le lait et aiment les légumes). La deuxième manipulation  consiste à baser le calcul sur l’effet de la somme des coefficients de risque, définis par l’étude des conséquences des bombardements atomiques de Hiroshima et Nagasaki. L’utilisation des coefficients de risque définis au Japon est incorrecte pour la raison, tout d’abord, que l’irradiation y était d’une nature totalement différente qu’à Tchernobyl et ensuite parce que pendant plus de quatre ans toute étude des conséquences y avait été  interdite, laps de temps pendant lequel plus de cent mille personnes parmi les plus faibles sont mortes sans qu’on en tienne compte. Tchernobyl a connu une situation quasiment semblable. Les autorités soviétiques ont non seulement officiellement interdit aux médecins de faire le lien entre les maladies et l’irradiation mais ils ont de plus classé « secrets » tous les matériaux concernant Tchernobyl.

Manipuler les données est contraire à l’objectivité de la recherche scientifique. Pour déterminer de manière scientifiquement correcte l’impact sur l’homme de la contamination radiologique de Tchernobyl, il faut comparer la santé des populations vivant dans des régions aux données ethniques, physiques, géographiques et socio-économiques semblables mais se distinguant par l’intensité de la contamination due aux retombées radioactives. Il est également correct de comparer la santé d’un même groupe de victimes à des moments différents. Si de telles comparaisons  font découvrir des changements  de l’état de santé des groupes mis en regard, on peut conclure avec suffisamment de fiabilité que ces différences sont dues à la catastrophe de Tchernobyl (voir ch.3).

Un principe qui remonte au droit romain clame que personne ne doit être juge de sa propre cause. L’estimation des conséquences de la catastrophe de Tchernobyl faite par des spécialistes liés à l’industrie atomique ne peut être objective. Ce parti pris des jugements concerne également l’OMS car un accord a été signé en 1959 entre l’AIEA et l’OMS obligeant l’OMS à coordonner sa position avec l’AIEA dans tous les cas où le nucléaire est en jeu. Les gouvernements non plus ne semblent pas particulièrement intéressés à évaluer l’envergure réelle des conséquences de la Catastrophe de peur d’avoir à verser de grosses sommes pour aider les victimes.

Finalement seuls les victimes, les médecins et les organisations non gouvernementales qui expriment l’inquiétude de la société devant le développement du nucléaire semblent intéressés à connaître l’ampleur véritable des conséquences de la Catastrophe. Le livre que nous vous proposons en est une tentative.

Première partie.

LA CONTAMINATION DES TERRITOIRES (p.24)

Traduction de W. Tchertkoff

Il est nécessaire d’établir le caractère et les dimensions de la contamination causée par Tchernobyl pour évaluer les conséquences de cette catastrophe.

Le nuage de Tchernobyl a fait au moins deux fois le tour de la Terre, en laissant des traces principalement dans l’hémisphère nord.

Bien que les controverses au sujet de la quantité des radionucléides expulsés du réacteur explosé n’ont pas cessé, il est clair que cette émission a constitué, même sans compter les radionucléides gazeux, plusieurs centaines de millions de Ci, et a surpassé plusieurs centaines de fois les explosions nucléaires de Hiroshima et de Nagasaki en quantité de radionucléides rejetés.

Pour évaluer les conséquences de la contamination radioactive de Tchernobyl il est nécessaire de présenter dans les grandes lignes la distribution des radionucléides rejetés sur la superficie de la Terre (Ch. 1, division 1.), ainsi que certaines caractéristiques communes de la contamination radioactive dans l’espace et dans le temps (Ch. 1, division 2). Dans le Ch. 2. nous caractérisons brièvement un aspect de la contamination de Tchernobyl, qui attire jusqu’à présent peu d’attention : la contamination par le plomb.

 Chapitre 1. CONTAMINATION RADIOACTIVE […

1.1. Particularités géographiques de la contamination (p.25)

[…] Dans l’ensemble, une grande partie des radionucléides gazeux et aérosols, expulsés du 4ème réacteur de la centrale de Tchernobyl s’est déposée hors des frontières du Bélarus, d’Ukraine et de la partie européenne de la Russie. […]

1.1.1. Europe (p.27)

Selon certaines données (cf. revue Fairlie, Sumner, 2006, tableau 3.6, pp.48-49) l’Europe a reçu  68-89% de radionucléides gazeux et aérosols déposés sur la terre ferme par les nuages de Tchernobyl. Ils se sont distribués de façon extrêmement irrégulière.

Pendant les rejets actifs du réacteur (du 26 avril au 5 mai 1986) le vent autour de Tchernobyl s’est déployé à 360°, en conséquence de quoi les rejets radioactifs (composés de radionucléides différents suivant les jours) ont couvert de grandes étendues. […] Les rejets des radionucléides du réacteur en feu ont duré jusqu’à la mi mai. Chaque rejet avait sa propre géographie et composition de contamination.

Il n’y a pas de données instrumentales de contamination de tous les pays d’Europe par tous les radionucléides de Tchernobyl, et désormais il n’yen aura plus jamais. Les données calculées (sur 1 km2 en moyenne – cf. discussion Fairlie, Sumner, 2006) ne sont publiées que pour le césium-137 et le plutonium. La contamination par le césium-137 de Tchernobyl a touché tous les pays européens sans exception. […]

1.1.1.1. Bélarus (p.37)

Tout le territoire du Bélarus a été pratiquement couvert par le nuage de Tchernobyl.

1. La contamination par les isotopes radioactifs d’iode-131, iode-132 et tellure-132 a atteint tout le territoire du pays. En mai 1986, la contamination maximum par l’iode-131 près du village Svétilovitchi dans la région de Gomel était de 600 Ci/km2.

23% du territoire du pays (47.000 km2) ont été contaminés par le césium-137 au-dessus de 1 Ci/km2 (Nesterenko, 1996; Tsalko, 2005). Au début de 2004, la superficie des territoires avec une densité de contamination par le césium-137 supérieure à 37 kBq/m2 était de 41.110 km2.

Les niveaux maxima de contamination par le césium-137 sont révélés dans la région de Gomel (475 Ci/km2 dans le village Zalessié du district de Braguine, 500 Ci/km2 dans le village Dovliady du district de Narovlia. Le niveau maximum  de la contamination radioactive du sol, découvert en 1993 (village Tchoudiany de la région de Moguilev : 5402 kBq/m2 ou 145 Ci/km2) dépasse le niveau pré accidentel de 3500 fois (Iliazov, 2002).

La contamination du territoire du pays par le strontium-90 a un caractère plus local que la contamination par le césium-137. Les niveaux de contamination du sol par le strontium-90 d’une densité supérieure  à 5,5 kBq/m2 sont révélés sur une superficie de 211 000 km2, ce qui constitue le 10% du territoire de la république.

La contamination du sol par le plutonium-238, -239 et -240 supérieure à 0,37 kBq/m2 embrasse près de 4000 km2, soit presque 2% de la superficie de la république (Konoplia et al., 2006).

Dans l’ensemble, plus 18 000 km2 des terres cultivables du pays sont contaminés (22% de la superficie totale des terres cultivables), dont 2640 km2 sont exclus de la production agricole. La plus grande partie du territoire de la réserve radiologique d’état de Polessié, créée dans la zone proche de la centrale de Tchernobyl (1300 km2), est pratiquement exclue de l’exploitation pour l’éternité à cause de la grande densité de la contamination par les isotopes de longue période.

1.1.1.2. Ukraine

Plus du quart du territoire de l’Ukraine a été contaminé par les rejets de Tchernobyl ; 4,8% du territoire est contaminé par le césium-137 avec une densité supérieure à 1 Ci/km2.

1.1.1.3. Partie européenne de Russie

En 1992, la contamination de la Russie d’Europe a été établie dans 19 régions de la Fédération de Russie (cf. tableau). Avec cela, il faut considérer qu’il y a d’importants territoires contaminés dans la partie asiatique de la Russie.

Territoire

Superficie contaminée

milliers de km2

Population,

milliers de pers

Région de Belgorod

1,6

77,8

Région de Briansk

11,7

476,5

Région de Voronej

1,7

40,4

Région de Kaluga

4,8

95,0

Région de Koursk

1,4

140,0

Région de Leningrad

1,2

19,6

Région de Lipetsk

1,6

71,0

République de Mordovie

1,9

18,0

Région de Nijni Novgorod

0,1

?

Région de Orlov

8,4

346,7

Région de Penza

3,9

130,6

Région de Riazan

5,4

199,6

Région de Saratov

0,2

?

Région de Smolensk

0,1

?

Région de Tambov

0,5

16,2

République du Tatarstan

0,2

?

Région de Tula

11,5

936,2

Région de Oulianov

1,1

58,0

République de Tchouvachie

0,1

?

TOTAL

56,0

2 626,5

[…]

1.1.2. Asie

1.1.3. Amérique du nord

1.1.4. Arctique

1.1.5. Hémisphère sud

1.2. Particularités écologiques de la contamination (p.36)

Parmi les nombreuses particularités écologiques de la contamination des territoires par des radionucléides il semble que les plus importantes, pour comprendre les possibles conséquences pour la santé de l’environnement et de l’être humain, sont la distribution tachetée de la contamination, l’action des « particules chaudes » et la bioaccumulation des radionucléides. […]

1.2.1. Contamination en taches de léopard

[…] …à la distance de quelques dizaines de mètres la concentration des radionucléides peut différer profondément. Même dans les limites du terrain dont se nourrit un arbre particulier, la densité de la contamination par le césium-137 diffère de plusieurs grandeurs.

M.Tchikine « Des taches tchernobyliennes sur la carte de France ». (« Komsomolskaya Pravda », 25 mars 1997, p. 6) :

« Le service sanitaire du département français des Vosges a découvert qu’un petit sanglier, abattu par un chasseur local, « brillait ». Les experts, armés d’instruments super modernes, ont donné une information encore plus inquiétante : pratiquement toute l’élévation, où venait de courir l’animal tué, était contaminée. Le niveau de la radioactivité s’élevait à 12000 – 24000 becquerels au mètre carré. A titre de comparaison : la norme européenne est de 600 becquerels. Le niveau du césium-137 des chanterelles et des bolets dépassait la norme d’environ quarante fois… » […]  

 1.2.2. Le problème des « particules chaudes » (p. 38)

Le problème des « particules chaudes » (« poussière de Tchernobyl ») est un autre aspect important de la complexité de l’évaluation des niveaux de contamination radiologique de Tchernobyl.

Le réacteur explosé ne rejetait pas seulement des gaz et des aérosols, – produits de la désintégration de l’uranium (césium-137, strontium-90, plutonium et autres), – mais aussi des particules du combustible d’uranium combinées avec d’autres radionucléides : des particules chaudes solides. De grandes particules lourdes d’uranium et de plutonium sont retombées en proximité de la centrale de Tchernobyl. […]  (Des particules de grandeur moyenne ont été identifiées et leur activité a été mesurée dans des territoires de Hongrie, d’Allemagne, de Finlande et de Bulgarie.) […] Des « particules chaudes liquides » se formaient suite à la concentration des radionucléides dans les gouttes de pluie.

L’activité de certaines particules chaudes atteignait 10 kilobecquerels. Lorsque ces particules pénètrent dans l’organisme à travers l’eau, l’alimentation ou l’air inhalé, elles procurent des doses élevées d’irradiation, même si la personne se trouve dans un territoire non contaminé ou faiblement contaminé. Les petites particules (moins de 5 microns) pénètrent facilement dans les poumons, les grandes (20-40 microns) sont retenues principalement au niveau des voies respiratoires supérieures (Khrushch et al. 1988 ; Malachenko & Goluenko 1990 ; Ivanov et al 1990 ; AIEA 1994).

Les mécanismes de formation et de désintégration de ces particules, leurs propriétés et leur action sur la santé humaine et d’autres organismes vivants sont peu étudiés.

1.3. Modification de la composition des radionucléides pourvoyeurs de doses       (p. 39)

Pour comprendre les particularités de l’influence de la contamination de Tchernobyl sur la santé de l’homme et de l’environnement il est nécessaire de tenir compte des modifications importantes dans la composition des radionucléides, au cours des premiers jours, des semaines et des mois, comme des décennies à venir après la Catastrophe.

1.3.1. Modification de la composition des radionucléides dans le temps

L’irradiation principale de Tchernobyl a été provoquée par des radionucléides de courte période, pendant les premiers jours, semaines et mois après la catastrophe. La contamination des territoires observable actuellement représente seulement une faible partie de toute la radioactivité expulsée au cours de la catastrophe. […]

Pendant les premiers jours de la catastrophe la part du césium-137 ne dépassait pas 4% de l’irradiation totale externe. L’irradiation d’iode-131, d’iode-133, du tellure-129, du tellure-132 et d’une série d’autres radionucléides était des dizaines et des centaines de fois plus élevée.

Pendant les premiers jours et les premières semaines, dans certains territoires les grandeurs maximales d’activité des retombées radioactives de Tchernobyl dépassaient les niveaux du fond naturel d’un facteur supérieur à 10 000 (Krychev, Riazantsev, 2000).

Au cours des mois suivants et des premières années après la Catastrophe, le rôle important dans la formation de la situation radiologique était joué par les isotopes du cérium-141, -144, du ruthénium-103, -106, du zirconium-95, du niobium-95, du césium-136, du neptunium-239 et d’une série d’autres. A partir de 1987 et jusqu’à présent la situation radiologique est déterminée par le césium-137, le strontium-90, le plutonium-231, -239, -240, -241, et dans le futur par l’américium-241. Une partie importante des radionucléides s’est accumulée pendant ce temps dans le sol et constitue en ce moment la source principale de la radioactivité dans la production agricole. Dans l’immédiat, le rayonnement gamma dépendra du césium-137, et le bêta du strontium-90.

La dimension de la contamination peut être illustrée aussi par l’analyse des doses de radioactivité accumulées dans l’émail des dents. Cette analyse, effectuée sur 6000 enfants par l’organisation internationale des « Médecins pour la Prévention  de la Guerre Nucléaire » en Allemagne, a montré que les dents des enfants nés après la Catastrophe (comparés avec les dents des enfants nés en 1983) avaient 10 fois plus de strontium-90 (UK, 2000).

1.3.2. Problème de l’américium-241

Suite aux processus de désintégration du plutonium-241, la formation naturelle de l’américium-241, puissant émetteur de rayons gamma, constitue un aspect important de la contamination de nombreux territoires distants jusqu’à un millier de kilomètres de la centrale de Tchernobyl.

A cause de cette désintégration les territoires, dont le niveau des rayonnements gamma était faible, deviennent de nouveau dangereux.

1.4. Combien de personnes ont été touchées par la contamination de Tchernobyl ? (p. 41)

Les premières prévisions officielles des conséquences de la catastrophe de Tchernobyl pour la santé des habitants ne parlaient que de quelques cas supplémentaires de cancer dans quelques dizaines d’années. Au bout de 20 ans il est devenu clair que pas moins de 8 000 000 d’habitants du Bélarus, d’Ukraine et de Russie ont pâti de la catastrophe de Tchernobyl. […]

                                                                                                                               

                                                                                                                               Tableau 1.4

Nombre de victimes de la catastrophe de Tchernobyl au Bélarus, en Ukraine et dans la partie européenne de Russie

Groupes de population

Nombre de personnes

Sources diverses

Cardis et al., 1996

Évacués

et émigrés

Bélarus

135 000

135 000

Ukraine

162 000

Russie

  52 400

Habitants des territoires contaminés à plus de

555 kBq/m2 (15 Ci/km2)

270 000

Habitants des territoires contaminés à plus de 37 kBq/m2 (1 Ci/km2)

Bélarus

2 000 000

6 800 000

Ukraine

3 500 000

Russie

2 700 000

Liquidateurs

Bélarus

130 000

200 000

(1986 – 1987)

Ukraine

360 000

Russie

250 000

Autres pays

Pas moins de 90 000

Total

9 379 400

7 405 000

ll faut tenir compte également du fait que dans les territoires contaminés par plus de       1 Ci/km2 vit au moins un million d’enfants, et que le nombre d’enfants des habitants évacués et des liquidateurs s’élève à 450 000 au moins. […]

40% du territoire d’Europe a été contaminé par le césium-137 de Tchernobyl au niveau de  4 – 40 kBq/m2 (0,11-1,08 Ci/km2) (cf. Ch. 1.). Si on suppose que dans ce territoire vivaient près de 35% d’habitants (une partie des retombées s’est déposée sur des régions montagneuses peu habitées), et que la population totale de l’Europe comptait, à la fin des années 80, près de 550 000 000 de personnes, on peut considérer qu’environ 190 000 000 d’Européens vivaient dans des territoires faiblement contaminés, et que 15 000 000 vivaient dans des territoires contaminés par le césium-137 à plus de 40 kBq/m2 (1,08 Ci/km2).

Si on considère que les retombées de Tchernobyl ont contaminé près de 8% du territoire d’Asie, 6% du territoire d’Afrique et 0,6% du territoire de l’Amérique du Nord, en appliquant la même approche que pour l’Europe il apparaît que le nombre total des habitants dans les territoires contaminés par le césium-137 à 40 kBq/m2 pouvait s’élever à près de 200 000 000 de personnes. […]

En résumant sommairement, la contamination radioactive de Tchernobyl a touché près de 400 000 000 de personnes (205 000 000 en Europe et environ 200 000 000 hors de l’Europe), à un niveau de 4 kBq/m2 (0,1Ci/km2) et plus.

Un autre calcul du nombre de personnes ayant subi la radioactivité supplémentaire de Tchernobyl peut être effectué à partir de la dose collective totale. Le tableau ci-dessous présente les résultats de l’un de ces calculs, suivant lequel le nombre total de ceux qui ont reçu la radioactivité supplémentaire de Tchernobyl au niveau de 2,5 10-2 mSv peut représenter  plus de 4,5 milliards de personnes, et au niveau de 0,4 mSv plus de 605 000 000 de personnes.

 

                                                                                                                                                    Tableau 1.6

Nombre total des victimes des retombées radioactives de Tchernobyl dans le monde et leur niveau d’irradiation (Fairly, 2007) 

Groupe

Nombre de personnes

Dose moyenne, mSv

Liquidateurs

240 000

100

Habitants des territoires fortement contaminés

270 000

50

Évacués en 1986

116 000

33

Habitants des territoires faiblement contaminés

5 000 000

10

Autres habitants d’Europe

600 000 000

0,4

Atres habitants du monde

4 000 000 000

2,5 10-2

Qu’il s’agisse de calculs effectués sur la base des territoires contaminés ou de calculs à partir des doses collectives, on ne peut pas ne pas être d’accord avec l’observation de I. Fairly et de D. Sumner (2006, 5. 16, p. 73), quand ils disent que le fait que l’AIEA et les autres organisations officielles aient ignoré les données sur l’énorme diffusion de la contamination de Tchernobyl sur la superficie du globe terrestre « n’a pas d’explication scientifique ». Il nous semble que ce fait n’est pas dicté par le désir de dire la vérité, mais par le désir de minimiser maladroitement les risques de Tchernobyl.

Chapitre 2. CONTAMINATION PAR LE PLOMB  DE LA CATASTROPHE DE TCHERNOBYL (p. 44)

2400 tonnes de plomb selon certaines estimations (« Niveaux d’irradiation… », 2000), et 6720 t. selon certaines autres (Kiselev, 1996) ont été déversées au cours des opérations d’extinction du réacteur du bloc n. 4 en feu de la centrale de Tchernobyl.

Pendant les quelques jours qui ont suivi, une partie importante de ce plomb a été rejetée dans l’atmosphère suite à sa fusion, à son ébullition et à sa sublimation dans l’incendie du réacteur.

La teneur du sang en plomb des enfants et des adultes a sensiblement augmenté au cours des dernières années au Bélarus (Rolevitch el al., 1996). C’est ainsi, par exemple (Petrova et al., 1996) que dans la région de Brest chez 213 enfants examinés la teneur du sang en plomb a représenté 0,109±0,007 mg/l ; près de la moitié des enfants avait la teneur du sang en plomb de 0,007±0,003 mg/l (la norme OMS pour les enfants est de <0,001 mg/l).

La contamination du plomb peut constituer un facteur complémentaire, aggravant l’action de la radioactivité sur l’organisme vivant (Petin, Synzynys, 1998). Il a été montré que la radiation ionisante provoque des processus biochimiques dans les cellules des organismes vivants, liés avec l’oxydation des radicaux libres. Sous l’influence des métaux lourds ces réactions s’intensifient sensiblement (Nikitenko, 1990). La fréquence des gastrites atrophiques augmentait sensiblement chez les enfants dont l’organisme contenait le césium-137 avec du plomb (Gres, Poliakova, 1997). L’empoisonnement par le plomb est déjà dangereux par lui-même en provoquant, par exemple, le retard du développement mental chez les enfants (Zigel, 1993).

  21 ans après la Catastrophe, un autre mystère de Tchernobyl se dévoile : non seulement les simples observateurs des mystérieux vols d’avions et des pluies qui s’en sont suivies ont commencé à parler, mais aussi les pilotes militaires en personne qui pulvérisaient réellement de l’argent iodé, pour empêcher qu’une dangereuse contamination radioactive n’arrive sur les territoires densément peuplés de Moscou, Voronej, Nijni Novgorod et autres (Grei, 2007).

Une grande partie des radionucléides de Tchernobyl est retombée hors des frontières de l’ex URSS, déterminant une contamination radioactive importante d’immenses territoires sur tout le globe terrestre. Le fait que le rapport de l’AIEA/OMS « Forum Tchernobyl » (2005) ne discute que les données concernant les territoires du Bélarus, de l’Ukraine et de la Russie Européenne, et n’analyse pas les données de la contamination des autres pays (dont les territoires ont reçu une grande partie des radionucléides de Tchernobyl), ne trouve pas d’explication scientifique. Les déclarations rassurantes comme quoi la contamination de Tchernobyl n’ajoute que 2% au fond radioactif naturel sur la superficie de la Terre, constituent une dissimulation consciente du fait que dans les territoires touchés cette contamination pouvait surpasser considérablement le fond naturel, et le fait que dans les territoires contaminés par les radionucléides de Tchernobyl à un niveau supérieur à 0,1 Ci/km2 vivent près de 400 000 000 de personnes.

La contamination radioactive de n’importe quel territoire pollué par Tchernobyl est très dynamique tant par sa densité que par sa composition en radionucléides. Cette dynamique est déterminée premièrement par la désintégration naturelle des radionucléides : pendant les premiers jours et les semaines après la Catastrophe, les niveaux de contamination étaient supérieurs aux actuels de plusieurs ordres de grandeur. Deuxièmement, cette dynamique est déterminée par une forte redistribution des radionucléides dans les écosystèmes du fait de leur concentration par les organismes vivants et de leur migration dans le sol et dans l’atmosphère. La non prise en considération de ces facteurs et des facteurs semblables peut constituer l’une des causes qui conduisent les chercheurs à des conclusions erronées quant à l’insignifiance des conséquences de la catastrophe pour la santé tant des habitants que de l’environnement.

Plus de vingt ans après la Catastrophe, des dizaines de millions de personnes (parmi lesquelles près de 7 millions au Bélarus, en Ukraine et en Russie) vivent (et vivront encore pendant de nombreuses décennies) dans un environnement altéré par une contamination, faible mais constante, ajoutée au fond naturel. Même si la densité actuelle de la contamination n’est pas élevée dans quelque territoire précis, l’énorme contamination des premiers jours et des semaines qui ont suivi la Catastrophe, ainsi que la faible contamination persistante pendant des décennies, a pu causer (et causera) une influence considérable sur la santé des habitants et de l’environnement (cf. détails dans parties II et III).

Deuxième partie

LA SANTÉ DE LA POPULATION (p. 46)

Les premières prévisions officielles des conséquences de la catastrophe de Tchernobyl parlaient seulement de quelques cas supplémentaires de cancer au bout de quelques dizaines d’années. Quatre ans après, ces mêmes personnalités officielles (Iline et al., 1990) 1 augmentèrent le nombre des cas prévisibles à quelques dizaines (alors qu’il y avait déjà des milliers de malades). Vingt ans après, ces mêmes experts formulent la position officielle de l’AIEA et de l’OMS (Health Effects… 2005), selon laquelle le nombre des morts et de ceux qui mourront à cause des maladies provoquées par la Catastrophe, s’élèvera à près de 9000, et le nombre des malades à quelques dizaines de mille.

Près de 400 millions d’habitants de la Terre ont reçu les retombées de Tchernobyl et peuvent, eux-mêmes et leurs descendants, éprouver les conséquences négatives de l’irradiation ionisante de Tchernobyl (détails dans le Ch.1). L’analyse de cette modification de la santé dans ses dimensions globales sera la tâche des recherches futures. La présente étude examine plus en détail les données sur la santé des populations touchées de la partie européenne de l’URSS (essentiellement, de l’Ukraine, du Bélarus et de la Russie européenne), au sujet desquelles existe une énorme quantité  de publications scientifiques, peu connues en Occident.

Une réponse est nécessaire à la question suscitée par le Rapport du « Forum Tchernobyl » (Health Effects.., 2005) : le nombre des décès provoqués par la Catastrophe se monte-t-il réellement aux premiers milliers, et celui des malades à quelques dizaines de mille (ce qui, sur fond de nombreux millions de morts naturelles et de centaines de millions de maladies, est statistiquement peu visible, bien que déjà terrible en soi). Cette réponse est nécessaire avant tout, parce que seule une évaluation objective des dimensions de la Catastrophe constitue une base solide pour l’élaboration de mesures pour l’atténuation de ses conséquences.

La tâche de la présente étude n’est pas de présenter un inventaire exhaustif des données factuelles existantes sur la santé des habitants en relation avec la catastrophe de Tchernobyl (il faudrait plusieurs monographies pour cela), mais de donner une idée des dimensions et de l’éventail des conséquences de cette catastrophe pour la santé humaine.

Pour une présentation du matériel le plus condensée possible, la structure suivante a été choisie dans cette partie : morbidité générale (chapitre 4), vieillissement radiologique (chapitre 5), morbidité non cancéreuse (chapitre 6), morbidité cancéreuse (chapitre 7), mortalité (chapitre 8). L’examen des problèmes méthodologiques, liés au recensement des effets de la contamination de Tchernobyl sur la santé, est placé avant l’exposition des données sur la morbidité liée à cette contamination (chapitre 3). A l’intérieur des chapitres de cette partie le matériel est exposé en général dans l’ordre suivant : Bélarus, Ukraine, Russie, autres pays, et à l’intérieur de ces divisions : enfants, ensemble de la population, liquidateurs.

 Chapitre 3. PROBLÈMES MÉTHODOLOGIQUES DE LA RECHERCHE

DES CONSÉQUENCES DE LA CATASTROPHE POUR LA SANTÉ

 Étant donné que l’action du rayonnement ionisant sur la santé n’a pas de seuil inférieur, le moindre dépassement du niveau d’irradiation au-dessus du fond naturel se fera nécessairement sentir, tôt ou tard, statistiquement (effet stochastique), sur l’état de santé des personnes irradiées ou de leurs descendants. L’énorme quantité de radionucléides expulsés du réacteur du bloc n.4 de la centrale atomique de Tchernobyl (cf. ch. 1 et Annexe), en devenant partie intégrante de l’habitat de centaines de millions de personnes dans tous les continents, devait produire une influence importante sur leur santé.

3.1. Difficultés pour obtenir des données objectives sur les effets de la Catastrophe

/Résumé, par le traducteur/

Causes subjectives : 1. secret ; 2. falsification officielle sans retour des statistiques en URSS ; 3. absence d’une  statistique fiable en URSS (ensuite, en Ukraine, au Bélarus et en Russie) ; 4. désir prononcé des structures gouvernementales et de l’industrie atomique, ainsi que des principales organisations intergouvernementales compétentes (AIEA et OMS) de minimiser les conséquences de Tchernobyl. […]

La situation des liquidateurs est significative à cet égard (leur nombre total s’élève à plus de 800 000). Au cours des premières années après l’accident il a été interdit officiellement d’établir la corrélation entre la morbidité et la radioactivité, en conséquence de quoi les données sur la morbidité des liquidateurs, obtenues avant 1989, on été falsifiées sans retour. (p. 48)

[…] Ainsi, par exemple, dans le livret militaire de pas un  seul (!) des 60 000 militaires en service, qui ont participé aux travaux de liquidation, n’a été enregistré le dépassement de la norme de 25 röntgens, alors en vigueur. En même temps, l’examen clinique de 1100 militaires liquidateurs a révélé chez 37% d’entre eux les symptômes hématologiques de la maladie des rayons, qui indique que ces personnes ont reçu plus de 25 röntgens (Khartchenko et al., 2001). Etc. etc. […]

Tout ceci signifie que, du point de vue d’une méthodologie rigoureuse, il est impossible d’attendre une corrélation certaine entre la morbidité des liquidateurs et un niveau d’irradiation documenté. (p. 50)

Causes objectives :

1. Difficulté d’établir la vraie charge radioactive d’une personne et d’un groupe de personnes, à cause de la :

· difficulté d’une reconstruction correcte des doses transmises au cours des premiers jours, semaines et mois par des radionucléides de courte période, dont l’irradiation pouvait être des centaines et même des milliers de fois supérieure à celle du césium-137 traditionnellement mesuré quelques années plus tard ;

· difficulté de calculer l’action des « particules chaudes » (différenciées dans la composition de leurs radionucléides et de leurs propriétés chimiques) ;

· difficulté de calculer le niveau d’irradiation externe précis d’une personne concrète et d’un groupe de personnes : les doses ne sont pas mesurée par des appareils, toutes les « doses » sont des projections mathématiques indirectes à partir de la consommation moyenne par une personne « moyenne » d’une sélection arbitrairement établie de produits alimentaires, ainsi qu’exposée au niveau moyen de l’irradiation externe par un des radionucléides ;

· difficulté de déterminer l’influence de la contamination des radionucléides, déposés en taches de léopard, sur une personne donnée (cf. ch. 1) ;

· difficulté de déterminer l’influence de tous les radionucléides sur un territoire donné (des territoires propres en césium-137 peuvent être contaminés par le strotium-90, par le plutonium et l’américium) ; […]

· difficulté de déterminer les coefficients spécifiques du passage des radionucléides du sol dans la chaîne alimentaire pour chaque espèce – et même sorte ! – de végétaux, d’animaux et de champignons, pour chaque type de sol, pour les différentes saison et les différentes années.

Etc.… […]

2. Le deuxième groupe des causes objectives est représenté par l’insuffisance des connaissances et des recherches scientifiques modernes :

· de la spécificité de l’action sur l’organisme humain des principaux radionucléides connus, de leur interaction réciproque, ainsi que de leur synergie avec d’autres facteurs de l’environnement ;

· de la variabilité de la sensibilité radiologique humaine selon les individus et les populations (Yablokov, 1998 et al) ;

· de l’influence des doses ultra faibles et des puissances des doses ;

· de l’influence de l’irradiation interne (incorporée).

Les circonstances énumérées ci-dessus provoqueront invariablement, de la part de l’AIEA, de l’OMS et des spécialistes liés à l’industrie nucléaire, l’exigence scientifiquement incorrecte d’une corrélation : « niveau d’irradiation – effet », pour que telle ou telle altération de la santé soit reconnue comme conséquence de la contamination causée par la Catastrophe. L’obligation de découvrir une « corrélation certaine » entre la charge radioactive, toujours déterminée de façon insuffisamment précise, chez une personne concrète (et conséquemment chez un groupe de personnes) et les altération de la santé, saisies avec bien plus de précision (par exemple la fréquence de telle ou telle maladie), comme preuve déterminante du lien entre la maladie et l’irradiation de Tchernobyl, est peu fondée scientifiquement. Les cas fréquents d’une absence de corrélation entre les grandeurs des charges de doses calculées au moyen d’une méthode choisie et les particularités observées d’une altération de la santé (Vorobiev, Chklovskyi – Kodry, 1996 ; Adamovitch et al., 1998 ; Conséquences médicales, 2003 ; Drozd, 2002 ; Kornev et al., 2004 et beaucoup d’autres), ne sont pas la preuve de l’absence de l’action de l’irradiation, mais la preuve de l’erreur méthodologique de cette approche.

3.2. De l’utilisation des « protocoles scientifiques ».

Une des objections communes que l’on fait contre l’utilisation d’une énorme quantité de données sur les conséquences de la Catastrophe pour la santé des habitants, obtenues en Russie, en Ukraine et au Bélarus, consiste dans le reproche que ces données sont obtenues sans respecter les protocoles scientifiques adoptés en Occident. (p. 52)

[… 1. – 4.]

La bonne façon de procéder dans l’analyse des conséquences de la plus grande catastrophe de l’histoire qui s’éloigne rapidement dans le passé, est d’utiliser pour le bien de la société cette énorme quantité de données recueillies par des milliers de spécialistes dans les territoires contaminés par la radioactivité bien que non présentées sous la forme de « protocoles scientifiques » validés. Si c’est le cas, ce n’est pas parce que quelqu’un était contre l’utilisation des « protocoles scientifiques », mais parce que la priorité des médecins était l’aide aux habitants et non la mise en forme des résultats des observations pour une publication scientifique. Il est significatif que, régulièrement, les symposiums des spécialistes qui travaillaient dans les territoires de Tchernobyl n’étaient pas appelés symposiums scientifiques, mais  conférences « scientifiques pratiques ». Les courtes thèses publiées pour ces conférences sont souvent les seules sources d’information de l’énorme travail d’examens de centaines de milliers de victimes.

La mortalité et l’invalidité parmi les spécialistes médicaux eux-mêmes, qui travaillaient dans les territoires contaminés (et qui recevaient une irradiation supplémentaire de leurs patients eux-mêmes), sont indubitablement supérieures : ceci est encore une explication du fait que la généralisation des résultats de leurs observations, remise « à plus tard », ne soit souvent pas terminée sous la forme d’une bonne publication scientifique.

Une grande quantité de données, présentées dans des dizaines de conférences scientifiques pratiques, au cours des années 1980-1990, sur les problèmes de Tchernobyl au Bélarus, en Ukraine et en Russie, ou décrites brièvement dans des éditions administratives non périodiques ne pourra plus jamais être recueillie. Il faut chercher la manière d’extraire une information objective de ces données, au lieu de les rejeter avec superbe.

En novembre 2006, le Comité Fédéral d’Allemagne sur les radiations ionisantes a organisé un symposium, qui a donné la rare occasion d’une discussion ouverte entre des approches fondamentalement divergentes pour la détermination des conséquences de la Catastrophe. Une des conclusions, qui a analysé les résultats de ce symposium, a une importance fondamentale pour tout le matériel tchernobylien : il n’est permis de mettre en doute les données, qui ont été obtenues sans l’utilisation des « protocoles scientifiques » adoptés en occident, que si les résultats des examens du même matériel résultent différents en utilisant ces protocoles. Il est inadmissible, du pointe de vue scientifique, éthique et social, de refuser la discussion des données seulement parce qu’elles ont été obtenues sans l’utilisation des « protocoles scientifiques ».

3.3. Comment reconnaître l’influence de la Catastrophe sur la santé de la population ?

Il est clair que la cause première des maladies radiologiques est constituée par l’irradiation interne et externe par différents radionucléides. Il est possible de le montrer par des voies différentes, parmi lesquelles :

[…]

· la comparaison entre les grandeurs contrôlées instrumentalement de l’accumulation de tel ou tel radionucléide (césium-137, strontium-90, plutonium, américium etc.) dans l’organisme des personnes vivant dans les territoires contaminés. Étant donné qu’un an après la catastrophe la dose interne d’irradiation est formée à 80-90% par le césium-137, la comparaison entre les maladies des personnes qui ont des niveaux différents de son accumulation dans l’organisme (lequel n’aura pas subi l’irradiation d’autres radionucléides pendant la première année de la Catastrophe), donnera des résultats objectifs sur l’influence de la contamination artificielle. Cette méthode est particulièrement efficace pour les enfants, nés plusieurs années après la Catastrophe, comme le montrent les travaux de l’Institut BELRAD (Minsk) (plus en détail cf. la partie IV) ;

[...]

· la mise en évidence d’une corrélation entre les altérations pathologiques d’un organe déterminé ou de parties du corps et les niveaux instrumentalement précis de radionucléides incorporés dans ces organes ou parties du corps. […] (p. 56)

Chapitre 4. MORBIDITÉ GÉNÉRALE ET INVALIDITÉ (p. 56)

 Toutes les fois que les territoires contaminés par les radionucléides de Tchernobyl étaient comparés avec des territoires voisins moins contaminés mais semblables du point de vue des paramètres sociaux et démographiques, on observait l’augmentation de la morbidité générale dans les territoires contaminés. L’augmentation du nombre de nouveaux-nés affaiblis et malades est le résultat de la catastrophe de Tchernobyl, observé dans beaucoup de cas. Les données citées ci-dessous ne sont que des exemples, – elles caractérisent la situation générale.

 4.1. Bélarus [1. – 14.]

1. La morbidité générale des enfants est sensiblement accrue (notamment du fait de l’augmentation de la part des maladies auparavant rares) dans les territoires contaminés (Nesterenko et al., 1993) […]

5. Dans les territoires contaminés par les radionucléides la morbidité générale des enfants du district de Louninets de la région de Brest a augmenté d’un facteur 3,5 dans toutes les classes de maladies, au cours des 8 ans qui ont suivi la Catastrophe, (Voronetski, 1995) : 1986-1988 – 166,6 (sur 1000 enfants), 1989-1991 – 337,3, 1992-1994 – 610,7. […]

9. Dans les districts de Vétka, Narovlia, Khoïniki, Kalinkovitchi de la région de Gomel et dans le district de Krasnopolié de la région de Moguilev la fréquence des avortements et le nombre de nouveaux-nés avec un poids trop faible sont plus élevés dans les territoires contaminés (Ijevsky, Mechkov, 1998).

[…]

4.2. Ukraine [1. – 21.]

1. Au bout des premiers dix ans après la Catastrophe, la morbidité enfantine a augmenté d’un facteur 6 (TASS.., 06.04.98), ensuite elle a un peu diminué et au bout de quinze ans la morbidité générale des enfants ukrainiens était  supérieure à celle1986 d’un facteur 2,9. […]

4. La morbidité des enfants âgés de moins de 14 ans a augmenté de 455,4 en 1987 à 1383,5 (sur 1000) en 2004 (Stépanova, 2006).

5. Le nombre d’enfants pratiquement en bonne santé a diminué dans les territoires contaminés d’un facteur supérieur à 6 : de 3,2% à 0,5%, pendant la période de 1997 à 2005 (Horishna, 2005) […]

7. En 1999, les enfants invalides vivant dans les territoires contaminés étaient quatre fois plus nombreux que la moyenne de toute l’Ukraine (Prysyazhnyuk et al., 2002). […]

14. Pendant la période 1988-2004, le nombre des liquidateurs en bonne santé a diminué de 67,6% à 4,3%, et le nombre des liquidateurs malades de maladies chroniques a augmenté de 12,8% à 81,4% (Rapport national d’Ukraine, 2006 ; Loi…, 2006). […]

19. […] 18 ans après la catastrophe, le nombre de « malades » parmi les liquidateurs ukrainiens a dépassé 94% : à Kiev – 99,9%, dans la région de Soumsk – 96,5%, dans la région de Donetsk – 96,0% (Tchernobyl.., 2004 ; Lubensky, 2004).

[…]

 4.3. Russie [1. – 2.]

1. Le coefficient total de la santé de la population (somme des coefficients de l’invalidité et de la morbidité) dans les territoires de Tchernobyl de la Russie européenne s’est aggravé d’un facteur 2-3, en 10 ans (Tsyb, 1996). […]

7. […] Au début, tous les liquidateurs étaient des jeunes gens en bonne santé. En Russie, cinq ans après la catastrophe, 30% d’entre eux  étaient déjà considérés officiellement « malades », dix ans plus tard, moins de 9% liquidateurs étaient considérés « en bonne santé », et après 16 ans il ne restait dans le groupe « en bonne santé » pas plus de 2% (Ivanov et al., 2004 ; Pribylova et al 2004). […]

9. Le nombre de maladies reconnues chez chaque liquidateur augmente (poly morbidité : pathologie combinée). Avant 1991, il y avait en moyenne 2,8 maladies par liquidateur, en 1995 – 3,5, en 1999 – 5,0 (Liubtchenko, Agaltsev, 2001 ; Liubtchenko et al., 2001).

10. Deux ans à peine après la Catastrophe, des invalides ont commencé à apparaître parmi les liquidateurs, puis les processus invalidants se sont mis à augmenter comme une avalanche (Rybazev, 2002).

En 1995, le nombre d’invalides chez les liquidateurs surpassait les coefficients des groupes d’âge correspondants dans la population d’un facteur trois (Problèmes.., 2002), en 1998 déjà, d’un facteur quatre (Romanenkova, 1998). 15 ans après la catastrophe, 27% de liquidateurs russes étaient devenus invalides, bien qu’ils n’avaient que 48-49 ans d’âge (Guerassimova et al., 2001). En 2004, 64,7% des liquidateurs en âge de travailler étaient invalides (Zubovsky, Tararukhina, 2007).

4.4. Autres pays

1. Hongrie

2. Grande Bretagne

3. Finlande

4. Lituanie

Le fait d’une augmentation manifeste de la morbidité dans les territoires contaminés par les retombées radioactives de Tchernobyl (y compris l’augmentation du nombre d’invalides dans les groupes qui ont reçu une irradiation supplémentaire) n’est pas douteux. Certes, il n’y a pas de preuve directe de l’existence d’un lien entre la morbidité accrue pendant la période post Tchernobyl et l’action de l’irradiation supplémentaire des radionucléides de Tchernobyl. Mais une question se pose alors : avec quoi peut bien être liée cette augmentation de la morbidité deux à trois fois supérieure, coïncidant avec le niveau de la charge radioactive chez des groupes concrets de la population, si ce n’est avec la radioactivité de Tchernobyl ?

L’AIEA et l’OMS (Forum Tchernobyl, 2005) affirment que cette augmentation de la morbidité est liée avec les facteurs socio-économiques et psychologiques. Les facteurs socio-économiques ne peuvent pas en constituer la cause, étant donné que les groupes comparés sont identiques du point de vue de la condition socio-économique, des caractéristiques physique et géographiques des lieux d’habitation, de l’âge et du sexe et ne se différencient que par le niveau de la charge radioactive.

Le facteur psychologique comme la radiophobie ne peut pas constituer non plus une cause déterminante de l’augmentation de la morbidité dans les territoires contaminés, parce que la morbidité augmente partout, quelques années après la Catastrophe, alors que la radiophobie diminue sensiblement avec le temps. [Quelle radiophobie peuvent avoir les petits enfants qui naissent malformés ou souffrent de toutes les maladies infectieuses à cause du système immunitaire affaibli par le lait contaminé de la mère, qui se décharge sur eux, sans le savoir, de sa radioactivité? W.Tchertkoff.]

Chapitre 5. VIEILLISSEMENT RADIOLOGIQUE [1. – 10.]

 Le phénomène du vieillissement accéléré est une des conséquences spécifiques de l’action de la radiation ionisante (Klemparskaya, 1964). Dans tous les territoires contaminés suite à la catastrophe de Tchernobyl, le phénomène du vieillissement précoce est observé à un degré plus ou moins élevé.

1. Un « bouquet » de maladies propres aux personnes d’âge avancé, est une caractéristique des enfants vivant dans les territoires du Bélarus fortement contaminés par les retombées de Tchernobyl (Anonyme, 2005).

2. L’épithélium du tube digestif chez les enfants des régions contaminées du Bélarus rappelle souvent celui des vieillards (Nesterenko et al., 1996).

3. Plus de 70% des 69 enfants et adolescents hospitalisés au Bélarus en 1991-1996 à cause de l’alopécie précoce (calvitie) provenaient des zones fortement radioactives (Morosévitch et al., 1997).

4. L’âge biologique des personnes, qui vivent de manière permanente dans les territoires radiologiquement contaminés d’Ukraine, surpasse l’âge du calendrier de 7 à 9 ans (Mezjerine, 1996). La même tendance s’observe en Russie (Malyguine et al., 1998).

[…]

7. Les processus de vieillissement précoce sont caractéristiques des liquidateurs : beaucoup de maladies apparaissent chez les liquidateurs 10 à 15 ans plus tôt que dans la moyenne de la population. L’âge biologique des liquidateurs surpasse celui de leur état civil de 5 à 15 ans (Gadassina, 1994 ; Poliukhov et al., 1995 ; Romanenko et al., 1996 ; Tron’ko et al., 1995). La différence entre l’âge biologique et celui du calendrier, calculée par les marqueurs du vieillissement chez 306 liquidateurs, est de 5 à 11 ans (Poliukhov et al., 1995 ; cité de Uchakov et al., 1997, p.197).

8. Symptômes du vieillissement précoce des liquidateurs (Antipova et al., 1997 ; Javoronkova et al., 2002 ; Kholodova, Zoubovsky, 2002 ; Zoubovsky, Malova, 2002 ; Vartanian et al., 2002 ; Krassilenko, Eler Aiad, 2002 ; Stépanenko, 2003 ; Khartchenko et al., 1998, 2004 ; Droujinina, 2004 ; Oradovskaya, 2006) :

· poly morbidité sénile à un âge, qui ne sorrespond pas à l’âge avancé ou vieux (10,6 diagnostics de maladies pour un liquidateur dépasse la norme d’âge d’un facteur 2,4) ;

· altérations dégénératives dystrophiques de type sénile dans différents organes et tissus (ostéoporose, cholécystite chronique, cholécystopancréatite, dystrophie du foie etc.) ;

· vieillissement accéléré des vaisseaux sanguins, y compris ceux du cerveau (encéphalopathie sénile à l’âge de 40 ans environ) ;

· altérations du fond de l’oeil : focosclérose ; angiodystrophie de la rétine, cataractes séniles précoces, presbyties précoces ;

· caractère sénile des altérations des fonctions psychiques supérieures ;

· diabète sucré sénile du 2ème type chez des liquidateurs âgés de moins de 30 ans.

[…]

10. une des causes apparentes du vieillissement précoce est représentée par la découverte pratiquement chez tous les liquidateurs des altérations du système circulatoire, qui portent à l’artériosclérose (Tlepchoukov et al., 1998), ainsi que les altérations des tissus épithéliaux (y compris l’épithélium de l’intestin).

***

Le vieillissement radiologique provoqué par la catastrophe de Tchernobyl a déjà touché des centaines de milliers de personnes et touchera des millions dans le futur.

Chapitre 6. MORBIDITÉ NON CANCÉREUSE (pp.70-177)

 Habituellement, quand on mentionne les conséquences de la catastrophe de Tchernobyl pour la santé des personnes, on pense à l’apparition des maladies cancéreuses. Cependant, quelle que soit leur importance, les maladies cancéreuses sont loin d’épuiser les conséquences médicales de la Catastrophe. Sans prétendre de faire une revue complète du matériel accumulé sur les maladies non cancéreuses, nous citerons des exemples, qui montrent les dimensions et la variété des altérations négatives des différents organes et systèmes.

(Hormis quelques paragraphes significatifs, choisis arbitrairement, la traduction se limite ici à donner la liste des maladies citées pour les 3 pays dans les 107 pages de ce chapitre.

6.1 Maladies des systèmes circulatoire et lymphatique

Les maladies des systèmes circulatoire et lymphatique sont l’une des conséquences les plus répandues de la contamination radiologique de Tchernobyl chez les enfants et les adultes. Les maladies des organes circulatoires sont l’une des causes principales d’invalidité et de la mort des liquidateurs.

6.1.1. Maladies du sang et des organes hématopoïétiques (p.70)

6.1.1.1. Bélarus [1. – 14.]

6.1.1.2. Ukraine [1. – 8]

6.1.1.3. Russie [1. – 11.]

6.1.2. Maladies des organes du système circulatoire (p.75)

6.1.2.1. Bélarus [1. – 10]

6.1.2.2. Ukraine [1. – 5.]

6.1.2.3. Russie [1. – 14.]

6.1.2.4. Autres pays

Moldavie

[…] Bien que le tableau de l’ensemble de la morbidité des systèmes circulatoire et hématopoïétique soit encore loin d’être complet, il devient clair que l’une des causes communes de l’altération du fonctionnement des vaisseaux est l’atteinte de l’endothélium – couche de cellules qui tapisse l’intérieur des parois du cœur et des vaisseaux.

  6.2 Altérations génétiques (p.81)

[…] Vingt ans après la catastrophe, une grande quantité de données est apparue sur les atteintes génétiques, liées à l’irradiation supplémentaire de Tchernobyl. Dans cette partie nous ne citons pas seulement les données sur les mutations de différents types apparues suite à la Catastrophe (6.2.1.), mais aussi celles sur les malformations congénitales induites génétiquement (6.2.3.) ainsi que sur la santé des enfants de parents irradiés (6.2.4.)

6.2.1. Altérations de la fréquence des mutations

6.2.1.1. Mutations chromosomiques

6.2.1.1.1. Bélarus [1. – 5.]

6.2.1.1.2. Ukraine [1. – 13.]

6.2.1.1.3. Russie [1. – 20.]

6.2.1.1.4. Autres pays – Yougoslavie, Autriche, Allemagne, Norvège

6.2.1.2. Mutations génomiques

6.2.1.2.1. Trisomie-21 (mongolisme) – Bélarus, Allemagne, Suède, Grande Bretagne.

6.2.1.2.2. Trisomie-13 (syndrome Patau) et autres mutations génomiques

6.2.2. Polymorphisme génétique des protéines

6.2.3. Altérations dans l’ADN satellitaire

6.2.4. Malformations congénitales induites génétiquement

6.2.5. Enfants de parents irradiés [1. – 13.]

***

Puisqu’on sait qu’à la deuxième et à la troisième génération, chez les enfants de parents qui ont subi les effets des explosions nucléaires au Japon en 1945, la fréquence des maladies des organes hématopoïétiques est 10,5 fois plus élevée, celle des maladies du foie 10 fois et celle du système respiratoire 3,3 fois plus élevée que celle du groupe contrôle (Furitsu et al., 1992), on peut penser que les problèmes de santé des descendants des liquidateurs vont également continuer pendant les générations futures.

 

6.2.6. Les aberrations chromosomiques sont des indicateurs de l’état de santé [1. – 12.]

[…] Ces corrélations montrent que l’augmentation générale du niveau des altérations chromosomiques dans les territoires contaminés constitue un indice objectif d’un risque génétique élevé, de même que du risque de développement de beaucoup d’autres maladies.

 6.2.7. Conclusion (p.100-101)

[…] Le perfectionnement des méthodes scientifiques rendra possible un recensement plus complet de ces mutations génétiques. Toutefois on peut dire déjà, qu’en apparaissant dès les premiers jours qui on suivi l’irradiation et en augmentant le risque d’apparition de différentes maladies, la modification des structures génétiques fut la première manifestation dangereuse de la catastrophe de Tchernobyl,.

Même si l’irradiation de Tchernobyl ne subsistait que peu de temps (comme à Hiroshima et à Nagasaki), ses conséquences se feraient sentir suivant les lois de la génétique statistique pendant au moins une série de générations successives à partir de l’instant de la Catastrophe (Chevtchenko, 2002). L’irradiation de Tchernobyl est génétiquement plus dangereuse que celle de Hiroshima et Nagasaki, tant parce que la quantité des radionucléides rejetés par la Catastrophe dans la biosphère est des milliers de fois supérieure, qu’à cause de la composition des radionucléides. Elle a frappé et frappera les habitants dans des territoires immenses pendant des siècles, en ajoutant de nouvelles atteintes génétiques à celles déjà reçues. Les conséquences génétiques de la catastrophe de Tchernobyl toucheront des centaines de millions de personnes, parmi lesquelles :

· celles qui ont subi le premier choc radiologique par les radionucléides de courte période dans le monde entier, en 1986 (cf. ch.1) ;

· celles qui vivent, et vivront pendant pas moins de 300 ans, dans les territoires contaminés par le strontium-90 et le césium-137, jusqu’à ce que leur niveau ne baisse jusqu’à celui du fond naturel ;

· celles qui vivront dans les territoires contaminés par le plutonium et l’américium pendant des milliers d’années ;

· les enfants des géniteurs irradiés pendant sept générations (même s’ils vivront dans des territoires propres).

 6.3. Maladies des organes du système endocrinien

La glande thyroïde concentre jusqu’à 40% de la quantité totale des radionucléides d’iode chez les adultes et jusqu’à 70% chez les enfants (Iline et al.1989, Dedov et al. 1993). L’hypophyse aussi concentre considérablement (de 5 à 12 fois) les radionucléides d’iode incorporés dans l’organisme (Zubovsky, Tararukhina, 1991). C’est la raison de l’hyper contamination de ces deux glandes endocriniennes très importantes pendant la première période « iodée » de la Catastrophe : pendant les quelques semaines initiales. Du fait que tous les autres organes de la sécrétion interne (glandes parathyroïdiennes, épiphyse, pancréas et glandes surrénales) sont étroitement liés dans l’équilibre hormonal, la contamination radiologique de Tchernobyl  a influé sur le fonctionnement de tous les organes du système endocrinien. Ainsi, la synthèse de l’hormone surrénal cortisone et de l’hormone testiculaire testostérone était corrélée chez les femmes gestantes avec le niveau de l’irradiation interne (Duda, Kharkévitch, 1996). Le niveau de la cortisone dans le sang des enfants était significativement abaissé dans les territoires contaminés (Petrenko et al., 1993). La corrélation entre les coefficients immunitaires et la contamination radiologique du territoire est manifeste chez les enfants et les adolescents atteints d’une thyroïdite Hashimoto auto-immune (Kutchinskaya et al., 2001). Les exemples semblables sont nombreux.

Il est évident que l’influence de l’irradiation de Tchernobyl agit dangereusement sur les organes du système endocrinien, mais quelle est la dimension de cette action ? L’ensemble des exemples présentés dans ce chapitre répond à cette question. A cet effet, après la revue des matériaux qui concernent les maladies des organes du système endocrinien (6.3.1) nous examinerons le problème central de la morbidité endocrinienne liée à la catastrophe de Tchernobyl : les altérations du fonctionnement de la glande thyroïde (6.3.2).

6.3.1 Revue des matériaux concernant les maladies du système endocrinien

 Les maladies du système endocrinien sont parmi les plus répandues dans tous les territoires, qui ont subi les retombées radioactives de TchernobyL (Baleva et al., 1996 et nombreux autres).

Dans les territoires contaminés par la radioactivité les fœtus ont l’activité adrénalo-sympathique diminuée de 50% avant leur naissance et la corticale de 36%, en comparaison avec les données normatives. Le système hypophyso-thyroïdien fonctionne en régime de [dysthyréose ?], et dès la fin de la première semaine de vie et le début de la deuxième, chez 28% des nouveaux-nés examinés se forme une [hypothyréose ?] transitoire (Kulakov et al., 1997).

6.3.1.1. Bélarus [1. – 16.]

6.3.1.2. Ukraine [1. – 09.]

6.3.1.3. Russie [1. – 13.]

 O. Ulévitch. « Le filles de Tchernobyl se transforment en garçons ». Hebdomadaire « Versia » (Moscou, N°7, 22-28 février 2000, p. 14.

« … En été 1998, le docteur Vvedensky a visité avec un groupe de collègues le sanatorium de l’entreprise « Khimvolokno », à 100 km de Gomel. Depuis l’accident de Tchernobyl, les enfants des territoires les plus contaminés passent chaque année des périodes de convalescence dans ce sanatorium… Les médecins ont sélectionné 300 fillettes nées en 1986-1990… Après un an et demi d’observations, les médecins on obtenu des résultats stupéfiants. Les examens anthropométriques : mesures de la hauteur, du poids, du volume du thorax, des hanches et des extrémités – ont révélé que tous les indices quantitatifs chez les filles de la zone de Tchernobyl sont inférieurs à la norme. Cependant la largeur des épaules des filles était supérieure à la norme. On notait que leurs, jambes, épaules et avant bras étaient intensément poilus.

Plus tard, les scientifiques se sont heurtés à des pathologies plus sérieuses. Généralement, le  cycle menstruel commence chez les filles à l’âge de 12-13 ans. Pas une des 300 filles n’avait les menstruations. Les données échographiques ont montré de même que leurs organes internes – utérus, ovaires – étaient insuffisamment développés.  « Les résultats de nos examens pouvaient être le fait d’un hasard exceptionnel, – pense le docteur Vvedensky, – cependant parmi ces trois cents filles il y en avait une qui manquait totalement d’organes génitaux internes… Pour le moment, nous n’avons pas le droit d’en tirer des conclusions scientifiques quelconques. Si nous avions trouvé ne serait-ce que trois filles sur 10.000 examinées avec des malformations congénitales analogues, alors nous pourrions dire que nous sommes en présence d’une terrible catastrophe physiologique. » Mais les médecins n’ont pas d’argent pour des recherches plus étendues et approfondies. Le groupe de Vvedensky a conclu que la cause des altérations résidait dans un déséquilibre hormonal. Sous l’action de la radioactivité l’organisme des jeunes filles produit une énorme quantité de l’hormone testostérone. C’est une hormone masculine. Elle est présente dans l’organisme de chaque femme, mais quand il y en a trop, la femme peut perdre les caractéristiques féminines… »

 6.3.2. Altérations du fonctionnement de la glande thyroïdienne

6.3.2.1. Bélarus [1. – 15]

6.3.2.2. Ukraine [1. – 12]

6.3.2.3. Russie [1. – 6]

6.3.2.4. Autres pays Pologne

6.3.3. Conclusion

Les données présentées dans cette partie ne donnent pas encore un tableau complet des maladies liées aux altérations hormonales. Une des causes principales est due au fait qu’une grande partie de ces altérations n’est pas enregistrée par la statistique médicale actuelle.

[…]

Rappelons que pour un cas de cancer de la glande thyroïde nous avons près de mille cas d’autres maladies de cet organe. Aussi pouvons-nous, affirmer que les maladies du système endocrinien, provoquées par Tchernobyl, devront toucher des millions de personnes. Selon les estimations des experts, seulement au Bélarus près de 1 500 000 de personnes sont à risque de maladie de la glande thyroïde (Gofman, 1994 a ; Lipik, 2004).

6.4. Altérations de l’immunité et du système lymphoïde

L’irradiation supplémentaire affecte l’immunité : le système naturel de protection de l’organisme contre l’infection et la majeure partie des maladies. Ceci est un autre résultat important des nombreuses recherches effectuées au cours des dernières années en Ukraine, au Bélarus et en Russie.

Sous l’effet chronique de l’irradiation ionisante supplémentaire, même de faible intensité, provoquée par les retombées radioactives de Tchernobyl, des altérations apparaissent dans les organes faisant partie du système lymphoïde de l’organisme : moelle des os, thymus, rate, nœuds lymphatiques. Il en résulte une modification de la quantité et de l’activité des différents groupes de lymphocytes du sang et, par suite, une insuffisante production des anticorps (immunoglobulines de différentes classes), des cellules hématopoïétiques, des thrombocytes. L’altération du système immunitaire général a pour résultat la déficience immunitaire et, comme conséquence, l’augmentation de la fréquence et de la gravité des maladies et des infections aiguës et chroniques, observées en grand nombre dans les territoires de Tchernobyl (Bortkevtich et al., 1996 ; Lenskaya et al., 1999 et nombreux autres). L’affaiblissement de l’immunité dans les territoires contaminés par la radioactivité est appelé parfois « le SIDA de Tchernobyl ».

L’examen de près de 150 publications scientifiques porte à la conclusion que l’effondrement de la fonction hormonale du thymus joue le rôle principal dans le développement de la pathologie du système immunitaire irradié (Savina, Khoptynskaya, 1995).

Dans cette partie nous présentons seulement des exemples de l’action de la contamination de Tchernobyl sur le système immunitaire, ce qui permet toutefois de montrer les dimensions de l’atteinte radiogène à la santé.

 6.4.1. Bélarus [1. – 22.]

6.4.2. Ukraine [1. – 10.]

6.4.3. Russie [1. – 13.]

 Bien que fragmentaires, les données présentées dans cette partie sur l’action des retombées radioactives de Tchernobyl sur les caractéristiques du système immunitaire montrent l’énorme dimension de cette action. Selon toute apparence, les atteintes à l’immunité provoquées par les retombées radioactives de Tchernobyl intéressent d’une manière ou d’une autre toutes les personnes qui ont subi l’irradiation supplémentaire sans exception.

 6.5. Maladies des organes respiratoires

L’augmentation des maladies des organes respiratoires dans les territoires de Tchernobyl est observée partout. Les maladies des organes respiratoires (cavité nasale, pharynx, trachée, bronches, poumons) constituent l’une des premières conséquences visibles de l’irradiation ionisante, – des hémorragies nasales et irritations de la gorge aux cancers des poumons. Les particules de la « poussière de Tchernobyl » (radionucléides combinés avec des particules de ciment, du sol etc.) demeurent pendant longtemps dans le tissu pulmonaire à cause de la mauvaise solubilité des oxydes d’uranium. Pendant les premiers jours après la catastrophe, les maladies des voies respiratoires supérieures (cavité buccale, pharynx, trachée) chez les adultes étaient liées essentiellement à l’action des radionucléides sous forme gazeuse et d’aérosols. Pendant la première période après la Catastrophe, l’iode-131, le rubidium-106 et le cérium-144 avaient la plus forte action sur le système respiratoire (IAEA 1992 ; Tchoutchaline et al., 1998 ; Kout’kov et al., 1993 ; Terechtchenko et al., 2004). Plus tard, les maladies des organes respiratoires étaient déterminées par les « particules chaudes » pénétrées dans l’organisme, par l’irradiation externe, et se manifestaient aussi suite aux altérations des systèmes immunitaire et hormonal. Les « particules chaudes » les plus petites de la grandeur de 5 microns pénètrent facilement dans les régions les plus éloignées des poumons, les plus grandes sont retenues dans les voies respiratoires supérieures (Khruchch et al., 1988 ; Malachanko & Goluenko 1990 ; Ivanov et al., 1990 ; IAEA 1994).

La fréquence des maladies broncho-pulmonaires chroniques est en rapide augmentation dans les territoires atteints et parmi les liquidateurs (Kogan, 1998 ; Provotorov, Romachov, 1977 ; Trakhtenberg, Thissov, 2001 ; Yakouchine, Smirnova, 2002 ; Tsélovalnikova, Balachov, Efremov, t2003 et al.). Chez les liquidateurs, dont l’observation de la santé était effectuée plus scrupuleusement, on notait une altération de la régularité respiratoire, conditionnée par l’amoindrissement fonctionnel de l’élasticité des poumons (Kouznetsova, 2004). La « poussière de Tchernobyl » se révèle chez les liquidateurs au bout de nombreuses années dans les bronches, dans les bronchioles et les alvéoles, et cause un « syndrome d’inflammation aiguë des voies respiratoires supérieures par inhalation », qui se manifeste sous la forme d’une combinaison entre rhinite, irritation du larynx, toux sèche, difficulté de respiration (Tchoutchaline et al., 1993 ; Kout’kov, 1998 ; Romanova, 1998 ; Tchikina et al., 2001 et al).

6.5.1. Bélarus [1. – 8.]

1. Les maladies respiratoires aiguës sont deux fois plus fréquentes chez les enfants nés de mères, qui étaient gestantes au moment de l’accident (Nesrerenko, 1996).

[…]

6.5.2. Ukraine [1. – 9.]

6.5.3. Russie [1. – 8.]

[…]

Chez les descendants (non irradiés directement) des survivants atomisés de Hiroshima – Nagasaki (hibakusha), quelques décennies après les bombardements les maladies du système respiratoire se rencontraient avec une fréquence plusieurs fois supérieure aux groupes de contrôle (Furitsu et al., 1992). Si cette augmentation de la morbidité est observée suite à une seule brève irradiation, on peut être certain que l’irradiation de Tchernobyl provoquera une morbidité élevée du système respiratoire pendant plusieurs générations.

6.6. Maladies des organes du système uro-génital et atteintes à la reproduction

6.6.1 Bélarus [1. – 12.]

[…]

« … le médecin se souvient : « Dans un village nous avons découvert douze vieilles femmes lactantes*. Des femmes de 70 ans avaient du lait dans les seins, comme les accouchées. Les spécialistes peuvent discuter du nouvel effet radiologique à faibles doses, mais l’imagination humaine commune est dans l’ impasse… ».

Svetlana Alexievitch « La supplication » (Literatournaïa Gazéta, 24.04.1996).

*galactorrhée, syndrome d’hyperprolactinémie, sécrétion du lait en l’absence de gestation. Une des manifestations de l’altération de la fonction de la glande thyroïde.

 6.6.2. Ukraine [1. – 18.]

6.6.3. Russie [1. – 10.]

6.6.4. Autres pays – Arménie, Tchéquie.

 6.7. Maladies du système osseux

6.7.1. Bélarus [1. – 3.]

6.7.2. Ukraine [1. – 7.]

6.7.3. Russie [1. – 12.]

6.8. Maladies des organes du système nerveux et des organes des sens

Avant la catastrophe de Tchernobyl le système nerveux était considéré comme le plus résistant à l’action de l’irradiation ionisante (Gouskova, Baïsogolov, 1971). Vingt ans après la Catastrophe on peut dire que cette idée s’est révélée exacte seulement pour les doses élevées d’irradiation : chez les habitants, soumis à une faible irradiation chronique, comme chez les liquidateurs (irradiés pendant un temps relativement court), les maladies du système nerveux  sont devenues habituelles.

6.8.1. Maladies des organes du système nerveux

Certaines régions du système nerveux central sont particulièrement réceptifs à l’affection radiologique (revue cf. Loganovsky, 1999). Vingt ans après la Catastrophe beaucoup de données se sont accumulées montrant que l’irradiation ionisante de niveau relativement faible conduit non seulement à des altérations stochastiques, mais également à des altérations déterministes des systèmes nerveux central et végétatif : à des encéphalopathies de radiations.

6.8.1.1. Bélarus [1. – 7.]

6.8.1.2. Ukraine [1. – 13.]

6.8.1.3. Russie [1. – 25.]

[…]

4. Chez les étudiants de 16-17 ans des territoires contaminés on a découvert une diminution  de l’étendue de la mémoire de courte durée et une détérioration de la fonction d’attention, dont la manifestation a été corrélée avec la densité de la contamination radioactive (Ouchakov et al., 1997).

[…]

6. On voit apparaître de plus en plus d’observations du phénomène de « débilité mentale de Tchernobyl » (détérioration de la mémoire, automatisme de l’écriture, apparition de convulsions, douleurs de tête pulsionnelles) provoquée par la destruction des cellules de l’encéphale  chez les adultes (Sokolovskaya, 1997).

[…]

9. En 1995, le niveau de la morbidité du système nerveux et des organes des sens chez les liquidateurs était supérieur à la moyenne du pays d’un facteur 6,4 (« Sécurité écologique de Russie » éd. 4, Moscou pp. 211-225, avril 2002).

[…]

20. Les plaintes typiques des liquidateurs sont les fortes douleurs de tête, que les analgésiques ne diminuent pas, diminution de la mémoire des événements du jour, faiblesse      générale, fatigue, diminution de la capacité de travail, transpiration, battements du cœur, douleurs aux os et aux articulations, qui empêchent de dormir la nuit, accès de douleurs avec pertes de conscience, accès d’arythmies cardiaques avec frissons ou fébrilité, troubles de la vue, insomnie, engourdissement des bras et des pieds (Sokolova, 2000 ; Kholodova, 2006).

[…]

25. La gravité des pathologies neurologiques chez les liquidateurs est corrélée avec les altérations de la circulation sanguine dans différentes parties du cortex, de la matière blanche et des formations profondes de l’encéphale (Kholodova,)

***

Les nombreuses données sur les maladies du système nerveux dans les territoires contaminés ainsi que chez les liquidateurs montrent que les idées précédentes sur la stabilité du système nerveux soumis à l’influence radiologique s’avèrent erronées. L’influence des radiations, même de niveau relativement faible (par rapport aux évaluations précédentes de la sécurité radiologique), à l’instar de celle qui existe dans les territoires contaminés, conduit à de profondes altérations systémiques du système nerveux central.

Chez de nombreux habitants des territoires contaminés, en particulier parmi les irradiés in utero, mais aussi chez les liquidateurs, certaines fonctions du système nerveux sont altérées : particularités de la perception, mémoire de courte durée, attention, pensée opérative, sommeil. Cela est corrélé avec des altérations de l’activité des parties profondes de l’encéphale : diencéphale, parties rétro frontales, temporales, sincipitales et occipitales des lobes du cerveau. L’influence radiologique altère de quelque façon aussi l’activité  du système nerveux végétatif. Il reste à ajouter que le retard mental est noté chez 45% des enfants nés de mères qui ont survécu à un bombardement atomique (Boulanova, 1996).

6.8.2. Maladies des organes des sens

6.8.2.1. Bélarus [1. -11.]

[…]

5. Il y a une corrélation directe  entre le niveau du césium-137 incorporé et la fréquence des cataractes chez les enfants du district de Vétka de la région de Gomel (Bandajevsky, 1999).

6.8.2.2. Ukraine [1. – 6.]

6.8.2.3. Russie [1. – 3.]

6.8.2.4. Autres pays – Norvège

                                                                                           ***

Ce n’est qu’après l’an 2000 que la médecine officielle a commencé à reconnaître que l’augmentation des cas de cataracte partout dans les territoires de Tchernobyl, parmi les évacués et les liquidateurs sont d’origine radiologique. Il a fallu attendre 10 ans ( !) après que les médecins aient commencé à donner l’alarme à ce sujet.

6.9. Maladies du système digestif et des organes internes

6.9.1. Bélarus [1. – 12.]

6.9.2. Ukraine [1. – 15.]

6.9.3. Russie [1. – 17.]

6.10. Maladies de la peau

6.10.1. Bélarus [1. – 5.]

6.10.2. Ukraine [1.]

6.10.3. Russie [1. – 7.]

6.11. Infections et invasions

Étant donné que la radioactivité ionisante est un puissant facteur mutagène, le nuage des radionucléides du bloc explosé N°4 de la centrale atomique de Tchernobyl, qui a recouvert tout l’hémisphère Nord de la planète d’un mélange de différents radionucléides (cf. chap. 3 et 4), ne pouvait pas ne pas modifier les entérobiocénoses en activant un processus de création de nouvelles formes de microorganismes, dont certains sont pathogènes. C’est ce qui s’est passé effectivement. En témoignent les données sur l’augmentation du nombre et de la gravité des toxicoses intestinales, gastroentérites, (dysbactérioses ?), septicémies, hépatites virales, virus respiratoires dans les territoires contaminés par les retombées de Tchernobyl (Batian, Kojarskaya,1003 ; Kapitonova, Krivitskaya, 1994 ; Nesrerenko et al., 1993 ; Boussouète et al., 2000).

6.11.1. Bélarus [1. – 16.]

6.11.2. Ukraine [1. – 2.]

6.11.3. Russie [1. – 11.)

***

Il n’est pas exclu que les faits exposés ci-dessus sur la propagation plus large des affections infectieuses et parasitaires dans les territoires contaminés et parmi les liquidateurs ne soient que le reflet d’un processus insuffisamment étudié et extrêmement dangereux de la diffusion de formes radio induites d’infections virulentes dangereuses. L’influence radiologique, qui neutralise certaines affections infectieuses, provoque la diffusion d’autres maladies, en agissant aussi bien sur les agents pathogènes directement, qu’en détériorant la résistance antimicrobienne et antivirale de l’organisme suite à l’affaiblissement du système immunitaire. L’instabilité génétique observée dans les territoires de Tchernobyl peut favoriser une sensibilité plus élevée de l’organisme aux infections virales et d’autres types (Vorobtsova et al., 1995).

6.12. Malformations congénitales

Les malformations congénitales (MC) et les anomalies héréditaires moins importantes prennent naissance en tant qu’altérations pendant le développement embryonnaire et peuvent être soit génétiquement provoquées (résultant de quelque mutation, comme par exemple, le syndrome de Down), soit tératogènes – provoquées par quelque influence externe au cours du développement embryonnaire (habituellement à la 16ème semaine de grossesse). Dans la partie 6.2.4 « Malformations induites génétiquement » nous avons examiné certaines MC ayant une claire origine génétique. Dans cette partie nous examinons les données de toutes les autres MC et anomalies de développement.

6.12.1. Bélarus [1. – 15.]

6.12.2. Ukraine [1. -  12.]

6.12.3. Russie [1. – 7.]

6.12.4. Autres pays - Moldavie, Géorgie.

6.13. Autres maladies

 Chapitre 7. AFFECTIONS CANCÉREUSES (pp. 178 – 207)

Les affections cancéreuses (tumeurs malignes, cancers) constituent une des conséquences les plus typiques de l’irradiation ionisante. Du moment de l’irradiation à celui de l’apparition  de tumeurs malignes qu’elle provoque, passe une période de latence. D’après les données obtenues des études des victimes du bombardement atomique de Hiroshima et Nagasaki, les cancers provoqués par l’irradiation apparaissent dans leur généralité de la façon suivante :

- leucémie (cancer du sang) – au bout de 5 ans ;

- cancer de la thyroïde – au bout de 10 ans ;

- cancer du sein et des poumons – au bout de 20 ans ;

- cancer de l’estomac, de la peau et du rectum – au bout de 30 ans.

Dans le cas de l’irradiation de Tchernobyl ce tableau est rendu plus complexe du fait que les personnes vivant dans les territoires contaminés subissent une irradiation supplémentaire constamment renouvelée, et tant que cette irradiation aura lieu, la morbidité totale augmentera sans cesse.

 « R.Geil :… une probabilité quelconque de l’apparition des maladies cancéreuses suite à l’accident de Tchernobyl est extrêmemnt faible… Il est même possible qu’il n’y aura pas de cas du tout, ou le nombre sera tel que nous ne pourrons pas le déterminer… J’espère qu’il n’y aura pas de cas supplémentaires d’affections cancéreuses.

L. A. Bouldakov : Il y a la morbidité causée par le bruit de fond (rayonnement naturel), et il ne doit y avoir aucun cas supplémentaire ».

Colloque du prof. R. Geil de l’Université de la Californie avec le vice-directeur de l’Institut de biophysique du ministère de la Santé de l’URSS, prof. L. A. Bouldakov, peu de mois après la catastrophe de Tchernobyl

(cit. de Diatchenko et al., 1996 pp.716-717)

Pour apprécier les données présentées ici il faut tenir compte du fait que la qualité des statistiques oncologiques russe et ukrainienne est basse, elle ne correspond pas aux standards internationaux. Dans l’ensemble, ces données présentent une évaluation minimisée des affections cancéreuses rencontrées.

[…]

Dans cette partie nous présentons successivement les données de la morbidité cancéreuse générale, du cancer de la glande thyroïde, de la leucémie, et ensuite de tous les autres néoplasmes malins observés dans les territoires touchés par les retombées de Tchernobyl. Il faut rappeler que les données présentées dans cette partie, comme dans les autres, ne représentent pas une revue exhaustive, mais seulement des exemples, qui témoignent de la dimension de l’ensemble du problème qui, dans le cas présent, est celui de l’apparition de tumeurs malignes sous l’effet des radionucléides répandus lors de la catastrophe de Tchernobyl.

7.1. Augmentation de la morbidité cancéreuse générale

Il existe deux voies pour déterminer la dimension de la morbidité cancéreuse causée par la catastrophe de Tchernobyl : sur la base du calcul des doses reçues (en utilisant les coefficients de risque correspondants), et en comparant directement les niveaux de morbidité cancéreuse des habitants des territoires contaminés.

7.1.1. Bélarus [1. – 8.]

1. Pendant la période 1990-2000, la fréquence de toutes les affections cancéreuses a augmenté de 40% dans le pays. L’augmentation était maximale dans la région de Gomel, la plus contaminée par la radioactivité de Tchernobyl, et moindre dans les régions moins contaminées de Brest et de Moguilev (respectivement, 53%, 33%, 32% ; Okeanov et al., 2004).

[...]

7.1.2 Ukraine [1. – 5.]

7.1.3. Russie [1. – 5.]

 7.2.  Cancer de la thyroïde

Le problème du cancer de la thyroïde attire particulièrement l’attention non seulement parce que la morbidité de ce cancer est pour le moment la plus considérable quantitativement parmi toutes les néoplasies malignes causées par la catastrophe de Tchernobyl, mais aussi parce que la glande thyroïde constitue l’anneau central du système endocrino-hormonal, et son affection provoque des dizaines d’autres maladies sérieuses.

7.2.1. Nombre de malades

7.2.1.1. Bélarus [1. –9.]

7.2.1.2 Ukraine [1. – 7.]

7.2.1.2. Russie [1. – 8.]

7.2.1.4. Autres pays [1. – 4]

1. France. Le nombre total de malades du cancer de la thyroïde pendant la période 1986-2002 dans le Midi de la France s’élevait jusqu’ à 1500 cas selon les médias et les ONG.

+ Autriche, Tchéquie, Grande Bretagne.

7.2.2. Combien et quand peut-on attendre de nouveaux cas de cancers de la thyroïde ?

(pp. 193-196)

***

 Les particularités caractéristiques de la diffusion et de l’apparition du cancer de la thyroïde de Tchernobyl sont très différentes des données, largement utilisées comme références, sur les conséquences des bombardements atomiques de Hiroshima et Nagasaki.

Le cancer de Tchernobyl :

- apparaît beaucoup plus tôt (non après 10 ans, mais déjà au bout de 3-4 ans après l’irradiation) ;

- il se développe dans une forme beaucoup plus agressive ;

- il ne touche pas seulement les enfants, mais des personnes adultes au moment de l’irradiation.

Il est erroné de penser que ce cancer est facilement guérissable chirurgicalement. Bien que dans la majorité des cas il est curable par l’opération, dans un  tiers des cas environ le cancer continue à se développer après l’intervention. En outre, dans tous les cas de la cure chirurgicale sans exception le malade reste invalide pour toute la vie, dépendant entièrement des médicaments.

Enfin, il faut tenir compte du fait que le cancer de la thyroïde n’est que la pointe de l’iceberg des affections radio induites de cet organe (cf. partie 6.3.2.) – pour chaque cas de cancer il y a des centaines de cas d’autres maladies de la thyroïde, qui altèrent aussi son fonctionnement.

7.3. Cancer du sang – leucémie

7.3.1. Bélarus [1. – 8.]

7.3.2. Ukraine [1. – 8.]

7.3.3. Russie [1. – 6.]

7.4. Autres cancers

7.4.1. Bélarus [1. – 11.]

7.4.2. Ukraine [1. – 6.]

7.4.3. Russie [1. –  7.]

CHAPITRE 8. MORTALITÉ

Pendant les 20 ans qui ont suivi la Catastrophe, pas une seule publication officielle (ni internationale, ni nationale) n’a fourni de données chiffrées de la mortalité dans l’ensemble des territoires touchés par les retombées de Tchernobyl : elles ne contiennent les données de l’augmentation de la mortalité que dans des groupes particuliers de la population et pour certaines maladies (essentiellement cancéreuses (cf. chap.7).

A partir de 1986 en URSS, l’espérance moyenne de vie a sensiblement baissé et la mortalité néonatale et celle des âges adultes a commencé visiblement à augmenter.

Il n’y a pas de preuves d’un lien direct de ces modifications avec la catastrophe de Tchernobyl, mais il n’y a pas de preuves convaincantes de l’absence de ce lien. Dans le même temps, il y a un grand nombre de preuves de l’augmentation de la mortalité prénatale, enfantine et générale, corrélée avec la contamination de Tchernobyl.

8.1. Augmentation de la mortalité prénatale.

[Avortements spontanés, fausses couches, mort-nés…]

8.1.1. Bélarus [1. – 2.]

8.1.2. Ukraine [1. – 4.]

8.1.3. Russie [1. – 4.]

8.1.4. Autres pays

Les avortements et les mort-nés en Ukraine à cause de la contamination radioactive de Tchernobyl ont atteint le nombre de 50 000 (Lipik, 2004). Si on se base sur ce chiffre pour la partie européenne de la Russie et pour le Bélarus, leur nombre ne doit pas être inférieur à cette grandeur, et on peut évaluer à 100 000 le nombre total des fœtus morts prématurément pendant le temps écoulé depuis la catastrophe dans ces trois pays. Si on considère que ces trois territoires ont reçu près de la moitié de tous les rejets radioactifs de Tchernobyl, on peut supposer qu’en dehors de ces territoires la dimension des morts prénatales doit également se chiffrer à 100 000. La grandeur totale de la mortalité prénatale provoquée dans le monde par l’irradiation de Tchernobyl, peut donc être de l’ordre de 200 000 cas.

8.2. Augmentation de la mortalité périnatale, néonatale et enfantine en général.

Un effet tragique de la contamination de Tchernobyl est représenté par l’augmentation de toutes les catégories de mortalité enfantine : précoce néonatale (0-6 jours après la naissance) ; périnatale (avortements + 0-6 jours après la naissance) ; néonatale (0-27 jours) ; petite enfance (première année) ; enfantine générale (0-14 ans).

Il y a peu de données précises sur la mortalité enfantine pour le Bélarus, l’Ukraine et la Russie, en premier lieu à cause de la falsification traditionnelle de ces données (Lossoto, 2005) : afin de ne pas « empirer » les statistiques de la santé nationale, on a pris l’habitude dans le territoire de l’ex URSS d’enregistrer les nouveau-nés non le jour de la naissance, mais après 1-2 semaines (transférant de cette façon la mortalité enfantine précoce dans la catégorie des mort-nés).

8.2.1. Mortalité périnatale

8.2.1.1. Bélarus [1.]

8.2.1.2. Ukraine [1. – 2.]

8.2.1.3. Autres pays – Allemagne, Pologne.

8.2.2. Mortalité néonatale

8.2.2.1. Ukraine

8.2.2.2. Russie

8.2.2.3. Autres pays – Pologne. Angleterre, Galles.

 ***

Sur la base des données citées ci-dessus on peut supposer que la mortalité générale supplémentaire de la petite enfance, provoquée par les retombées de Tchernobyl, doit représenter en Europe plusieurs milliers de cas. Une détermination plus précise de cette grandeur constitue la tâche de recherches spéciale.

 8.2.3. Mortalité enfantine générale (0-14 ans)

8.2.3.1. Bélarus [1.]

8.2.3.2. Ukraine [1. – 3.]

8.2.3.3. Russie [1.]

***

L’augmentation de la mortalité enfantine, provoquée par la catastrophe de Tchernobyl, ne sera jamais déterminée avec précision. Toutefois, en nous basant sur les données fragmentaires en notre possession d’indices nettement élevés de toutes les classes de mortalité enfantine et de mort-nés dans les territoires les plus contaminés, nous pouvons supposer qu’au Bélarus, en Ukraine et en Russie la mortalité supplémentaire « tchernobylienne » doit être évaluée globalement en dizaines de milliers de personnes.

8.3. Mortalité des liquidateurs [1. – 14.]

Il n’existe pas de données suffisamment complètes de la mortalité des liquidateurs d’Ukraine, de Russie et du Bélarus pour toute la période postérieure à la Catastrophe. Rappelons que les liquidateurs étaient des personnes en bonne santé et essentiellement jeunes, parmi lesquels la mortalité était au départ beaucoup moindre que dans les groupes d’âge correspondants.

[…]

3. A partir de 1995, la mortalité parmi les liquidateurs  devint plus élevée que celle des groupes correspondants de l’ensemble de la population (Loi d’Ukraine… 2006).

[…]

8. Selon les données de « Union Tchernobyl » sur 244 700 liquidateurs de Russie pas moins de 31 700 (env. 13%) sont morts en 2005.

En généralisant les données de la mortalité des liquidateurs, on peut affirmer qu’à partir de 1990 – quatre ans après la Catastrophe, – la mortalité parmi eux a surpassé la mortalité dans les groupes correspondants de la population. Selon toute vraisemblance, la mort de                    14 000-15 000 environ des 112 000 – 125 000 liquidateurs décédés en 2005 (14-15% des           830 000) peut être causée par l’irradiation de Tchernobyl.

8.4. Augmentation de la mortalité générale

La contamination de Tchernobyl a indéniablement provoqué une mortalité générale plus élevée de toute la population.

8.4.1. Bélarus [1. – 4.]

8.4.2. Ukraine [1. – 3.]

8.4.3. Russie [1. – 3.]

8.5. Calculs de la mortalité générale selon la grandeur du risque cancérigène

Sur la base des différents coefficients de risque (apparition du cancer par unité d’irradiation) différents auteurs estiment de manière différente la mortalité générale provoquée par les cancers induits par la catastrophe de Tchernobyl.

                                                                                                                                                 

                                                                                                                                            Tableau 8.10

Estimation de la mortalité par cancer causée par le césium-134, césium-137 et iode-131  

                                                                                                                                                                                                                                                                                               

Nombre de morts

Auteur

Observation

4 000

AIEA-OMS, conf. de presse

du « Forum de Tchernobyl » (2005)

90 ans Bélarus, Ukraine,

Russie

8 930

« Forum de Tchernobyl » (2005)

90 ans Bélarus, Ukraine,

Russie

9 335

Mousseau et al. 2005

Le monde, 95 ans (sans le cancer

de la glande thyroïde)

14 000

Nuclear Regulatory Comission, USA

En tout dans le monde entier

17 400

Anspaugh et al. 1988

Le monde, 50 ans

28 000

Ministère de l’énergie USA

(Goldman, 198)

En 50 ans, dans le monde entier

30 000

UNSCEAR (Bennett, 1996)

En tout dans le monde entier

30 000-60 000

Fairley, Sumner (2006)

En tout dans le monde entier

90 000

Imanaka (2002)

En tout dans le monde entier

93 080

Malko (2007)

Le monde entier en 70 ans

180 000

Malko (2007)

Le monde entier en 70 ans.

Toutes les causes

495 000

John Gofman (1994a, 1994b)

En tout

899 310-1 786 657

Rosalie Bertell (2006)

En tout. Tous les radionucléides.

Le monde entier

L’amplitude des évaluations présentées dans ce tableau est supérieure au facteur 100. Même si on considère le fait que les calcules de J. Gofman et de R. Bertell tiennent compte, à la différence des autres, de tout le temps de l’action des radionucléides rejetés, et qu’en plus les calculs de R. Bertell considèrent aussi tous les radionucléides rejetés (différemment des autres, qui ne calculent que le césium et l’iode), l’amplitude des évaluations dépasse largement la marge d’incertitude scientifique habituelle. Ceci constitue une autre confirmation (cf. ch. 3) du fait que les évaluations du dommage à la santé sur la base des coefficients de risque radiologique sont méthodologiquement erronées.

8.6. Calculs de la mortalité générale par comparaison entre les territoires fortement et faiblement contaminés

 8.7. Quel est le nombre des victimes de Tchernobyl ? (voir CONCLUSION p. 51)

En déclarant que le nombre total des victimes et de ceux qui mourront à cause de la contamination radioactive de Tchernobyl au Bélarus, en Ukraine et dans la partie européenne de la Russie sera, au cours de 90 ans à partir du moment de la catastrophe, de 9000 personnes, le « Forum de Tchernobyl » (2005) a de nouveau attiré l’attention sur les calculs du nombre des victimes de Tchernobyl. Différentes prévisions principales du nombre total des morts et de ceux qui périront dans la succession des générations à cause de la contamination radioactive de Tchernobyl sont présentées dans le tableau 8.10. Elles sont toutes basées sur les calculs de la mortalité en utilisant différents coefficients de risque du développement des cancers à partir d’un niveau d’irradiation déterminé. Il est connu par ailleurs que la morbidité cancéreuse n’a jamais occupé la première place du point de vue de l’importance dans la structure de la mortalité générale. C’est la raison pour laquelle les données de Khoudolei et al. (2006), basées sur la prise en compte de toutes les causes de la mortalité générale acquièrent une importance exceptionnelle. Cette approche – la comparaison et l’analyse des coefficients de la mortalité réelle dans les territoires contaminés, – donne la possibilité de mettre fin aux controverses sur les grandeurs des coefficients de risque pour l’évaluation de la mortalité.

En se basant sur les données de Khoudolei et al. (2006) pour le Bélarus, l’Ukraine et la Russie d’Europe, il est possible de calculer de façon beaucoup plus précise qu’avec l’utilisation des coefficients de risque pour un seul groupe de cas mortels (le cancer), l’importance de la mortalité réelle de Tchernobyl pour l’Europe et pour le monde entier, pendant les 15 premières années de la Catastrophe.

1. […]

2. […]

3. […]

4. […]

En faisant la somme des calculs des points 1-4 nous voyons que la mortalité « tchernobylienne » supplémentaire, au cours des 15 premières années après la Catastrophe, représente dans le monde entier :

Bélarus, Ukraine Russie d’Europe                                                          237 000

Le reste de l’Europe ; contaminée >1 Ci/km2                                        170 000

contaminée de 0,1 à 1 Ci/km2                             255 000

Asie, Afrique, Amérique du Nord                                                           323 000

Le monde entier                                                      985 000 personnes.

[…]

8.8. Conclusion

[…]

Les calculs présentés ci-dessus montrent qu’après la Catastrophe des centaines de milliers de morts supplémentaires ont déjà eu lieu parmi les centaines de millions de personnes, qui ont eu le malheur de se trouver dans les territoires contaminés par les retombées radioactives de Tchernobyl. Le nombre des victimes de Tchernobyl croîtra pendant plusieurs générations.

Conclusion de la IIe PARTIE

Traduction de Lisa Mouravieff

            Malgré l’énorme quantité de données sur la dégradation de la santé des populations vivant dans les territoires contaminés par les retombées radioactives de Tchernobyl, le tableau est loin d’être complet et définitif. Pour obtenir le tableau complet des conséquences sanitaires de la catastrophe de Tchernobyl il faut tout d’abord :

  • Elargir et non réduire (comme c’est le cas ces dernières années en Russie, Biélorussie et Ukraine) la recherche médico-biologique et radiologique ;
  • Reconstituer les doses individuelles en différenciant l’apport des divers radionucléides, de l’irradiation interne et externe ;
  • Analyser le détail des statistiques médicales mensuelles (surtout celle des premières années après la Catastrophe) de toutes les régions administratives ayant reçu des retombées radioactives de Tchernobyl (comparées aux régions voisines).

La propagation et l’intensité de quelques maladies prises séparément (voir ci-dessus ch. 4-8) ne donnent pas un tableau complet des changements qui surviennent dans la santé des gens vivant en territoires contaminés. Nous présentons ci-dessous le tableau généralisé de l’état de santé par années 10 ans après la catastrophe dans la petite région de Louguina en Ukraine, à 110 km au sud-ouest de la centrale de Tchernobyl dans la région administrative de Jitomir. Des régions comme celle-ci se comptent par dizaines en Biélorussie, Ukraine et Russie. Mais peu nombreuses sont celles où les données sur la santé des gens ont été recueillies par les mêmes personnes, avec le même équipement médical et en suivant les mêmes protocoles avant et après la catastrophe (Godlevsky, Nasvit, 1999).

 Changements survenus dans la santé de la population d’une région administrative

dans les 10 ans qui ont suivi la Catastrophe

 Région de Louguina (Ukraine). Nombre d’habitants

en 1986 – 29276 habitants

en  1996 – 22552 (dont 4227 enfants)

La région compte 50 villages dont 22 ont été contaminés en 1986 jusqu’à un niveau de 1-5 Ci/km2  et 26 à moins de 1 Ci/km2.

Espérance de vie à partir du moment où a été diagnostiqué un cancer du poumon ou de l’estomac :

  • 1984 -1985 : 38-62 mois ;
  • 1995 -1996 : 2-7,2 mois ;

Nombre de cas d’une  tuberculose sous forme active diagnostiquée pour la première fois (% du nombre total de cas de tuberculose diagnostiquée pour la première fois, sur 100 000) :

  • 1985-1986 : 17,2 – 28,7 ;
  • 1995 – 1996 : 41,7 – 50,0 ;

Maladies des organes endocriniens (sur 1000 enfants) :

  • 1985-1990 : 10
  • 1994-1995 : 90-97 ;

Cas de goitre (sur 1000 enfants) :

  • Avant 1988 : aucun ;
  • 1994-1995 : 12-13 ;

Mortalité néonatale (au cours des 7 jours qui suivent la naissance, sur 1000) :

  • 1984 -1987 : 25 – 75 ;
  • 1995 -1996 : 330-340 ;

Mortalité générale (sur 1000) :

  • 1985 : 10,9
  • 1991 : 15,5 ;

Espérance de vie :

  • 1984 -1985 : 75 ans ;
  • 1990 – 1996 : 65 ans ;

 [Fig.8.15 Nombre absolu de malformations congénitales chez les nouveaux-nés

pour la période 1983-1996]

  Comme le montrent les données ci-dessus pour la région de Louguina, on observe une détérioration générale de la santé des habitants des territoires, contaminés par les retombées radioactives de Tchernobyl. Le nier, comme le font les auteurs du rapport du « Forum de Tchernobyl » (2005) sous le prétexte que la nature des changements de ce genre n’est pas suffisamment claire, est scientifiquement faux et moralement inadmissible.

On observe dans les territoires contaminés avec une fréquence nettement plus grande qu’ailleurs un grand nombre de maladies et de symptômes dont les statistiques ne tiennent aucun compte. Citons la lenteur anormale de l’augmentation de la masse corporelle chez l’enfant ; les convalescences qui s’éternisent après la maladie ; de fréquentes fièvres et autres. Tchernobyl a « enrichi » le vocabulaire  médical de la planète de nombreux termes nouveaux tels que :

  • Syndrome de « dystonie végétovasculaire » : trouble fonctionnel de la régulation nerveuse du système cardiovasculaire, accompagné de diverses manifestations cliniques surgissant sur fond de stress ;
  • Syndrome des « radionucléides incorporés à vie longue » : altération structurelle et fonctionnelle des systèmes cardio-vasculaire, nerveux, endocrinien, reproducteur et autres, causée par l’accumulation dans l’organisme de radionucléides des césium-137 et strontium-90 à un taux supérieur à 50 Bq par kg de poids du corps (Bandajevsky, 1999) ;
  • Syndrome de « l’affection d’inhalation aiguë des voies respiratoires supérieures » : alliance de rhinite, irritation de la gorge, toux sèche, respiration difficile, dyspnée d’effort, causés par l’effet des radionucléides, y compris des « particules chaudes », inhalés (Tchikina et al., 2001).

Certains syndromes connus ont acquis après Tchernobyl une tonalité nouvelle tchernobylienne et une propension jamais vue jusque là. Citons parmi ceux-ci :

 

  • Syndrome de « fatigue chronique » (Lloyd, 1984) : fatigue manifestée, trouble du sommeil, dépression et abattement périodique, fatigabilité sans raison, défaillance de la mémoire, douleur musculaire diffuse, douleur dans les grosses articulations, frissons, sautes d’humeur fréquentes, hypersensibilité des noeuds lymphatiques jugulaires, perte de poids – effets causés par l’altération des fonctions du système immunitaire alliée aux lésions de la région temporale limbique du cerveau ;
  • Syndrome du « mal radiologique prolongé » (Furitsu et al.1992), alliance de grande fatigue, vertiges, tremblement, douleur du dos et de la ceinture scapulaire, manifestations caractéristiques des victimes de bombardements atomiques.

Mentionnons parmi les syndromes qui attendent d’être médicalement décrits « l’irradiation in utero », « le SIDA tchernobylien », « le coeur tchernobylien » et « les membres tchernobiliens ».

L’apport de Tchernobyl à la mortalité générale s’élève à 3,5-3,75% dans les territoires avec une contamination de 1-5 Cu/km2 (voir ch.8) ; l’apport de Tchernobyl à la morbidité dans ces territoires est bien plus élevé. Les maladies chroniques d’étiologie diverse, mais liées d’une manière ou d’une autre à la contamination radioactive, sont devenues un phénomène de masse non seulement parmi les liquidateurs mais parmi les habitants des régions contaminées.

Les données scientifiques objectives sur les conséquences sanitaires de la catastrophe de Tchernobyl ne cessent de se multiplier, ce qui ne permet pas d’être optimiste : la morbidité dans les territoires contaminés continuera à croître si des programmes spéciaux ne sont pas mis en oeuvre à grande échelle. En témoigne aussi bien  l’absence de corrélation des doses annuelles moyennes avec les doses cumulées reçues par la population depuis le jour de la Catastrophe, que l’apport croissant des régions à faible densité de contamination à la dose collective, l’augmentation (et non la diminution comme on le supposait précédemment) de la charge radioactive par irradiation interne, et la fin de la période latente de 20 ans pour de nombreuses formes de cancer (de la peau, du sein, du poumon et autres). Le refrènement du système immunitaire conduira immanquablement à la propagation de nombreuses autres maladies. La destruction des structures du système nerveux central va multiplier le nombre de retardés mentaux, ce qui risque de conduire à une véritable débilisation de la société. Les conséquences génétiques se laisseront observer pendant de nombreuses générations encore dans le fonds génétique de l’humanité.

Si on se place sur le plan de la morale universelle, il est absolument inexplicable que l’AIEA, l’OMS et les fonctionnaires spécialistes du nucléaire mettent « des lunettes roses » et assurent la société que la catastrophe de Tchernobyl a des effets dirait-on quasiment bénéfiques. Cette position empêche que puisse se mettre en oeuvre une politique responsable et efficace, capable de réduire au maximum les conséquences de la Catastrophe pour la santé de l’homme.

IIIe PARTIE

CONSÉQUENCES  DE LA CATASTROPHE  POUR L’ENVIRONNEMENT

Traduction de W. Tchertkoff

Le niveau de la contamination radioactive des territoires – atmosphère, eaux, sol, – détermine les niveaux d’irradiation de tout le vivant, directement et à travers les chaînes alimentaires. […] Il y a beaucoup de données sur l’influence de la radioactivité de Tchernobyl sur les écosystèmes et sur les populations animales et végétales et même les microorganismes. Comme pour la santé des habitants, dont les données présentées dans cet ouvrage ne sont pas exhaustives, de même nous n’examinons dans cette partie que les tendances principales de l’influence de la Catastrophe sur la nature – il s’agit d’une mosaïque plus que d’un tableau achevé. La situation radiologique change jusqu’à ces derniers temps de façon imprévisible. C’est ainsi par exemple qu’on n’a pas prévu l’accroissement des formes solubles du strontium, la désintégration des particules du combustible accompagnée d’un deuxième rejet d’une série de radionucléides, l’apparition de l’américium-241 hautement radioactif.

Chapitre 9. CONTAMINATION DE L’ATMOSPHÈRE, DES EAUX ET DES SOLS

[…]

9.1. Contamination de l’atmosphère terrestre

9.2. Contamination des écosystèmes d’eau [1. – 8.]

9.3. Contamination du sol [1. – 6.]

 

***

 Suite à la migration verticale des radionucléides, ceux-ci seront assimilés en quantités  importantes par les végétaux, dont les racines se trouvent dans les couches inférieures du sol. Capturés par les racines, les radionucléides qui se sont enfoncés dans le sol, se retrouvent une deuxième fois en surface (dans les parties superficielles des végétaux), et entrent dans les chaînes alimentaires. C’est l’un des mécanismes observés ces dernières années de l’augmentation de la contamination interne de la population dans les territoires contaminés.

Le nombre des bactéries du terroir diminue et la composition de leurs espèces change dans les territoires contaminés par la radioactivité. Toutes ces altérations de la faune bactérienne conduiront à la diminution de la transformation microbienne des éléments organiques et inorganiques, qui constitue l’un des processus fondamentaux du tourbillon de la matière dans la nature.

Chapitre 10. INFLUENCE SUR LE MONDE VÉGÉTAL

 

10.1. Accumulation des radionucléides par les végétaux et les champignons         [1. – 24.]

10.2. Radiomorphoses et tumeurs [1. – 9.]

10.3. Altérations génétiques [1. – 12.]

10.4. Autres altérations des végétaux et des champignons [1. – 5.]

L’atteinte radioactive a ressuscité des signes ataviques, caractéristiques des formes ancestrales disparues depuis longtemps – la radioactivité a comme réveillé des gènes devenus muets depuis longtemps au cours de l’évolution.

Chapitre 11. INFLUENCE SUR LE MONDE ANIMAL

 La catastrophe de Tchernobyl a produit (et produira encore pendant longtemps) une influence variée sur l’état du monde vivant, à commencer par les modifications du système de la faune, jusqu’à l’altération des particularités de la reproduction animale et l’atteinte à l’appareil génétique.

 11.1. Incorporation des radionucléides [1. – 10.]

11.2. Altérations de la reproduction [1. – 13.]

11.3. Modifications génétiques [1. – 17.]

11.4. Modifications d’autres caractéristiques biologiques [1. – 11.]

Chapitre 12. INFLUENCE SUR LES MICROORGANISMES ET LES VIRUS [1. – 5.]

Conclusion de la IIIe PARTIE     

 Le tableau de la contamination radioactive de Tchernobyl des eaux et du sol se révèle dynamique non seulement à cause des transformations physiques des radionucléides, mais aussi à cause de la migration des radionucléides dans les écosystèmes. Cette migration intense du strontium-90, du césium-137, du plutonium et de l’américium, qui résulte des processus de l’accumulation biologique, nous donnera des surprises encore pendant longtemps.

Même les données fragmentaires présentées dans cette partie montrent que la catastrophe de Tchernobyl a produit et produira une influence multiforme sur le monde végétal et animal.

[ …]

Sûrement, des processus de sélection et de radio adaptation d’exemplaires moins radiosensibles sont en cours dans les territoires contaminés. Ils aboutiront au résultat qu’au bout de nombreuses générations, les populations vivant dans les conditions de contamination chronique deviendront moins radiosensibles. Cette adaptation de la population sera accompagnée de la disparition des génotypes sensibles et de l’appauvrissement du patrimoine génétique.

[…]

Le matériel présenté dans cette partie montre qu’il est dangereux et imprévoyant de considérer la zone de Tchernobyl comme une réserve naturelle dans laquelle les végétaux et les animaux  vivent et se développent en bonne forme. En réalité, il s’agit d’une poche micro évolutive, qui transforme activement les patrimoines génétiques (avec des conséquences imprévisibles), mais d’un autre côté c’est un trou noir qui attire les gros animaux, qui s’y égarent insensibles au danger d’une dégénération génétique.

Pour une plus profonde compréhension des processus en cours dans la zone de Tchernobyl, les recherches biologiques ne doivent pas se réduire et s’interrompre (comme on le voit partout en Biélorussie, en Ukraine et en Russie), mais s’amplifier et s’intensifier, ne serait-ce que pour éviter une évolution imprévue et dangereuse des évènements.

IVe PARTIE. LA RADIOPROTECTION DES HABITANTS DES TERRITOIRES CONTAMINES

Traduction de Lisa Mouravieff

La consommation de produits alimentaires locaux fait que 90% de la dose radioactive accumulée par la population est due au césium-137. Il est très important de souligner que dans une famille dont tous les membres se nourrissent de la même façon, les charges radioactives accumulées par les enfants sont de 3 à 5 fois plus élevées que celles acquises par les adultes. Le césium-137, de même que le strontium 90, est soluble dans l’eau, ce qui lui permet de s’introduire aisément dans la chaîne alimentaire de l’homme. Compte tenu de la longueur de sa demi-vie (près de 30 ans), les territoires contaminés par le césium-137  resteront radiologiquement dangereux pendant encore près de trois siècles.

Pendant tout le temps que le césium-137 se trouve dans la couche végétale du sol, tout ce qui y pousse – les produits agricoles comme les dons de la forêt – sera contaminé. Selon nos évaluations faites 20 ans après la Catastrophe, le césium 137 se trouvera encore pendant les 30-40 années à venir dans la couche végétale et continuera à contaminer activement les produits alimentaires locaux. Plus de 5 millions de personnes en Biélorussie, Ukraine et Russie vivent toujours dans les territoires contaminés et ont besoin d’être protégés de la radioactivité.

Chapitre 13. SUIVI RADIOLOGIQUE DANS LES TERRITOIRES CONTAMINES

Quelles que soient les sommes allouées par l’Etat aux besoins de la radioprotection des populations (par ex. près de 300 millions de dollars ont été alloués en 2006 aux grosses exploitations agricoles de Biélorussie pour y effectuer des mesures de protection agrochimiques permettant de diminuer sensiblement le taux de contamination des produits agricoles), aucun Etat n’est en mesure de garantir l’entière sécurité radiologique des populations vivant sur des sols contaminés et s’alimentant des produits de leurs lopins de terre individuels, de la forêt environnante, des produits de la chasse et de la pêche contaminés par les radionucléides.

Dans cette situation il est impossible de surestimer l’importance du suivi radiologique des produits alimentaires locaux ni du fait d’informer les habitants du taux de contamination par les radionucléides des produits qu’ils consomment : les habitants peuvent ainsi participer activement eux-mêmes à l’organisation et à la mise en oeuvre de leur propre protection radiologique.

Ces questions sont examinées plus en détails ci-dessous sur l’exemple de la Biélorussie.

13.1. Suivi radiologique des produits alimentaires

1. Pour effectuer le suivi radiologique des produits alimentaires du secteur privé, à la fin de 1993 l’Institut de radioprotection « Belrad » (Institut Belrad) avec le soutien de Komtchernobyl (Comité d’Etat de Biélorussie chargé des problèmes dus à Tchernobyl) a créé dans les territoires contaminés 370 centres locaux de contrôle radiologique des produits alimentaires (CLCR).

2. L’Institut Belrad possède à ce jour une base de données de la contamination des produits alimentaires qui comporte plus de 340 000 mesures dont près de 111 000 mesures d’échantillons de lait.

3. Selon les données de l’Institut Belrad jusqu’à 15% du lait des économies auxiliaires privées de trois régions administratives sont contaminés à des taux supérieurs aux normes acceptables et jusqu’à 80% des autres produits alimentaires et des produits de la forêt dénotent des niveaux dangereux de contamination par le césium 137. (Annexe 4, tab.1).

4. En avril 1999 de nouvelles normes républicaines plus sévères ont été établies en Biélorussie pour les niveaux acceptables de teneur en radionucléides des produits alimentaires  et  de l’eau (RDU-99). Le tableau 13.1 présente la dynamique de la part de produits dépassant la norme d’admissibilité radiologique d’une année à l’autre de 1993 à 2006.

Tableau 13.1

]Dynamique de la part (%) des produits alimentaires des régions de Gomel, Moguilev et Brest dont la teneur en césium-137 est supérieure  aux normes admissibles au cours de la période 1993-2006 (données de l’Institut « Belrad »)

 

Région 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005

2006

Gomel 12,7 11,5 8,0* 11,1 10,2 13,9 11,5 13,9 16,2 13,3 19,3 20,5 14,1 15,4
Moguilev 6,7 11,7 3,3 4,6 4,1 4,2 6,2 4,4 4,8 4,7 4,2 6,5 15,2

-

Brest 15,0 15,0 17, 16,0 12,8 15,1 16,1 19,4 18,1 17,8 21,0 17,3 11,0 15,0

13.2. Suivi de la concentration de radionucléides dans l’organisme humain

[1. – 5.]

[…]

3. On observe une forte corrélation entre le niveau de contamination des produits alimentaires locaux et la concentration de radionucléides incorporés chez les enfants (Fig.13.1 et fig. 13.2.) Le tracé des lignes brisées sur ces figures reflète le caractère saisonnier (dans les limites d’une année) de la consommation d’aliments contaminés par le césium 137 et, par conséquent, de la concentration de ce radionucléide dans l’organisme des enfants.  En règle générale la consommation de produits fortement contaminés comme les champignons, les baies, le gibier, augmente dans les 3e et 4e trimestre de l’année, ce qui cause une augmentation de l’activité spécifique moyenne du césium 137 dans l’organisme des enfants. L’augmentation de la teneur en césium 137 pendant les mois d’hiver est causée par la consommation de champignons et de baies contaminés conservés pour l’hiver ainsi que de lait contaminé par les fourrages à forte teneur en césium 137 stockés pour l’hiver.

4. Les mesures faites à partir de 1995 à aujourd’hui par l’Institut Belrad du degré de contamination de l’organisme de 300 000 enfants montrent que chez 70 à 90% des enfants vivant dans les territoires fortement contaminés de Biélorussie, les taux d’accumulation du césium 137 sont supérieurs à 15-20 Bq/kg (0,1 mSv/an). Dans de nombreux villages les taux d’accumulation de césium 137 dans le corps des enfants atteignent 200-400 Bq/kg, chez certains enfants des régions de Gomel et de Brest ces taux s’élèvent jusqu’à 1500-2000 Bq/kg.

5. Des niveaux maxima d’accumulation de césium 137 ont été observés chez de nombreux enfants de la région de Narovlia (6700 à 7300 Bq/kg). Dans plusieurs villages de cette région de 10 à 33% des enfants ont des charges de dose supérieures à 1 mSv/an.

Tous ceux qui vivent dans des territoires contaminés par les retombées radioactives, dues à la Catastrophe, sont exposés à une irradiation chronique de faible dose. L’homme ne dispose pas d’organes de sens capables de capter le rayonnement ionisant. Sans appareils spéciaux, il est donc impossible de définir le niveau dangereux de contamination de l’environnement, des produits alimentaires ou de l’eau. Voilà pourquoi il est indispensable d’organiser dans tous les territoires contaminés par la Catastrophe un suivi radiologique permanent des aliments et du taux de radionucléides incorporés par les habitants afin d’assurer aux populations un maximum de sécurité radiologique et un minimum de risques de contamination.

L’analyse des mesures faites au moyen des spectromètres de rayonnement humain (SRH) et du suivi radiologique des aliments de production locale dans certaines localités de Biélorussie permet d’affirmer  qu’il existe une forte corrélation entre la contamination des aliments par césium 137 et le degré d’accumulation de radionucléides dans l’organisme des habitants (en premier lieu – des enfants).

Dans la IIe partie on trouve de nombreux exemples de la corrélation entre la densité de la contamination du territoire par les radionucléides et le niveau d’accumulation de radionucléides dans l’organisme. Les recherches réalisées en Biélorussie et en Ukraine ont montré que pour des niveaux d’accumulation de césium 137 de 50 Bq/kg et plus (ce qui est typique des régions contaminées à 37.555 kBq/m2), la morbidité de tous genres et la mortalité croissent et le nombre d’enfants en bonne santé diminue (Résolution… 2006).

Tout cela permet d’affirmer que si les habitants des territoires contaminés par Tchernobyl sont malades, ce n’est pas à cause de stress ni de radiophobie, comme veulent nous le faire croire les experts de l’AIEA et de l’OMS qui ont rédigé le rapport du « Forum de Tchernobyl » (2005), mais bien à cause de l’action chronique de faibles doses de rayonnement ionisant provenant en premier lieu de la consommation d’aliments contaminés par des radionucléides.

La pratique a démontré que les systèmes de suivi radiologique gouvernementaux actuels ne sont pas suffisants car ils ne fonctionnent que ponctuellement dans les territoires et ne concernent pas tout le monde. On comprend que les organes du pouvoir veuillent dépenser le moins possible mais cela ne contribue pas à donner un tableau exhaustif et objectif de la contamination radioactive des localités, de leurs habitants et des aliments que ceux-ci consomment. Il est indispensable de mettre en place un système de suivi indépendant qui – sans se substituer au système gouvernemental! – assurerait le contrôle radiologique des produits alimentaires partout, jusqu’aux plus petits villages, dans chaque famille, et un suivi de l’accumulation de radionucléides dans l’organisme de chacun des habitants de ces territoires.

 Chapitre 14. EXPÉRIMENTATION DE L’EMPLOI

D’ENTÉROABSORBANTS POUR L’ÉLIMINATION

DES RADIONUCLÉIDES DE L’ORGANISME

Traduction de W. Tchertkoff

Une teneur élevée des principaux aliments de production locale en césium-137 dans les territoires contaminés (cf. ch.13) comporte le danger de l’accumulation d’une quantité dangereuse de radionucléides dans l’organisme humain, principalement chez les enfants. Cette accumulation des radionucléides constitue la cause principale de l’aggravation de la santé des enfants dans les territoires contaminés (dont beaucoup d’exemples sont présentés dans la IIe partie). Ici ce problème est examiné sur la base de l’expérience obtenue au Bélarus. Comme cela a été montré par Y. I. Bandajevsky et al., à partir de 50 Bq/kg d’accumulation du césium-137 dans l’organisme de l’enfant des altérations pathologiques peuvent apparaître dans les systèmes vitaux (cardio-vasculaire, nerveux, endocrinien, immunitaire), dans les reins, foie, yeux et autres organes, la production de l’immunoglobuline est altérée dans l’organisme.

14.1. Emploi des entéroabsorbants à base de pectine. [1. – 12.]

Les études scientifiques effectuée dans le Centre de médecine radiologique d’Ukraine (Porokhniak-Ganovskaya, 1998) et dans l’Institut de médecine et d’endocrinologie du ministère cde la Santé du Bélarus (Gres et al., 1997), sont arrivées à la conclusion, que l’introduction plusieurs fois par an de produits vitaminés à base de pectine dans  la ration alimentaire des habitants des régions de Tchernobyl favorise une élimination efficace des radionucléides incorporés du corps humain.

[…]

12. L’expérience décennale de mesures complexes de protection pour la diminution du risque radiologique individuel chez les enfants dans les territoires contaminés a montré :

- que la prise par plus de 100 000 enfants de produits à base de pectine (dans le cadre du contrôle des niveaux d’accumulation du césium-137 dans l’organisme de plus de 300 000 enfants), a favorisé la diminution des niveaux d’accumulation du césium-137 dans l’organisme des enfants d’un facteur 3-5 dans les villages contaminés par la radioactivité, où la prophylaxie à base de pectine était effectuée 3-4 fois par an ;

- que cela n’a pas provoqué d’inquiétude dans la population ni d’apparition de radiophobie, mais a provoqué la diffusion des connaissances dans le domaine de la radioprotection et a élevé la responsabilité personnelle devant sa propre santé (contribuant en cela à la diminution de la radiophobie).

 14.2. Où l’aide internationale à la population enfantine souffrante des conséquences de la catastrophe serait-elle  particulièrement efficace ?

 L’expérience acquise au cours de nombreuses années de travaux de grande envergure du suivi des produits alimentaires et du suivi de la teneur en radionucléides des organismes humains dans les territoires contaminés suite à la catastrophe de Tchernobyl permet de formuler les propositions suivantes afin d’accroître l’efficacité des programmes d’aide internationaux et nationaux :

1. Organiser des recherches communes pour déterminer la corrélation de la fréquence et de la gravité des différentes maladies  (surtout chez les enfants) avec le niveau des radionucléides incorporés.

2. Embrasser en premier lieu l’ensemble de la population enfantine par un examen radiamétrique systématique (en utilisant les laboratoires mobiles SRH – spectromètres pour rayonnement humain) dans tous les territoires touchés. Au Bélarus il est indispensable d’augmenter pour cela le nombre de laboratoires mobiles (8) jusqu’à 12-15 unités ; créer dans les territoires d’Ukraine et de Russie des systèmes de centres scientifiques pratiques analogues à ceux du Bélarus. A partir des résultats du suivi radiométrique identifier régulièrement les groupes critiques ayant de fortes charges radioactives par radionucléides incorporés

3. Augmenter la production et l’emploi de différents additifs alimentaires et boissons contenant des pectines ( de pommes, cassis, raisin, algues marines etc.) comme l’un des moyens les plus efficaces de radioprotection individuelle ciblée des victimes de la Catastrophe ;

4. Réaliser un grand projet de radioprotection (sur une population de 300-600 villages), en utilisant des produits à base de pectine afin de faire connaître l’expérience acquise d’élimination des radionucléides incorporés de l’organisme des enfants au moyen de produits à base de pectine, et faire connaître parallèlement le suivi individuel de la dynamique des radionucléides incorporés dans l’organisme au moyen des SRH.

5. Élargir le système public de suivi radiologique et de contrôle public des denrées alimentaires de production locale, en utilisant l’expérience de l’organisation des centres locaux de contrôle radiologique (CLCR). Ils ne remplacent pas, mais complètent les systèmes gouvernementaux de contrôle radiologique des produits alimentaires (dans les centres de quartier et dans les entreprises d’Etat) et peuvent être utilisés comme points efficaces  d’éducation et d’instruction radiologique.

6. Introduire dans la ration alimentaire des enfants des territoires contaminés une cure de prophylaxie de trois semaines à base de pectine.

 Chapitre 15. MESURES DE PROTECTION EN AGRICULTURE

ET EN EXPLOITATION FORESTIÈRE DANS LES TERRITOIRES CONTAMINÉS PAR LES RADIONUCLÉIDES

 Suite à la catastrophe de Tchernobyl des millions d’hectares de terres agricoles ont subi la contamination radioactive à des niveaux supérieurs à 37kBq/m2 dans une série de pays, mais plus qu’ailleurs au Bélarus (près de 20% de leur superficie totale), en Ukraine et en Russie. Des millions d’hectare de forêts (au Bélarus plus de 22% de toutes les forêts) ont été dangereusement contaminés. Actuellement, plus de 5 000 000 de personnes vivent dans ces territoires. Nous examinerons la manière de rendre leur vie sûre en considérant l’exemple du Bélarus, dont le territoire est le plus touché par la catastrophe.

15.1. Mesures de protection en agriculture [1. – 5.]

[…]

Malgré toutes les mesures adoptées, l’expérience montre qu’il est difficile et économiquement coûteux d’obtenir une production constante et efficace de denrées alimentaires sûres dans les territoires contaminés. La solution adéquate pour les territoires contaminés serait le passage de la production alimentaire à une production non alimentaire.

 15.2. Expériences des mesures de protection dans l’exploitation forestière

[1. – 4.]

[…]En pénétrant, suite à la migration naturelle, dans les parties du sol où plongent les racines, les radionucléides deviennent actuellement de plus en plus accessibles pour les végétaux, qui les reportent pour la deuxième fois à la surface. Ici, d’une façon ou d’une autre, ils entrent dans la chaîne alimentaire des habitants, en augmentant pendant un temps prévisible la dangerosité radiologique d’habiter dans les territoires contaminés et de consommer des produits alimentaires de production locale.

Depuis 1994-1995, on observe dans les territoires contaminés une augmentation de la charge radiologique dans la population (à cause de l’augmentation de la contamination interne – la plus dangereuse – par les radionucléides incorporés). Cette augmentation a lieu nonobstant la diminution par désintégration naturelle de l’activité des radionucléides rejetés. C’est l’une des causes principales de l’expansion et de l’aggravation (et non de  la diminution) de la morbidité  et de la mortalité tchernobylienne dans les territoires contaminés (cf. IIe prtie).

Conclusion de la PARTIE IV.

 Des dizaines de tonnes de radionucléides de Tchernobyl, éjectés par le réacteur explosé (leur radioactivité surpasse plusieurs centaines de fois les rejets des bombes atomiques qui ont détruit Hiroshima et Nagasaki), sont tombées, au cours du lointain printemps et de l’été 1986, sur les territoires où vivaient des centaines de millions de personnes qui n’avaient rien à voir avec la dangereuse industrie atomique.

La vie normale de dizaines de millions de personnes a été perturbée. Des millions de personnes innocentes ont déjà payé de leur santé les erreurs des nucléaristes. Mais pour plus de six millions de personnes, qui habitent encore aujourd’hui dans les territoires dangereusement contaminés (et qui le seront encore pendant de nombreuses dizaines d’années), se pose quotidiennement le problème : comment continuer à vivre ?

Dans les territoires contaminés par les dépôts de Tchernobyl il est dangereux de s’occuper d’agriculture, il est dangereux de cultiver les forêts, dangereux de pêcher le poisson et de chasser le gibier, il est dangereux de consommer les denrées produites localement sans contrôler leur radioactivité, dangereux de boire le lait et même l’eau. A ceux qui vivent dans ces territoires (ou qui y ont vécu, ou qui se sont trouvés parmi les liquidateurs) la question se pose de comment éviter la tragédie de la naissance d’un fils ou d’une fille  avec de graves affections héréditaires provoquées par l’irradiation ?

Dans le même temps, un ensemble de mesures ont été élaborées pour minimiser substantiellement les risques de séjour dans les territoires contaminés et d’y exploiter les champs et les forêts.

Ces mesures touchent à l’organisation de la protection radiologique individuelle, au soutien de la production agricole non contaminée et aux moyens d’exercer sans danger une activité artisanale et forestière.

Le rôle dirigeant dans la réalisation de ces mesures est assumé par les programmes gouvernementaux d’aide aux territoires et aux populations touchées. Mais le problème ne sera pas résolu par les seuls programmes gouvernementaux, compte tenu surtout de la tendance de l’État à minimiser les dépenses « tchernobyliennes ». Pour faciliter la vie dans les territoires touchés, un travail énorme, tant d’instruction que d’organisation, est nécessaire pour la mise au point du suivi radiologique de la teneur de l’organisme de chaque personne en radionucléides incorporés, pour la mise en place du suivi radiologique de tous les produits alimentaires sans exception, pour l’élaboration de programmes ciblés de la diminution individuelle de la quantité des radionucléides incorporés, pour la détermination des doses accumulées par des méthodes instrumentales objectives et pour la consultation médicale et génétique des victimes (y compris les personnes irradiées souhaitant avoir des enfants).

Vingt ans après la Catastrophe, il se trouve qu’en raison de la migration naturelle des radionucléides, le danger radiologique dans ces territoires ne diminue pas mais augmente, et cette augmentation continuera  pendant de nombreuses années. Cela signifie qu’une forte augmentation des dépenses – tant nationales qu’internationales, gouvernementales et de bienfaisance privée – est nécessaire (ainsi qu’un accroissement de l’efficacité de l’utilisation des fonds alloués !) dans les programmes d’aide aux territoires et aux personnes touchés.

LEÇONS GÉNÉRALES ET CONCLUSION

 Par ses dimensions et ses conséquences l’explosion du 4ème bloc de la centrale d’énergie atomique de Tchernobyl constitue la plus grande catastrophe technologique de l’histoire.

1. Dimension de la contamination par la Catastrophe. [1.1. – 1.4.]

1.3. Les déclarations des spécialistes de l’AIEA, de l’UNSCEAR et d’autres organismes liés à l’industrie atomique du fait que la contamination de Tchernobyl n’ajoute que 2% au fond de la radioactivité naturelle surfacique de la Terre, dissimulent le fait que cette contamination était dangereusement élevée dans les territoires touchés. Même si actuellement la densité de la contamination n’est pas élevée, l’énorme contamination au cours des premières semaines de la Catastrophe, ainsi que la faible contamination chronique qui continue depuis des décennies, a exercé et exercera encore pendant des dizaines d’années une influence considérable sur la santé des habitants et de la nature.

1.4. Il n’y a pas d’explication scientifique à la politique de l’AIEA et de l’OMS (exprimée dans la relation du « Forum de Tchernobyl », 2005), qui ne prend pas en considération les données des conséquences de la contamination des territoires autres que le Bélarus, l’Ukraine et la Russie européenne : Eurasie, Amérique du Nord et Afrique, où une grande partie des radionucléides de Tchernobyl s’est déposée.

2. Difficultés d’analyse des données des conséquences de la Catastrophe

(cf. partie 3.1)

2.1. Parmi les causes qui rendent difficile l’évaluation de l’influence de la catastrophe de Tchernobyl sur la santé de la population il y a :

- le caractère secret et la falsification officielle définitive des données statistiques médicales en URSS pendant les premières années de la Catastrophe ; l’absence en Union Soviétique (Ukraine, Bélarus et Russie) de statistiques médicales détaillées et fiables.

- la difficulté de déterminer la charge radioactive réelle de chaque individu en raison de la nécessité de reconstruire les doses individuelles des premiers jours, semaines et mois de la Catastrophe, de l’influence des « particules chaudes », de l’influence du caractère tacheté des retombées (taches de léopard), de l’influence de tous les radionucléides etc.

- l’insuffisance des connaissances actuelles de la spécificité de l’action même des principaux radionucléides pourvoyeurs de doses dans leur combinaison avec d’autres facteurs de l’environnement ; de la variabilité de la radiosensibilité collective et individuelle ; de l’influence des doses ultra faibles et de la puissance des doses ; de l’influence de l’irradiation interne (incorporée).

Aussi l’exigence avancée par les spécialistes de l’AIEA et de l’OMS de la nécessité d’une « corrélation certaine » entre la charge radioactive d’une personne concrète (et conséquemment d’un groupe d’habitants) jamais déterminable avec précision, et l’atteinte à la santé saisissable avec beaucoup plus de précision (fréquence de telle ou telle maladie), pour qu’il y ait démonstration évidente du lien de la maladie avec l’irradiation de Tchernobyl, est-elle peu fondée scientifiquement.

2.2. Il n’est pas correct de rejeter les données obtenues par des médecins praticiens et par des spécialistes, au cours d’examens de centaines de milliers de victimes des retombées radioactives dans les territoires du Bélarus, d’Ukraine et de Russie, parce que « non correspondantes aux protocoles scientifiques ». Il faut extraire une information scientifique objective de ces données.

2.3. L’information scientifique objective sur l’influence de la catastrophe sur la santé des habitants peut être obtenue par différentes voies, parmi lesquelles :

- la comparaison de la morbidité et de la mortalité dans les territoires identiques du point de vue des conditions physiques, géographiques et socioéconomiques, et ne se distinguant que par le niveau et la composition de la contamination radiologique (de même, comparaison des mêmes groupes dans des périodes différentes après la Catastrophe) ;

- démonstration d’une corrélation entre des altérations pathologiques d’organes concrets ou de parties du corps et des niveaux déterminés de radionucléides concrets incorporés dans ces organes ou parties du corps, au moyen d’instruments de mesure.

2.4. Pour une prise en compte objective des conséquences  de la Catastrophe il est indispensable de considérer aussi l’état de santé d’environ 830 000 liquidateurs, ainsi que de quelques centaines de milliers d’évacués et partis de leur propre chef des territoires contaminés du Bélarus, d’Ukraine et de Russie (et de leurs enfants), qui vivent hors de ces territoires, y compris dans beaucoup d’autres pays du monde.

2.5. Il est nécessaire d’identifier les territoires d’Asie (en particulier en Chine, en Transcaucasie, en Iran et dans les parties asiatiques de Russie et de Turquie), de l’Afrique du Nord et de l’Amérique du Nord, qui ont reçu les radionucléides de Tchernobyl en avril juin 1986, et analyser les statistiques médicales et autres matériaux capables de révéler l’influence des retombées des  radionucléides sur la santé humaine et sur la nature dans ces régions.

3. Conséquences connues de la Catastrophe pour la santé des populations.

(voir ch. 4 à 7)

[3.1. – 3.9.]

3.8. Les spécialistes liés avec l’industrie atomique affirment que l’augmentation de la morbidité dans les territoires de Tchernobyl est causée non par l’irradiation, mais par des facteurs socioéconomiques et psychologiques. Les facteurs socioéconomiques ne peuvent pas constituer la cause principale, car les groupes comparés sont identiques du point de vue de la condition socioéconomique,  des caractéristiques physiques et géographiques de leur lieu de résidence et de l’âge et du sexe, et ne se distinguent que par le niveau de la charge radiologique. La radiophobie non plus ne peut pas être une cause déterminante parce que la morbidité augmente partout, plusieurs années après la catastrophe, alors que la radiophobie diminue avec le temps.

3.9. L’aggravation de la santé de la population (surtout des enfants) partout dans les territoires contaminés par les radionucléides de Tchernobyl, 20 ans après la Catastrophe, permet d’affirmer que les personnes ne sont pas malades à cause du stress psychologique, de la radiophobie, du changement de résidence, mais à cause de l’influence de l’irradiation ionisante supplémentaire, – de la première terrible blessure radiologique (en particulier du « choc d’iode ») en 1986, comme à cause de l’action chronique des faibles doses de radioactivité.

4. Probable nombre total des victimes de la catastrophe [4.1. – 4.6.]

4.1. Les premières prévisions officielles des conséquences de la Catastrophe pour la santé ne parlaient que de quelques cas supplémentaires de cancers, au bout de quelques dizaines d’années.

4.2. Vingt ans après, l’AIEA et l’OMS ont déclaré dans le rapport du « Forum de Tchernobyl » (2005), que le nombre de morts et de ceux qui mourront à cause des maladies provoquées par la Catastrophe constituera environ 9 000, et que le nombre de malades  s’élèvera jusqu’à 200 000 personnes (ce qui statistiquement est peu perceptible sur le fond de la mort de beaucoup de millions et des maladies de centaines de millions).

4.3. L’analyse des indicateurs démographiques montre qu’aussitôt après la Catastrophe l’espérance de vie en URSS a sensiblement baissé et la mortalité néonatale et des âges adultes a commencé à croître.

4.4. La comparaison statistique entre les territoires contaminés de Tchernobyl et les territoires voisins a montré une augmentation de 3,75% de la mortalité totale dans les territoires contaminés par la radioactivité du Bélarus, d’Ukraine et de la Russie européenne, au cours des 15 premières années après la Catastrophe.

4.5. D’après les calculs, basés sur l’analyse détaillée des statistiques démographiques officielles, la mortalité « tchernobylienne » supplémentaire dans les territoires contaminés du Bélarus, d’Ukraine et de la Russie européenne a représenté 237 000, au cours des 15 premières années après la Catastrophe. On peut supposer que la mortalité « tchernobylienne » totale pendant la période 1987-2004 a atteint 417 000 dans le reste de l’Europe, 170 000 en Asie, Afrique et Amérique du Nord, et près de 823 000 personnes dans le monde entier.

4.6. Le nombre des victimes de Tchernobyl augmentera au cours de plusieurs générations.

5. Conséquences de la Catastrophe  pour la nature [5.1. – 5.14.]

6. Problèmes socioéconomiques de la minimisation des conséquences de la catastrophe [6.1. – 6.12.]

6.1. Actuellement, les habitants des régions biélorusses, ukrainiennes et russes de Tchernobyl reçoivent 90% de la charge de dose à travers les aliments de production locale contaminés par la radioactivité. C’est pourquoi des mesures didactiques et prophylactiques sont nécessaires pour prévenir la contamination interne par radionucléides et pour accélérer l’évacuation des radionucléides de l’organisme des habitants de ces régions, qui les consomment avec les produits alimentaires contaminés.

6.2. Les mesures adoptées pour la production massive des denrées alimentaires propres et pour l’amélioration de la santé des habitants (comme l’introduction de fertilisants minéraux supplémentaires, l’adoption de programmes spéciaux pour la nourriture du bétail agricole, l’adoption de nouveaux procédés et techniques agricoles, qui permettent d’abaisser le niveau  d’accumulation des radionucléides de Tchernobyl dans les produits alimentaires, l’organisation de l’alimentation quotidienne dépourvue de radionucléides pour les enfants dans les écoles et dans les jardins d’enfants, les programmes spéciaux pour les cures et la convalescence des enfants avec des départs périodiques des régions contaminées), se révèlent insuffisamment efficaces dans les régions dont les produits des exploitations individuelles, les produits de la nature, les poissons et le gibier locaux tiennent le rôle principal dans l’alimentation.1

6.3. Il est nécessaire d’élaborer et d’améliorer constamment des mesures pour la diminution de l’accumulation du césium-137 dans l’organisme des habitants des territoires contaminés, jusqu’à un niveau relativement sûr. D’après les données existantes relatives à l’action des radionucléides incorporés sur la santé, ce niveau est de l’ordre de 30-50 Bq/kg pour les enfants et de 70-75 Bq/kg pour les adultes.

6.4. Des mesures efficaces de protection pour la diminution de la teneur en radionucléides incorporés doivent commencer à partir du niveau d’accumulation  du césium-137 de 25-28 Bq/kg dans l’organisme (ce qui correspond à la charge de dose de 0,1 mSv/an).

6.5. Compte tenu de la spécificité familiale et locale de la consommation des produits alimentaires, ainsi que de la variabilité écologique de l’accumulation des radionucléides (coefficients de migration), il est indispensable, à part l’abaissement général des niveaux admissibles de contamination des produits alimentaires, d’effectuer un suivi radiologique permanent des denrées alimentaires de production locale, ainsi que de l’accumulation individuelle des radionucléides dans l’organisme des habitants et, avant tout, des enfants.

6.6. Afin d’abaisser jusqu’à 1 mSv/an la charge de dose du groupe critique le plus irradié de chaque village dans les territoires contaminés du Bélarus, d’Ukraine et de Russie par les radionucléides de Tchernobyl, il est opportun, entre autres :

- d’introduire, au moins tous les trois ans, des fertilisants minéraux dans tous les terrains agricoles, y compris les potagers individuels,2 ainsi que dans les pâturages et les terrains de fenaisons ;

- d’introduire du potassium et de la lignine dans les écosystèmes forestiers dans un rayon de 10 km autour des villages, pour diminuer la contamination par le césium-137 des produits de la nature (champignons et baies), qui constituent une importante composante de l’alimentation des habitants ;

- d’assurer la prise individuelle d’entéroabsorbants à base de pectine naturelle (de pommes, de cassis etc.), au cours de cures mensuelles 4 fois par an, ainsi que des boissons contenant de la pectine, dans la ration alimentaire quotidienne des enfants dans les maternelles et dans les écoles pour l’élimination des radionucléides de l’organisme ;

- pour diminuer la pénétration des radionucléides dans l’organisme humain avec la viande, les champignons, les poissons et les légumes il est important d’observer une série de mesures prophylactiques en utilisant ces produits (macérer les produits, écrémer le lait) ;

- pour diminuer le niveau des radionucléides dans les produits de l’élevage, il est rationnel d’utiliser des entéroabsorbants (ferrocyanides - ?- et al.) en élevant le bétail agricole.

6.7. Pour la prophylaxie et une plus grande efficacité des mesures de rétablissement il est opportun, entre autres :

- d’organiser chaque année dans les régions contaminées (pour les enfants, chaque trimestre)  la détermination individuelle générale du niveau réel d’accumulation des radionucléides dans l’organisme (au moyen du SRH – spectromètre pour rayonnements humains) :

- de reconstruire rétrospectivement pour toutes les victimes (y compris les liquidateurs, les personnes évacuées et ceux qui ont quitté de leur propre chef les régions contaminées) le niveau d’irradiation pendant la première période après la Catastrophe (en utilisant la résonance électroparamagnétique de dosimétrie et la détermination du niveau des aberrations chromosomiques) ;

- de garantir la consultation médicale génétique obligatoire pour les résidents en permanence dans les territoires contaminés qui se marient (et volontaire, pour tous les citoyens en âge d’avoir des enfants, qui le voudront) concernant le risque de graves malformations congénitales chez la future descendance ;

- embrasser tous les territoires contaminés du Bélarus, d’Ukraine et de Russie par un diagnostic prénatal des graves malformations congénitales et soutenir les programmes d’avortements médicaux ;

- à la fin de la période de latence de 20 ans de la plupart des cancers, multiplier les programmes de suivi oncologique et de check-up pour les habitants des régions contaminées.

6.8. La catastrophe de Tchernobyl a montré qu’en cas d’une catastrophe à un centrale d’énergie atomique il est impossible de garantir la sécurité de la population par les ressources nationales du pays : le dommage économique direct pour le Bélarus, l’Ukraine et la Russie a dépassé en 20 ans 500 000 000 000 (milliards) de dollars (pour faire front aux conséquences de la catastrophe le Bélarus dépense chaque année 20% du budget national, l’Ukraine 6%, la Russie près de 1%). Le Bélarus a besoin d’une grande aide internationale au cours des prochains 25-30 ans (tant que les radionucléides n’auront pas quitté  les couches du sol où plongent les racines)  pour le soutien de la santé de la population touchée, et, surtout, pour la protection radiologique des enfants.

6.9. Le fait de ne pas avoir effectué la prophylaxie par le iode stable de tous les habitants des territoires touchés en avril 1986, a conduit à une importante augmentation du nombre de victimes de la Catastrophe.  Une réserve permanente d’iodate de potassium doit être créée dans tous les pays du monde et la prophylaxie d’iode doit être garantie en cas  de nouveaux accidents dans les centrales d’énergie atomique.

6.10. Dans tous les pays, les organisations de la société civile doivent considérer l’importance de la création d’un système de contrôles radiologique des produits alimentaires indépendant du système officiel.

6.11. Dans les territoires qui se trouvent dans « la sphère d’influence » des centrales d’énergie atomique un suivi indépendant de l’industrie atomique de l’accumulation des radionucléides dans l’organisme des habitants, surtout des enfants, est indispensable, ainsi que l’organisation d’un système efficace de radioprotection.

6.12. Il est nécessaire de développer un système de consultations médicales et génétiques pour les personnes désireuses d’avoir une descendance et aspirant de diminuer le risque de mettre au monde une descendance avec de graves anomalies génétiques. Cela concerne en premier lieu :

- les personnes qui résident dans des territoires contaminés par la radioactivité ;

- les personnes irradiées pendant leur enfance et qui ont quitté les territoires contaminés ;

- les liquidateurs ;

- les enfants des personnes appartenant à l’un des groupes énumérés ci-dessus.

Sur la base du caractère et du spectre des mutations, observés dans les cellules du sang périphérique ou de la moelle osseuse des futurs parents, il est possible de déterminer le risque de concevoir un enfant avec de graves altérations génétiques, et éviter de ce fait des tragédies supplémentaires.

7. Les organisations liées à l’industrie atomique la défendent en premier lieu, plutôt que l’être humain. [7.1. – 7.4.]

7.1. Ce n’est que 8-9 après que la chose ait été découverte, que la médecine officielle a commencé à reconnaître le fait de l’augmentation de la fréquence de cas la cataracte « tchernobylienne » partout. Même chose en ce qui concerne le cancer de la glande thyroïde, la leucémie et l’affection du système nerveux central. Cette façon de faire traîner la reconnaissance de l’évidence (et, conséquemment, la prise des décisions nécessaires pour minimiser les conséquences) reste sur la conscience de ceux pour qui les intérêts de l’industrie atomique sont plus importants que l’aide aux millions de victimes innocentes.

7.2. La conclusion générale de ce résumé du catalogue des données des conséquences de la catastrophe de Tchernobyl pour la santé humaine et de l’environnement est que les spécialistes et les organisations liés à l’industrie atomique (en premier lieu l’AIEA et l’UNSCEAR ONU) minimisent et font le silence sur les conséquences de la Catastrophe. L’industrie atomique craint la réaction négative de la société et tend à tirer le rideau sur la Catastrophe, en la déclarant une « étape dépassée » du développement de l’énergie atomique.

7.3. Quand les nucléaristes déclarent, à la 20ème année après la Catastrophe : «aujourd’hui,  la condition principale de la garantie de la sûreté radiologique (notons, garantie de la sûreté radiologique pas dans la branche atomique, mais en général dans le monde – Réd.) n’est plus dans l’abaissement des charges de dose déjà insignifiantes, mais dans la garantie du fonctionnement efficace des entreprises et de la production de l’énergie atomique » (Bol’chov et al., 2006), ils refusent clairement la responsabilité pour le sort de nombreux millions de victimes du développement de l’énergie atomique, et en premier lieu de la catastrophe de Tchernobyl.

7.4. La réponse à la question « comment l’Organisation mondiale de la santé peut-elle faire chorus avec les nucléaristes et garder le silence ? » est dans le fait que l’OMS est liée à l’AIEA par l’accord de ne publier ses travaux qu’après consultation avec les nucléaristes, et qui prévoit la possibilité d’une rétention de l’information !

«… chaque fois que l’une des parties (c. à d. tant l’AIEA que l’OMS – note de A.Y.) se propose d’entreprendre un programme ou une activité dans un domaine qui présente ou peut présenter un intérêt majeur pour l’autre partie, la première consulte la seconde en vue de régler la question d’un commun accord… L’OMS et l’AIEA reconnaissent qu’elles peuvent être appelées à prendre certaines mesures restrictives pour sauvegarder le caractère confidentiel de renseignements qui leur auront été fournis  ».

(ResWHA 12 -40 du 28 mai 1959, p. 1 (3))

7.5. Le désir de dissimuler et de minimiser les conséquences de la Catastrophe coïncide avec la tendance des gouvernements des pays touchés par les retombées radioactives de Tchernobyl de réduire continuellement les dépenses pour  atténuer les conséquences de la Catastrophe.

  8. Vivre après Tchernobyl

8.1 La quantité croissante des données objectives sur les conséquences de la catastrophe de Tchernobyl ne donne pas de raisons d’être optimistes : en l’absence d’importants programmes spéciaux de niveau national et international la morbidité dans les territoires contaminés continuera à augmenter. Du point de vue de la morale humaine, on ne comprend pas comment des spécialistes liés à l’industrie atomique peuvent lancer l’appel « Il est temps d’oublier Tchernobyl ».

8.2. Le comportement de l’AIEA et d’autres organisations liées à l’industrie atomique ne favorise pas la formation d’une politique responsable et efficace pour la minimisation  des conséquences de la Catastrophe et l’aide à ses victimes. Cette politique internationale et nationale doit être fondée sur le principe

 

« Nous ne pouvons pas oublier Tchernobyl, nous devons minimiser les conséquences de cette terrible catastrophe ».

BIBLIOGRAPHIE      59 pages, 698 titres de publications scientifiques


1 Qui est le professeur Iline et d’où vient-il ? Membre de la Commission internationale de protection radiologique (CIPR), scientifique, médecin et radiologue, ex vice-président de l’Académie des sciences médicales de l’URSS, ex directeur de l’Institut de biophysique de l’Académie de médecine, le professeur Leonid Iline présidait le comité de protection radiologique de l’URSS au moment de la catastrophe de Tchernobyl. Il est issu du complexe militaro-industriel qui s’occupe de la production des armes atomiques. Lui et ses collègues médecins, tenus au secret-défense autant que les ingénieurs, les physiciens et les chimistes qui travaillent dans ce complexe, étudient les conséquences des explosions nucléaires et les maladies des personnes qui travaillent dans ces entreprises. Le Prof. Iline, nucléariste en blouse blanche, est un brillant représentant de ce complexe militaro-industriel dans le domaine médical. Il a déconseillé aux gouvernements d’Ukraine et du Bélarus et aux Politburos de leurs partis d’évacuer les enfants les premiers jours de mai. Il a réussi à maintenir jusqu’au début de 1990 un black-out quasi total sur l’étendue et l’intensité exceptionnelles des retombées dans la région de Briansk et sur le maintien in situ des populations exposées. C’est lui qui a dirigé les négociations finales de la délégation de l’URSS à Vienne, pour soumettre les prévisions soviétiques des conséquences de Tchernobyl aux chiffres de l’AIEA, en les divisant par dix. L’OMS, directement concernée par les conséquences prévisibles pour la santé des populations, n’a émis aucune objection à cette façon antiscientifique de décider du sort des victimes. Le 26 avril 1988, quatre jours après la communication de Iline à la conférence de Sydney, qui préparait l’abdication des scientifiques de l’URSS, le premier rapporteur soviétique à Vienne, Valéri Légassov, s’est suicidé à Moscou.

Hormis une brève période de démocratisation au temps de la perestroïka de Gorbatchev, la politique de minimisation et de dissimulation des conséquences de la Carastrophe de Tchernobyl par les ministères de la Santé et par les gouvernements des états post soviétique (Bélarus, Ukraine et Fédération de Russie) n’a pas varié depuis l’écroulement de l’URSS. Dans la continuité des dogmes construits sur la base des premières manipulations, omissions, dissimulations et interprétations fallacieuses des données, les institutions internationales, OMS et AIEA, cautionnent encore aujourd’hui, 22 ans après la catastrophe, les violations du droit à l’alimentation et à la santé par les trois états, et sont les premières responsables du délit de non assistance à populations en danger. La caution que l’OMS fournit du haut de son autorité médicale à cette politique inhumaine, constitue un acte de haute trahison de sa propre constitution. [Note de W. Tchertkoff, journaliste de télévision, traducteur , auteur de « Le crime de Tchernobyl » Éd. Actes Sud 2006.]

 

* La moyenne des données de la région de Gomel peut être minimisée car les données de la contamination très élevée des produits alimentaires du district de Leltchitsy n’arrivent plus à l’Institut « Belrad » depuis 1995 (24 CLCR ont été retirés de la gestion de l’Institut et confiés à la gestion de l’Institut de radiologie de Comtchernobyl).

1 Au Bélarus en 2005-2006, la teneur du lait en césium-137 atteint parfois 1000 Bq/litre, celle des champignons secs 70 000 Bq/kg, et celle de l’organisme des enfants jusqu’à 2500 Bq/kilo du poids du corps.

2 L’introduction de 30 kg de calcium, de 2 kg de potassium et de 1kg de phosphore dans un potager de 100 m2 diminue le passage des radionucléides du sol dans les végétaux d’un facteur 10.

Publié dans:REFLEXIONS PERSONNELLES |on 8 mai, 2012 |Pas de commentaires »
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