HOLLANDE A PRESENTE SA FEUILLE DE ROUTE POUR L’ECOLE+ BONUS: L’INTERVENTION IN EXTENSO DE F.HOLLANDE
Hollande a présenté sa feuille de route pour l’école
PARIS (Sipa) — François Hollande, présentant mardi 9 octobre 2012 les grandes orientations de son projet pour l’école, a tranché pour un retour à la semaine à 4,5 jours, une réforme « engagée dès la rentrée 2013″, et s’est prononcé en faveur de la disparition progressive des redoublements et des devoirs à la maison.
Dans un discours prononcé à la Sorbonne après la présentation officielle du rapport sur la refondation de l’école, le chef de l’Etat a réaffirmé son voeu de « donner la priorité au primaire » et de « sanctuariser » durant le quinquennat le budget de l’éducation.
Parmi les arbitrages les plus attendus, M. Hollande a tranché la question des rythmes scolaires en annonçant le retour de la semaine de 4,5 jours à l’école, une réforme qu’il souhaite « engagée dès la rentrée 2013″.
« Je suis favorable au retour à une semaine de neuf demi-journées. Nous ne pouvons pas nous plaindre de la baisse de nos résultats et ne pas voir que 144 jours de classe par an, alors que nos partenaires européens sont à plus de 180, c’est un handicap », a souligné le chef de l’Etat, réitérant ainsi un souhait déjà formulé durant la campagne présidentielle.
Toutefois, le raccourcissement des journées de classes, la fixation de la matinée supplémentaire au mercredi ou l’allongement éventuel de l’année scolaire, tels que l’a préconisé le rapport issus de la concertation, n’ont pas été tranchés par François Hollande.
« L’Etat ne peut pas se défausser sur les collectivités », a ensuite précisé l’Elysée, affirmant que des discussions allaient démarrer rapidement avec les associations de maires pour établir les besoins et les modalités de la prise en charge des enfants durant le temps périscolaire et la pause de midi.
Reprenant l’une des propositions issues de la concertation, M. Hollande a également annoncé la fin des « labels » – ZEP (zone d’éducation prioritaire), réseau ambition réussite, Eclair – qui stigmatisent certains établissements et en privent d’autres de moyens.
Plutôt que des « labels », François Hollande préconise une « aide personnalisée aux établissements » qui différenciera les moyens de chaque établissement en fonction de ses « spécificités territoriales, sociales, scolaires ». Le chef de l’Etat estime qu’il faudra aussi retravailler la carte scolaire.
Un nouveau système de dotation financière pour les établissements doit donc voir le jour, mais à l’Elysée, on estime que ses effets seront visibles à partir de l’année scolaire 2014-2015.
Toujours pour les « territoires en difficulté » François Hollande a proposé d’y affecter « des enseignants expérimentés, sur la base du volontariat et de garantir une grande stabilité des équipes ». Une mission qu’il veut valoriser: « En contrepartie, je suis prêt (…) à accorder de meilleures conditions de travail pour ceux, celles qui sont confrontés à des situations éprouvantes », a-t-il affirmé.
Enfin, pour lutter contre le décrochage, le président demande la mise en place d’ »un référent dans les collèges et les lycées professionnels à fort taux d’absentéisme ».
Pour faire face aux inégalités, François Hollande veut voir relancée la scolarisation des enfants de moins de trois ans « dès la rentrée 2013 dans les zones en difficulté ». Selon l’Elysée, ce principe sera ensuite élargi mais pas inscrit dans les objectifs de la loi.
François Hollande a aussi affirmé qu’il avait retenu « le principe du plus de maître que de classe », afin de développer des pédagogies alternatives et le travail en petits groupes, en priorités dans les territoires défavorisés.
Enfin le président a repris à son compte les « propositions sur les redoublements, qui ne sont pas toujours utiles et doivent être limités, sur la notation, dont l’objet précieux, nécessaire est d’indiquer un niveau plus que de sanctionner et sur les devoirs qui doivent pouvoir être faits dans l’établissement plutôt qu’à la maison si on veut accompagner les enfants et rétablir l’égalité. »
Enfin « l’école du futur » voulue par le chef l’Etat accorde une place importante au numérique. « Cela suppose de former les enseignants et de mettre à disposition non seulement les matériels mais aussi les ressources et les réseaux », a-t-il développé. L’Elysée a précisé que, dans le budget 2013, 10 millions d’euros étaient fléchés pour ces priorités qui permettront de développer des équipements et de créer des contenus.
Le Ministre de l’Education Vincent Peillon avait lancé le 5 juillet 2012 la concertation sur la refondation de l’école, promise par François Hollande durant la campagne. Selon l’agenda donné par le Président de la République, des discussions vont être engagées « dans les jours qui suivront » et un texte de loi doit être présenté en conseil des ministres « avant la fin de l’année ».
Le ministre présidera, jeudi 11 octobre 2012, une réunion extraordinaire du Conseil Supérieur de l’Education.
(Sipa / 09.10.2012 18h59)
Concertation sur l’école : le compte n’y est pas !
Sociologue, Choukri Ben Ayed critique le rapport de la concertation. Pour lui, la refondation prolonge les politiques libérales des gouvernements précédents. Le rapport reste dans des formules vagues par exemple quand il évoque « les pratiques pédagogiques dites efficaces ». La co-éducation avec les collectivités territoriales est aussi présentée comme un élément de creusement des inégalités.
Après une phase dense de concertation sur l’école, le Comité de Pilotage a remis sa copie. Il nous est ainsi permis de réagir, même si l’exercice n’est pas aisé en raison de la nature un peu particulière du texte à mi-chemin entre la concertation elle-même et la future proposition de loi. Nous sommes tentés de souligner le caractère participatif de la démarche (bien que dans un cadre bien prédéfini par les thèmes retenus), de nous réjouir également de voir abandonné le langage agressif qui caractérisait la période précédente. Pour autant les doutes et les réserves ne sont pas dissipés.
Les doutes d’abord: n’y a-t-il pas contradiction à louer les vertus d’une concertation inédite par son ampleur et d’annoncer un calendrier aussi étriqué pour la rédaction de la loi d’orientation qui en sera issue ? Quant aux réserves, nous abordons à présent le fond du texte.
L’avenir de l’école appelle un projet éducatif ambitieux et non une simple action publique réformée
Dès l’entrée en matière du texte on ressent une certaine gêne. Si le thème des inégalités est mis en exergue, pourquoi n’avoir retenu que des données de cadrage de PISA ? Ignorées donc les enquêtes nationales plus fines mettant l’accent sur la source des inégalités en France et sur leur caractère cumulatif tout au long de la scolarité ? En second lieu, et c’est sûrement le point d’achoppement, on ne trouve pas de critique en règle sur le fond des réformes menées sous l’ancien gouvernement. Les déboires de l’école seraient uniquement liés à un mauvais pilotage de ces réformes, une mauvaise organisation, un mauvais ordonnancement, une « mauvaise conduite du changement ». Le lecteur avisé y trouve là des références implicites à certaines théories de la science politique qui autorisent le glissement de sens du registre de la « politique éducative » à « l’action publique éducative ».
La notion d’action publique fait référence à une conception techniciste et managériale des réformes, alors que la notion de politique éducative mobilise une acception beaucoup plus ambitieuse et potentiellement portée par une vision humaniste. L’école aujourd’hui a besoin d’un projet de très grande ampleur et d’une rupture radicale avec la période précédente. Naguère nous tombions tous à bras raccourcis contre les réformes menées tambour battant, il n’est pas trop tard pour assumer ces critiques et abroger les dispositions prises. Une telle entrée en matière du texte aurait eu le mérite de clarifier les choses.
Mais la critique nécessaire fait place à une rhétorique du changement à l’aune de formules générales et convenues : « l’école doit changer car le monde change », « l’école doit rentrer dans la modernité », ou bien des critiques un peu éloignées des réformes elles-mêmes déplorant qui les mutations des cultures juvéniles, qui la communication, qui l’individualisme etc. Dont acte. Mais que dire des évolutions problématiques de l’école elle-même : doxa de l’utilitarisme, du néo-libéralisme, de la concurrence ? Certes ce dernier point est évoqué mais quelle action volontariste lui est opposée ? Suppression des palmarès et des classements ? Non. Suppression des logiques d’autonomie des établissements ? Non. De la situation spécifique de l’enseignement privé ? Non. Tout juste l’idée d’une nouvelle forme d’évaluation détachée des logiques concurrentielles qui reste d’ailleurs à clarifier.
Comment réduire les inégalités ?
Vrais problèmes et solutions limitées
Nous touchons là probablement au cœur du texte. La continuité avec les orientations politico-idéologiques précédentes se confirme. Le socle commun de connaissances, directement issu de la loi Fillon de 2005, n’est pas remis en cause. Il est au contraire fortement revendiqué. Seule sa simplification est annoncée : quelle simplification ? C’est même lui qui conduirait la réforme des programmes et les épreuves du DNB (Diplôme National du Brevet des Collèges).
Si la perspective de réduction des inégalités est tout à fait louable, et nous devons bien sûr l’encourager, les causes de ces inégalités sont peu analysées. Certes il est nécessaire d’œuvrer pour la pré-scolarisation, et de renforcer l’école primaire. D’accord aussi pour une action volontariste en ce sens au collège. Mais la nature de celle-ci laisse perplexe. Le thème de l’individualisation de l’action pédagogique comme remède à l’échec scolaire, cher à Xavier Darcos et Luc Chatel et qui cristallisait les critiques il y a encore quelques mois, n’est pas ici remis en cause. Il est même récurrent et demeure étroitement lié aux approches psychologisantes et naturalisantes de la difficulté scolaire. On retrouve la rhétorique du précédent gouvernement qui triait les élèves en fonction de leurs goûts, intérêts et autres talents supposés. Le « bien être psychologique », composante de la réussite ne saurait suffire pour éradiquer l’échec scolaire.
Une référence récurrente au « changement de pédagogie » ? Ce changement est indispensable mais le propos demeure bien général. Opposer l’innovation, sans la définir aux « pédagogiques traditionnelles frontales », sans en faire l’analyse, revient à une critique formelle aussi convenue que dépassée des anciens contre les modernes. Qui s’est vraiment donné la peine de comprendre la genèse des pratiques pédagogiques et d’outiller efficacement les enseignants ? Les ESPE (Ecoles Supérieures du Professorat et de l’Education) revendiquées, seront-elles à la hauteur? Le rapport n’apporte au fond que peu de précision sur les pratiques pédagogiques dites « efficaces » sur la façon de les penser et de les transmettre.
Les élèves qui rencontrent des difficultés ont besoin d’un service public fort plutôt que de compassion ou de bienveillance, d’un service public qui en appui sur la recherche universitaire et pédagogique interroge la nature des difficultés rencontrées par les élèves pour y apporter des réponses audacieuses, garantes d’un profond changement.
La co-éducation : pour quoi faire ?
Le thème du partenariat est également très présent. Mais rien de nouveau depuis à présent trois décennies. Ce qui l’est en revanche, c’est la notion de co-éducation qui impliquerait certes les parents d’élèves mais également les entreprises, et ce dès la 6ème, comme le préconisait récemment le Ministre lui-même. N’est-ce pas là la consécration d’une logique utilitariste ? En matière de « gouvernance » la décentralisation (de la formation professionnelle et de l’orientation) est fortement souhaitée ainsi que la contractualisation avec les collectivités locales, tout en revendiquant une action forte de l’Etat : n’est-ce pas contradictoire ? Quel bilan peut-on faire de l’émiettement de l’action éducative depuis trois décennies ? N’y a-t-il pas un lien avec le développement très marqué des inégalités territoriales d’éducation ? Aujourd’hui l’école a besoin de plus ou de moins d’Etat ? D’une simplification de son action ou d’une complexification ? Cette nouvelle phase de décentralisation revendiquée, corrélée à un rapprochement avec le monde de l’entreprise, ne risque-t-elle pas de plonger l’école dans une nouvelle crise dont elle n’a absolument pas besoin aujourd’hui pour se reconstruire ? Il y a à mon sens davantage à perdre qu’à gagner sur ce de terrain.
L’éducation prioritaire et la carte scolaire : les grands oubliés
Ces deux sujets condensent la plus grande surprise du rapport. Si ce dernier souhaite mettre l’accent sur la réduction des inégalités, pourquoi alors reléguer le sujet de l’éducation prioritaire en dernière position ? C’est le cas aussi pour la carte scolaire qui pourtant constituait l’un des symboles de la dérégulation éducative par l’ancien gouvernement.
Ce qui pose problème c’est de cantonner la question du traitement des inégalités les plus vives, ainsi que celle de la sectorisation, aux seuls territoires prioritaires. Il s’agit même d’un contre sens. Ce qui se joue dans ces territoires n’est qu’un révélateur puissant des défaillances d’ensemble de l’école. La concentration des difficultés et les logiques ségrégatives sont le produit de la compétition scolaire généralisée et de l’insuffisance de l’école à assumer la massification scolaire.
Le traitement de ces deux questions appelle des actions d’ensemble et non des approches segmentées et particularistes en allant même jusqu’à proposer d’agir à la seule échelle des établissements. Renoncer à l’idée de zonage territorial fait courir du reste un risque considérable de démobilisation et de déstabilisation des établissements depuis longtemps engagés dans des actions en réseau et d’ouverture sur leur environnement. La priorité est d’éviter que ces établissements ne décrochent davantage et qu’ils ne fassent l’objet d’une stigmatisation renforcée.
Agir contre les inégalités ce n’est pas « triturer » à loisir les zonages prioritaires, c’est aussi poser clairement la question de la politique redistributive en matière d’éducation. A ce titre le rapport aurait été bien inspiré de reprendre à son compte les termes du référé de la Cour des Comptes adressé le 11 juillet 2012 au Ministre de l’Education Nationale et portant sur le traitement des inégalités scolaires. Ce dernier argumentait, en substance, que l’une des causes du renforcement des inégalités de scolarisation est leur absence de prise en compte lors de l’attribution des moyens. C’est donc à un changement radical de paradigme redistributif que le référé appelle de ses vœux.
Il ne s’agit de saupoudrage de moyens supplémentaires au profit de quelques établissements triés sur le volet, mais de s’adresser à tous ceux qui accueillent des élèves en situation objective de désavantage économique, scolaire et culturel. En soulignant le fait que certains territoires scolaires situés dans le haut des hiérarchies concentrent les moyens les plus importants, on peut résumer la préconisation de la Cour par le principe de « donner moins à ceux qui ont plus » et réellement « plus à ceux qui ont moins ». Preuve s’il en est qu’une action volontariste en matière de réduction des inégalités nécessite une vision d’ensemble tant en matière de redistribution des moyens, des postes, que des actions spécifiques à mener, conception bien éloignée donc d’une vision partielle du problème.
Vous avez dit arbitrage ?
Au terme de cette lecture, si nous avons souligné des manques et des points de désaccord nombreux, il est aussi des points d’accord : sur la scolarisation obligatoire à 2 ans, sur la nécessité de réformer la formation des enseignants, sur le rétablissement de la sectorisation (partout ou dans les territoires prioritaires ?), sur la nécessité d’homogénéiser l’offre de formation, sur l’obligation de ne laisser aucun élève sans solution, de redonner un second soufflet à la vie scolaire etc. Cependant faute d’une argumentation beaucoup plus précise, ces propositions, qui étaient « dans l’air du temps » avant la concertation risquent bien d’en rester à l’état d’incantation. Du reste ces dernières cohabitent avec des propositions inquiétantes d’une toute autre obédience politique puisqu’elles s’inscrivent dans la continuité des politiques néo-libérales qui ont plongé l’école dans l’impasse. Refonder l’école ce n’est pas chercher à contenter tout le monde, c’est faire des choix. L’école du peuple supposera des changements de paradigmes radicaux : c’est bien cela que l’on appelle à présent l’arbitrage ?
Choukri Ben Ayed
Sociologue, Professeur à l’Université de Limoges
Chercheur au GRESCO
PRÉSIDENCE
DE LA
RÉPUBLIQUE
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DISCOURS DU PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE
Clôture de la concertation sur l’Ecole
Paris (la Sorbonne) – Mardi 9 octobre 2012
Monsieur le Premier ministre,
En entrant dans cette salle, je me suis demandé si le Conseil des ministres n’avait pas été délocalisé. Car je retrouve l’ensemble du Gouvernement. Non pas que j’interdise à tous ceux qui ne sont pas encore au gouvernement de le rejoindre à un moment ou à un autre, mais la présence d’autant de ministres témoigne bien de ce que vous avez voulu, Monsieur le Premier ministre. C’est-à-dire engager l’ensemble des administrations, des responsables publics dans la concertation.
Je salue ici, les rectrices, les recteurs, les personnels de l’éducation qui ont été représentés et tous ceux qui se sont associés à cette idée lancée en début de mandat qui pouvait donner une nouvelle fois, l’impression que l’on allait parler et non pas décider.
La concertation est faite pour qu’il y ait des choix qui soient préparés, et qui ensuite, puissent être considérés comme utiles au pays.
Je vous retrouve ce matin dans ce grand amphithéâtre de la Sorbonne, un lieu où il y a eu tant de discours prononcés, tant de cours magistraux délivrés, pour que nous soyons conscients de l’instant que nous vivons. Vous avez voulu tous, participer à cette délibération, nous impliquer dans la décision qui sera prise. Vous l’avez fait en conscience, parce que vous aviez le sentiment qu’ici se jouait l’essentiel. C’est-à-dire l’avenir.
Notre pays s’interroge depuis longtemps, avec plus d’intensité ces derniers mois ou ses derniers jours, sur sa place, son destin. Notre pays veut savoir s‘il a les capacités de surmonter la crise, d’affronter la mondialisation, de tenir son rang dans la compétition. Il s’interroge aussi, sur ses atouts. Est-il capable de vaincre le chômage ? Et de préserver son modèle social ? C’est pour répondre à cette interrogation première que le Gouvernement de Jean-Marc AYRAULT a engagé le redressement. Dans ce redressement, il y a la formation, la qualification, l’instruction, l’éducation. En d’autres termes, une école de haute qualité.
Notre pays s’inquiète aussi pour sa cohésion nationale, les conditions de la vie en commun, pour le lien civique. Chacun mesure les dangers du défaut d’intégration, du déclassement et des ruptures de toutes sortes qui peuvent déboucher sur des violences. Et là encore, beaucoup de Français attendent de l’éducation nationale, de ce qu’elle peut offrir comme garantie, comme sécurité, comme bien-être. Chaque fois que cette Education Nationale connaît un échec, subit une agression, peine à atteindre ses objectifs, c’est tout le pacte républicain qui est mis à mal.
Depuis l’invention même de la République, la France a toujours eu un rapport fusionnel avec son école. Dès la Révolution Française, c’est à Condorcet qu’il est demandé de travailler sur l’école. Lorsque le République est rétablie, après le Second Empire, c’est à Jules FERRY qu’il échoit cette belle mission d’engager l’avenir de l’école dans la République. Au lendemain de la seconde guerre mondiale, quand il s’agit de reconstruire, c’est à Paul LANGEVIN et Henri WALLON qu’il est demandé, une nouvelle fois, de penser l’école et aujourd’hui encore, nous avons à le faire.
La France a toujours eu un rapport passionné avec son école, puisqu’elle fait de l’enfant un citoyen en devenir, lui apprend à vivre en société, à en connaître les règles notamment celles de la laïcité, à en accepter les contraintes. La première vocation de l’école c’est de transmettre un savoir, une connaissance, mais c’est aussi de donner le goût d’apprendre, d’éveiller à la culture et de cultiver aussi l’esprit civique. Bref, son rôle est de parvenir, génération après génération, à conforter la Nation. C’est pourquoi j’ai donné mon plein accord au projet d’enseigner la morale laïque. Ce n’est pas vouloir enrégimenter, imposer des dogmes, une orthodoxie, une raison d’Etat : c’est l’inverse. C’est permettre à chacun de construire sa vie en liberté dans le respect de celle de tous les autres. Nous mesurons bien, face aux dérives que nous connaissons, à quel point il nous faut être intransigeants et déterminés sur nos valeurs. Tout commence par l’école.
Elle est le lieu-même où se prépare la France de demain. Faire progresser l’école, c’est faire avancer la France. Un projet éducatif est, par définition, un projet de société.
C’est dans cet esprit que j’ai annoncé, non pas une réforme, mais une refondation de l’école.
J’ai pris un engagement devant les Français et rien ne m’en détournera : c’est la priorité éducative.
Pourquoi cette priorité ? Pourquoi cet engagement ?
Parce que j’ai une conviction et vous la partagez : l’investissement dans l’éducation est la meilleure façon de répondre aux grands enjeux de notre pays : le redressement économique, la cohésion nationale, la promesse républicaine.
Aujourd’hui, l’école n’est pas encore suffisamment préparée à de tels défis. Elle a subi tant de réformes qui l’ont davantage accablée que confortée. Elle a vécu douloureusement tant de mises en cause, d’accusations, de mauvais procès : trop lourde, trop chère, trop immobile. Elle a été tellement amoindrie dans ses budgets, asséchée dans ses recrutements, affaiblie dans ses prérogatives, qu’elle a forcément affronté avec de plus en plus de difficultés les missions qui lui ont été confiées.
Et dans le même temps, elle accueille aussi en son sein les problèmes de la société française : les ruptures familiales, la violence, la pauvreté, les difficultés de l’intégration, les discriminations. Elle a fait face
Et pourtant, malgré ce contexte, cela a été rappelé, l’école a été capable de très belles réussites. L’accès de tous à l’éducation s’est élargi, le nombre de bacheliers a progressé chaque année, des établissements – même dans des zones réputées fragiles ou en tension – connaissent des performances remarquables, qui sont saluées comme des exemples, ici en France et à l’étranger. Nous avons été capables de conjuguer l’excellence avec la massification.
Mais l’école connaît aussi des échecs. Regardons la réalité en face. La France est l’un des pays où l’écart de résultats entre les élèves de statuts sociaux favorisés et défavorisés est le plus important des pays de l’OCDE.
La réalité, c’est que trop d’élèves, à la fin de l’école primaire ne maîtrisent pas les connaissances de base.
La réalité c’est que les inégalités territoriales se sont creusées le taux de réussite de l’Académie de Créteil est inférieur à celui de Nantes.
La réalité, c’est également que l’école peine à prendre en compte les mutations profondes de notre société, y compris les nouvelles technologies. La réalité, c’est que trop de jeunes sortent du système éducatif sans diplôme ni qualification, vous les avez chiffrés à 140 000, 140 000 dans une génération sans le passeport d’un diplôme, sans la fierté d’avoir obtenu un résultat au terme d’un parcours scolaire et qui connaissent l’échec, forcement l’échec, au lendemain de la sortie du système éducatif.
La réalité, c’est le décrochage, formule nouvelle qui s’est introduite dans le débat mais qui renvoie à une vérité, c’est-à-dire une sortie, avant même la fin de la scolarité obligatoire. Echec humain insupportable, mais aussi un gâchis économique, risque social.
Alors si nous partageons ce constat – celui que vous avez dressé, d’une école qui a été capable de réussir, alors même que lui étaient discutés les moyens, d’une école qui a été confrontée à des problèmes lourds de notre société, qui connait aussi des échecs que nous ne pouvons pas accepter -, tirons en la conclusion : l’école doit changer. Ses personnels y sont prêts, et ils le montrent encore en cette rentrée. Les parents l’espèrent, et demandent à s’y impliquer davantage, les élus locaux sont disposés à accompagner les mutations s’ils sont convaincus que c’est dans l’intérêt de l’enfant.
Il y faudra du temps et des moyens.
Du temps, car je n’ignore rien du scepticisme français, j’entends déjà les voix de ceux qui murmurent : encore une réforme, une de plus. L’éducation nationale a en effet été échaudée. La France aussi. Que d’annonces ont été faites, aussi vite oubliées que solennellement formulées. C’est pourquoi je propose une feuille de route qui donne de la lisibilité aux acteurs et qui assume de donner du temps à la mise en œuvre de la refondation.
Du temps mais aussi des moyens, non pas pour céder à la facilité du quantitatif, non pas pour complaire à des catégories, non pas pour réparer les dégâts des choix budgétaires précédents. Des moyens, parce que nos enfants ont besoin, c’est une vérité, de professeurs. C’est dans cet esprit que s’inscrit mon engagement de créer 60 000 postes sur le quinquennat. Dès cette année et malgré les difficultés budgétaires, et pour chacune des cinq années à venir, ce sont près de 10.000 postes qui seront créés.
Un tel objectif exige que les étudiants qui ont la volonté de servir leur pays en se consacrant à l’éducation des enfants puissent le faire. Qu’est-ce qu’une nation qui n’est pas capable de mettre des enseignants devant les élèves et qui décourage les vocations? ça ne peut pas être la France. La France a confiance dans son école. Ce mot de confiance, vous avez souhaité qu’il soit non seulement prononcé, mais traduit. C’est pourquoi j’ai demandé au Gouvernement et au ministre de l’Education Nationale que les conditions d’entrée dans le métier soient améliorées et que des pré-recrutements puissent avoir lieu. C’est ce qui aura lieu, dès janvier prochain, avec 6000 emplois Avenir Professeur et la mise en place, au printemps, d’un deuxième concours et, dès la rentrée 2013, une rentrée progressive dans le métier.Nos enfants ont besoin de professeurs. Ils ont aussi besoin de professeurs bien formés.
Enseigner, c’est un métier exigeant, qui expose, parfois durement, à des risques réels, comme l’ont cruellement rappelé les incidents de ces dernières semaines.
C’est aussi un métier qui s’apprend. La formation des professeurs sera rétablie. Il ne s’agira pas de revenir aux écoles normales, pas davantage aux IUFM. Nous allons faire du neuf : avec les écoles supérieures du professorat et de l’éducation, autour de l’idée de la professionnalisation.
La professionnalisation, à la fois dans les contenus et dans les modalités, avec une vraie place pour les stages pratiques, avec une prise en compte des spécificités comme pour les maîtres de maternelle. La professionnalisation, c’est également celle des concours. Je veux éviter tous les malentendus. Connaître ce métier, c’est d’abord maîtriser sa propre discipline. Mais le savoir, évidemment indispensable, ne peut suffire à préparer les futurs enseignants à la réalité de leur exercice professionnel devant les élèves, qui exige un certain savoir-faire.
Voilà la condition indispensable pour refonder l’école : un encadrement plus élevé, des professeurs mieux formés et un budget sanctuarisé. Mais faut-il encore fixer clairement des objectifs.
J’en dégage deux principaux :
1/ Le premier, c’est la réussite pour tous.
Je veux remettre tout simplement, le système à l’endroit et donner la priorité au primaire. Là où sont acquises les bases solides qui détermineront la suite du parcours. Il ne s’agit pas d’imposer les cycles les uns aux autres, il s’agit de prendre les systèmes scolaires dans sa logique même. On l’a dit, on l’écrit depuis des années. Cela n’a pas empêché le sous-investissement chronique et inconséquent dans le premier degré.
Aussi, j’assume pleinement, ici devant vous, le choix de cibler les moyens, de les concentrer là où ils seront le plus utiles.
D’abord, la scolarisation des enfants de moins de trois ans, qui doit être centrée sur les apprentissages premiers et notamment le langage oral. C’est dans le très jeune âge que se nouent souvent des inégalités qui deviennent rapidement irréversibles. L’école maternelle peut les atténuer et les corriger. Encore doit-elle offrir une scolarisation adaptée à l’âge des enfants et à leurs besoins psychologiques et physiologiques spécifiques. Cette politique s’engagera dès la rentrée 2013 dans les territoires en difficulté.
Ensuite, l’école élémentaire, sa mission est de transmettre les premiers éléments des savoirs fondamentaux. Elle doit bénéficier d’une pédagogie nouvelle et de la mise en place du principe du « plus de maîtres que de classes ». Cet apport d’enseignants dans les établissements qui en ont le plus besoin facilitera justement le travail en commun, introduira de nouvelles méthodes de suivi personnalisé des élèves et permettra de prévenir les premiers retards.
Je fais miennes vos propositions. Sur les redoublements qui ne sont pas toujours utiles et dont le nombre devra être réduit.
Sur la notation, dont l’objet – précieux, nécessaire – est d’indiquer un niveau plutôt que de sanctionner un élève.
Egalement sur les devoirs qui doivent être faits dans l’établissement plutôt qu’à la maison si l’on veut accompagner les enfants et rétablir l’égalité.
Je veux aussi que soient facilitées les articulations entre les différents niveaux de scolarité, pour assurer une plus grande fluidité des parcours scolaires. C’est un point essentiel. Des expériences existent: elles sont probantes. Je pense à la liaison entre le CM2 et le collège, mais mon propos va au-delà : le passage au lycée général comme professionnel ou technologique, l’accès à l’enseignement supérieur peuvent donner lieu à des transitions parfois trop brutales. La réponse passe par la coopération entre les établissements, l’échange des pratiques, l’ouverture vers d’autres acteurs, l’implication des enseignants. Nous dessinerons ainsi un nouveau visage à l’école avec plus de continuité et moins de ruptures.
Le collège est une étape décisive. Son caractère unique est devenu une apparence, pour ne pas dire un faux semblant. Et c’est là que s’accentuent les différences, se marquent les échecs, se concentrent les inégalités, aggravées encore par la mise en cause de la carte scolaire. Je considère que son rôle est d’assurer le socle commun des connaissances. Mais à condition de lui permettre d’organiser plus librement sa pédagogie et ne plus avoir un modèle trop rigide d’organisation pour ses activités.
Pour le lycée, je veux insister sur la voie professionnelle à ce stade. Car en ces temps où notre pays doit engager un sursaut productif et conforter son industrie, ma volonté est de valoriser cet enseignement et les diplômes qu’il prépare : depuis le CAP jusqu’à la formation post baccalauréat.
Des réformes seront donc nécessaires. J’en vois deux à mener rapidement :
- La complémentarité entre les formations en apprentissage et celles sous statut scolaire
- La définition d’une carte des formations que les régions prépareront en dialogue avec l’Etat.
Elles seront utiles pour les élèves, pour l’Etat et aussi pour les entreprises.
Plus largement, c’est toute l’orientation des élèves qu’il convient de revoir. L’objectif, c’est de passer d’une orientation subie souvent liée à l’origine sociale, à une orientation choisie débouchant sur une perspective professionnelle et à terme sur un métier.
Ce sera le sens du service public régional de l’orientation qui coordonnera les dispositifs existants et qui proposera lorsque c’est nécessaire une deuxième chance.
J’ai évoqué le décrochage et je veux regarder cette réalité, là aussi, bien en face. Elle est souvent sous-estimée, parfois niée ou par d’autres stigmatisée, comme l’échec de l’école. Nous devons y répondre.
Ce phénomène a de multiples causes mais il a une seule conséquence : c’est d’abord le retard, le redoublement, puis la sortie prématurée et donc l’abandon.
Je propose d’utiliser face au décrochage toute la gamme des instruments, de l’alerte jusqu’au traitement personnalisé à travers un encadrement dans l’établissement, et parfois hors de l’établissement, permettant ensuite un retour. Mais c’est en amont que l’efficacité peut être la plus grande. Je retiens, là encore, une proposition de la concertation : celle d’un référent présent dans les collèges et les lycées professionnels où nous connaissons un fort taux d’absentéisme.
Reste la question des inégalités territoriales et donc de la justice. Nous avons des progrès à réaliser. Comment comprendre que selon l’établissement, parfois selon la filière, il y ait la certitude de réussite ou la prévisibilité de l’échec ? Nous devons donc faire en sorte qu’il ne puisse pas y avoir de fatalité et que les établissements ne soient pas marqués comme étant ceux de l’excellence ou ceux du risque.
Le système éducatif a accumulé les dispositifs, souvent résumés à autant d’acronymes plus ou moins heureux : ZEP, Eclair, ZRR et bien d’autres. Et ce faisant, la « labellisation » n’a pas toujours su éviter le piège de la stigmatisation. Nous n’avons pas toujours su bien traiter, dans leur diversité, les difficultés territoriales, qu’elles soient urbaines ou rurales, du fait d’une rigidité souvent excessive, d’une concurrence souvent mal maîtrisée entre les différents « labels », et finalement de priorités qui n’étaient pas assumées.
Je préconise une autre approche. Elle est sortie aussi de vos échanges. Celle de « l’aide personnalisée » aux établissements. Il s’agira de différencier, dans le cadre de leur contrat d’objectifs, les moyens en fonction des spécificités territoriales, sociales, et scolaires de chacun des établissements. Cette méthode aura l’avantage, en plus d’associer les collectivités locales, de redonner de la souplesse et d’en terminer avec un système qui s’est essoufflé.
Dans le même temps, je propose d’affecter dans les territoires en difficulté, des enseignants expérimentés, sur la base du volontariat et de garantir une grande stabilité des équipes parce que c’est ce qui est le plus efficace. En contrepartie, je suis prêt avec le Premier ministre et le ministre de l’Education nationale à accorder de meilleures conditions de travail pour ceux, celles qui sont confrontés à des situations éprouvantes.
Voilà l’enjeu, voilà la règle, voilà la méthode si nous voulons permettre la réussite de tous. Je préfère ce beau mot de réussite que celui de lutter simplement contre l’échec. C’est pour la réussite des enfants, pas simplement contre l’échec, que nous avons à nous mobiliser. Et pour la réussite de tous. Nul ne doit penser que son enfant, parce qu’il n’est pas bien né, parce qu’il n’habite pas le quartier supposé favorisé, parce qu’il n’est pas accompagné, n’a pas de chance de réussir sa vie à travers un parcours scolaire. C’est l’ambition de la République de permettre la réussite de tous et si nous cédons par rapport à cet objectif, alors c’est le pacte que nous avons depuis des générations conclu qui se trouve abîmé et peut-être déchiré.
Le second grand enjeu, au-delà de la réussite de tous, c’est de préparer l’école du futur.
L’école du futur ça commence par les nouvelles technologies. Je ne veux pas céder à l’illusion du tout numérique, mais il est clair que cette nouvelle donne modifie le rôle de l’enseignant, transforme les savoirs et affecte les pédagogies. Nous pouvons nier le phénomène, il s’impose à nous, il s’introduit même dans les établissements. Il concurrence, y compris la construction des savoirs, et s’il n’y a pas l’esprit critique, des informations douteuses peuvent arriver jusqu’à la conscience des élèves. Le rôle de l’éducation c’est de saisir ces nouvelles technologies et en même temps d’avoir l’esprit critique pour les dominer. Donc nous devrons, vous devrez adapter vos façons de faire et utiliser ces technologies comme un levier de changement, d’ouverture. Cela suppose, là encore, la formation des enseignants et de mettre à disposition les matériels mais aussi les ressources, les réseaux dans chaque établissement. Je demande au Gouvernement de prendre rapidement les initiatives pour donner à ce que l’on appelle l’e-éducation, la dimension qui doit être la sienne. Le Gouvernement donnera tous les moyens pour déployer ces ressources et réussir à relever ce beau défi du numérique. Nous ne manquerons pas le rendez-vous. Et nous devrons inscrire la devise de la République, présente sur les frontons de toutes nos écoles, dans les territoires numériques éducatifs du XXI siècle. La République n’a pas de frontière, elle ne connait pas de limites : le savoir, la connaissance, la curiosité doivent être mises à la disposition de tous.
Toujours l’école du futur, c’est celle qui saura conjuguer tradition et modernité à travers l’autonomie des équipes pédagogiques et les initiatives locales. L’éducation nationale, contrairement à bien des préjugés, a fait preuve, toujours, d’une grande capacité d’adaptation, d’innovation, d’expérimentation dès lors que la confiance lui a été accordée.
Il ne s’agit pas, de remettre en cause le caractère national de l’éducation. J’y suis profondément attaché comme vous tous. Mais l’uniformité, c’est le contraire de l’égalité. Je veux que, sur l’ensemble de notre territoire, les enseignants, les personnels de l’Education, les chefs d’établissement puissent inventer de nouvelles méthodes, se fixer de nouveaux objectifs, élaborer des instruments pédagogiques. Je souhaite même que les collectivités locales, qui représentent 25% de la dépense intérieure de l’Education, puissent également s’investir et s’impliquer dans ce bel objectif de l’école du futur.
L’école du futur, c’est aussi les lieux qui assurent de bonnes conditions de vie, les plus propices pour apprendre, pour comprendre, pour maitriser.
Tout commence par la sécurité : si elle n’est pas garantie alors c’est la mission même de l’école qui s’en trouve empêchée. Des premières mesures ont été prises avec la création des assistants de prévention et de sécurité dans un certain nombre d’établissements et dès cette rentrée, la mise en place d’une délégation ministérielle à la lutte contre les violences. Mais l’Etat devra répondre à cette menace de la violence, à cette réalité de la violence en liaison avec tous les acteurs, tous les ministères et avec à la fois vigilance et intransigeance dans l’intérêt même de l’enfant.
La santé scolaire a également son rôle à jouer pour dépister, informer, signaler. Faut-il encore qu’on lui renforce un certain nombre de ses moyens car la santé scolaire a été dégradée ces dernières années alors même qu’il y a des risques sanitaires et aussi des trafics qui se sont introduits dans l’école.
Ensuite, l’école du futur c’est une école accueillante.
L’éducation culturelle, artistique et scientifique s’inscrit dans cette perspective. C’est un enjeu pédagogique car l’éveil artistique valorise les enseignements traditionnels. C’est un enjeu d’épanouissement, de confiance et de fierté de l’élève pour lui-même. L’objectif, c’est de pouvoir à la fin de la mandature avoir été capable de généraliser les programmes d’éducation culturelle de la maternelle à la terminale.
Le système éducatif doit être accueillant aussi pour les élèves en situation de handicap. Là aussi je mesure les avancées, elles sont significatives, mais aussi combien le chemin est encore long pour que l’école soit véritablement inclusive. La formation des enseignants intègrera cette dimension. Je considère également comme essentielle la valorisation du métier des personnels, non enseignants, qui accompagnent les élèves handicapés, souvent sans reconnaissance et avec des contrats de travail précaires.
Enfin, l’école du futur, c’est celle qui introduit les rythmes scolaires en fonction du besoin des enfants.
Je sais les attentes mais aussi les inquiétudes pour une réforme qui touche à la vie quotidienne, non seulement des élèves mais des Français. Il convient désormais d’avancer.
Certains points me paraissent aller d’eux-mêmes.
D’abord, l’objectif est de permettre aux enfants de faire autant qu’il sera possible leur travail personnel sur le temps d’accueil de l’école.
D’autres évolutions sont sans doute plus délicates. C’est le cas notamment de l’organisation de la journée, de la semaine, selon l’âge des enfants, et là encore nous avons besoin de nous concerter.
Pour ma part, je suis favorable au retour à une semaine de neuf demi-journées. Nous ne pouvons pas nous plaindre de la baisse de nos résultats dans les classements internationaux et ne pas voir que 144 journées de classe par an, alors que nos partenaires européens sont à plus de 180, c’est un handicap et c’est une explication. Cette organisation a conduit, en plus, à surcharger les journées des élèves. La réforme des rythmes scolaires n’est pas la clef de tout, ce n’est pas elle qui va être le sésame pour régler l’ensemble des difficultés que nous connaissons mais c’est le levier de la réussite. Ce projet exigera que les élèves ne soient pas livrés à eux-mêmes à partir du milieu de l’après-midi et que les inégalités d’accès aux activités éducatives, culturelles ou sportives ne s’en trouvent pas creusées. Donc il y aura à accompagner les élèves dans des activités périscolaires, à développer la pratique culturelle et sportive et à faire l’accompagnement aux devoirs dans l’établissement. Cette réforme de la semaine de 4 jours et demi doit pouvoir être engagée – je dis bien engagée – dès la rentrée 2013.
Sur ce sujet majeur, l’Etat prend ses responsabilités. Mais il ne peut pas agir seul. Les collectivités locales seront donc associées dans le cadre des projets éducatifs territoriaux et les personnels également mobilisés.
Je veux terminer sur la méthode et sur le calendrier : c’est-à-dire sur le quand et le comment.
Dès jeudi, le ministre de l’Education nationale présidera une session extraordinaire du Conseil supérieur de l’éducation. Il présentera les orientations. Dans les jours qui suivront, des discussions vont être engagées, sous sa responsabilité, en liaison étroite avec le Premier ministre, avec les représentants des personnels, des parents d’élèves et des collectivités locales et le travail interministériel sera à ce moment-là mené pour déboucher sur une loi de programmation et d’orientation qui sera présentée en conseil des ministres avant la fin de l’année. Le temps de la décision est venu et le temps de la concertation n’est pas achevé.
Le choix de recourir à une loi d’orientation et de programmation a un sens. La refondation de l’école ce n’est pas une décision d’une année, ce n’est pas une facilité budgétaire de circonstances, ce n’est pas un choix qui traduirait simplement un engagement électoral. La refondation de l’école, cela doit être une garantie qu’elle ne sera plus une variable d’ajustement selon les variables budgétaires, que même s’il y a des imprévus – et il y en aura sur le plan financier forcément – rien ne devra remettre en cause l’objectif que nous aurons fixé, les réformes que nous aurons engagées.
Nous devons aussi aller vite et je sais l’ampleur des attentes. C’est pourquoi, plusieurs choix seront faits dès 2013.
Le premier, c’est le rétablissement de la formation des maîtres. Ce sera chose faite dans les prochains mois puisque les écoles supérieures du professorat et de l’éducation ouvriront à la rentrée 2013.
Nous n’attendrons pas non plus pour mettre en œuvre la priorité donnée au primaire, cette réforme irriguera l’ensemble du système éducatif dans les années à venir.
La rentrée 2013 sera également marquée par l’amélioration des rythmes éducatifs, de l’allongement du temps scolaire, de l’allégement de la journée et de la mise en place du temps éducatif complémentaire.
De même, sans perdre de temps sera mis en place le service public territorialisé de l’orientation, sera lancée l’ambition numérique et une nouvelle gouvernance plus collégiale permettra de réfléchir au programme et d’évaluer notre école.
D’autres chantiers prendront plus de temps. Je pense à la réflexion sur le métier d’enseignant, à la réforme du lycée ou à la construction du parcours éducatif et en particulier la liaison entre école et collège. Mais la loi de programmation sera une étape décisive pour la refondation de l’école.
J’ajoute que les textes, qui seront donc votés prochainement, devront être mis en œuvre promptement. J’invite le ministre de l’Education à veiller au suivi des mesures. Une grande ambition peut être gâchée, en tous cas tourmentée, par des détails qui viennent lui nuire et parfois la limiter. Il faut avoir dans ces choses à la fois de grandes idées et aussi la passion des détails.
Mesdames et Messieurs,
Quand je vous parle de l’école, de notre école, je le fais avec respect dû à son histoire, qui est une histoire glorieuse qui se confond, je l’ai dit, avec la République. Je le fais aussi pour ces milliers de dévouements anonymes, de ces hommes et de ces femmes qui ont agi pour nous instruire et qui le font encore, pour tous ceux qui nous ont légué ce bien inestimable qui est notre éducation nationale, et pour tous ceux, enseignants, personnels de l’éducation qui en maintiennent encore l’exigence et la flamme. Je veux au nom de la Nation tout entière, exprimer à tous ces personnels d’hier et d’aujourd’hui, ma reconnaissance et dire à tous ces jeunes qui ont la vocation de servir leur pays en devenant enseignants ou agents de l’école publique, qu’ils seront les bienvenus, qu’ils seront attendus, qu’ils seront utiles au redressement de la France.
Je pense aussi à tous ces enseignants, ces maîtres qui, à un moment dans une classe, ont identifié une jeune fille, un jeune garçon doués de plus de talent que les autres, qui l’ont associé au travail de la classe et qui en même temps ont espéré que celui-ci ou celle-là finissent avec un destin exceptionnel. Et quelle plus grande fierté pour un maître, un enseignant que de savoir que l’un de ses élèves a pu devenir prix Nobel de physique. C’est le cas aujourd’hui pour Serge HAROCHE qui vient d’être récompensé.
Mesdames, Messieurs,
La France traverse une période économique difficile. On ne lui annonce pas des prévisions exceptionnelles et elle n’a pas hérité non plus d’un bilan exceptionnel. Les Français sont donc inquiets, le chômage est en hausse constante depuis 16 mois, la croissance est au ralenti, l’endettement public atteint un niveau record. Quelle est notre mission ? Redresser les comptes publics sûrement, redresser la production nécessairement, mais j’allais dire ce qu’il faut redresser, c’est l’espoir, c’est la conviction que notre pays peut y compris dans ce moment être au meilleur de lui-même. Ma mission, c’est de faire les choix qui répondent à l’urgence, elle est là, elle s’impose à nous, mais c’est aussi de préparer l’avenir. Un avenir qui depuis tant d’années a été sacrifié parce qu’à la dette financière que nous connaissons, s’est ajoutée une dette éducative qui devient une dette morale. J’ai voulu placer la jeunesse au cœur de mon mandat en faisant de l’école la priorité de mon quinquennat. Je suis devant vous pour réaffirmer le droit à l’espérance, pour montrer l’horizon, pour définir le but et je vous annonce que la voie la plus rapide pour renouer la promesse républicaine, pour que demain soit meilleur qu’aujourd’hui, la voie la plus rapide, c’est l’école, c’est l’éducation. Le redressement, il exige de la clarté, de la vérité, dire les choses telles qu’elles sont, de la justice dans les choix qu’il convient de faire mais le redressement exige aussi le rassemblement. Il n’y a pas plus beau projet pour rassembler notre pays que l’école du futur, tel est mon cap, tel est le contrat que j’ai passé avec mes concitoyens avec vous. Rien ne m’en détournera parce que si je veux à ce point la réussite de tous les enfants de France, c’est parce qu’ils sont nos enfants et que nous avons des devoirs à leur égard, parce que je veux à travers la réussite des enfants, la réussite de la France tout entière. C’est pourquoi, je crois à l’école, à la République et à la France.
Merci.
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