PLONGEE DANS LES HÔPITAUX DE GOMA, VILLE MEURTRIE (FRANCE 24)
Plongée dans les hôpitaux de GOMA, ville
meurtrie
Photos des blessés de guerre à Goma, avec l’autorisation de l’hôpital HealAfrica.
Une semaine après la prise de la ville par les rebelles du M23, les blessés continuent d’affluer dans les hôpitaux et les personnels hospitaliers s’inquiètent d’une pénurie de médicaments.
Les petites structures comme l’hôpital provincial du Nord-Kivu (Goma), qui compte une vingtaine de lits, ont été forcées de tourner au ralenti toute la semaine à cause des coupures d’eau et d’électricité. D’autres centres hospitaliers ont pu bénéficier de l’appui d’équipes chirurgicales du CICR.
Sur sa page Facebook, l’hôpital Heal Africa, le principal établissement de Goma (155 lits) a proposé de soigner gratuitement toutes les personnes qui lui seraient transférées. Selon les derniers bilans, 111 blessés de guerre reçoivent actuellement des soins dans cet hôpital, tandis que des médecins parcourent actuellement la ville pour aller à la recherche d’autres victimes.
On estime à 100 000 personnes le nombre de déplacés présents dans la région du Nord et du Sud-Kivu, ou dans des camps du Rwanda et d’Ouganda.
« Nous aurons bientôt épuisé le stock de
médicaments disponibles »
Luc Malemo est chirurgien à l’hôpital Heal Africa.
Nous manquons d’équipements et certains malades ne peuvent pas être soignés. Nous n’avons par ailleurs pas assez de spécialistes en chirurgie thoracique pour soigner ceux qui ont pris des balles dans la poitrine. Il nous faudrait aussi davantage de moniteurs cardio-pulmonaires pour permettre une assistance respiratoire aux blessés ainsi que des fixateurs externes afin d’opérer les fractures ouvertes. Mais la priorité absolue, c’est d’avoir des ambulances médicalisées pour permettre d’acheminer les malades vers de plus grandes structures notamment au Rwanda.
À cause de la coupure d’électricité, nous avons dû utiliser des générateurs et nous avons traité en priorité les cas qui avaient besoin de machines pour survivre. Pour le moment, nous déplorons trois décès. La plupart des patients sont des blessés par balle, essentiellement à la tête ou aux jambes.
»Si on doit évacuer un patient vers un autre
hôpital, celui-ci a plus de chance de mourir que
de survivre »
Nous avons eu des promesses de médicaments de la part de l’UNC et MSFmais nous ne savons pas du tout quand cela doit arriver. D’ici le milieu de la semaine, nous aurons épuisé les ressources que nous avons.
L’hôpital est neutre, nous accueillons tout le monde, quelles que soient l’opinion politique ou la nationalité. Nous n’avons pas rencontré les rebelles du M23 pour parler des conditions d’évacuation des blessés. Mais dans le contexte actuel, si on doit transférer un patient vers un autre hôpital, celui-ci a plus de chance de mourir que de survivre.
« Le M23 ne contrôle pas les livraisons de
médicaments et ne s’occupe pas de la situation
des blessés civils »
Patrick (pseudonyme) est médecin à l’hôpital public provincial du Nord-Kivu.
Les militaires du M23 ne s’occupent pas de la situation des blessés civils. Tout ce qui les intéresse, c’est de venir récupérer les soldats et les policiers qui arrivent chez nous pour les emmener dans l’hôpital militaire de Katindo, où ils sont « formés ».
Notre hôpital est débordé : pendant les six premiers jours après la prise de Goma, notre directeur avait disparu. Il était retranché chez lui, pour protéger sa famille. Nous n’étions que deux médecins, quelques infirmiers et trois stagiaires pour nous occuper de plus de vingt personnes. Vu la situation, on était vraiment en sous-effectif.
« Le directeur de l’hôpital a disparu pendant six
jours »
On a surtout des blessures par balle, mais aussi neuf enfants qui ont été piétinés lors de la fuite du camp de Kanyaruchinya et qui ont de multiples fractures. Depuis que l’électricité est revenue dimanche, et que nous avons de l’eau, la situation des patients s’améliore un peu. Mais en une semaine, nous avons reçu qu’une seule livraison de médicaments. Ce n’est pas assez.
Ce billet a été rédigé avec la collaboration d’Alexandre Capron (@alexcapron), journaliste à FRANCE 24.
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